Dossier : 02 17 14 Date : 20031203 Commissaire : M e Michel Laporte X Demanderesse c. PAROISSE DE SAINTE-CLOTILDE-DE-CHÂTEAUGUAY Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION [1] La demanderesse conteste la décision rendue par la Paroisse de Sainte-Clotilde-de-Châteauguay (la « Paroisse ») lui refusant l’accès, selon les termes de l’article 31 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi »), à l’ « opinion juridique de Dunton Rainville datée du 27 août 2002 concernant le paiement des frais d’avocats. » [2] Une audience se tient à Montréal le 30 octobre 2003. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 17 14 Page : 2 L'AUDIENCE A) LA PREUVE i) De la Paroisse M me Diane Lavigne [3] M me Lavigne, mairesse et responsable de l’accès, informe la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») que la demanderesse assume la fonction de directrice générale et secrétaire-trésorière à la Paroisse. Elle spécifie que la demanderesse a intenté un recours contre la Paroisse et elle-même pour harcèlement. [4] M me Lavigne remet, sous pli confidentiel, le document en litige (6 pages). Elle raconte que cette opinion juridique porte sur l’obligation ou non de la Paroisse de rembourser les frais juridiques encourus par la demanderesse dans le cadre d’un recours intenté contre la Paroisse pour harcèlement au travail. [5] M me Lavigne souligne que la Paroisse a mandaté la firme Dunton Rainville pour obtenir cette opinion juridique, laquelle ne devait être remise qu’aux membres de la Paroisse. [6] M me Lavigne fait valoir que la demanderesse, à titre de directrice générale, a confectionné l’ordre du jour de la séance du conseil du 3 septembre 2002, sans son avis à titre de mairesse, et reçu copie de l’opinion juridique en litige. Elle poursuit en mentionnant que la demanderesse a donné l’opinion juridique aux membres du conseil de la Paroisse lors de cette séance du 3 septembre. [7] M me Lavigne attire l’attention de la Commission aux points 10 et 11 de l’ordre du jour du conseil du 3 septembre 2002, mentionnant qu’elle s’est retirée des discussions portant sur l’opinion juridique pour s’asseoir dans la salle. Un conseiller municipal présent a été désigné pour présider la discussion sur ces points à l’ordre du jour (pièce O-1). Elle précise avoir agi ainsi pour éviter un possible conflit d’intérêts entre sa fonction comme personne responsable de l’accès, ayant refusé l’accès à cette opinion juridique à la demanderesse, et celle de mairesse de la Paroisse. [8] M me Lavigne ajoute que les membres du conseil ont validé l’opinion juridique en litige, tel qu'il a été rapporté au point 11 du procès-verbal, et refusé à la secrétaire-trésorière, la demanderesse, le remboursement de ses frais
02 17 14 Page : 3 d’avocats. Elle prétend que la demanderesse a fait une lecture de cette opinion juridique lors de la séance du conseil le 3 septembre. [9] Interrogée par le procureur de la demanderesse, M e François Vachon, M me Lavigne confirme avoir été élue mairesse de la Paroisse en l’an 2000. Elle est également responsable de l’accès depuis le mois de mars 2002. Elle relate avoir traité sa première demande d’accès au mois de mai 2002. [10] M me Lavigne confirme également que la demanderesse est secrétaire de la paroisse depuis 1980, ayant assumé la fonction de responsable de l’accès de 1989 jusqu’au mois de mars 2002. [11] M me Lavigne réitère que la demanderesse a, selon elle, fait lecture de l’opinion juridique à la séance du conseil, mais ne se rappelle pas l’avoir entendue. [12] M me Lavigne croit que l’opinion juridique a été versée aux archives de la Paroisse. Elle réitère s’objecter à communiquer à la demanderesse copie de cette opinion juridique. ii) De la demanderesse M. Yvon Duranceau [13] M. Duranceau, conseiller municipal, confirme la réception par la Paroisse d’une lettre des procureurs de la demanderesse lui réclamant d’assumer les frais et honoraires judiciaires dans le cadre d’un recours pour harcèlement dont elle se disait victime (pièce D-1). [14] M. Duranceau atteste avoir présidé la séance du conseil du 3 septembre 2002 portant sur les points 10 et 11 à l’ordre du jour, la mairesse s’étant retirée. Lors de cette séance du conseil, une demande de lire l’opinion juridique en litige lui a été réclamée. Il certifie que ce n’est pas la demanderesse qui a fait la lecture de cette opinion juridique. Il affirme n'avoir lu publiquement que les conclusions de cette opinion juridique, devant 15 personnes, et non l’opinion juridique au complet. [15] M. Duranceau affirme également qu’aucun membre du conseil ne s’est adressé à lui pour exiger de conserver confidentielle cette opinion juridique. [16] M. Duranceau confirme que chaque membre du conseil a reçu une copie de cette opinion juridique.
02 17 14 Page : 4 [17] Interrogé par le procureur de la Paroisse, M e Pierre Roy, M. Duranceau raconte avoir reçu une copie de l’opinion juridique par la secrétaire-trésorière, la demanderesse, lors de la séance du conseil du 3 septembre 2002. La demanderesse [18] La demanderesse confirme avoir mis en demeure la Paroisse de payer les frais juridiques engagés dans le cadre d’un recours contre celle-ci et la mairesse pour harcèlement au travail. De cette dernière demande, le conseil municipal a décidé d’obtenir une opinion juridique, soit celle en litige. [19] La demanderesse, présente lors de la séance du conseil du 3 septembre 2002, indique avoir reçu, photocopié et remis à chaque membre du conseil municipal copie de l’opinion juridique en litige. Elle affirme qu’elle n’a pas pris connaissance de cette opinion juridique. [20] La demanderesse raconte que les membres du conseil municipal se sont opposés à la lecture complète de l’opinion juridique lors de la séance du 3 septembre. Elle confirme que seule une lecture des conclusions a été faite par M. Duranceau. Elle ne peut confirmer si cette opinion juridique a été versée aux archives de la Paroisse, ayant quitté son travail pour maladie le 7 septembre 2002. [21] La demanderesse fait valoir que la Paroisse a toujours déposé les opinions juridiques aux archives, sauf ceux ayant fait l’objet d’une lecture à huis clos ou d’une demande expresse d’en conserver le caractère confidentiel. [22] Interrogée par M e Roy, la demanderesse mentionne ne pas avoir donné préalablement copie de cette opinion juridique à la mairesse, celle-ci ne lui ayant pas fait la demande. Elle précise avoir traité cette opinion juridique comme tous les autres documents demandés et déposés à la séance du conseil. M me Diane Lavigne [23] M me Lavigne confirme ne pas avoir été consultée sur le dépôt ou non de cette opinion juridique à la séance du conseil. [24] Interrogée par la Commission, M me Lavigne mentionne que la Paroisse n’a pas de comité exécutif et que l’ordre du jour est toujours préparé par la secrétaire-trésorière de la Paroisse. Elle mentionne que la paroisse compte quatre employés pour une population de 1 646 personnes.
02 17 14 Page : 5 D) LES ARGUMENTS i) De la Paroisse [25] M e Roy avance que la Paroisse n’est pas une municipalité comme les autres. Au présent dossier, soumet-il, la demanderesse, secrétaire-trésorière, a tout décidé, notamment d’inscrire ce sujet à l’ordre du jour du conseil municipal, d’ouvrir l’opinion juridique, d’en faire des photocopies et de les remettre aux membres du conseil. Il s’étonne que la demanderesse s’adresse aujourd’hui à la Commission, prétextant son droit d’en obtenir une copie parce que versée aux archives de la Paroisse. [26 ] Malgré cette situation, M e Roy est d’avis que la Paroisse est en droit de conserver confidentielle une opinion juridique lui ayant été émise à sa demande. Il ajoute que les conseillers municipaux ont d’ailleurs un droit de réserve les empêchant de communiquer ce secret professionnel. [27] M e Roy soutient que la Paroisse a démontré que les conditions de l’article 31 de la Loi ont été satisfaites : 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire. ii) De la demanderesse [28] M e Vachon plaide que la Commission n’a pas à décider de la manière dont est gérée la Paroisse, mais plutôt à trancher l’actuel litige en fonction de la Loi. [29] M e Vachon allègue que le conseil, en lisant publiquement les conclusions de l’opinion juridique, selon le témoignage non contredit de M. Duranceau, a relevé les procureurs de la Paroisse de leur obligation en ce qui touche le secret professionnel. Il spécifie qu’il n’apparaît pas au procès-verbal de la séance du conseil du 3 septembre 2002 de restrictions à la communication de cette opinion juridique. Il ajoute que cette opinion juridique revêt donc un caractère public, ayant été versé aux archives de la Paroisse 2 . Sa cliente peut alors obtenir copie de cette opinion juridique. 2 Rochette c. Municipalité de Val-David, [1986] C.A.I. 536; Lafond c. Ville de Saint-Hyacinthe, C.A.I. Montréal, n o 94 11 75, 20 mars 1995, c. Comeau; Bédard c. Municipalité de Saint-Émile, [1986] C.A.I. 380.
02 17 14 Page : 6 DÉCISION [30] J’ai examiné le document en litige. Il s’agit certes d’une opinion juridique portant sur le paiement des honoraires d’avocats de la demanderesse par le conseil municipal. La demanderesse prétend avoir droit au paiement des honoraires, ayant été l’objet de harcèlement au travail, notamment de la part de la mairesse. [31] La preuve a démontré que seules les conclusions de cette opinion juridique ont été communiquées lors de la séance publique du conseil de la Paroisse le 3 septembre 2002. De plus, la lecture de cette opinion juridique et la preuve m’ont convaincu qu’elle porte sur l’application d’un cas particulier, répondant aux exigences de l’article 31 de la Loi. [32] En outre, les faits soumis en la présente font ressortir une situation particulière, à tout le moins préoccupante. [33] D’une part, M me Lavigne est mairesse et refuse l’accès à la demanderesse à cette opinion juridique, et ce, à titre de personne responsable de l’accès. Elle déclare également s’être retirée des discussions portant sur cette opinion juridique lors de la séance du conseil du 3 septembre 2002. [34] D’autre part, la demanderesse, secrétaire-trésorière, a confirmé la version voulant qu’elle ait reçu, photocopié et remis à chaque membre du conseil municipal copie de l’opinion juridique en litige. [35] M me Lavigne et la demanderesse sont, à l’évidence, des personnes directement impliquées et concernées par cette opinion juridique. La Commission n'a toutefois pas à se prononcer si elles auraient dû s'abstenir d'intervenir. [36] En considération des faits distinctifs de la présente et pour ne pas déconsidérer l’intérêt de la justice, j’en arrive à la conclusion que le document en litige constitue une opinion juridique satisfaisant aux conditions de l’article 31 de la Loi, à l’exception toutefois, vu la preuve, des conclusions se trouvant aux pages 5 et 6. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [37] ACCUEILLE, en partie, la demande de révision de la demanderesse;
02 17 14 Page : 7 [38] ORDONNE à la Paroisse de communiquer à la demanderesse les conclusions du document en litige se trouvant aux pages 5 et 6; [39] REJETTE, quant au reste, la demande de révision. MICHEL LAPORTE Commissaire Vachon, Martin & Besner (M e François Vachon) Procureurs de la demanderesse Roy Mercier (M e Pierre Roy) Procureurs de l'organisme
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