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Dossier : 02 02 68 Date : 20030708 Commissaire : M e Michel Laporte X Demanderesse c. COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE ET DES DROITS DE LA JEUNESSE Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION [1] La demanderesse conteste la décision rendue par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (la « Commission des droits ») de lui refuser laccès, selon les termes des articles 9, 31, 37, 39, 53, 54 et 88 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi »), aux renseignements suivants : […] une copie de mon dossier intégral avec les notes évolutives incluant les rapports des rencontres et des conversations téléphoniques, les témoignages verbaux et 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 02 68 Page : 2 écrits, les procès verbaux, les notes personnelles, les commentaires ainsi que toutes les autres informations pertinentes à mon dossier. [2] Une audience se tient à Montréal le 25 juin 2003. L'AUDIENCE A) LE LITIGE [3] La procureure de la Commission des droits remet à la demanderesse, séance tenante, la correspondance échangée entre les parties, les notes manuscrites de lenquêtrice et les notes sténographiques dun témoignage la concernant. Elle remet également à la Commission d'accès à l'information (la « Commission »), mais sous pli confidentiel, les renseignements ayant été masqués et non transmis à la demanderesse. [4] La demanderesse confirme avoir déjà reçu de la Commission des droits une copie de son dossier quelle qualifie de volumineux. Lobjet du litige, spécifie-t-elle, vise à recevoir les renseignements ne lui ayant pas été donnés parce que masqués. B) LA PREUVE i) De la Commission des droits [5] M me Ginette Rioux, enquêtrice à la Commission des droits, indique que le dossier sous étude (MTL-10367) est une plainte du 18 novembre 1998. Il sagit, dit-elle, dune plainte de harcèlement et de discrimination fondée sur le sexe déposée par la demanderesse, étudiante, contre sa superviseure de stage. Elle dépose lexposé factuel de son enquête ayant été remis aux parties (pièce O-1). [6] M me Rioux mentionne quune enquête comprend quatre étapes : Létude de recevabilité de la plainte; La version des faits soumise par la plaignante et la partie mise en cause; Lenvoi à chaque partie de la version des faits de l'autre partie; La recherche dune preuve documentaire et testimoniale (pièce O-1).
02 02 68 Page : 3 [7] M me Rioux passe en revue les onglets 2 à 16 constituant les renseignements ou documents demeurant en litige de la façon ci-après exposée : Longlet 2.1 (2 pages), les parties masquées à longlet 2.2 (1 page) et longlet 8 (4 pages) sont refusés en vertu de larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 2 (la « Charte »); Longlet 2.3 (4 pages) est refusé en vertu des articles 31 de la Loi et 9 de la Charte; Longlet 3 (7 pages), longlet 5 (2 pages) et longlet 7 (1 page) sont refusés en vertu des articles 53 et 54 de la Loi; Sont également refusées, en vertu des articles 53 et 54 de la Loi, les parties masquées suivantes aux onglets 4 (10 pages), 6 (2 pages), 10 (1 page), 11 (7 pages), 12 (5 pages), 13 (3 pages), 14 (1 page), 15 (6 pages) et 16 (23 pages); Les parties masquées se trouvant à longlet 9 (1 page) sont refusées en vertu des articles 9 de la Charte et 53 et 54 de la Loi. [8] M me Rioux affirme que les parties masquées sont des renseignements nayant jamais été communiqués à lune ou lautre des parties dans le cadre de son enquête. [9] Une preuve ex parte est soumise en vertu de larticle 20 des Règles de preuve de la Commission 3 : 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. Au retour, M me Rioux fait valoir que la plainte de la demanderesse na pas été retenue par la Commission des droits et que lexposé factuel remis aux parties est daté du 13 mars 2002 (pièce O-1). ii) De la demanderesse 2 L.R.Q., c. C-12. 3 Règles de preuve et de procédure de la Commission d'accès à l'information, décret 2058-84.
02 02 68 Page : 4 [10] La demanderesse fait valoir quelle est en droit dobtenir le témoignage rendu par des personnes dans le cadre dune plainte la concernant, notamment celui dune personne quelle nomme. Elle signale ne pas vouloir le nom des personnes ayant témoigné, à lexception du nom de létudiant nayant pas réussi son stage. [11] La demanderesse sinterroge quant à savoir si elle peut obtenir des informations portant, par exemple, sur le contrat de travail de la superviseure de stage, lenquête réalisée par cette dernière auprès des enseignants et les documents émanant de la Commission scolaire ou du ministère de lÉducation. [12] La Commission informe la demanderesse quelle peut obtenir, le cas échéant, les informations recherchées provenant dautres ministères ou organismes en sadressant à ceux-ci. C) LES ARGUMENTS i) De la Commission des droits [13] La procureure de la Commission des droits, M e Michèle Morin, fait valoir que les renseignements refusés en vertu de larticle 9 de la Charte sont des communications ou des annotations données par lenquêtrice, M me Rioux, pour obtenir un avis juridique. Ces dernières informations, soutient-elle, se trouvent protégées par le secret professionnel de renseignements fournis à lavocat 4 et lavis juridique, par larticle 31 de la Loi 5 : 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire. 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Divulgation de renseignements confidentiels. 4 Municipalité d'Ascot c. Ministère des Affaires municipales, [1997] C.A.I. 124; Doyon-Pouliot c. Ministère de lEnvironnement, [1994] C.A.I. 131; Lebœuf c. Ville de Sept-Îles, [1995] C.A.I. 137 5 Choinière c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, C.A.I. Montréal, n o 97 06 88, 30 octobre 1997, c. Laporte; Cordeau c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, C.A.I. Québec, n o 00 11 93, 19 juillet 2001, c. Grenier.
02 02 68 Page : 5 Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel. [14] D'une part, M e Morin soumet que les renseignements nominatifs en litige sont ceux qui révéleraient lidentité dune personne, tels que le nom, ladresse, la liste de noms de professionnels ayant dirigé un stage, le nom de personne consultée ou le contrat de travail de personnes nayant pas de caractère public. [15] D'autre part, les autres renseignements sont des commentaires ou des opinions dautres personnes que la demanderesse. M e Morin identifie notamment la rencontre et limplication de témoins dans le cadre de la plainte, les confidences et les déclarations de tierces personnes. Elle prétend que ces renseignements ne peuvent être communiqués à la demanderesse, selon les termes des articles 53, 54 et 88 de la Loi, sans dévoiler lidentité ou des renseignements de son ou ses auteur(s) 6 : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 6 Fuentes c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, C.A.I. Montréal, n o 99 09 38, 14 mars 2001, c. Iuticone; Roy c. Ministère de la Main-d'œuvre et de la Sécurité du revenu, [1990] C.A.I. 116; Huard c. Régie de l'assurance automobile du Québec, [1989] C.A.I. 43; Bruneau c. Commissaire à la déontologie policière, [1997] C.A.I. 7.
02 02 68 Page : 6 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. DÉCISION [16] J'ai examiné les documents et renseignements en litige. Jai également lu attentivement lexposé factuel de 32 pages rédigé par M me Ginette Rioux et remis à chaque partie impliquée (pièce O-1). Ce dernier document permet de connaître les renseignements qui ont été collectés et communiqués par la Commission des droits à la demanderesse dans le cadre de lenquête. Larticle 9 de la Charte [17] Les renseignements se trouvant aux onglets 2.1, 2.2, 8, à la partie masquée apparaissant à longlet 9 et au point 4 de la page 5 de longlet 11 constituent une communication privilégiée entre un client et son avocat. Ces informations sont protégées par larticle 9 de la Charte et la demanderesse ne pourra donc pas les obtenir. Larticle 31 de la Loi [18] La vérification de longlet 2.3 et la preuve confirment quil sagit bien d'une opinion juridique sur un cas particulier répondant aux conditions de larticle 31 de la Loi. La demanderesse ne pourra en conséquence recevoir copie de cette opinion juridique. Les articles 53, 54 et 88 de la Loi [19] Les renseignements permettant de dévoiler vraisemblablement un renseignement concernant une autre personne physique que la demanderesse et nayant pas été donnés à cette dernière doivent être protégés en vertu de larticle 88 de la Loi. Il sagit notamment des nom, date de naissance, adresse, numéros de téléphone, déclarations, fonctions et résultats scolaires ou activités nayant pas un caractère public, selon les termes des articles 55 et 57 de la Loi :
02 02 68 Page : 7 55. Un renseignement personnel qui a un caractère public en vertu de la loi n'est pas nominatif. 57. Les renseignements suivants ont un caractère public: 1 o le nom, le titre, la fonction, la classification, le traitement, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail d'un membre d'un organisme public, de son conseil d'administration ou de son personnel de direction et, dans le cas d'un ministère, d'un sous-ministre, de ses adjoints et de son personnel d'encadrement; 2 o le nom, le titre, la fonction, l'adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail et la classification, y compris l'échelle de traitement rattachée à cette classification, d'un membre du personnel d'un organisme public; 3 o un renseignement concernant une personne en sa qualité de partie à un contrat de service conclu avec un organisme public, ainsi que les conditions de ce contrat; 4 o le nom et l'adresse d'une personne qui bénéficie d'un avantage économique conféré par un organisme public en vertu d'un pouvoir discrétionnaire et tout renseignement sur la nature de cet avantage. 5 o le nom et l'adresse d'affaires du titulaire d'un permis délivré par un organisme public et dont la détention est requise en vertu de la loi pour exercer une activité ou une profession ou pour exploiter un commerce. Toutefois, les renseignements prévus au premier alinéa n'ont pas un caractère public si leur divulgation est de nature à nuire ou à entraver le travail d'une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime. En outre, les renseignements prévus au paragraphe 2 o ne peuvent avoir pour effet de révéler le traitement d'un membre du personnel d'un organisme public. [20] J'arrive à la conclusion que les renseignements se trouvant aux onglets ci-après identifiés sont de ceux bénéficiant de la restriction de larticle 88 de la Loi : Les onglets 3, 4, 5, 6 et 7; Longlet 11 : les pages 4 à 6 et 8 à 11; Longlet 12 : la ligne 16 jusquà la fin de la page 5 et la page 6; Longlet 13 : les pages 21 et 22;
02 02 68 Page : 8 Longlet 15 : le 2 e paragraphe de la page 2, les 2 e et 3 e paragraphes de la page 4 et la page 8; Longlet 16 : les pages 17, 37, 44 et 45 du cahier « B », les pages 17, 18 et 24 à 27 du cahier « C » et les pages 9, 10, 12 et 14 du cahier « D ». [21] Toutefois, les renseignements déjà connus de la demanderesse ainsi que ceux étant neutres, factuels et ne constituant pas des opinions ou des renseignements permettant de dévoiler un renseignement nominatif sur son auteur 7 demeurent accessibles à la demanderesse. Telle est la situation pour les cas suivants : Les onglets 10 et 14; Longlet 11, à lexception des pages précédemment énumérées; Longlet 12, à lexception des pages précédemment énumérées; Longlet 13 : la page 6; Longlet 15 : les 3 e et 4 e lignes de la page 2, les pages 3 et 5 et les 1 er et 2 e paragraphes de la page 4; Longlet 16 : les pages 16, 22, 23, 28, 29 et 30 du cahier « C » et les pages 6 à 8 du cahier « D ». POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [22] ACCUEILLE, en partie, la demande de révision de la demanderesse; [23] PREND ACTE que la demanderesse a obtenu de la Commission des droits copie de son dossier, à lexception des renseignements et documents en litige; [24] CONSTATE que la demanderesse a reçu à laudience de la Commission des droits la correspondance échangée entre les parties, les notes manuscrites de lenquêtrice et les notes sténographiques dun témoignage la concernant; [25] ORDONNE à la Commission des droits de communiquer à la demanderesse les renseignements suivants : Les onglets 10 et 14; Longlet 11, à lexception des pages 4 à 6 et 8 à 11; 7 Roy c. Ministère de la Main-d'œuvre et de la Sécurité du revenu, précitée, note 6, 121.
02 02 68 Page : 9 Longlet 12, à lexception de la ligne 16 jusquà la fin de la page 5 et de la page 6; Longlet 13 : la page 6; Longlet 15 : les 3 e et 4 e lignes de la page 2, les pages 3 et 5 et les 1 er et 2 e paragraphes de la page 4; Longlet 16 : les pages 16, 22, 23, 28, 29 et 30 du cahier « C » et les pages 6 à 8 du cahier « D ». [26] REJETTE, quant au reste, la demande de révision. MICHEL LAPORTE Commissaire M e Michèle Morin Procureure de l'organisme
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