Dossier : 02 02 38 Date : 20030630 Commissaire : M e Diane Boissinot X Demandeur c. ABITIBI CONSOLIDATED INC Entreprise DÉCISION OBJET DEMANDE D’EXAMEN DE MÉSENTENTE EN MATIÈRE DE RECTIFICATION de renseignement personnel en vertu de l’article 42 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] Le 28 mai 2003, la Commission d’adresse aux parties en ces termes : La présidente de la Commission de l’accès à l’information (la Commission) a désigné la soussignée pour entendre la demande d’examen de mésentente citée en rubrique. La soussignée a donc examiné le dossier et est d’opinion qu’il ne convient pas de convoquer tout de suite les parties à une audience formelle. La soussignée désire, d’abord, s’informer auprès des parties des développements dans ce dossier depuis le 26 mars 2002. 1 L.R.Q., c. P-39.1, ci-après appelée « la Loi ».
02 02 38 Page : 2 Ce dossier débute par une demande de rectification adressée le 8 janvier 2002 par le demandeur à monsieur Germain Tremblay, directeur Santé-Sécurité chez l’entreprise. Le demandeur veut que l’entreprise rectifie le rapport du 22 septembre 1987 rédigé par SécuriGest et produit par l’entreprise à la CSST, en y ajoutant ce qui suit : […] la consultation demandée auprès du Dr Jean Brouillette chirurgien-orthopédiste, par le Dr Pierre Houle médecin de l’usine Wayagamack était pour des douleurs au dos et à la jambe droite causées par un accident de travail à l’usine Wayagamack survenu le 3 juillet 1971 qui a occasionné un arrêt de travail du 17 juillet 1972 au 21 août 1972. Le demandeur produit copie des pièces à l’appui de sa position. Il exige aussi que l’entreprise fasse parvenir à la CSST la rectification qu’elle apportera en conséquence au rapport du 22 septembre 1987. Le 17 février 2002, n’ayant reçu aucune communication de l’entreprise, le demandeur requiert la Commission d’examiner la mésentente résultant du refus réputé de rectifier et ce, en vertu de l’article 42 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (L.R.Q., c. P-39.1, « la Loi »). Il joint copie de sa demande d’accès du 8 janvier 2002 et des pièces qu’il y annexait. Le 2 avril 2002, la Commission reçoit copie d’une lettre que monsieur François Brassard adressait le 26 mars précédent à madame Françoise Nolet de la CSST en ces termes : Tel que convenu lors de notre conversation téléphonique du 26 mars, je vous transmets les documents nécessaires pour mettre à jour le dossier d’accident de M. Pierre-Alain Beaulac, daté du 3 juillet 1971. M. Beaulac nous a fait parvenir ces documents le 8 janvier 2002 et nous a demandé de faire rectifier son dossier à la CSST. Veuillez, s.v.p., me confirmer, ainsi qu’à M. Beaulac, que la rectification de son dossier a été effectuée en bonne et due forme. La Commission demande aux deux parties de l’informer, par écrit, d’ici le 25 juin prochain, si la CSST a confirmé la rectification et, dans l’affirmative, en quels termes elle l’a fait. Puisque la demande de rectification est d’abord adressée à l’entreprise, cette dernière devra aussi, dans le même délai, informer la soussignée si
02 02 38 Page : 3 elle a elle-même rectifié le dossier qu’elle détient sur le demandeur et en quels termes ou de quelle façon elle l’a fait. Le demandeur devra par la même occasion signifier à la Commission s’il maintient toujours sa contestation et des raisons qui motivent ce maintien. À défaut de recevoir du demandeur, dans ce délai, ces informations, la Commission prendra pour acquis que ce dernier estime qu’il n’est pas utile de continuer les procédures devant la Commission. Toute communication adressée à la Commission devra être également adressée à la partie adverse en « copie conforme ». La Commission prendra connaissance de cette correspondance et avisera les parties de la suite qu’elle entend donner à ce dossier. [2] Le 5 juin suivant, le demandeur avise la Commission qu’aucune rectification n’a été effectuée, ni par l’entreprise ni par la CSST. [3] Le 10 juin 2003, l’entreprise écrit à la Commission qu’elle fournit à la CSST, le même jour, tous les documents présentés par le demandeur, documents qu’elle annexe à cette lettre afin que la CSST puisse mettre à jour son dossier sur l’accident du 3 juillet 1971. [4] Il convient de déposer, en liasse sous la cote E-1, cette correspondance du 10 juin 2003 provenant de l’entreprise et adressée à la Commission avec ses annexes (lettre de l’entreprise du 10 juin 2003 à madame Brigitte Dufresne de la CSST, lettre de l’entreprise du 26 mars 2002 à la CSST, pages 1 à 3 du rapport en litige préparé par Sécurigest inc. le 22 septembre 1987, diagnostique du Dr Jean Brouillette du 16 août 1972, 3 pages de la fiche médicale du demandeur chez l’entreprise, son employeur, en 1971 et 1972, la lettre du 28 mai 2003 de la Commission aux parties plus haut retranscrite et l’historique des dossiers 01 05 85 et 02 02 38 en demande d’examen de mésentente à la Commission). [5] De cette correspondance et de ses annexes, la Commission ne peut conclure que l’entreprise a répondu à la demande de rectification du dossier qu’elle détient sur le demandeur, mais seulement que celle-ci réitère sa demande à la CSST de rectifier le sien pour l’accident du 3 juillet 1971, comme elle l’avait fait la première fois le 26 mars 2002. [6] Afin d’entendre plus amplement les parties sur certains points précis, la Commission les convoque à une conférence téléphonique qui se tient le 12 juin et se poursuit le 25 juin 2003.
02 02 38 Page : 4 [7] Au cours de cette conférence téléphonique, monsieur Germain Tremblay, directeur Santé-Sécurité de l’entreprise, affirme que le conseiller en gestion, Santé et Sécurité au travail, Sécurigest inc., mandaté par l’entreprise en 1987 dans le dossier du demandeur et qui est l’auteur du rapport en litige, n’a plus d’existence légale. [8] Tout de suite après la séance du 12 juin 2003, la Commission reçoit copie conforme d’une lettre adressée le même jour à l’entreprise par madame Brigitte Dufresne, chef d’équipe consolidation de la CSST et dont le demandeur a reçu copie. Il convient de déposer ce document sous la cote E-2. [9] Madame Dufresne y écrit : Suite à votre lettre du 10 juin dernier, je vous informe que nous avions déjà rendu une décision suite à un événement du 3 juillet 1971, en ce qui concerne M. Pierre-Alain Beaulac. Voici un bref historique : La CAT [Commission des accidents du travail] reçoit un compte d’établissement de santé du Centre Hospitalier Sainte-Marie de Trois-Rivières le 3 juillet 1971, nous indiquant un accident de travail survenu chez Canadian International Paper Co. subit par M. Pierre-Alain Beaulac. Après vérification, M. Beaulac n’est pas un employé de la CIP. Donc, le 14 janvier 1972, la CAT envoie à M. Beaulac un formulaire de déclaration d’accident, afin qu’il le fasse remplir par son employeur avec cette mention : « Si d’ici 15 jours nous n’avons pas reçu ce document, nous fermerons le dossier considérant que ce n’est pas un accident de travail.» Nous n’avons jamais reçu de nouvelles de M. Beaulac. Le 26 avril 1996, la CSST écrit à nouveau à M. Beaulac suite à sa lettre du 26 février 1996. Nous l’informons que sa demande a été annulée, car il n’avait pas donné suite à notre lettre du 14 janvier 1972. Par conséquent, la CSST ne peut rectifier le dossier de M. Pierre-Alain Beaulac, car il n’a pas fait les démarches nécessaires en 1972 pour prouver qu’il y a eu accident de travail. Un travailleur victime d’un accident de travail doit informer, le plus tôt possible, son employeur. [10] L’entreprise prétend que s’il y a rectification à effectuer au rapport de 1987, elle devrait être faite par l’auteur de ce rapport, Sécurigest inc., société revêtue d’une personnalité juridique distincte de l’entreprise, et non par cette dernière.
02 02 38 Page : 5 [11] L’entreprise soutient également que le cas échéant, Sécurigest inc. ne pourrait exécuter cette rectification puisqu’elle n’a plus d’existence légale. [12] Enfin, l’entreprise plaide que les affirmations de Sécurigest Inc. consistant en ce que le demandeur était porteur d’un handicap, le 20 septembre 1984, lors de la survenue d’un l’accident de travail, et que la rechute de juin 1986 était plus le fruit de l'évolution naturelle de sa maladie personnelle que de l’accident de travail du 20 septembre 1984, maladie personnelle dont témoigne la note du Dr Jean Brouillette du 16 août 1972, ne sont pas rectifiables du seul fait qu’elles constituent des opinions émises par un expert après étude du dossier médical du demandeur. [13] Le demandeur plaide, pour sa part, que l’entreprise peut modifier l’opinion de la personne qu’il a mandatée pour faire l’étude du dossier en se basant sur les fiches médicales de 1971 et 1972 le concernant, constatant l’accident survenu pendant le travail du demandeur, le 3 juillet 1971, et se trouvant dans les archives d’une de ses usines d’alors. Ces archives font preuve contradictoire du contenu des dossiers de la CSST qui n’enregistrent pas d’accident de travail pour le demandeur ce jour là. [14] Ayant terminé l’audience, la Commission peut maintenant rendre sa décision. Le délibéré débute le 26 juin 2003. DÉCISION [15] La Commission est d’avis que le pouvoir de déterminer comme étant un accident de travail l’événement du 3 juillet 1972 appartient à la CSST exclusivement. [16] La preuve démontre que cette détermination a été faite en janvier 1972 par la CAT (aujourd’hui appelée CSST), qui a fermé le dossier en considérant qu’il n’y avait pas accident du travail pour cet événement. [17] Il n’appartient pas à la Commission de faire cette détermination. [18] L’appréciation de l’état du dossier du demandeur, en 1987, par l’expert Sécurigest inc., est une question d’opinion.
02 02 38 Page : 6 [19] La jurisprudence constante de la Commission 2 , tant dans l’interprétation des dispositions de la Loi concernant le droit à la rectification que de celles de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 3 , établit que le droit à la rectification ne s’étend pas à la modification de l’opinion d’une personne contre son gré. [20] Ni l’entreprise ni la Commission ne peuvent aujourd’hui substituer leur opinion à celle de l’auteur du rapport en litige dans le sens que le demandeur souhaite. [21] La preuve démontre que l’auteur du rapport en litige n’a plus d’existence légale et ne pourrait même pas donner son assentiment à la rectification dans le sens souhaité par le demandeur. [22] POUR CES MOTIFS, la Commission REJETTE la demande d’examen de mésentente. Québec, le 30 juin 2003 DIANE BOISSINOT Commissaire 2 Lire à ce sujet Doray, Raymond et Charette, François. Accès à l’information : loi annotée, jurisprudence, analyse et commentaires, Volume 1, Ed. Yvon Blais, p. III/89-3 et suivantes, mise à jour 15 août 2002. 3 L.R.Q., c. A-2.1, ci après appelée « la Loi sur l’accès ».
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