Dossier : 02 11 91 Date : 26 juin 2003 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. HÔPITAL GÉNÉRAL JUIF SIR MORTIMER B. DAVIS Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 12 juillet 2002, le demandeur s’adresse à l’organisme pour obtenir copie de tous les renseignements (« the complete file…not to exclude any referral and any questionnaire filled up ») qui concernent sa fille de 11 ans et que le D r Ronald Feldman a en mains. [2] L’organisme reconnaît la qualité de titulaire de l’autorité parentale du demandeur ainsi que le droit d’accès qui en résulte; de l’avis de l’organisme, ce droit d’accès n’est cependant pas absolu et il est, en l’occurrence, restreint en vertu de l’article 88 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 : 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 11 91 Page : 2 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [3] L’organisme précise sa décision en soulignant que les renseignements demandés et détenus sont fournis par des tiers. [4] Le demandeur requiert la révision de ce refus. L'AUDIENCE A) LA PREUVE i) de l'organisme [5] La qualité de titulaire de l’autorité parentale du demandeur est admise. Témoignage du D r Ronald Feldman : [6] L’avocate de l’organisme fait entendre le D r Ronald Feldman qui témoigne sous serment. Le D r Feldman est pédopsychiatre; il est à ce titre responsable d’un programme (After School Program) géré par l’organisme. [7] L’enfant du demandeur a été référée au D r Feldman par sa mère qui est l’ex-conjointe du demandeur. Le D r Feldman souhaiterait rencontrer les parents pour les renseigner sur l’état de leur enfant et pour recevoir leur consentement respectif l’autorisant à évaluer l’enfant et à lui administrer les soins nécessaires; le demandeur n’a pas rencontré le D r Feldman et il n’a pas encore donné son consentement parce qu’il n’a pas eu accès au dossier de sa fille. [8] Les renseignements auxquels l’accès est refusé ont été fournis par la mère de l’enfant et par des enseignants et intervenants qui oeuvrent auprès de l’enfant à l’école. Sous réserve de restrictions légales pouvant s’appliquer, le
02 11 91 Page : 3 D r Feldman ne voit pas de motif justifiant le refus de donner au demandeur accès aux renseignements émanant de l’école. ii) du demandeur Témoignage du demandeur : [9] Le demandeur témoigne sous serment. Il a reçu un appel du D r Feldman qui l’a avisé que sa fille était malade et qu’elle devait recevoir des soins compte tenu des renseignements déjà détenus au dossier; le D r Feldman lui a alors demandé son consentement écrit à l’administration de soins. Le demandeur a refusé de donner son consentement et il a formulé sa demande d’accès. Il refuse de donner son consentement tant et aussi longtemps qu’il n’aura pas eu accès au dossier de sa fille. Il entend prendre une décision éclairée qui favorise la santé de sa fille, ce, en fonction des renseignements complets qui lui seront communiqués sur celle-ci. Il n’a pu, jusqu’à maintenant, prendre cette décision, faute d’avoir eu accès aux renseignements qui sont en litige. [10] Le demandeur détient déjà copie d’une évaluation concernant sa fille, évaluation effectuée par la D re Tamara Morganstein, psychologue, et datée du 13 janvier 2002; cette évaluation, que le D r Feldman a aussi en mains, n’est pas en litige. Le demandeur veut obtenir les renseignements sur lesquels le D r Feldman s’appuie pour déterminer que l’état de sa fille nécessite des soins. B) LES ARGUMENTS i) de l'organisme [11] Les renseignements qui sont en litige ont été fournis par des tiers; l’article 88 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels oblige l’organisme à refuser de communiquer ces renseignements : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une
02 11 91 Page : 4 autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. ii) du demandeur [12] Les renseignements fournis par l’école fréquentée par l’enfant ne sont pas nominatifs en ce qui concerne l’école et doivent être communiqués au demandeur. DÉCISION [13] La demande d’accès a été formulée par l’un des titulaires de l’autorité parentale; elle concerne une enfant qui était âgée de 11 ans à la date de cette demande. [14] Le 1 er alinéa de l’article 21 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (L.R.Q., c. S-4.2) confère au demandeur un droit d’accès au dossier de sa fille mineure : 21. Le titulaire de l'autorité parentale a droit d'accès au dossier d'un usager mineur. Toutefois, un établissement doit refuser au titulaire de l'autorité parentale l'accès au dossier d'un usager mineur dans les cas suivants: 1° l'usager est âgé de moins de 14 ans et il a fait l'objet d'une intervention au sens de l'article 2.3 de la Loi sur la protection de la jeunesse (chapitre P-34.1) ou il est visé par une décision prise en vertu de cette loi et l'établissement, après avoir consulté le directeur de la protection de la jeunesse, détermine que la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager; 2° l'usager est âgé de 14 ans et plus et, après avoir été consulté par l'établissement, refuse que le titulaire de l'autorité parentale reçoive communication de son dossier et l'établissement détermine que
02 11 91 Page : 5 la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager. [15] Aucune preuve ne démontre que le 1 er paragraphe du 2 ième alinéa de l’article 21 précité s’applique. [16] L’article 18 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux protège les tiers qui ont fourni des renseignements concernant l’usager et contenus dans le dossier de celui-ci. Cet article restreint l’étendue du droit d’accès aux renseignements concernant l’usager afin de protéger ces tiers : conséquemment, l’existence ou le contenu d’un renseignement fourni par un tiers à un établissement ne pourront, sans le consentement écrit de ce tiers, être communiqués à l’usager lorsqu’ils permettront d’identifier ce tiers: 18. Un usager n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement le concernant et contenu dans son dossier qui a été fourni à son sujet par un tiers et dont l'information de l'existence ou la communication permettrait d'identifier le tiers, à moins que ce dernier n'ait consenti par écrit à ce que ce renseignement et sa provenance soient révélés à l'usager. Le premier alinéa ne s'applique pas lorsque le renseignement a été fourni par un professionnel de la santé ou des services sociaux ou par un employé d'un établissement dans l'exercice de leurs fonctions. Aux fins du présent alinéa, un stagiaire, y compris un résident en médecine, est assimilé à un professionnel de la santé ou des services sociaux. [17] Aucune preuve ne démontre que les tiers qui peuvent être identifiés par les renseignements qu’ils ont fournis concernant l’enfant du demandeur aient consenti à la communication de ces renseignements au demandeur.
02 11 91 Page : 6 [18] J’ai pris connaissance des renseignements qui constituent le dossier complet de la fille du demandeur tel qu’il était détenu à la date de la demande d’accès du 12 juillet 2002. Il s’agit essentiellement: • de quelques renseignements (triage intake booklet) communiqués par des tiers; les renseignements émanant de l’école n’identifient cependant pas les tiers qui les ont fournis et ils sont, quant à eux, accessibles au demandeur; • de renseignements constituant un document de l’organisme intitulé « School Questionnaire » qui a été complété par des membres du personnel de l’école alors fréquentée par l’enfant du demandeur. Les renseignements correspondant aux numéros 617, 619, et 669 identifient des tiers et ne sont pas accessibles au demandeur qui, par ailleurs, a droit d’accès aux autres renseignements constituant ce document; • de notes d’évolution datées du 28 juin 2002 : les renseignements constituant ces notes sont accessibles au demandeur; • de notes d’évolution datées du 5 juillet 2002 : les renseignements constituant ces notes sont accessibles au demandeur; • de notes d’évolution datées du 12 juillet 2002 : les renseignements constituant ces notes ne sont pas accessibles parce qu’ils concernent et identifient un tiers; • de données préliminaires réunies dans un document intitulé « Child Psychiatry Admission Assessment » : ces renseignements, très peu nombreux, identifient spécifiquement les tiers qui ont communiqué des renseignements concernant l’enfant; ils ne sont pas accessibles au demandeur; • de renseignements constituant un document de l’organisme intitulé « Pre-Interview Questionnaire » : ces renseignements ne sont pas accessibles au demandeur parce qu’ils identifient ou concernent un tiers; • de renseignements complétant deux questionnaires Conners : seuls les renseignements émanant de l’école sont accessibles au demandeur après que les noms et statuts des personnes qui les ont fournis auront été masqués; les renseignements qui n’émanent pas de l’école identifient d’eux-mêmes les tiers qui les ont fournis en répondant aux questions qui leur étaient destinées et ils ne sont conséquemment pas accessibles;
02 11 91 Page : 7 • de renseignements complétant deux questionnaires Achenbach : seuls les renseignements émanant de l’école et constituant les pages 3 et suivantes sont accessibles au demandeur; les autres renseignements qui sont fournis par l’école ainsi que ceux qui n’émanent pas de l’école identifient d’eux-mêmes les tiers qui les ont fournis en répondant aux questions qui leur étaient destinées et ils ne sont conséquemment pas accessibles au demandeur; • de renseignements divers identifiant d’eux-mêmes les tiers qui les ont fournis et conséquemment non accessibles; • de renseignements constituant le rendement scolaire de l’enfant du demandeur tel qu’exprimé par l’école primaire fréquentée par celle-ci et portant sur les 3 premières sessions de l’année scolaire 2001-2002; ces renseignements, qui sont entièrement accessibles au demandeur auprès de l’école, lui sont conséquemment accessibles. [19] La preuve démontre que l’évaluation de l’enfant, effectuée par la D re Morganstein et communiquée à l’organisme, était déjà détenue par le demandeur et n’est pas en litige. [20] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE PARTIELLEMENT la demande de révision; ORDONNE à l’organisme de donner au demandeur copie des renseignements dont l’accessibilité est déterminée plus haut. HÉLÈNE GRENIER Commissaire
02 11 91 Page : 8 M e Alain Gagnon Avocat du demandeur M e Dana Kean Avocate de l’organisme
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