Dossier : 02 09 64 Date : 20030529 Commissaire : Christiane Constant Richard BERGERON Demandeur c. Municipalité de Pontiac Organisme public DÉCISION OBJET DU LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 9 mai 2002, M. Richard Bergeron (le « demandeur ») s’adresse à la municipalité de Pontiac (la « Municipalité ») pour obtenir • Le nom, adresse et titre de poste occupé à la municipalité, par l’individu ou les individus qui en tant que représentant de la Municipalité de Pontiac, accorda une permission au propriétaire du 330 Route 366 Ouest, l’autorisant à opérer une entreprise d’élevage et de chasse de faisans sur une propriété située dans une zone résidentielle rurale (RR-55).
02 09 64 Page : 2 • La date (jour/mois/année) à laquelle la permission a été accordée ainsi que le processus (verbal ou écrit) par lequel la permission a été accordée. • Si cette permission fut autorisée par écrit, je désire obtenir une copie du ou des dit(s) document(s) utilisé(s) par la Municipalité. [2] De plus, le 13 mai suivant, il requiert : copie de l’opinion légale de l’aviseur légal de la municipalité de Pontiac quant à l’usage permis sur la propriété du 330 Route 366 Ouest. En plus, tel que demandé dans ma lettre du 7 mars 2002 concernant l’avis légal, j’aimerais que l’on me fournisse la liste des documents, règlements et articles de règlements cités à l’aviseur légal ainsi que toutes autres informations fournies par la municipalité de Pontiac pour fin d’opinion légale. [3] Dans une lettre datée du 4 juin 2002, M. Sylvain Bertrand, secrétaire-trésorier de la Municipalité, transmet une réponse au demandeur sur les différents points de ses demandes d'accès. [4] Insatisfait de cette réponse, le demandeur sollicite, le 18 juin 2002, l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») pour réviser cette décision. L’AUDIENCE [5] Une audience est tenue, par lien téléphonique, le 9 mai 2003, en l'absence du demandeur, bien que dûment convoqué par la Commission. LA PREUVE [6] M e Jonathan Coulombe, du cabinet d’avocats Legault Roy qui représente la Municipalité, fait témoigner, sous serment, M. Bertrand, secrétaire-trésorier. [7] Concernant la première demande d'accès, datée du 9 mai, relative à une permission que la Municipalité aurait accordée au propriétaire du 330 Route 366 Ouest, M. Bertrand déclare que ce document est inexistant. Il indique cependant, que l’organisme avait émis un permis au propriétaire résidant à cette adresse pour la construction d’un enclos pour l’élevage de faisans, et ce, tel qu’il a mentionné à la lettre qu’il a adressée au demandeur, le 8 avril 2002 (pièce O-1). Il signale que ce propriétaire réside sur une terre agricole, dans une zone résidentielle, et possède des droits acquis sur cette terre; celui-ci n’a donc pas besoin de
02 09 64 Page : 3 permission pour procéder à l’élevage des animaux. Selon M. Bertrand, il existe « d’autres grands terrains qui servent de terres agricoles » sur le territoire de la Municipalité. [8] En ce qui a trait à l’avis juridique recherché par le demandeur (deuxième demande d'accès, 13 mai 2002), M. Bertrand déclare que la Municipalité ne peut pas lui en fournir une copie parce que : • cet avis n’a pas fait l’objet de discussion lors d'une réunion du conseil municipal; • cet avis n’a pas été déposé à une réunion de ce conseil et la Municipalité n’en a remis copie à nul autre que la Commission, sous pli confidentiel, à la demande expresse de cette dernière, dans le cadre de l’examen de cette cause; • cet avis serait protégé par l’article 31 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l'accès »). [9] Il ajoute que la Municipalité a déjà remis au demandeur, au mois d’avril 2002, tous les règlements et autres documents dont s’est servi le conseiller juridique pour pouvoir émettre son opinion, tel qu’en fait foi la réponse de l'organisme datée du 4 juin 2002 (pièce O-2). [10] De plus, M. Bertrand indique que, lors d’une réunion « en comité plénier », il a répondu à une question d’un conseiller municipal eu égard à l’existence ou non de droits acquis à l’élevage des faisans, information recherchée par le demandeur. ARGUMENTS A) PREMIÈRE DEMANDE : PERMISSION POUR OPÉRER L'ÉLEVAGE DE FAISANS [11] Concernant cette demande, M e Coulombe argue que la preuve a révélé que le propriétaire du « 330 Route 366 Ouest » réside sur une terre agricole, dans une zone résidentielle. Celui-ci possédant déjà des droits acquis, la Municipalité n’a pas besoin d’émettre une permission à cet effet. Il ajoute que la Loi sur l'accès s’applique aux documents que détient un organisme dans l’exercice de ses fonctions (article 9). Il précise que l’organisme n’est pas tenu d’en créer un pour satisfaire à la demande (article 15 de la Loi sur l'accès). 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 09 64 Page : 4 [12] Par ailleurs, il rappelle une partie du témoignage de M. Bertrand selon lequel la Municipalité a fourni au demandeur copie d’un permis de construction émis au propriétaire pour un enclos à faisans. B) DEUXIÈME DEMANDE : AVIS JURIDIQUE [13] En ce qui concerne l’avis juridique, M e Coulombe argue que la Municipalité peut refuser d’en fournir une copie au demandeur, parce que c’est un document protégé par l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 2 (la « Charte ») et l’article 31 de la Loi sur l'accès. Il précise que cette opinion vise un cas particulier soit celui du propriétaire cité dans les demandes d’accès et de révision du demandeur. Ce document contient des faits de nature confidentielle recueillis par un avocat afin de lui permettre d’émettre une opinion juridique à sa cliente, à savoir la Municipalité. Cet énoncé est confirmé aux décisions Ascot c. Ministère des Affaires municipales 3 et Ministère de la Justice c. Broasca et C.A.I 4 . DÉCISION [14] L’audience s’est tenue par lien téléphonique avec M e Coulombe, avocat de la Municipalité et M. Bertrand, témoin pour l'organisme. Le demandeur, pour sa part, a été dûment convoqué par la Commission. Celle-ci a informé, par écrit, les parties que l’audience de cette cause se tiendrait par conférence téléphonique à l’heure indiquée. Cependant, le demandeur n’a pas cru nécessaire de communiquer par écrit avec la Commission pour l’aviser de son intention de ne pas participer à ladite audience. De plus, il n’a pas cru nécessaire non plus de demander de remettre la présente cause. [15] Le demandeur, étant insatisfait de cette décision par la soussignée de tenir la présente audience par lien téléphonique, a informé le personnel de la Commission qu'il avait décidé de ne pas participer à la dite audience. A) PERMISSION POUR OPÉRER L'ÉLEVAGE ET LA CHASSE DE FAISANS [16] L’article 1 de la Loi sur l'accès prévoit que cette loi s’applique aux documents détenus par un organisme public dans l’exercice de ses fonctions, peu importe la forme que peuvent prendre ces documents. 2 L.R.Q., c. C-12. 3 [1997] CAI 124. 4 Cour du Québec, Québec, n o 200-02-027507-013, 8 avril 2002, j. Simard.
02 09 64 Page : 5 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [17] Or, la preuve a démontré, qu’au moment de la demande d’accès, la Municipalité ne détenait pas de document autorisant le propriétaire du « 330 Route 366 Ouest » à opérer une entreprise d’élevage et de chasse de faisans. Le document n’existe pas. L’organisme n’est donc pas tenu de créer ledit document au sens de l’article 15 de la Loi sur l'accès pour satisfaire à la demande : 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [18] Ce que vient confirmer un jugement de la Cour du Québec dans Walsh c. Commission d’accès à l’information et Ministère du Revenu du Québec 5 par lequel cette cour entérine une décision de la Commission statuant qu’une demande d’accès ne doit porter que sur des documents existant au moment de la demande. Dans Directron Média inc. c. Ville de Laval 6 , la Commission a statué que : Conformément à cette disposition, un organisme n’a pas à créer un document pour satisfaire à une demande d’accès. [19] Par ailleurs, l’article 9 de la Loi sur l'accès prévoit que toute personne qui en fait la demande, a droit aux documents d’un organisme public, dans la mesure où ces derniers existent : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. […] B) DEUXIÈME DEMANDE : AVIS JURIDIQUE [20] En ce qui a trait à l’avis juridique que souhaite obtenir le demandeur, il s’agit d’un document de trois pages, signé par M e Michel Lafrenière, avocat. Cet avis relate des faits eu égard à l’existence ou non de droits acquis du propriétaire en question pour procéder à l’élevage et à la chasse de faisans sur sa terre. 5 [1990] 3 C.A.I. 259 (C.Q.). 6 [1990] 2 C.A.I. 107.
02 09 64 Page : 6 [21] L’étude de ce document indique que l’avocat s’est basé, entre autres, sur des règlements municipaux pour émettre une opinion juridique à l'organisme. Il s’agit donc d’une opinion juridique à ce cas particulier, tel qu'il est mentionné aux décisions Youknovsky c. Ville Saint-Bruno-de-Montarville 7 et Broasca 8 précitée. La soussignée considère que ce document peut être visé par l’article 31 de la Loi sur l'accès. [22] Relativement à l’article 9 de la Charte tel qu'il a été cité par la Municipalité, l’examen de ce document amène la soussignée à conclure que ce dernier est protégé par le secret professionnel. Dans l’affaire Ascot 9 précitée, la Commission s’est référée à la règle utilisée par la Cour suprême du Canada dans Descôteaux c. Mierzwinski 5 , qui résume notamment les conditions à respecter sur l’existence du droit à la confidentialité pour le client de l'avocat : Les communications faites par le client qui consulte un conseiller juridique ès qualités, voulues confidentielles par le client et qui ont pour fin d’obtenir un avis juridique font l’objet à son instance d’une protection permanente contre toute divulgation par le client ou le conseiller juridique, sous réserve de la renonciation à cette protection. _______________ 5 [1982] 1 R.C.S. 860, 872-873. [23] De plus, l’article 131 de la Loi sur le Barreau 10 stipule que : 131. 1. L'avocat doit conserver le secret absolu des confidences qu'il reçoit en raison de sa profession. 2. Cette obligation cède toutefois dans le cas où l'avocat en est relevé expressément ou implicitement par la personne qui lui a fait ces confidences ou lorsque la loi l'ordonne. 3. L'avocat peut en outre communiquer un renseignement protégé par le secret professionnel, en vue de prévenir un acte de violence, dont un suicide, lorsqu'il a un motif raisonnable de croire qu'un danger imminent de mort ou de blessures graves menace une personne ou un groupe de personnes identifiable. Toutefois, l'avocat ne peut alors communiquer ce renseignement qu'à la ou aux personnes exposées à ce danger, à leur représentant ou aux personnes susceptibles de leur porter secours. L'avocat ne peut 7 [1984-86] 1 C.A.I. 136. 8 Précitée, note 4. 9 Précitée, note 3. 10 L.R.Q., c. B-1.
02 09 64 Page : 7 communiquer que les renseignements nécessaires aux fins poursuivies par la communication. [24] Par ailleurs, la preuve non contestée a démontré que la Municipalité avait communiqué au demandeur une copie des règlements et documents ayant été remis au conseiller juridique (pièce O-2 précitée), cette partie n’étant pas en litige dans la présente cause. [25] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande de révision de M. Richard Bergeron contre la Municipalité de Pontiac; FERME le présent dossier portant le n o 02 09 64. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 29 mai 2003 M e Jonathan Coulombe LEGAULT ROY, AVOCATS Procureurs de la Municipalité de Pontiac
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.