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Dossier : 02 09 48 Date : 9 avril 2003 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. ASSURANCES GÉNÉRALES DES CAISSES DESJARDINS Entreprise DÉCISION OBJET DEMANDE DEXAMEN DE MÉSENTENTE [1] Le demandeur, qui est le représentant dune entreprise commerciale bien identifiée, a mandaté son avocate pour adresser à lassureur une demande daccès datée du 26 avril 2002. Dans cette demande daccès, lavocate réfère à lavis du 15 avril 2002 par lequel lassureur informe le demandeur de son refus de lindemniser selon la réclamation produite à la suite dun incendie survenu le 11 décembre 2001 dans limmeuble se situait sa place daffaires; lavocate réfère spécifiquement au fondement de ce refus, à savoir quil serait « based on the conclusion of the investigation made by Insurance Bureau of Canada (Investigations Division) ». Lavocate déplore labsence de détails expliquant ce refus, détails quelle na pu réussir à obtenir le 23 avril 2002 lors de sa conversation avec le signataire de lavis du 15 avril 2002, M. Laurent Orr, auprès de qui elle sétait identifiée comme étant lavocate du demandeur. Lavocate rappelle à lassureur quil a émis une police dassurance en faveur du
02 09 48 Page : 2 demandeur, que celui-ci a acquitté les primes dues et que le refus de lindemniser pour les dommages subis lui est signifié plus de 4 mois après lincendie. Lavocate précise, entre autres: « Having studied the « Déclaration solennelle » taken by Mr Guy Bouchard, which, until proof to the contrary, I conclude is the foundation for the refusal, I found it to be rife with inappropriate and prejudicial questions as well as procedural errors » Après avoir, de façon détaillée, fait état des « inappropriate questions » et des erreurs procédurales que le demandeur a subir lors de lenquête effectuée sur sa réclamation, lavocate souligne le fait que son client, « a legitimate business man, was made to feel and treated like a common criminal rather than the victim of a devastating loss ». Elle demande donc que lui soient précisément communiqués les renseignements suivants, ce, dans les plus brefs délais: « the reason for your refusal to honor the claim made by NNCO Global Inc. »; tous les documents constituant le dossier de son client; « a copy of his application for coverage; a copy of his insurance policy; a copy of the letter advising him that his coverage would be terminated in January of 2002 with the justification for the termination; a copy of the report/conclusions made by Jacques Roch, of Groupe Conseil S&J. ». Elle conclut en soulignant que son client « continues to sustain damages on a daily basis ». [2] Le 6 juin 2002, lavocate réitère, par mise en demeure, sa demande daccès à lassureur qui a fait défaut dy donner suite dans le délai applicable. Elle rappelle que « my clients damages continue to accumulate with every passing day. ». [3] Le 6 juin 2002, M. Martin Robitaille, directeur du service à la clientèle de lassureur, répond à la demande daccès. Il confirme à lavocate du demandeur que le refus de lassureur de donner suite à la réclamation de son client sappuie sur larticle 2472 du Code civil du Québec: 2472. Toute déclaration mensongère entraîne pour son auteur la déchéance de
02 09 48 Page : 3 son droit à lindemnisation à légard du risque auquel se rattache ladite déclaration. Toutefois, si la réalisation du risque a entraîné la perte à la fois de biens mobiliers et immobiliers, ou à la fois de biens à usage professionnel et à usage personnel, la déchéance ne vaut quà légard de la catégorie de biens à laquelle se rattache la déclaration mensongère. M. Robitaille ajoute dans sa réponse du 6 juin que le rapport de M. Jacques Roch ne peut être communiqué en vertu de larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., c. C-12) : 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au respect du secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins quils ny soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, doffice, assurer le respect du secret professionnel. [4] Le 21 juin 2002, lavocate, mandatée par le demandeur, requiert lexamen de la mésentente résultant du refus de lassureur. Elle signale que lassureur na pas donné suite à la demande daccès du 26 avril 2002 dans le délai applicable, délai qui, à son avis, est de rigueur et entraîne la déchéance du droit de lassureur de restreindre laccès; elle souligne que les motifs invoqués par lassureur au soutien de son refus de donner accès sont tardifs et non pertinents. Elle spécifie : « we asked for detailed reason for their refusal. Their claim of deceit is far too vague and ambiguous to be considered a satisfactory answer. The allegation that my client made deceiful representations without stating in what way or on what point they claim deceit, is non responsiveIt is our contention that the report we are asking for does not fall under the scope of section 9 of the Charter ».
02 09 48 Page : 4 L'AUDIENCE du 4 mars 2003 A) LA PREUVE i) de l'assureur [5] Lavocate de lassureur dépose copie des procédures intentées contre lassureur le 17 février 2003 par lentreprise dont le demandeur est le principal actionnaire et représentant, procédures par lesquelles cette entreprise conteste le refus de lassureur de lindemniser et réclame la somme de 60 000$ (E-1). [6] Lavocate de lassureur fait entendre M. Laurent Orr qui témoigne sous serment. M. Orr est expert senior en sinistre depuis 30 ans. Le 15 avril 2002, M. Orr a donné au demandeur avis (E-2) du refus de lassureur de lindemniser à la suite de sa réclamation, avis spécifiant que cette décision résultait de lenquête faite par le Bureau dassurance du Canada. [7] Lors de sa conversation téléphonique avec lavocate du demandeur, le 23 avril 2002, M. Orr lui a indiqué que laccès au dossier du demandeur devait faire lobjet dune demande adressée au service à la clientèle de lassureur. [8] Le demandeur sest donc adressé à lassureur le 25 avril 2002 (E-3); dans sa lettre, le demandeur explique : « As I have been met with a wall of silence as to the specific reason for the refusal of my insurance claim, and have encountered nothing but uncooperative stonewalling on the part of the Insurance Bureau of Canada, the Assurances Desjardins, Laurent Orr, claims adjuster-Financial Services Firm, and other relevant bodies : I, (X…), have mandated Bianca Sgambettera, Attorney, to look into the matter of the refusal of my companys (X…) insurance claim. I therefore authorize Assurances générales des caisses Desjardins to cooperate fully with my attorney and to divulge any and all information or details necessary for Ms Sgambettera to carry out her mandate ». [9] M. Orr na pas traité la demande daccès du 26 avril 2002. M. Orr avait cependant requis les services de M. Jacques Roch dans le dossier du demandeur. M. Roch, qui a préparé le rapport qui est en litige, est un expert indépendant auquel lassureur a eu recours pour évaluer les équipements et systèmes informatiques qui sont visés dans la réclamation du demandeur.
02 09 48 Page : 5 [10] Lavocate de lassureur fait également entendre M. Martin Robitaille, directeur du service à la clientèle de lassureur, qui témoigne sous serment. M. Robitaille a reçu la demande daccès du 26 avril 2002 à compter du 29 avril 2002, avec la lettre du 25 avril 2002 (E-3) adressée par le demandeur à lassureur, précitée. Il a par la suite négligé de traiter la demande, ce, jusquà ce que lavocate du demandeur le rappelle à lordre, en juin 2002. Il lui a remis, à compter du 7 juin 2002, la copie de la police dassurance ainsi que la lettre dannulation de la police (E-4, en liasse). Il avait, le 6 juin 2002, refusé laccès au rapport de M. Jacques Roch en vertu de larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne. [11] Le rapport de M. Jacques Roch comprend des renseignements confidentiels pour lassureur. Les documents accessibles ont par ailleurs été transmis au demandeur. [12] Le 4 décembre 2002, lassureur a donné à lavocate du demandeur avis que le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 était également invoqué. Cet avis a été donné en raison de limminence dune poursuite (E-5). Contre-interrogatoire de M. Martin Robitaille [13] Le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé est invoqué parce quun autre avocat du demandeur a, le 29 novembre 2002 (E-5), donné à lassureur avis de lintention du demandeur de réclamer le dommage subi à la suite de lincendie de son entreprise en décembre 2001 et dobtenir des précisions concernant les propos suivants écrits par M. Robitaille dans sa lettre du 6 juin 2002 : « Dune part, nous vous confirmons que nous ne donnerons pas suite à la réclamation mentionnée en titre en vertu de larticle 2472 du Code civil du Québec. ». [14] Selon M. Robitaille, le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé devait, vu « lampleur du dossier », être ajouté comme motif de refus de donner accès puisquil pensait que des procédures étaient imminentes. [15] Le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé est habituellement invoqué avec larticle 9 de la Charte. Il a été invoqué à la suite de la lettre du 29 1 L.R.Q., c. P-39.1.
02 09 48 Page : 6 novembre 2002 (E-5) en raison des précisions requises par le demandeur concernant le refus de lassureur de donner suite à sa réclamation. [16] Le 26 mai 2002, soit 30 jours après la date de la demande daccès adressée par télécopieur à lassureur, celui-ci navait pas de raison dinvoquer le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé bien que la réclamation du demandeur, qui nétait pas recevable, portait à penser que des procédures judiciaires seraient une suite logique au refus de lassureur dindemniser le demandeur. Lorsquune demande daccès suit un refus dindemniser, il arrive que des procédures soient imminentes. [17] La lettre du 25 avril 2002 (E-3) porte sur le mandat confié par le demandeur à son avocate dobtenir les raisons justifiant le refus de lassureur dindemniser le demandeur. Il ny est pas question, comme tel, dintenter des procédures judiciaires. ii) du demandeur [18] Lavocate du demandeur admet que la copie du contrat dassurance ainsi que la lettre indiquant que la couverture dassurance prend fin en janvier 2002 ont été communiquées. [19] Le demandeur ne témoigne pas. LES ARGUMENTS i) de lassureur [20] La demande daccès a été traitée au terme dune période plus longue de quelques jours que celle qui est prévue par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé; il nen demeure pas moins que larticle 9 de la Charte des droits et libertés de la personne sapplique au rapport de lexpert en sinistre, M. Jacques Roch, qui demeure en litige. [21] Lexpert en sinistre est tenu au secret professionnel. [22] Le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé sapplique au rapport de M. Roch qui avait le mandat de vérifier la légitimité de la réclamation du
02 09 48 Page : 7 demandeur. Les procédures judiciaires ont été intentées après la demande daccès; le demandeur a mandaté, dès le 23 avril 2002 (E-3), son avocate afin de faire une demande daccès pour senquérir des raisons qui justifiaient le refus de lassureur de lindemniser. Tous ces éléments démontrent que lassureur pouvait, dès lors, légitimement croire que des procédures seraient intentées dautant plus que le refus dindemniser le demandeur lui avait été acheminé le 15 avril 2002 (E-2). [23] La demande daccès du 26 avril 2002 concerne le refus dindemniser le demandeur et vise laccès à des documents qui pouvaient légitimement laisser lassureur croire que des procédures pourraient être intentées à cause de ce refus. Larticle 9 de la Charte, qui sapplique au rapport confidentiel en litige, a conséquemment été invoqué. Lexpert en sinistre bénéficie du secret professionnel prévu par larticle 9 de la Charte; le respect du secret professionnel est un droit fondamental qui nest pas une exception au droit daccès à des renseignements personnels; la protection que garantit larticle 9 de la Charte au respect du secret professionnel lui confère un caractère prioritaire lorsquil vient en conflit avec un autre droit. 2 [24] Même invoqué tardivement, larticle 39 peut sappliquer pour refuser laccès au rapport de lexpert en sinistre. 3 [25] Le rapport de lexpert en sinistre Roch est protégé par larticle 9 de la Charte, ce, quil soit ou non communiqué à lintérieur dune relation client/avocat. Lexpert en sinistre est une personne appelée à composer avec des renseignements confidentiels quil recueille pour son client; il doit respecter la confidentialité de ces renseignements. 4 Le Code de déontologie des experts en sinistre prévoit de plus que : 20. Lexpert en sinistre doit respecter le secret de tous les renseignements personnels quil obtient sur un client et les utiliser aux fins pour lesquelles il les obtient, à moins quune disposition dune loi ou dune ordonnance dun tribunal compétent ne le relève de cette obligation; 21. Lexpert en sinistre ne doit pas divulguer les renseignements personnels de nature confidentielle quil a obtenus autrement que conformément à la loi, ni les utiliser au préjudice de son client ou en vue dobtenir un avantage pour lui-même ou pour une autre personne. 2 Général Accident cie dassurance du Canada c. Danny Ferland [1997] C.A.I. 446, 458. 3 Général Accident cie dassurance du Canada c. Danny Ferland [1997] C.A.I. 446. 4 Sécurité Assurances Générales c. Lorraine Gravel [2000] C.A.I. 408, 410.
02 09 48 Page : 8 [26] Le délai de 30 jours, prévu par larticle 32 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé nest pas de rigueur; le défaut de donner suite à une demande daccès à lintérieur de ce délai nentraîne pas la déchéance du droit dinvoquer une restriction à laccès. Les circonstances de chacun des dossiers doivent être analysées 5 et la Commission doit exercer les pouvoirs qui lui sont attribués par la loi précitée : 55. La Commission a tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice de sa compétence; elle peut rendre toute ordonnance qu'elle estime propre à sauvegarder les droits des parties et décider de toute question de fait ou de droit. Elle peut notamment ordonner à une personne exploitant une entreprise de donner communication ou de rectifier un renseignement personnel ou de s'abstenir de le faire. [27] Limminence de procédures judiciaires était fort possible dès le 25 avril 2002 lorsque le demandeur a requis que des explications relatives au refus de lindemniser lui soient fournies par lassureur (E-3). Lassureur a donc su démontrer linsatisfaction du demandeur à la suite du refus de lassureur de lindemniser le 15 avril 2002 (E-2). Le rapport en litige est constitué de renseignements qui permettront à lassureur de justifier son refus dindemniser le demandeur dans le cadre des procédures judiciaires mises en preuve E-1, E-5). ii) du demandeur [28] La Commission a discrétion pour autoriser lajout dun nouveau motif de refus et elle doit exercer judicieusement cette discrétion eu égard aux circonstances de chaque dossier 6 . Lassureur na cependant pas démontré de circonstances exceptionnelles justifiant lajout du 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé six mois après la demande daccès. 5 Ministère de la Justice c. Schulze [2000] C.A.I. 413; X c. Bélair Direct, dossier C.A.I. 01 18 29, 9 octobre 2002. 6 Ministère de la Justice c. Schulze [2000] C.A.I. 413.
02 09 48 Page : 9 [29] Lassureur na pas, non plus, démontré que tous les faits appuyant le refus de donner accès aux documents en litige existaient avant la demande daccès. Le témoignage de M. Robitaille indique plutôt quà lexpiration de la période de 30 jours prévue pour répondre à la demande, aucune raison ou circonstance ne la incité à requérir une prolongation de cette période pour ajouter une autre restriction à laccès. [30] Aucune preuve ne démontre quavant la demande daccès du 26 avril 2002, le demandeur avait exprimé à lassureur son insatisfaction quant au traitement de sa réclamation et quil avait donné avis de son intention davoir recours à un avocat pour entreprendre des procédures. Le demandeur sest plutôt limité à demander les renseignements constituant son dossier, notamment le rapport de lexpert en sinistre Roch, afin de savoir pourquoi lassureur refusait sa réclamation. [31] La preuve démontre que le refus dacquiescer à la demande daccès du 26 avril 2002 sappuie sur deux motifs facultatifs invoqués après la période prévue pour ce faire par larticle 32 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Aucune circonstance exceptionnelle justifiant ce retard nayant été démontrée, le demandeur a, en vertu du droit daccès que lui attribue cette loi, conséquemment droit daccès au contenu de son dossier. 7 [32] Lassureur na pas motivé son refus de donner accès dans le délai applicable; il na pas, non plus, démontré lexistence de circonstances exceptionnelles justifiant son retard. [33] Larticle 9 de la Charte ne sapplique pas au rapport en litige. Ce rapport est constitué de renseignements personnels concernant la réclamation du demandeur; le privilège est celui du demandeur qui est concerné par ces renseignements; lassureur ne peut conséquemment linvoquer. Le droit au secret professionnel, droit fondamental, est rattaché à la personne qui se confie dans le but dobtenir un service professionnel; il relève du client qui peut, sil le juge pertinent, y renoncer. Lenquêteur qui a préparé le rapport est tenu à la confidentialité, non pas au secret professionnel 8 . [34] Le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé ne sapplique pas aux 7 Milliard c. Axa [1999] C.A.I. 305; Chaîné c. Paul Revere cie dassurance-vie [1998] C.A.I. 139; Avis de la C.A.I. concernant le projet de loi 122, juin 2000, dossier 00 09 36. 8 Milliard c. Axa [1999] C.A.I. 305; Rapport annuel 2000-2001, C.A.I., p.41.
02 09 48 Page : 10 renseignements en litige parce que la preuve démontre quaucune procédure judiciaire nétait imminente ou pendante lors du traitement de la demande daccès du 26 avril 2002. Le refus dacquiescer à cette demande, exprimé en juin 2002, nest en lien avec aucune procédure judiciaire; rien au dossier du demandeur nindiquait, au moment le refus a été décidé, que des procédures judiciaires étaient imminentes et que la divulgation du rapport risquait vraisemblablement davoir un effet sur ces procédures. De plus, le refus dindemniser, signifié au demandeur le 15 avril 2002 (E-2), sappuie sur la conclusion inscrite dans le rapport denquête du Bureau dassurance du Canada qui nest pas visé par la demande daccès. [35] Le 2 ième paragraphe de larticle 39, précité, doit être interprété restrictivement; il ne peut être automatiquement invoqué lorsquune demande daccès suit le refus dindemniser un assuré et que des procédures judiciaires sont possibles. La preuve de procédures judiciaires, imminentes ou pendantes lors du traitement de la demande daccès, na pas été faite par lassureur. Le témoignage de M. Robitaille démontre plutôt que lassureur invoque automatiquement cette restriction avec larticle 9 de la Charte et que rien au dossier du demandeur ne justifiait lapplication de cette restriction facultative lors du traitement de la demande du 26 avril 2002. [36] Le demandeur a un droit daccès aux renseignements personnels qui le concernent. Le refus de lassureur dacquiescer à sa demande daccès nest justifié par aucune circonstance exceptionnelle et il nest pas fondé. À lépoque le refus dacquiescer à sa demande daccès a été décidé, il nétait pas évident que le demandeur avait lintention de poursuivre lassureur; il était évident que le demandeur réagissait au refus non motivé de lassureur de lindemniser, refus qui a donné lieu à une demande dexplications. DÉCISION [37] La preuve (E-4) démontre que le demandeur est le principal actionnaire dune entreprise commerciale bien identifiée qui, à titre de détaillant dordinateurs et de téléphones cellulaires, a contracté avec lassureur une assurance de dommages. [38] La preuve (E-4) démontre que ce contrat dassurance avait une durée dun an et quil devait prendre fin le 10 septembre 2002.
02 09 48 Page : 11 [39] La preuve (E-4) démontre que le 4 décembre 2001, lassureur a, par poste prioritaire, donné à cette entreprise commerciale un avis de résiliation de ce contrat comprenant, notamment, les mentions suivantes : « Date de résiliation : 02-01-2002; Raison : Normes de souscription; Nous avons résilié la police précitée conformément aux conditions de celle-ci. Nous vous invitons, compte tenu de ce qui précède, à prendre les mesures nécessaires afin de protéger adéquatement vos biens et den informer, sil y a lieu, votre créancier... ». [40] La preuve démontre que lentreprise du demandeur a été endommagée par le feu le 11 décembre 2001 et que lassureur a, le 15 avril 2002, donné au demandeur avis de son refus dindemniser son entreprise pour les dommages subis à cause de cet incendie (E-1, E-2, E-5). [41] La preuve démontre que lenquête menée par lexpert Jacques Roch pour le compte de lassureur concerne la réclamation soumise par le demandeur pour son entreprise et a donné lieu au rapport qui est en litige. [42] La preuve démontre que lavocate du demandeur avait commencé lexécution de son mandat le 23 avril 2002 en sadressant à M. Laurent Orr, expert en sinistre à lemploi de lassureur, pour obtenir des détails sur le refus dindemniser lentreprise du demandeur, signifié le 15 avril 2002 (E-2). [43] La preuve (E-3) démontre que le 25 avril 2002, le demandeur sest adressé à lassureur pour: déplorer le silence de lassureur sur la raison spécifique appuyant le refus dindemniser son entreprise; déplorer labsence de collaboration du Bureau dassurance du Canada, de lassureur et de M. Laurent Orr, entre autres personnes; donner avis du mandat confié en conséquence à une avocate afin quelle examine ce refus et quelle reçoive de lassureur tous les renseignements nécessaires lui permettant dexécuter son mandat. [44] La preuve démontre que lavocate du demandeur a débuté lexécution plus formelle de son mandat en adressant la demande daccès du 26 avril 2002 à lassureur. Cette demande porte sur le refus (E-2) de lassureur dindemniser lentreprise du demandeur pour les dommages subis le 11 décembre 2001 à cause dun incendie; elle vise notamment lobtention des détails appuyant ce refus que lavocate qualifie dinjustifié et de tardif, refus qui, selon lavocate,
02 09 48 Page : 12 résulte dune enquête dont elle attaque la validité tant au niveau du fond que de la procédure et qui, selon les affirmations de lavocate, continue de causer préjudice à son client. Les renseignements demandés sont directement reliés à la contestation annoncée dans cette demande daccès qui met en lumière le conflit opposant les parties à cause du refus dindemniser. À mon avis, lensemble du contexte qui préexistait, lequel a été démontré par lassureur, et que vient compléter cette demande daccès du 26 avril 2002 laisse entendre que le risque de procédures judiciaires dans lesquelles les deux parties ont un intérêt évident est plus que vraisemblable. Le refus dindemniser est clair; il est aussi clair que cette décision nest pas acceptée par le demandeur qui a mandaté une avocate. [45] Jai pris connaissance des renseignements qui sont en litige. Ces renseignements, obtenus dans le cadre de lenquête menée sur le demandeur, constituent le rapport adressé par lexpert Jacques Roch à lassureur. Le contenu de ce rapport sert essentiellement de fondement au refus de lassureur dindemniser lentreprise du demandeur selon la réclamation produite; il est évident que la divulgation de cet élément de preuve, dont ladmissibilité ou la valeur probante ne sauraient être déterminés par la Commission, risquerait vraisemblablement davoir un effet sur les procédures judiciaires dont limminence pouvait déjà être perçue par le conflit ou la contestation clairement annoncés à compter des 23, 25 et 26 avril 2002. [46] Le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé ne soppose ni ne contrevient à lapplication de larticle 9 de la Charte; il sapplique, notamment, aux renseignements personnels dont la confidentialité est protégée par lobligation de respecter le secret professionnel : 39. Une personne qui exploite une entreprise peut refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant lorsque la divulgation du renseignement risquerait vraisemblablement: 1° de nuire à une enquête menée par son service de sécurité interne ayant pour objet de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions à la loi ou, pour son compte, par un service externe ayant le même objet ou une agence d'investigation ou de sécurité conformément à la Loi sur les agences d'investigation ou de sécurité (chapitre A-8);
02 09 48 Page : 13 2° d'avoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle l'une ou l'autre de ces personnes a un intérêt. [47] Le 2 ième paragraphe de larticle 39, précité, sapplique, vu la preuve, au rapport en litige. Il appartiendra au tribunal civil saisi de la requête produite par lentreprise du demandeur (E-1) de déterminer ladmissibilité ou la valeur probante de ce rapport. [48] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande dexamen de mésentente. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Bianca Sgambetterra Avocate du demandeur M e Paule Émond Avocate de lassureur
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