Date : 20030117 Dossiers: 00 09 49, 00 10 22, 00 10 85, 00 18 31, 00 07 48, 00 02 06, 00 00 99, 00 20 50, 00 13 14, 00 18 90, 00 21 84, 01 07 66, 01 12 34. Commissaire : Diane Boissinot DÉCISION INTERLOCUTOIRE OBJET REQUÊTE EN IRRECEVABILITÉ DES DEMANDES DE RÉVISION faites en vertu des articles 135 et 137 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 L.R.Q., c. A-2.1 (la Loi).GAUTHIER, ÉLISE et REGROUPEMENT RÉGIONAL DE CITOYENNES ET CITOYENS POUR LA SAUVEGARDE DE L’ENVIRONNEMENT demandeur MINISTÈRE DE L’ENVIRONNEMENT organisme et RÉCUPÈRE SOL INC. tiers 1 PRÉSENTÉE PAR LE TIERS.
00 09 49 et autres Page 2 de 8 [1] À diverses dates, le demandeur formule des demandes d’accès à certains documents et essuie, de la part du responsable de l’accès de l’organisme (le Responsable), des refus de les communiquer, en totalité ou en partie, au motif, entre autres, qu’ils contiennent des renseignements fournis par un tiers, renseignements qui sont visés par les articles 23 et/ou 24 de la Loi. [2] À la suite de ces refus, le demandeur s’adresse à la Commission aux fins de faire réviser ces décisions du Responsable. [3] Chacune des demandes d’accès, chacune des décisions de refus de communiquer et chacune des demandes de révision forment les pièces introductives d’instances dans chacun des dossiers. [4] Toutes les demandes d’accès citent l’article 26 de la Loi en préambule : 26. Un organisme public ne peut refuser de communiquer un renseignement visé par les articles 22, 23 et 24 lorsque ce renseignement permet de connaître ou de confirmer l'existence d'un risque immédiat pour la santé ou la sécurité d'une personne ou d'une atteinte sérieuse ou irréparable à son droit à la qualité de l'environnement. En pareil cas, l'organisme public peut, malgré l'article 49, rendre sa décision dès qu'il a donné au tiers l'avis requis par l'article 25. [5] Chacune des demandes de révision adressée à la Commission en vertu des articles 135 et 137 fait référence à une demande d’accès précise et laisse entendre ou invoque un refus quelconque de communication des documents demandés : 135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision. Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles.
00 09 49 et autres Page 3 de 8 Ces demandes doivent être faites dans les trente jours qui suivent la date de la décision ou de l'expiration du délai accordé par la présente loi au responsable pour répondre à une demande. La Commission peut toutefois, pour un motif raisonnable, relever le requérant du défaut de respecter ce délai. 137. La demande de révision doit être faite par écrit; elle peut exposer brièvement les raisons pour lesquelles la décision devrait être révisée. Avis en est donné à l'organisme par la Commission. Lorsque la demande de révision porte sur le refus de communiquer un renseignement fourni par un tiers, la Commission doit en donner avis au tiers concerné. [6] Sauf dans le dossier 00 00 99, les demandes sont formulées en ces termes : Comme nous croyons qu’il y a un risque pour notre santé et notre environnement nous aimerions obtenir ces documents et c’est la raison pour laquelle nous faisons une demande à votre service. [7] Dans le dossier 00 00 99, les termes diffèrent et se lisent ainsi : Comme nous n’avons pas eu satisfaction à notre demande et nous croyons que nous aurions dû recevoir tous les documents, nous faisons appel à votre service afin d’obtenir tous les documents dans les plus brefs délais. [8] Au cours de l’audience, par courrier du 11 décembre 2002, l’avocat de la demanderesse avise l’avocat du tiers (avec copie à la Commission et à l’avocat de l’organisme) de la décision de sa cliente de ne pas invoquer l’article 26 de la Loi dans le cadre de l’audition des dossiers mentionnés en rubrique. [9] A la suite de la réception de ce courrier, l’avocat du tiers annonce son intention de soulever le présent moyen d’irrecevabilité. [10] Le 9 janvier 2003, la requête en irrecevabilité du tiers et les arguments des parties sont entendus, par voie de téléconférence entre tous les avocats impliqués et la soussignée. Les autorités citées par l’une des parties sont produites aux autres parties antérieurement à cette séance.
00 09 49 et autres Page 4 de 8 AUDIENCE LES ARGUMENTS i) du tiers [11] L’avocat du tiers rappelle que les demandes de révision font référence aux risques d’atteinte à la santé du demandeur comme motif et indiquent que « c’est la raison pour laquelle nous faisons une demande de révision ». [12] La juridiction de la Commission, en matière de révision, est déterminée par cette formulation de la demande. [13] La seule disposition de la Loi qui réfère au risque d’atteinte à la santé du demandeur est l’article 26 de la Loi, article par ailleurs cité dans les demandes d’accès. [14] L’avocat du demandeur a fait savoir que son client n’invoquait plus l’article 26 de la Loi dans le cadre de l’audition des présents dossiers. [15] L’avocat du tiers prétend qu’en retirant la raison, le motif fondé sur l’article 26 de la Loi, l’avocat du demandeur retire la substance, le cœur même de la demande de révision dont la Commission est saisie. [16] L’avocat du tiers plaide qu’en ce faisant, le demandeur modifie de façon substantielle la demande originale. Permettre une telle modification substantielle équivaut à permettre la présentation d’une demande entièrement nouvelle. Un tel amendement est contraire aux intérêts de la justice 2 . [17] L’avocat du tiers soutient donc qu’en ce faisant, l’avocat du demandeur retire sa demande de révision. [18] La Commission se trouve dès lors « functus officio » et ne peut entendre les présentes demandes de révision sans outrepasser sa compétence. [19] Les demandes de révision sont, en conséquences, irrecevables. 2 Bruyère c. 104937 Canada inc., [1989] R.J.Q., 1925 (C.S.) 1927; La compagnie d’assurances générales Kansa Ltée c. Construction Désourdy inc. [1996] R.D.J. 72 (C.A.) 74; G.C.V. c. G.E., [1990] R.D.J., 293 (C.A.) 296; Québec (Procureur général) c. Bernier, [1991] CAI 278 (C.Q.) 281; Villeneuve c. Centre hospitalier régional de Baie-Comeau, [1990] CAI 43. 45; Société des alcools du Québec c. Martin Everell, CAI Québec 00 04 14, le 21 février 2002, page 4/7, 5/7 (AZ-50116240).
00 09 49 et autres Page 5 de 8 [20] L’avocat du tiers demande à la Commission de déclarer irrecevables les demandes de révision et de les rejeter. ii) du demandeur [21] L’avocat du demandeur plaide que la modification apportée ne change en rien l’objet des demandes qui reste toujours la révision des décisions du Responsable refusant l’accès à certains renseignements se trouvant dans certains documents. [22] Les renseignements en cause dont on refuse l’accès sont toujours les mêmes et les exceptions que l’organisme a fait valoir dans ses décisions pour refuser la communication de ces renseignements, décisions dont le bien-fondé est contesté par les présentes demandes de révisions, sont également les mêmes. [23] L’essence des recours que le demandeur exerce est de faire réviser par la Commission les motifs pour lesquels le Responsable a refusé l’accès aux renseignements demandés, comme le permet l’article 135 précité. [24] Le fondement de tels recours se trouve à l’alinéa premier de l’article 9 de la Loi qui consacre le droit d’accès, lequel est un droit garanti par la Charte des droits et libertés de la personne 3 : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. […] [25] Ce droit est tout de même restreint par les seules exceptions prévues aux articles 18 à 41 de la Loi, exceptions que peut ou doit soulever l’organisme pour refuser l’accès. [26] Le demandeur rappelle que les articles 23 et 24 font partie de ces exceptions, que le demandeur conteste toujours le bien-fondé de ces motifs de refus et qu’il n’a pas renoncé à ce que la Commission examine la contestation. 3 L.R.Q., c. C-12 (la Charte) art. 44. « Toute personne a droit à l'information, dans la mesure prévue par la loi. ».
00 09 49 et autres Page 6 de 8 iii) de l’organisme [27] L’avocat de l’organisme ne fait aucune représentation sur la présente requête. DÉCISION Les demandes de révisions sont recevables quant au fond et quant à la forme. RECEVABILITÉ QUANT AU FOND [28] L’accès est l’objet de la Loi et l’objet des recours visés par la requête est la révision des décisions du Responsable de refuser l’accès. [29] Telles que rédigées, les demandes de révision des décisions de refuser l’accès ne visent pas d’autre but. Ainsi font-elle mention des demandes d’accès, des refus d’accès et du droit d’accès et concluent en ces termes : […] nous aimerions obtenir ces documents et c’est la raison pour laquelle nous faisons une demande à votre service. ou encore : […] Comme nous n’avons pas eu satisfaction à notre demande et nous croyons que nous aurions dû recevoir tous les documents, nous faisons appel à votre service afin d’obtenir tous les documents dans les plus brefs délais. [30] L’article 26 n’a été invoqué par le demandeur, dans ses demandes d’accès, qu’à titre indicatif et ce, dans le but de faire savoir à l’avance, à l’organisme qui refuserait de communiquer les renseignements demandés au motif que ceux-ci ont été fournis pas des tiers et sont visés par les articles 23 et 24 de la Loi, qu’il soulèverait ce moyen à l’encontre de l’application des deux articles. À titre de rappel à l’intention de la Commission, le demandeur fait allusion aux risques pour la santé dans ses demandes de révision. [31] La Loi ne prévoit aucun recours visant à garantir un environnement libre de tout risque immédiat pour la santé ou la sécurité d'une personne ou d'une atteinte sérieuse ou irréparable à son droit à la qualité de l'environnement. La Commission n’a donc aucune compétence en cette matière. Retirer une allégation concernant
00 09 49 et autres Page 7 de 8 ce risque n’a aucune conséquence sur l’exercice de la compétence de la Commission en matière de révision, comme c’est le cas ici. [32] La Commission est d’avis que la décision du demandeur de ne plus invoquer l’article 26 de la Loi équivaut à renoncer à un moyen lié à sa contestation, l’article 26 pouvant faire échec à l’application des articles 23 et 24 aux renseignements demandés. [33] Cette décision du demandeur ne change en rien la nature ou la substance des recours dont est saisie la Commission qui est toujours de faire réviser le refus du Responsable de communiquer. À cet égard, les affaires Bruyère, La Compagnie d’assurances générales Kansa Ltée et G.C.V 4 , où la nature du recours risquait d’être fondamentalement modifiée, ne s’appliquent pas au présent cas. [34] Cette modification de la stratégie ou de l’argumentaire du demandeur ne change en rien l’objet des décisions du Responsable, sous révision, puisque les renseignements en cause restent les mêmes : ils sont toujours, parmi ceux qui ont été demandés, ceux auxquels l’accès a été refusé. À cet égard, les affaires Villeneuve et Société des alcools du Québec, où on avait tenté de modifier les renseignements demandés à la demande d’accès, ne s’appliquent pas ici. [35] Les motifs de refus à l’origine de la contestation, dont les articles 23 et 24 de la Loi, ne sont pas modifiés par le geste du demandeur. Le voudrait-il qu’il ne le pourrait pas, l’invocation des motifs de refus appartenant à l’organisme et à son Responsable. La tâche de la Commission est toujours, à l’heure qu’il est, de déterminer si ces motifs sont fondés ou non. À cet égard, l’affaire Bernier, ne s’applique pas non plus au cas en l’espèce. Dans cette cause, l’organisme avait ajouté un motif de refus. [36] L’abandon par le demandeur du moyen fondé sur l’article 26 n’a pas changé la substance de ses recours, ni l’objet des litiges, ni leur portée ou leur étendue. RECEVABILITÉ QUANT À LA FORME [37] Comme le droit d’accès est un droit d’ordre public, la Commission n’exige pas d’un demandeur que celui-ci expose les motifs de sa demande de révision du refus de communiquer les documents ou renseignements demandés. 4 pour les trois affaires, voir supra, note 2.
00 09 49 et autres Page 8 de 8 [38] En effet, en vertu de l’article 9 alinéa premier de la Loi, un document est accessible pour tous ou il ne l’est pour personne par le jeu des exceptions à l’accès. [39] D’ailleurs, l’article 137 n’impose pas au demandeur 5 l’obligation de motiver sa demande de révision, Tout au plus cet article stipule-t-il la discrétion du demandeur en la matière : «… [la demande de révision] peut exposer brièvement les raisons pour lesquelles la décision devrait être révisée ». [40] De toute façon, la Commission est d’avis que l’invocation de l’article 26 ne constitue pas un motif à la base des demandes de révision, mais plutôt un moyen à faire valoir à l’encontre de la position de l’organisme et du tiers. [41] Telles que formulées, les demandes de révisions sont conformes. [42] POUR CES MOTIFS, la Commission REJETTE la requête en irrecevabilité; et ORDONNE aux parties de se présenter à la continuation de l’audience aux jours, heure et lieu prévus à l’avis de convocation posté le 14 novembre 2002, savoir en la Ville de Saguenay, au Palais de Justice de Jonquière, les 25 et 26 février prochain (2003). Québec, le 17 janvier 2003 DIANE BOISSINOT Commissaire Avocat du tiers : Gauthier Bédard, avocats (M e Pierre Mazurette) Avocat de la demanderesse : M e Francis Letendre Avocat de l’organisme : M e Jean-Sébastien Gobeil-Desmeules 5 Église de scientologie de Montréal c. Office de la protection du consommateur, [1993] CAI 36, 38.
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