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01 14 05 X, demanderesse c. STANDARD LIFE, COMPAGNIE DASSURANCE, entreprise LOBJET DU LITIGE : Le 26 juillet 2001, la demanderesse sadresse à lentreprise pour obtenir « une copie exhaustive de mon dossier depuis juin 1998, incluant donc, entre autres, tous les rapports écrits échangés entre toutes les personnes ainsi que les rapports de conversations ayant pu y être versés, les lettres échangées, incluant toutes les lettres et rapports que Les Éditions du Centre Éducatif et Culturel inc. vous ont fait parvenir et celles/ceux que vous leur avez envoyé(e)s etc. etc. ». Le 22 août 2001, lentreprise refuse dacquiescer à cette demande daccès; elle invoque le 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 au soutien de son refus : 39. Une personne qui exploite une entreprise peut refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant lorsque la divulgation du renseignement risquerait vraisemblablement: 1 o de nuire à une enquête menée par son service de sécurité interne ayant pour objet de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions à la loi ou, pour son compte, par un service externe ayant le même objet ou une agence d'investigation ou de sécurité conformément à la Loi sur les agences d'investigation ou de sécurité (chapitre A-8); 1 L.R.Q., c. P-39.1.
01 14 05 2 2 o d'avoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle l'une ou l'autre de ces personnes a un intérêt. Le 7 septembre 2001, la demanderesse requiert lexamen de la mésentente résultant de ce refus. PREUVE : Après discussion entre elles, tenue séance tenante concernant les documents en litige, lavocate de lentreprise sengage envers la demanderesse, qui accepte : à communiquer au psychiatre traitant de la demanderesse, le D r René Tirol, les rapports médicaux déjà fournis par celui-ci à lentreprise ainsi que dautres rapports médicaux concernant la demanderesse et émanant des psychiatres Louis Bérard (11 mars 1999) et Roger-Michel Poirier (26 octobre 2000) de même que du médecin consultant de lentreprise (Pierre J. Gosselin), la communication de ces rapports par lentreprise étant effectuée pour permettre au D r Tirol de discuter avec la demanderesse des renseignements qui y sont inscrits à un moment quil déterminera lui-même en qualité de psychiatre traitant; à communiquer au psychologue traitant de la demanderesse, le D r Claude Bélanger, les deux rapports préparés par celui-ci concernant la demanderesse, la communication de ces rapports par lentreprise étant effectuée pour permettre au D r Bélanger de discuter avec la demanderesse des renseignements qui y sont inscrits à un moment quil déterminera lui-même en qualité de psychologue traitant. (Le 6 septembre 2002, lavocate de lentreprise a donné à la demanderesse et à la Commission avis de la communication de ces documents au psychiatre et au psychologue concernés, conformément à lentente intervenue lors de laudience du 4 septembre 2002.)
01 14 05 3 Lavocate de lentreprise et la demanderesse déterminent par ailleurs les documents qui demeurent en litige, à savoir : les rapports de la firme de réadaptation Optima; le rapport dune infirmière psychiatrique préparé pour lentreprise (sauf 3 pages que la demanderesse détient déjà). Lavocate de lentreprise fait entendre M me Marjolaine Cantin qui témoigne sous serment. M me Cantin est à lemploi de lentreprise à titre de consultante en gestion de linvalidité. Elle partage, avec le contentieux de lentreprise et depuis le 15 janvier 2001, la responsabilité du traitement des dossiers de litige en assurance salaire. M me Cantin a traité la demande daccès de la demanderesse; elle a refusé dy acquiescer compte tenu de la lettre adressée à lentreprise le 23 mars 2001 (E-1), lettre par laquelle la demanderesse conteste explicitement la décision de lentreprise, prise le 20 décembre 2000, dinterrompre le versement de ses prestations dinvalidité à la fin du mois davril 2001. M me Cantin rappelle que la demanderesse a commencé à recevoir des prestations dinvalidité en juillet 1998, ce jusquau 23 octobre 2000, pour ensuite recevoir une rente mensuelle dinvalidité accompagnant son insertion dans un programme daide en réadaptation jusquà la fin du mois davril 2001. M me Cantin signale le manque de collaboration de la demanderesse avec la firme de réadaptation Optima Optima ») lorsque laide en réadaptation lui a été offerte : elle a refusé le stage proposé chez son employeur et elle a décidé de faire du bénévolat dans un endroit quelle a gardé secret, empêchant ainsi Optima de lévaluer et deffectuer ses suivis en réadaptation. M me Cantin ajoute que la demanderesse a également refusé laide à
01 14 05 4 la recherche demploi qui lui était offerte, prétextant quelle était malade et dépassée par les événements et sinquiétant particulièrement du versement de ses prestations après la fin avril 2001. M me Cantin réfère spécifiquement à la lettre que la demanderesse a fait parvenir à lentreprise avant la demande daccès, soit le 23 mars 2001 (E-1), lettre par laquelle la demanderesse : reconnaît être inscrite au programme de réadaptation Optima visant un retour à lemploi; indique avoir essayé une réintégration partielle et avoir travaillé comme bénévole depuis le 7 mars 2001, ce, moins de 3 heures par semaine, dans le cadre du programme de réadaptation; constate que sa condition médicale et psychologique ne lui permet pas de travailler sur le marché régulier de lemploi; rappelle quelle ne peut fonctionner dans le bénévolat quen raison de la grande flexibilité de lhoraire et des tâches qui lui sont demandées et souligne que lentreprise sait quun employeur naccepterait pas dembaucher une personne dans des conditions similaires; estime que lévaluation psychiatrique faite en octobre 2000 doit être revue à la lumière de ces faits nouveaux; « annonce donc officiellement » quelle conteste linterruption de ses prestations prenant effet le 26 avril 2001 et quelle demande une nouvelle évaluation psychiatrique, ce, afin quune décision puisse être basée sur sa condition effective à cette date. M me Cantin explique que lentreprise a, le 25 avril 2001, communiqué à la demanderesse son refus de réviser son dossier dinvalidité et dacquiescer à sa demande dune nouvelle expertise psychiatrique, considérant que la demanderesse nétait pas complètement
01 14 05 5 invalide et quelle pouvait retourner progressivement sur le marché du travail. M me Cantin précise cependant que lemployeur de la demanderesse a pour sa part exigé, au début de juillet 2001, que la demanderesse soit examinée par un médecin, ce qui fut fait le 11 juillet 2001 par le D r Lionel Béliveau qui a maintenu que la demanderesse était apte à effectuer un autre emploi. La demande daccès, rappelle M me Cantin, est datée du 26 juillet 2001; à son avis, cette demande daccès résulte des faits qui précèdent et démontre que des procédures judiciaires sont imminentes. M me Cantin explique avoir communiqué avec la demanderesse dans le cadre du traitement de sa demande daccès afin de comprendre ce quelle voulait; elle précise que sa conversation avec la demanderesse lui a confirmé lapplication du 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, précité. M me Cantin explique enfin que le versement de prestations dinvalidité à la demanderesse a cessé à la fin du mois davril 2001 alors quil devait être interrompu le 23 octobre 2000, période durant laquelle la demanderesse nétait pas invalide pour effectuer tout emploi; elle ajoute que lentreprise a accepté de prolonger le versement des prestations à la condition que la demanderesse accepte quun programme de réintégration visant le retour progressif au travail lui soit appliqué, programme suggéré à lentreprise par le psychiatre Poirier et approuvé par le psychiatre traitant de la demanderesse (D r Tirol). La demanderesse indique pour sa part quelle veut connaître les renseignements qui la concernent et qui sont détenus par lentreprise, notamment ceux qui expliquent ce quelle aurait pu faire pour éviter la cessation du versement de ses prestations dinvalidité. Elle a, souligne-t-elle, fait son possible.
01 14 05 6 LARGUMENTATION : Lavocate de lentreprise soutient que la preuve démontre que sa cliente a traité le dossier dassurée de la demanderesse, quelle a refusé, en décembre 2000, de prolonger le versement des prestations après avril 2001, que la demanderesse a explicitement donné avis écrit de sa contestation de cette décision le 23 mars 2001 et que lexpert de lemployeur de la demanderesse a, à linstar des médecins qui avaient antérieurement examiné la demanderesse, conclu que celle-ci était toujours apte à revenir au travail pour exercer une autre fonction. Lavocate de lentreprise prétend aussi que la preuve démontre que la demanderesse a fait défaut de collaborer avec la firme Optima à compter du moment lentreprise lui a fait savoir quelle mettrait un terme au versement de ses prestations dinvalidité dès la fin du mois davril 2001. Lavocate prétend enfin que les documents en litige sont constitués déléments de preuve dont lentreprise entend se servir dans le cadre de la contestation explicite manifestée par la demanderesse (E-1) dont le recours judiciaire nest pas prescrit. À son avis, il est manifeste que la divulgation des renseignements en litige risquait vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire imminente au moment du refus dacquiescer à la demande daccès, procédure opposant la demanderesse à lentreprise en ce qui concerne la décision de mettre un terme au versement des prestations dinvalidité 2 . 2 S.S.Q. Vie c. Nadeau, C.Q. 200-02-023728-001, Juge Michael Sheehan, 8 décembre 2000, J.E. 2001-147; Assurance-Vie Desjardins Laurentienne inc .c. Morin-Gauthier, C.Q. 500-02-016602-943, Juge Guy Boissonneault, 23 septembre 1997, J.E. 97-1950; La Personnelle-Vie, Corporation dassurance c.
01 14 05 7 Cour du Québec et al [1997] R.J.Q. 2296 à 2309.
01 14 05 8 DÉCISION : Jai pris connaissance des documents qui demeurent en litige. Il sagit, en un premier temps, de documents décrivant lévaluation de la demanderesse par linfirmière et par des représentants de la firme de réadaptation Optima, évaluations résultant de rencontres ou déchanges avec la demanderesse. Il sagit, en un deuxième temps, de renseignements illustrant les analyses, réflexions et opinions des représentants de lentreprise ou de consultants pour éclairer ou justifier la prise de décisions concernant la demanderesse. La preuve établit clairement que la demanderesse conteste la décision de lentreprise de mettre un terme au versement de ses prestations dinvalidité. Les documents en litige sont essentiellement constitués de renseignements se rapportant à cette décision contestée par la demanderesse avant sa demande daccès; la communication de ces renseignements équivaudrait à la communication dune importante partie de la preuve de lentreprise agissant en défense dans une procédure opposant ses intérêts à ceux de la demanderesse. Somme toute, laccès aux documents en litige permet dévaluer de façon approximative les chances de réussite de lune ou de lautre des parties dans la contestation qui les oppose. La preuve qui ma été présentée me convainc que la divulgation des documents en litige risquerait vraisemblablement davoir un effet sur une procédure judiciaire dans le cadre de laquelle cette décision serait plus formellement contestée par la demanderesse. À mon avis, le refus de lentreprise est fondé en vertu du 2 ième paragraphe de larticle 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
01 14 05 9 PAR CES MOTIFS, la Commission rejette la demande dexamen de mésentente. HÉLÈNE GRENIER Commissaire Québec, le 15 octobre 2002 M e Louise Prévost Penny J. Westman & Associés Avocate de lentreprise
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