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01 14 04 ADRAOUI, ABDEL, « le demandeur », c. MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DES COMMUNICATIONS, l « organisme ». Le 18 août 2001, le demandeur sadresse au responsable de laccès de lorganisme (le Responsable) afin dobtenir copie ce qui suit : Ma copie dexamen du concours réservé pour le personnel occasionnel; Ma vraie note que Mme Caroline Brodeur, ma gestionnaire, a attribué[e] à mon dossier professionnel avant que cette note ne soit changée et approuvée par la commission ministérielle; Les critères et les commentaires auxquels Mme Brodeur a justifié sa notation; Le nombre de minorités visibles qui ont participé au concours ainsi que le nombre représentant les minorités visibles au sein du ministère (combien le nombre des minorités qui travaillent au MCC par rapport au nombre total des employés Québécois de souche ?). (Linscription entre crochets est ajoutée). Le 30 août 2001, le Responsable offre au demandeur de consulter sur place la partie extraite de lexamen correspondant aux réponses quil a écrites, mais refuse de lui communiquer copie du reste du concours au motif quil constitue une épreuve au sens de larticle 40 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi) : 40. Un organisme public peut refuser de communiquer une épreuve destinée à l'évaluation comparative des connaissances, des aptitudes ou de l'expérience d'une personne, jusqu'au terme de l'utilisation de cette épreuve. Le Responsable explique ensuite au demandeur que lorganisme ne détient pas les autres renseignements recherchés au dernier point de la demande, sur quelque support que ce soit, et les raisons de labsence de ces documents au sein de lorganisme. Il réfère le demandeur, pour ce qui a trait au nombre de personnes qui, au sein de lorganisme, appartiennent aux minorités visibles et à leur proportion par 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée « Loi sur l'accès » ou « la Loi », article 47.
01 14 04 2 rapport à son total demployés, au Conseil du trésor qui compile ces données aux fins de ladministration de sa politique dégalité à lemploi. Le 7 septembre suivant, le demandeur sadresse à la Commission daccès à linformation (la Commission) afin quelle révise cette décision du responsable en vertu de larticle 135 de la Loi. Une audience se tient aux bureaux de la Commission sis en la ville de Québec, le 29 mai 2002, date à laquelle le délibéré commence. LAUDIENCE Lavocat de lorganisme, M e Jean Émond, appelle dabord, pour témoigner, le Responsable, monsieur Yves Laliberté (M. Laliberté). Ce dernier a traité la demande daccès en cause. Afin de retracer les documents demandés, il contacte la seule autorité pouvant les détenir, savoir la direction soccupant de ladministration du personnel et du travail chez lorganisme. Il obtient de cette direction les documents suivants quil dépose entre les mains de la Commission, sous le sceau de la confidentialité : La copie des résultats du demandeur au concours intitulé : « Concours réservé compétences acquises en emploi examen de type dossier professionnel ». Cette copie comprend les documents suivants répartis sur 12 feuillets : a Les motifs écrits de lappréciation globale, complétée par la supérieure immédiate du demandeur, Madame Carole Brodeur (Mme Brodeur), le 15 février 2001 (1 feuillet); b Les résultats accordés à chacune des quatre questions et compilés par Mme Brodeur le 15 février 2001, la signature des membres du comité ministériel inscrite le 26 février 2001 avec leur commentaire manuscrit et la correction apportée aux résultats, par le comité, apparaissant en marge de ceux inscrits par Mme Brodeur (2 feuillets); c Les consignes du concours (1 feuillet); d Les quatre questions, les quatre réponses manuscrites données par le demandeur et les quatre évaluations manuscrites faites par la supérieure immédiate du demandeur (8 feuillets). Pour ce qui est du deuxième volet de la demande daccès, le Responsable déclare, après plusieurs vérifications faites lors du traitement de la demande et postérieurement à celui-ci, que lorganisme neffectue pas de collecte ni de compilation de données sur la catégorie spécifique des minorités visibles, mais
01 14 04 3 seulement sur les catégories demployés suivants : les femmes, ceux provenant des communautés culturelles en général (dont fait partie la catégorie des minorités visibles) et les handicapés. Le Responsable précise que cette collecte de données donne des résultats peu fiables sur les communautés culturelles en général puisquelle se fait à partir dun questionnaire auquel les nouveaux employés répondent facultativement. Enfin, il déclare que, chaque année, ces données ne sont conservées par lorganisme que jusquà la publication du rapport annuel des activités de lorganisme. Le Responsable a la certitude que lorganisme ne détient aucune statistique spécifique sur les minorités visibles. De même, il est incapable de trouver les données demandées relativement au concours précis auquel a participé le demandeur parce que la question de savoir si les participants faisaient partie dune communauté culturelle ou dune minorité visible nétait tout simplement pas posée ni nétait un critère de sélection pour ce concours. Est appelé à témoigner par lavocat de lorganisme, M. Michel Marcotte (M. Marcotte). M. Marcotte œuvre au sein du Conseil du trésor à titre de conseiller en gestion des ressources humaines et en validation de moyens dévaluation dexamens qui servent à la fonction publique. M. Marcotte déclare que les groupes cible prédéterminés pour la mise en application de la politique dégalité à lemploi dans la fonction publique du Québec sont les suivants : les femmes, les membres des communautés culturelles, les membres des minorités visibles, les handicapés, les anglophones et les autochtones. Au début, le gouvernement avait pour objectif datteindre, pour les membres des communautés culturelles (comprenant les cibles communautés culturelles, minorités visibles, anglophones et autochtones), 9% de leffectif des employés de la fonction publique et de laugmenter peu à peu jusquà 25 %. La déclaration de lemployé est volontaire. Certains des employés visés par cette politique ne répondent pas au questionnaire de sorte que les statistiques qui découlent des compilations ne sont pas lexact reflet de la réalité. Le témoin Marcotte déclare que des données se compilent aussi à loccasion de la tenue de concours le candidat peut, à sa discrétion, compléter la section « accès à légalité dans lemploi » sur le formulaire doffre de services. Encore-là, les données ne sont que partielles puisque les réponses au questionnaire ne sont pas obligatoires. Il précise que dans le « concours réservé » au personnel occasionnel
01 14 04 4 de lorganisme, en cause ici, les candidats nont pas eu à compléter un tel formulaire doffre de services. Lorganisme na donc pu tirer les statistiques demandées. M. Marcotte a participé à lélaboration de lexamen en litige. Il en est un des concepteurs. Il sagissait de recruter des employés occasionnels et de les intégrer comme employés permanents au sein de la fonction publique. Cest donc un concours réservé aux employés occasionnels et le recrutement se fait à linterne chez lorganisme. 12 000 personnes ont été visées par ce concours (10 000 fonctionnaires et professionnels et 2 000 ouvriers). Les évaluations se portent sur les habiletés générales et globales ainsi que sur les compétences acquises en emploi. Ces dernières comptent pour 30% dans lévaluation. Deux examens assez traditionnels sont utilisés pour les habiletés générales. Ils ont été élaborés par des comités. Le témoin a, pour sa part, contribué à lélaboration de lexamen mesurant les compétences acquises en emploi et 10 000 personnes y ont été soumises. Afin de faciliter la compréhension de son témoignage, le témoin Marcotte dépose, sous pli confidentiel, les documents suivants : A. Un exemplaire en blanc des 4 critères choisis pour le concours réservé passé par le demandeur et intitulé « compétences acquises en emploi examen de type dossier professionnel » comprenant les blancs des documents a, b, c et d déposés sous pli confidentiel par M. Laliberté; B. un exemplaire en blanc des 15 critères utilisés pour évaluer les « compétences acquises en emploi examen de type dossier professionnel » comprenant les blancs des documents b, c et, en partie, les blancs du document d déposé sous pli confidentiel par M. Laliberté. M. Marcotte dit que son équipe a développé 15 questions, chacune portant sur un critère différent (voir les 15 critères en A.). Pour le corps demploi « technicien en informatique », il fallait choisir les quatre critères les plus pertinents pour ce type demploi, ce qui a été fait (voir les 4 critères en B.). Lépreuve sert à évaluer les compétences et lexpérience acquise du candidat au moyen de ses réponses aux quatre critères. Leur connaissance et leur habileté ont donc été évaluées. Cette épreuve est susceptible dêtre réutilisée et lest encore aujourdhui (le jour de laudience) puisque les concours réservés ne sont pas encore terminés. Le témoin donne, comme exemple, les concours réservés pour le corps demploi des professionnels de létat et ceux des techniciens agricoles au ministère de
01 14 04 5 lAlimentation, des Pêcheries et de lAgriculture, des professionnels de lInstitut du tourisme du Québec, du Conservatoire dart dramatique du Québec. Le témoin déclare que le Conseil du trésor considère cet examen comme valide et encore utile autant pour ce concours que pour dautres types de concours qui auront lieu dans les prochaines années. Il est davis que celui qui a vu les critères élaborés et les questions dexamen se trouvera incontestablement et indûment avantagé lors de leur réutilisation, situation qui entache les règles dimpartialité et de justice dans loctroi des emplois dans la fonction publique. M. Marcotte est aussi davis que les commentaires des correcteurs sont des jugements sur la valeur dune réponse et viennent souvent révéler les éléments qui auraient faire partie de la réponse. Ces commentaires qualifient donc les manques et, partant, les bonnes réponses. Il est davis que si les questions et les commentaires des correcteurs sont communiqués à qui que ce soit, il faudra mettre un terme à lutilisation de cet examen. Cet examen sera « brûlé », selon lexpression consacrée du milieu. LES ARGUMENTS Lavocat de lorganisme plaide que les critères dapplication apparaissant à larticle 40 de la Loi et développés par la jurisprudence 2 sont satisfaits : en effet, la preuve révèle que lexamen est une épreuve qui sert à évaluer la compétence du candidat et qui est toujours utilisée. De plus, la divulgation de telle épreuve avantagerait indûment celui qui laurait en sa possession et amènerait sa destruction ou sa non-utilisation. Le demandeur plaide quen vertu de larticle 83 de la Loi, il a droit aux documents demandés : 2 Office des ressources humaines c. Matakias, [1990] CAI 281, 285; Barrette et al c. Québec (Conseil du Trésor), CAI Montréal 15 34, 00 15 35 et 00 15 36, le 21 juin 2001, p. 5 et 6; Montreuil c. Québec (Ministère du Conseil exécutif), CAI Montréal, le 23 mai 2001, p. 4.; Lecca c. Québec (Conseil du Trésor), CAI Montréal 00 06 66, le 23 mai 2001, p. 4, (AZ-50098448).
01 14 04 6 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. DÉCISION La preuve présentée et largumentation de lavocat de lorganisme convainquent la Commission que les documents peuvent en grande partie être retenus par lorganisme en vertu de larticle 40 de la Loi. Une partie des documents en litige ne répond pas aux critères de larticle 40. En effet, le document b contenant les résultats du demandeur attribués par sa supérieure immédiate le 12 février 2001 ainsi que les signatures des trois membres du comité ministériel et les nouvelles notes que ce comité attribue, à lexclusion, cependant, des commentaires de ce dernier au bas des premier et deuxième feuillets, est accessible au demandeur. Ces renseignements ne peuvent être qualifiés d’« épreuve » au sens de cet article et de la jurisprudence citée par lorganisme. Les divulguer au demandeur ne causera aucun inconvénient à lorganisme. Pour le reste, la Commission est davis que la réponse du responsable est bien fondée. POUR CES MOTIFS, la Commission ACCUEILLE en partie la demande de révision; et ORDONNE à lorganisme de remettre au demandeur le document b en litige contenant les résultats du demandeur attribués par sa supérieure immédiate le 12 février 2001 ainsi que les signatures des
01 14 04 7 trois membres du comité ministériel et les nouvelles notes que ce comité attribue, à lexclusion, cependant, des commentaires de ce dernier au bas des premier et deuxième feuillets. Québec, le 13 août 2002 DIANE BOISSINOT Commissaire Avocat de lorganisme : M e Jean Émond
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