Dossier : 00 09 62 DÉCISION Le 5 avril 2000, le demandeur adresse au Curateur une demande d’accès « aux documents obtenus ou créés par la Curatelle publique dans le cadre de l’enquête tenue au Centre de réadaptation La Triade. » Il ajoute : « De façon non limitative, ces documents sont : tous les dossiers, bandes audio et vidéo (ou sous tout autre support matériel ayant pu être utilisé), que ces documents aient été produits ou déposés auprès des membres ou mandataires de la Curatelle dans le cadre de cette enquête ». Le 2 mai 2000, la responsable de l’accès du Curateur (la Responsable) lui refuse l’accès à l’ensemble de ces documents en vertu des articles 28 (1 37 et 54 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels Le 8 mai 2000, le demandeur, par son avocat, formule à la Commission d’accès à l’information (la Commission) une demande de révision de cette décision en vertu de l’article 135 de la Loi. Une audience se tient en la ville de Québec les 1 14 août, 5 septembre 1 er , 2, 3, octobre 2001, 24 janvier, 19 mars et 19 avril 2002. Les séances des 6 juillet et 14 août 2001 se tiennent par lien téléphonique à partir des bureaux de la Commission sis en la ville de Québec. 1 L.R.Q., c. A-2.1, ci après appelée la « Loi ».PROULX, GILLES, le « demandeur », c. LE CURATEUR PUBLIC, l’ « organisme » ou le « Curateur », et CENTRE DE RÉADAPTATION EN DÉFICIENCE INTELLECTUELLE DU QUÉBEC, l’ « intervenante » ou le « Centre ». ° , 2 ° , 3 ° , 4 ° ), 32, 1 . er décembre 2000, 4 mai, 6 juillet,
00 09 62 2 Le 5 septembre 2001, la Commission reçoit une demande d’intervention du Centre, autrefois connu sous le nom de « Centre de réadaptation La Triade », établissement dont fait mention la demande d’accès. Au début de la séance du 1 er octobre suivant, après avoir entendu les représentations des parties et de la requérante, la Commission accueille la requête en intervention, notamment parce que personne ne s’y objecte et que l’intérêt de la requérante à intervenir est démontré. La dernière partie de la séance du 1 er octobre 2001 et l’ensemble des séances des 2, 3, 4 octobre 2001 et du 24 janvier 2002 se déroulent ex parte et à huis clos, en l’absence du demandeur et, parfois de l’intervenante, et en l’absence de leur avocat. Les parties et leur avocat consentent à cette façon de procéder selon des modalités qui, après discussion et plaidoirie, sont de nature à favoriser au maximum la connaissance de la preuve et de l’argumentation présentées en leur absence. La Commission veillera à ce que ne soit pas révélé ce qui fait l’objet du litige, c’est-à-dire le contenu des documents en litige, et, à l’occasion, l’identité de certains témoins. La Commission est d’avis que ces modalités ont été respectées. Le délibéré commence donc après la séance du 19 avril 2002. L’AUDIENCE QUESTION PRÉLIMINAIRE Dès le début de l’audience, l’avocat du Curateur formule une opposition préliminaire à la recevabilité de la demande de révision par la Commission. Il prétend que la Commission n’a pas compétence pour décider de l’accessibilité aux documents demandés, celle-ci étant exclusive au Curateur en vertu des articles 2.2 de la Loi et 50, 51 et 52 de la Loi sur le curateur public 2 (la LCP) : 2.2 L'accès aux documents contenus dans un dossier que le curateur public détient sur une personne qu'il représente ou dont il administre les biens, de même que la protection des renseignements personnels contenus dans un tel dossier, sont régis par la Loi sur le curateur public. 2 L.R.Q., c. C-81, ci-après appelée la « LCP ».
00 09 62 3 A l'égard des renseignements personnels contenus dans un tel dossier, la présente loi ne s'applique que pour permettre à la Commission d'exercer la fonction visée au paragraphe 6 o de l'article 123 et les pouvoirs visés au paragraphe 3 o de l'article 127 et à l'article 128.1. 50. Le curateur public doit maintenir un dossier sur chacune des personnes qu'il représente ou dont il administre les biens. 51. Le dossier d'une personne que le curateur public représente ou dont il administre les biens est confidentiel. 52. Nul ne peut prendre connaissance d'un dossier maintenu par le curateur public sur une personne qu'il représente ou dont il administre les biens, en recevoir communication écrite ou verbale ou autrement y avoir accès si ce n'est : 1° le personnel du curateur public dans l'exercice de leurs fonctions; 2° la personne que le curateur public représente ou a représenté et celle dont il administre les biens ou leurs ayants cause ou héritiers; 3° le titulaire de l'autorité parentale de la personne que le curateur public représente, avec l'autorisation de ce dernier; 4° le conjoint, un proche parent, un allié, toute autre personne ayant démontré un intérêt particulier pour le majeur ou la personne qui a reçu une délégation du curateur public, avec l'autorisation de ce dernier; 5° le Protecteur du citoyen. Néanmoins, le curateur public peut attester qu'une personne est mineure ou sous un régime de protection et indiquer le nom du tuteur ou curateur, à la demande d'une personne intéressée. Il demande à la Commission de statuer d’abord sur le moyen préliminaire avant de statuer, en vertu de la Loi, sur le bien-fondé des motifs invoqués par la Responsable dans sa réponse du 2 mai 2000. Étant donné la nature précise des documents visés par le premier alinéa de l’article 2.2 de la Loi, la Commission exige que le Curateur dépose entre ses mains, sous le sceau de la confidentialité, les documents faisant l’objet de la demande d’accès afin qu’elle puisse déterminer, à la lumière de la preuve et de l’argumentation que les
00 09 62 4 parties croiront opportunes de présenter, si ceux-ci satisfont ou non au critère de l’article 2.2 de la Loi. Comme la Commission a l’intention d’examiner chacun de ces documents, elle décide, contrairement à ce que lui demande l’avocat du Curateur, de réserver sa décision sur le moyen préliminaire et d’entendre, en même temps que la preuve et les représentations des parties sur ce moyen préliminaire, celles que les parties voudront faire valoir au soutien ou à l’encontre du bien-fondé des motifs de refus invoqués par la Responsable et découlant de l’application de la Loi. OBJET DE LA QUESTION PRÉLIMINAIRE Compte tenu de l’évolution du dossier et de la preuve, la Commission considère que les documents détenus par le Curateur, faisant l’objet de la demande d’accès et qui sont toujours en litige à la clôture de la preuve et ce, en autant que la question préliminaire est concernée, sont : 1) les documents énumérés à la liste amendée déposée sous la cote O-26 (remplaçant les listes O-16, O-17, O-20, O-21, O-22, O-23 et O-24) et numérotés 1 à 101, à l’exception du document numéro 76 que le demandeur a déclaré ne pas vouloir ; et 2) les documents énumérés à la liste déposée sous la cote O-18A (remplaçant la liste 0-18) et numérotés 1 à 17, à l’exception des documents numéros 10 à 13 qui sont incorporés, entre autres, aux documents 81 et 25 de la liste O-26, et à l’exception du document numéro 6b) (lettre jointe) qu’un témoin (M e de Varennes) a formellement identifié comme ne faisant pas partie des documents de l’enquête en cause. Ces documents sont déposés par le Curateur entre les mains de la Commission, sous pli confidentiel.
00 09 62 5 LA PREUVE DU CURATEUR SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE Témoin M e Jean Nadeau M e Nadeau est avocat et est responsable du traitement de toutes les demandes d’accès chez le Curateur depuis le mois d’août 2000. Il énumère le type de dossiers que détient le Curateur dans l’exercice de ses fonctions : a) les dossiers sur les employés, b) les dossiers sur chacune des personnes qu’il représente ou dont il administre les biens, aux termes de la LCP, c) les dossiers de mandats de surveillance sur les tutelles ou les curatelles privées, sur les mandats d’inaptitudes homologués par la Cour supérieure et d) les dossiers administratifs comme ceux impliquant les relations avec le ministère des Relations avec les citoyens et de l’Immigration, par exemple. Lorsque M e Nadeau reçoit une demande d’accès, il doit d’abord déterminer s’il doit la traiter en vertu de la Loi ou en vertu de la LCP puisque les dispositions applicables régissant l’accès à ces documents ne sont pas les mêmes. Si les documents recherchés font partie du dossier visé par l’article 2.2 de la Loi, il doit obligatoirement exister un dossier confidentiel chez le Curateur en vertu des articles 50 et 51 de la LCP et ce dossier est soumis à un régime d’accessibilité limité aux prescriptions de l’article 52 de cette loi. Le dossier ouvert en vertu de l’article 50 de la LCP contient tous les documents se rapportant au mandat du Curateur concernant cette personne (aspect financier, médical, social etc.). Tout ce qui rentre chez le Curateur au nom de cette personne est classé dans ce dossier et il n’y a pas d’autre dossier sur cette personne chez le Curateur. Le témoin a lu la demande d’accès, qu’il dépose sous la cote O-1, et il est d’avis que celle-ci vise des documents qui concernent quatre personnes représentées par le Curateur et une cinquième qui était, à l’époque, en instance d’ouverture d’un régime de protection et qui est tombée sous ce régime depuis. Les dossiers des personnes que le Curateur représente ou dont il administre les biens sont classés par numéro, d’abord. Le système informatique repère tout aussi facilement le dossier par le nom et la date de naissance du pupille.
00 09 62 6 En contre-interrogatoire, il reconnaît la réponse formulée par la Responsable et déposée sous la cote O-2. Le témoin dit qu’il travaillait avec cette dernière à l’époque. Il déclare ne pas avoir lu tous les documents ni en avoir traité l’accessibilité, à l’époque. Il sait que les documents en litige sont chez les avocats du Curateur à l’heure actuelle, mais il estime qu’éventuellement, ils devront obligatoirement être classés dans les dossiers des personnes représentées affectées par l’enquête visée par la demande d’accès (l’enquête). Il croit que, par exemple, les casettes des témoignages concernant telle personne représentée devra aller dans le dossier de cette personne. Témoin M e Stéphan de Varennes L’avocat du Curateur appelle ensuite, pour témoigner, M e Stéphan de Varennes. M de Varennes est un avocat à l’emploi du Curateur. Il est l’un des enquêteurs dans l’enquête. Il a reçu son mandat du Curateur en vertu des articles 27 et 28 de la LCP tel qu’il appert du mandat annexé au Rapport d’enquête daté du 16 mars 2000, intitulé « Rapport d’enquête sur le Centre de réadaptation La Triade au sujet de signalements concernant des personnes sous régime de protection » et déposé sous la cote O-9. Le mandat apparaît à la page 12 de ce rapport public d’enquête O-9. Le Curateur a signé ce rapport. Le témoin a participé à la cueillette de la preuve, aux interrogatoires et, partiellement, à la rédaction du premier volet du rapport O-9. Le témoin était le détenteur du dossier de l’enquête chez le Curateur. Durant son témoignage ex parte et à huis clos, M e de Varennes explique, dans le détail, comment chacun des documents des liste O-26 et O-18A est venu aux mains des enquêteurs ou a été créé pour les fins de l’enquête, ou considéré comme pertinent par les enquêteurs, ou produit par un témoin de l’enquête ou par une source d’information dans le cadre de l’enquête. C’est ainsi que le document numéro 6b) de la liste 18-A est retiré du litige parce que, selon M e de Varennes, ce document ne fait pas partie de l’enquête. C’est par ce témoignage que certains documents de la liste O-18-A (numéros 10 à 13) sont plutôt incorporés à la liste O-26, entre autres à ses documents numéros 81 et 25. Selon le témoin, sauf le document 6b) de la liste O-18A, tous ces documents ont été obtenus ou créés par la Curatelle publique dans le cadre de l’enquête.
00 09 62 7 Un résumé du témoignage de M e de Varennes rendu ex parte et à huis clos a été rédigé par l’avocat du Curateur, déposé sous la cote O-25 après avoir été approuvé par la Commission, puis remis au demandeur. On peut y lire que le Curateur est intervenu pour enquêter dans ce dossier en raison d’un signalement d’abus physique sur une personne qu’il représentait et qui était sous la garde physique du Centre. Il explique combien les gens représentés par le Curateur sont vulnérables et démunies, ne pouvant même pas s’exprimer verbalement parfois. Il est d’avis que devant un tel signalement, le Curateur a l’obligation légale d’intervenir par une enquête afin de découvrir les faits, de porter plainte au criminel contre les responsables de ces abus, s’il y a lieu, ou de les poursuivre au civil, le cas échéant. Au cours de cette même partie de son témoignage, M e de Varennes affirme que tous les documents d’enquête font partie du dossier des personnes que le Curateur représente et qu’il voulait protéger par son enquête et seront versés globalement, que ce soit physiquement ou juridiquement au moyen d’une référence, à chacun des dossiers de ces personnes touchées par cette enquête. LA PREUVE DU CENTRE SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE Les deux témoins du Centre ont témoigné ex parte et à huis clos. Leur identité n’a pas été dévoilée. Le contenu de leur témoignage a cependant été résumé puis déposé par le Centre sous la cote I-4. Il ressort de ces témoignages que la très grande majorité des documents des listes O-26 et O-18A a été fournie aux enquêteurs du Curateur, dans le cadre de l’enquête et en raison de cette enquête, par le Centre et ses employés, par des personnes sous contrat avec le Centre ou par des employés de ces contractants. LA PREUVE DU DEMANDEUR SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE L’avocat du demandeur n’a pas présenté de preuve sur le sujet, si ce n’est cette affirmation du demandeur que l’enquêteur principal du Curateur lui a promis, juste après son interrogatoire, et devant les autres personnes présentes à son interrogatoire, qu’il lui remettrait toutes les cassettes reproduisant tous les interrogatoires de l’enquête.
00 09 62 8 CONTRE PREUVE DU CURATEUR SUR LA QUESTION PRÉLIMINAIRE L’avocat du Curateur rappelle M e de Varennes pour l’interroger au sujet de cette affirmation du demandeur. M e de Varennes était présent lors de l’interrogatoire du demandeur durant l’enquête. Il affirme ne jamais avoir entendu l’enquêteur principal avoir fait cette promesse au demandeur. Cette promesse n’étant pas banale, s’il l’avait entendu de la bouche de l’enquêteur principal, il s’en souviendrait et aurait sûrement réagit sur-le-champ, pour s’y opposer. PLAIDOIRIES Le Curateur L’avocat du Curateur fait valoir les obligations de ce dernier concernant les personnes qu’il représente. Elles découlent des articles 256, 260 et 261 du Code civil du Québec 3 et de l’article 6 de la LCP et ses articles 50 et 51 précités : 256. Les régimes de protection du majeur sont établis dans son intérêt; ils sont destinés à assurer la protection de sa personne, l'administration de son patrimoine et, en général, l'exercice de ses droits civils. L'incapacité qui en résulte est établie en sa faveur seulement. 260. Le curateur ou le tuteur au majeur protégé a la responsabilité de sa garde et de son entretien; il a également celle d'assurer le bien-être moral et matériel du majeur, en tenant compte de la condition de celui-ci, de ses besoins et de ses facultés, et des autres circonstances dans lesquelles il se trouve. Il peut déléguer l'exercice de la garde et de l'entretien du majeur protégé, mais, dans la mesure du possible, il doit, de même que le délégué, maintenir une relation personnelle avec le majeur, obtenir son avis, le cas échéant, et le tenir informé des décisions prises à son sujet. 261. Le curateur public n'exerce la curatelle ou la tutelle au majeur protégé, que s'il est nommé par le tribunal pour exercer la charge; il peut aussi agir d'office si le majeur n'est plus pourvu d'un curateur ou d'un tuteur. 3 L.Q., 1991, c. 64, ci après appelé la « Code civil ».
00 09 62 9 6. Le curateur public doit, avant de commencer à exercer ses fonctions, prêter le serment qui suit : «Je (...) déclare sous serment que je remplirai fidèlement et honnêtement au meilleur de ma capacité et de mes connaissances, tous les devoirs de curateur public et que j'en exercerai de même tous les pouvoirs. Je déclare sous serment de plus que je ne révélerai et ne ferai connaître, sans y être dûment autorisé, quoi que ce soit dont j'aurai eu connaissance dans l'exercice de ma charge». Le curateur public exécute cette obligation devant le juge en chef de la Cour du Québec et l'écrit constatant le serment est transmis au ministre de la Justice. Il rappelle que le Curateur a le devoir d’agir en lieu et place de la personne qu’il représente ou sa famille afin de faire valoir les droits que confèrent à cette personne les articles 1, 4, 5, 6 et 48 de la Charte des droits et libertés de la personne 4 dont la portée a été circonscrite par les dispositions du Code civil relatives aux droits de la personnalité à ses articles 10 à 49 : 1. Tout être humain a droit à la vie, ainsi qu'à la sûreté, à l'intégrité et à la liberté de sa personne. Il possède également la personnalité juridique. 4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation. 5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée. 6. Toute personne a droit à la jouissance paisible et à la libre disposition de ses biens, sauf dans la mesure prévue par la loi. 48. Toute personne âgée ou toute personne handicapée a droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation. Telle personne a aussi droit à la protection et à la sécurité que doivent lui apporter sa famille ou les personnes qui en tiennent lieu. 4 L.R.Q., c. C-12, ci-après appelée la « Charte ».
00 09 62 10 À cette fin, le Curateur jouit d’un pouvoir d’enquête en vertu des articles 27 et 28 de la LCP : 27. Le curateur public peut, de sa propre initiative ou sur demande, faire enquête relativement aux personnes qu'il représente, aux biens qu'il administre ou qui devraient être confiés à son administration et, généralement, à tout mineur ou à toute personne sous régime de protection; il peut, de même, faire enquête relativement à toute personne inapte dont un mandataire prend soin ou administre les biens. Le curateur public et toute personne qu'il autorise spécialement à enquêter sont, pour les fins de l'enquête, investis des pouvoirs et de l'immunité des commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête (chapitre C-37), sauf du pouvoir d'ordonner l'emprisonnement. 28. Malgré l'article 19 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux (chapitre S-4.2) ou malgré l'article 7 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris ( chapitre S-5 ), le curateur public ou une personne qu'il autorise peut pénétrer à toute heure raisonnable, ou en tout temps dans les cas d'urgence, dans une installation maintenue par un établissement visé, selon le cas, par l'une ou l'autre de ces lois afin de consulter sur place le dossier pertinent d'une personne inapte ou protégée et en tirer des copies. Sur demande, l'établissement doit transmettre au curateur public une copie de ce dossier. Il rappelle les termes du mandat (O-9, page 12) en vertu duquel les enquêteurs pouvaient agir et souligne que les questions soulevées dans le rapport O-9 sont le résultat de l’enquête et visent avant tout le bien-être des personnes que le Curateur représente. Pour l’avocat du Curateur, puisque la preuve établit que tout document qui concerne la personne représentée est versé dans le dossier unique de cette personne, dossier que le Curateur doit détenir, il est évident que toutes les actions entreprises par le Curateur dans le but de remplir ses obligations envers cette personne et tous les documents constatant ces actions sont versés à ce dossier unique. Le Centre L’avocat du Centre endosse l’argumentation du Curateur.
00 09 62 11 Le demandeur L’avocat du demandeur prie la Commission d’être vigilante dans l’examen qu’elle fera des documents qui demeurent en litige au regard de la preuve entendue et de bien vérifier s’ils sont spécifiquement consignés aux dossiers du Curateur sur chacune des personnes qu’il représente ou s’ils ne sont que des documents confectionnés par ce dernier pour des fins administratives. Selon la décision de la Commission dans l’affaire non rapportée Greenbaum, Ura c. Le curateur public du Québec 5 , l’accessibilité des premiers est régie par la LCP tandis que celles des seconds doit s’apprécier en vertu de la Loi. MOTIFS DE REFUS BASÉS SUR L’APPLICATION DE LA LOI Le Curateur et le Centre ont présenté une abondante preuve au soutien du bien-fondé de ces motifs de refus. Une argumentation serrée des trois parties a suivi cette preuve. Considérant la conclusion de la Commission ci-après exprimée sur la question préliminaire, il est inutile de rapporter ici toute cette preuve et les arguments y afférant. 5 CAI 99 07 79 Montréal, le 22 mars 2001, M e Michel Laporte, commissaire.
00 09 62 12 DÉCISION INTERDIT DE PUBLICATION, DE DIVULGATION ET DE DIFFUSION Il convient tout d’abord de rappeler que certains documents déposés en preuve ont été frappés par la Commission, lors de leur dépôt durant l’audience, d’un interdit de publication, de divulgation et de diffusion. Il s’agit du document O-22 quant aux renseignements concernant l’identité des personnes physiques qui s’y trouvent nommés ou dont on parle. Il s’agit également du contenu des deux documents résumant la preuve entendue ex parte et à huis clos et déposés sous les cotes O-25 et I-4. QUESTION PRÉLIMINAIRE : LA COMPÉTENCE DE LA COMMISSION La Commission se rend aux arguments de l’avocat du Curateur concernant le devoir de ce dernier de veiller à ce que les droits fondamentaux des personnes qu’il représente ne soient menacés ou atteints, de prendre les moyens à sa disposition pour rétablir le respect de ces droits, le cas échéant, et généralement d’assurer leur bien-être. La preuve démontre que le Curateur avait de bonnes raisons de croire qu’une ou plusieurs de ces personnes risquaient de voir ces droits atteints. Il a donc mis en marche le processus d’enquête prévu aux articles 27 et 28 de la LCP aux fins d’exécuter les devoirs afférant à sa charge et mandaté quatre enquêteurs pour aller sur les lieux visés par le signalement d’abus, cueillir les faits relatifs aux abus dénoncés et faire rapport. La preuve établit qu’à partir des faits découverts, une plainte a été déposée par un des enquêteurs aux services de police concernés et que des accusations criminelles ont été portées par la suite. Il y a eu acquittement de ces accusations. Les témoignages entendus et le contenu du rapport O-9 ont cependant démontré que l’enquête a provoqué un sérieux examen de conscience chez les dirigeants du Centre et a permis d’améliorer la situation des personnes que le Curateur représente dans ce milieu. La preuve testimoniale, en particulier celle livrée ex parte et à huis clos par M e de Varennes, démontre que chacun les documents restant en litige et plus haut décrits
00 09 62 13 au chapitre titré « OBJET DE LA QUESTION PRÉLIMINAIRE » répond à un ou plusieurs des caractéristiques suivantes : • il concerne une personne représentée par le Curateur et touchée par l’enquête ; • il est produit par un témoin à l’occasion de l’enquête ; • il est créé par un enquêteur au cours de l’enquête ou après l’enquête, pour les fins de l’enquête ; • il est considéré pertinent aux fins de l’enquête par un enquêteur ; • il provient d’une personne qui n’a pas été interrogée mais qui voulait tenir les enquêteurs informés de certains faits ; • il fait partie de la correspondance échangée pour les fins de l’enquête ; • il est produit par le Centre dans le cadre de l’enquête. Les deux témoins du Centre ont affirmé, également ex parte et à huis clos, que la plupart de ces documents ont été fournis aux enquêteurs du Curateur, dans le cadre de l’enquête et en raison de cette enquête, par le Centre et ses employés, par des personnes sous contrat avec le Centre ou par des employés de ces contractants. La preuve démontre que le dossier tenu par le Curateur sur chacune des personnes qu’il représente est unique et contient tous les renseignements personnels, sociaux, médicaux, légaux et autres concernant ces personnes. La Commission est d’avis que les documents constatant les actions de surveillance, de protection et de prévention du Curateur à l’égard de ces personnes font partie du dossier qu’il doit tenir sur chacune d’elles. La Commission est convaincue que l’action d’enquêter sur les conditions de vie des personnes qu’il représente et qui sont sous la garde du Centre sont des actions qui doivent se retrouver au dossier de ces personnes. Les témoignages de M e de Varennes et de M e Nadeau établissent que les documents en litige appartiennent au dossier de ces personnes et qu’ils seront éventuellement, lorsque les avocats du Curateur en auront terminé, versés
00 09 62 14 physiquement ou, du moins juridiquement, comme l’a souligné M e de Varennes, par une référence précise, dans le dossier de chacune de ces personnes. La preuve et l’examen des documents faisant l’objet de cette question préliminaire convainquent la Commission que ces derniers sont visés par l’article 2.2 de la Loi et que le moyen préliminaire de l’avocat du Curateur est bien-fondé. POUR CES MOTIFS, la Commission FRAPPE d’un interdit de publication, de divulgation et de diffusion les renseignements du document O-22 concernant l’identité des personnes physiques qui y sont nommés ou dont on parle et le contenu des documents déposés sous les cotes O-25 et I-4 ; ACCUEILLE la requête en irrecevabilité du Curateur ; DÉCLARE que la Commission n’a pas compétence pour statuer sur l’accessibilité des documents en litige ; DÉCLARE que l'accès aux documents en litige de même que la protection des renseignements personnels qui s’y trouvent sont régis par la Loi sur le curateur public (L.R.Q., c. C-81) ; REJETTE la demande de révision. Québec, le 12 août 2002 DIANE BOISSINOT commissaire Avocat du demandeur : M e Alain Vachon Avocat du Curateur : M e Bernard Jacob M e Jacinthe Pelletier Avocat du Centre : M e Pierre A. Gagnon
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.