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DOSSIERS N os 01 06 45 SYNDICAT CANADIEN DE LA 01 07 89 FONCTION PUBLIQUE, SECTION 01 07 90 LOCALE 2869, 01 09 47

demandeur, c. CENTRE D'ACCUEIL LASALLE, organisme public, -et-LES CONSULTANTS MARCEL ASSELIN,

__________________________________________________________________ DÉCISION PRÉLIMINAIRE __________________________________________________________________

L'OBJET DU LITIGE DOSSIER N o 01 06 45 Les 8 et 21 mars 2001, M. Gilles Duchaussoy, président du Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 2869 (le « Syndicat »), s'adresse au Centre d'accueil LaSalle (le « Centre d’accueil ») pour obtenir les honoraires versés aux procureurs et consultants embauchés dans le cadre de dossiers de relations de travail pour la période du mois d’avril 1998 à celui de mars 2000.

Les 12 et 21 mars 2001, le Centre d'accueil accuse réception de la demande et requiert un délai supplémentaire de 10 jours pour pouvoir la traiter. Le 5 avril suivant, il achemine au Syndicat « une compilation des renseignements

-et-MÉDISYS, tierces parties.

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demandés ». Il invoque les articles 21, 22 et 24 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi ») et l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 2 (la « Charte ») pour lui refuser l'accès à « tout autre renseignement relié aux comptes d'honoraires. »

Le Centre d’accueil ajoute « que si vous décidez de vous adresser à la Commission d'accès à l'information pour faire réviser cette décision, nous contesterons le droit de ce tribunal de se saisir du litige. » Cette dernière décision fait l'objet d'une demande de révision de la part du Syndicat le 10 avril suivant.

Le 17 septembre 2001, le procureur du Centre d’accueil signale que les parties ont plusieurs dossiers devant la Commission d'accès à l'information (la « Commission »), soit les n os 01 07 89, 01 07 90 et 01 09 47, et suggère que l'audience prévue le 25 octobre 2001 serve de conférence préparatoire quant à la pertinence de les regrouper avec le présent dossier. Le procureur du Syndicat manifeste, le 24 octobre 2001, son accord pour regrouper les dossiers.

DOSSIER N o 01 07 89 Les 27 mars et 3 avril 2001, M. Gilles Duchaussoy, président du Syndicat, veut obtenir du Centre d’accueil l'information suivante :

Notre organisme serait intéressé de connaître les honoraires et les frais médicaux des différents médecins.

À qui l'ont à confiés les dossiers relevant du service des ressources humaines, incluant le bureau de santé.

Et touchant les relations de travail plus particulièrement les dossiers d'accident du travail, d'assurance-salaire.

Pour la période financière d'Avril 1999 à Mars 2001. 1 L.R.Q., c. A-2.1. 2 L.R.Q., c. C-12.

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Le 5 avril 2001, le Centre d’accueil requiert un délai supplémentaire de 10 jours pour traiter la demande et, le 23 avril suivant, expédie au Syndicat « une compilation des renseignements demandés ». Il invoque toutefois les articles 21, 22, et 24 de la Loi et l’article 9 de la Charte pour lui refuser tout autre renseignement.

Le 2 mai 2001, une demande de révision de cette décision du Centre d’accueil est soumise par le Syndicat.

DOSSIER N o 01 07 90 Le 3 avril 2001, M. Gilles Duchaussoy, président du Syndicat, écrit en ces termes au Centre d’accueil :

Notre organisme serait intéressé de connaître les honoraires, les frais juridiques des différents avocats, firmes, procureurs et ou consultants.

À qui l'ont à confiés les dossiers relevant du service des ressources humaines, incluant le bureau de santé.

Et touchant les relations de travail plus particulièrement les dossiers d'arbitrages, d'accident du travail, de médiation, d'assurance-salaire et d'accès à l'information.

[…] les dossiers de négociation locale, de comité de relation de travail, de négociation de griefs.

Pour la période financière d'Avril 2000 à Mars 2001.

Le 30 avril 2001, le Centre d’accueil remet au Syndicat « une compilation des renseignements demandés ». Il invoque les articles 21, 22, et 24 de la Loi pour lui donner tout autre renseignement.

Le 2 mai 2001, une demande de révision de cette décision du Centre d’accueil est soumise par le Syndicat.

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DOSSIER N o 01 09 47 Le 8 mai 2001, M. Gilles Duchaussoy, président du Syndicat, s'adresse au Centre d’accueil pour obtenir :

[…] les noms, addresses, numéro de télécopieurs et des numéros de téléphones des firmes d'avocats, incluant les avocats au dossier, ainsi que la ou les firmes de consultants et le nom de leur représentants au dossier des ressources humaines, pour les relations de travail, la négociation locale, les dossiers de griefs et de médiation pré-arbitrale pour les années suivantes: d'avril 97 à mars 98, d'avril 98 à mars 99, d'avril 99 à mars 00, d'avril 00 à mars 01, et cela en nous spécifiant les années qu'ils ont […] l'établissement. (sic)

[…] le montant alloué à votre établissement en budget annuel pour les années suivantes soit: 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001 […]

[…] le pourcentage et/ou le montant alloué au service des ressources humaines, incluant les service du bureau de santé. (sic)

Le 14 mai 2001, le Centre d’accueil prétend qu'il ne détient aucun document permettant de lui remettre les informations demandées.

M. Duchaussoy écrit de nouveau au Centre d’accueil pour obtenir : le 15 mai 2001 : […] les montants versé aux arbitres de griefs pour les années financières d'avril à mars suivantes soit: 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001.

De plus, nous voulons connaître les montants versé pour l'arbitre médiateur Me Pierre Laporte et son assesseur patronal Me Michel Desrosiers pour les griefs de l'accréditation syndicale SCFP 2869.

le 17 mai 2001 : Notre organisme croit savoir qu'il existe différent genre de documents traitants sur le budget annuel des années 1997 à 2001, apparaissant sous plusieurs forme tel que la

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correspondance du ministère de la santé, de la régie régionale, du rapport financier annuel […]

De plus notre seconde demande vise d'avoir les noms des firmes d'avocats et des consultants pour les ressources humaines, une simple carte d'affaire avec les coordonnées nous suffiraits […] (sic)

le 22 mai 2001 : Pour les périodes financières d'avril à mars des années suivantes soit 1996, 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001. Pourriez-vous nous indiquer combien annuellement il se défrais de contrats à la sous-traitance ou à toutes autres appellations du même genre, ainsi que le pourcentage que cela représente par rapport au budget annuel de l'établissement.

[…] […] combien de personnes salariées équivalents à temps complet cela représente-t-il pour les années financières citées ci-haut.

[…] Quel est votre paiement à la commission des accidentés du travail communément l'employeur?

[…] votre taux d'accident de travail avec et sans perte de temps de travail? Veuillez identifier par catégories avec perte et sans perte de salaire si possible.

le 29 mai 2001 : […] le nombre d'entrevue et d'embauche? […] les frais inhérents pour l'embauche d'une personne en spécifiant si possible, le cheminement pour notre accréditation syndicale. […]

Le 30 mai 2001, le Centre d’accueil invoque l'article 126 de la Loi pour que soient déclarées abusives les demandes des 8, 15, 22 et 29 mai 2001 et être autorisé à ne pas en tenir compte.

appelé quote part de

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Une audience se tient à Montréal le 18 janvier 2002. Les 22 et 30 janvier suivants, les procureurs font parvenir à la Commission une argumentation supplémentaire.

LES MOYENS PRÉLIMINAIRES M e François Charette, procureur du Centre d’accueil, soumet deux moyens préliminaires. Le premier porte sur l’existence d’un conflit d’intérêts et le second sur le caractère nul du droit de révision du Syndicat présenté par son président et fondé sur la Loi sur le Barreau 3 . LES ADMISSIONS Le Centre d’accueil a contesté devant la Cour du Québec une décision préliminaire rendue le 1 er avril 1999 par la Commission dans les dossiers n os 97 19 13 et 97 19 14, impliquant les mêmes parties (pièce O-1 en liasse) (les « dossiers de 1997 »). Il est admis par M e Charette et M e Michael Cohen, procureur du Syndicat, que la Cour du Québec a tenu une audience sur le fond le 26 septembre 2001 et qu’ils sont dans l’attente d’une décision de celle-ci (pièces O-2 à O-4).

M es Charette et Cohen admettent également que le président du Syndicat, M. Duchaussoy, n’est pas avocat. Il est convenu que la Commission rende décision sur les moyens préliminaires avant de poursuivre l’audience sur le fond.

Mise en situation du Centre d’accueil M me Julie Tremblay, agente de gestion financière, relate avoir traité, fait 3 L.R.Q., c. B-1.

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les recherches et analysé les documents reliés aux neuf demandes d’accès soumises par le Syndicat. Les demandes visaient tous des honoraires professionnels. À l’aide des factures et des relevés de la facturation, elle a réalisé une compilation des données et produit un tableau avec celles-ci. Elle confirme l’existence de comptes d’honoraires à la firme Lavery, de Billy pour les dossiers de 1997 ainsi que pour le règlement de griefs.

Le procureur du Centre d’accueil fait valoir que le Syndicat a déposé, aux mois de mars et juin 1996, une série de griefs pour obtenir les contrats de la main-d’œuvre indépendante ou de sous-contractants (pièce O-1, onglet 9). Les griefs, note-t-il, portent sur le non-respect à la communication de ces renseignements prévus à la convention collective. La Commission a été saisie, le 28 octobre 1997, de deux demandes du Syndicat pour obtenir les documents déjà requis par les griefs (pièce O-1, onglets 1 et 2). Le Centre d’accueil a refusé au Syndicat de lui communiquer les documents et l’a avisé que la juridiction appropriée est celle de l’arbitre de grief et non la Commission (pièce O-1, onglets 4 et 8). C’est cette position du Centre d’accueil qui a fait l’objet d’une décision préliminaire de la Commission celle-ci a conclu qu’elle avait juridiction (pièce O-1, onglet 10). Le Centre d’accueil a contesté cette décision à la Cour du Québec (pièce O-1, onglet 1 et pièce O-2), qui a pris la cause en délibéré le 26 septembre 2001 (pièce O-4). En Cour du Québec, la Commission, mise en cause, a produit une comparution (pièce O-3). M e Gaston Fréchette représentait la Commission et la commissaire Grenier.

CONFLIT D’INTÉRÊTS Le Centre d’accueil M e Charette prétend que le dossier à la Cour du Québec est toujours actif

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et oppose son client au Syndicat et à la Commission. Il avance que, dans les circonstances, la Commission, adversaire du Centre d’accueil et alliée du Syndicat en Cour du Québec, ne peut aujourd’hui, avec les mêmes parties, « redevenir neutre » et disposer des arguments du Syndicat.

M e Charette soumet que le Centre d’accueil a droit à une audience justice doit être rendue en toute apparence d’impartialité 4 , selon les articles 23 et 56 de la Charte :

23. Toute personne a droit, en pleine égalité, à une audition publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé, qu'il s'agisse de la détermination de ses droits et obligations ou du bien-fondé de toute accusation portée contre elle.

Le tribunal peut toutefois ordonner le huis clos dans l'intérêt de la morale ou de l'ordre public.

56. 1. Dans les articles 9, 23, 30, 31, 34 et 38, dans le chapitre III de la partie II ainsi que dans la partie IV, le mot «tribunal» inclut un coroner, un commissaire-enquêteur sur les incendies, une commission d'enquête et une personne ou un organisme exerçant des fonctions quasi judiciaires.

2. Dans l'article 19, les mots «traitement» et «salaire» incluent les compensations ou avantages à valeur pécuniaire e rapportant à l'emploi.

3. Dans la Charte, le mot «loi» inclut un règlement, un décret, une ordonnance ou un arrêté en conseil pris sous l'autorité d'une loi.

M e Charette s'interroge quant à savoir si nous sommes dans une situation objective que son client soit préjugé ou qu’une personne raisonnable a lieu de craindre à un préjugé. Il croit que les préjugés sont réels ou appréhendés et qu’il peut y avoir en la présente apparence de partialité 5 . Il soumet que le test à appliquer est celui de la personne raisonnable 6 , soit la perception de l’homme 4 Denis LEMIEUX, Le contrôle judiciaire de l’action gouvernementale, Publications CCH/FM ltée. 5 Patrice GARANT, Droit administratif, vol. 2, 4 e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1996. Brouillard dit Chatel c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 39. 6 Committee for Justice and Liberty c. Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369.

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instruit raisonnable 7 . Il prétend que, dans le cas nous concernant, une personne raisonnable va dire que la Commission et le Syndicat sont ensemble.

M e Charette concède que les organismes peuvent faire valoir leur droit à la Cour du Québec sur une question de compétence, mais que, dans le cas particulier qui nous occupe, la Commission est l’alliée du Syndicat et que la cause est encore pendante devant les tribunaux supérieurs. Le fait que la Commission se trouve aujourd’hui dans la position du décideur rend celle-ci inhabile.

M e Charette soumet un deuxième cas de conflit : certaines demandes actuelles font l’objet de l’intervention à la Cour du Québec. Il précise que le sujet du litige consiste à obtenir les comptes des honoraires de sa firme d’avocats liés à la cause des dossiers de 1997. La Commission recevra alors confidentiellement les comptes d’honoraires pour lesquels un conflit subsiste en Cour du Québec et en prendra connaissance. Cette situation, hors du contrôle du soussigné, entraîne une appréhension de conflit d'intérêts. Le seul remède pour l’instant, soumet-il, est de suspendre le dossier jusqu’à ce que la Cour du Québec se prononce. Lorsque celle-ci le fera, la Commission ne se trouvera plus partie au litige. Pour l’instant, il soumet que la Commission est en situation de partialité et que le commissaire n’a pas d’autre choix que de se récuser.

Le Syndicat M e Cohen soumet qu’un tribunal administratif a le droit d’intervenir devant la Cour du Québec lors d’un appel relatif à sa compétence 8 . Comme la question débattue à la Cour du Québec portait sur la compétence de la Commission, celle-ci est intervenue sur cette question, et non sur le bien-fondé de la demande 7 Comeau c. Société Radio-Canada, C.A. Montréal, n o 500-10-001293-982, 30 juin 1998, jj. Michaud, Otis et Biron. 8 Paccar of Canada Ltd. c. Association canadienne des travailleurs des industries mécaniques et

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d’accès. Dans l’affaire Paccar of Canada Ltd. c. Association canadienne des travailleurs des industries mécaniques 9 , la Cour suprême du Canada a autorisé un organisme à intervenir et à évaluer que le tribunal administratif n’est pas une partie au litige lorsqu’il argumente sur sa juridiction. Cette décision est donc venue protéger le droit d’intervention, mais pas au point, sur le fond, d’entacher sa partialité.

M e Cohen argue que l’actuelle demande d’accès diffère de celle soumise dans les dossiers de 1997 par le Syndicat. En 1997, celui-ci a demandé des contrats et la commissaire Grenier a statué sur sa compétence en spécifiant que la demande visait des renseignements « plus larges » que ceux prévus à la convention collective. C’est un non-sens, plaide-t-il, de prétendre à une apparence de conflit d’intérêts. L’intervention de la Commission sur des questions relevant de sa compétence en Cour du Québec ne veut pas dire que le Syndicat a raison.

M e Cohen prétend que les décisions rendues dans les affaires Brouillard dit Chatel c. La Reine 10 et Comeau c. Société Radio-Canada 11 citées par le Centre d’accueil relèvent du droit criminel et peuvent difficilement être applicables en la présente. Il fait remarquer que les comptes d’honoraires d’avocats réclamés par le Syndicat ne font pas l’objet du litige dans les dossiers de 1997.

M e Cohen fait valoir que si l’on donne raison au Centre d’accueil, les droits du Syndicat seraient bafoués pendant plusieurs années, si l’on considère l’éventualité de recours jusqu’en Cour suprême. Il ne s’agit pas, selon lui, d’une objection légitime de la part du Centre d’accueil.

assimilés, section locale 14, [1989] 2 R.C.S. 983. 9 Id.

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Le caractère nul du droit de révision du Syndicat basé sur la Loi sur le Barreau

Le Centre d’accueil M e Charette soumet que M. Duchaussoy, un individu, ne peut déposer une demande de révision à la Commission au nom d’une entreprise, le Syndicat, selon les termes des articles 128 et 129 de la Loi sur le Barreau :

128. 1. Sont du ressort exclusif de l'avocat en exercice ou du conseiller en loi les actes suivants exécutés pour le compte d'autrui: a) donner des consultations et avis d'ordre juridique; b) préparer et rédiger un avis, une requête, une procédure et tout autre document de même nature destiné à servir dans une affaire devant les tribunaux; c) préparer et rédiger une convention, une requête, un règlement, une résolution et tout autre document de même nature se rapportant à la constitution, l'organisation, la réorganisation ou la liquidation d'une personne morale régie par les lois fédérales ou provinciales concernant les compagnies, ou à l'amalgamation de plusieurs personnes morales ou à l'abandon d'une charte.

2. Sont du ressort exclusif de l'avocat et non du conseiller en loi les actes suivants exécutés pour le compte d'autrui: a) plaider ou agir devant tout tribunal, sauf devant: un conciliateur ou un arbitre de différend ou de grief, au sens du Code du travail (chapitre C-27); un agent d'accréditation, un commissaire du travail ou le Tribunal du travail siégeant autrement qu'en matière pénale, au sens du Code du travail; la Commission de la santé et de la sécurité du travail instituée par la Loi sur la santé et la sécurité du travail (chapitre S-2.1), un bureau de révision constitué en vertu de cette loi ou de la Loi sur les accidents du travail (chapitre A-3), la section des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec, institué en vertu de la Loi sur la justice administrative (chapitre J-3), s'il s'agit d'un recours portant sur l'indemnisation des sauveteurs et des victimes d'actes criminels, d'un recours formé en vertu de l'article 65 de la Loi sur les accidents du travail (chapitre A-3) ou d'un recours formé en vertu de l'article 12 de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières (chapitre I-7), la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles instituée par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (chapitre A-3.001) ou la Commission des lésions professionnelles instituée en vertu de cette loi;

10 Précitée, note 5. 11 Précitée, note 7.

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4° la Régie du logement instituée en vertu de la Loi sur la Régie du logement (chapitre R-8.1); la section des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec, dans la mesure il s'agit pour le ministre de l'Emploi et de la Solidarité, ou pour un organisme qui est son délégataire dans l'application de la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale (chapitre S-32.001), de se faire représenter pour plaider ou agir en son nom; un arbitre, un conciliateur, un conseil d'arbitrage, le commissaire de l'industrie de la construction, un commissaire adjoint de l'industrie de la construction, un enquêteur ou le Tribunal du travail, au sens de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction (chapitre R-20); en matière d'immigration, la section des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec, dans le cas et aux conditions prévus au troisième alinéa de l'article 102 de la Loi sur la justice administrative; b) préparer et rédiger un testament, un codicille ou une quittance et tout contrat ou document, sauf les baux, affectant des immeubles et requérant l'inscription ou la radiation d'une inscription au Québec; c) préparer, rédiger et produire la déclaration de la valeur d'une succession, requise par les lois fiscales; le présent sous-paragraphe c ne s'applique pas aux personnes morales autorisées par la loi à remplir les fonctions de liquidateur de succession ou de fiduciaire; d) préparer et rédiger un document ou une procédure pour l'enregistrement prescrit par la loi, d'une personne ou d'une société exploitant un commerce ou exerçant une industrie; e) faire de la perception ou réclamer avec frais ou suggérer que des procédures judiciaires seront intentées. Si l'identité du défunt est inconnue, le constat contient son signalement et décrit les circonstances de la découverte du corps.

129. Aucune des dispositions de l'article 128 ne limite ou restreint: a) le droit de l'avocat d'accomplir tout autre acte non expressément interdit par la présente loi et les règlements du Barreau; b) les droits spécifiquement définis et donnés à toute personne par toute loi d'ordre public ou privé; c) le droit des organismes publics ou privés de se faire représenter par leurs dirigeants, sauf aux fins de plaidoirie, devant tout organisme exerçant une fonction quasi judiciaire; d) le droit des secrétaires ou secrétaires adjoints des personnes morales de droit public ou de droit privé de rédiger les procès-verbaux des assemblées d'administrateurs ou d'actionnaires et tous autres documents qu'ils sont autorisés à rédiger par les lois fédérales ou provinciales; e) le droit du notaire en exercice de poser les actes qui y sont énumérés à l'exception de ceux qui sont prévus au sous-paragraphe b du paragraphe 1 lorsqu'il ne s'agit

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pas de matières non contentieuses, et aux sous-paragraphes a et e du paragraphe 2; toutefois le notaire en exercice peut suggérer que des procédures judiciaires seront intentées.

Il prétend que le sous paragraphe b) du paragraphe 1 de l’article 128 de la Loi sur le Barreau vise la préparation et la rédaction de procédures devant un tribunal. Il n’existe pas de différence entre la production d'une procédure et sa préparation ou sa rédaction. De plus, la Commission ne fait pas partie des exceptions énumérées au sous paragraphe a) du paragraphe 2 de l’article 128.

M e Charette avance que « plaider » signifie soumettre des arguments au tribunal. Le mot « agir », pour sa part, est le fait de poser un acte, poursuivre en justice ou intenter des procédures 12 . Seul l’avocat peut faire ces divers actes. M e Charette soumet que l’article 129 de la Loi sur le Barreau ne confère pas de droit parce qu’il est interprétatif, ne venant que réduire la portée de l’article 128. Le paragraphe b) de cet article 129 est une règle de droit qui permet d’imputer, par exemple, à un dirigeant l’autorisation requise, comme peuvent le prévoir les situations décrites aux articles 130 et 543 du Code de procédure civile :

130. La signification à une personne morale se fait soit à son siège, soit à l'un de ses établissements au Québec ou à celui de son agent dans le district la cause d'action a pris naissance, en s'adressant à l'un de ses dirigeants ou à une personne ayant la garde de l'établissement. À défaut de tel siège ou établissement, la signification peut être faite à l'un de ses dirigeants ou à toute personne apparaissant comme telle au registre constitué en vertu de la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales (chapitre P-45) ou encore à son fondé de pouvoir désigné en vertu de l'article 4 de cette loi. La signification à des personnes qui agissent illégalement comme personnes morales se fait à l'une d'elles, ou à leur principal établissement d'entreprise.

12 Le Petit Robert, dictionnaire de la langue française, 1999. Hubert REID, Dictionnaire de droit québécois et canadien, Montréal, Wilson & Lafleur, 1994.

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543. Lorsqu'un jugement est devenu exécutoire, le créancier peut assigner le débiteur à comparaître devant le juge ou le greffier, soit du district le jugement a été rendu, soit de celui le débiteur a sa résidence, pour y être interrogé sur tous les biens qu'il possède ou qu'il a possédés depuis la naissance de la créance qui a donné lieu au jugement, ainsi que sur ses sources de revenu.

Lorsque le débiteur est une personne morale, l'assignation doit être donnée à l'un de ses dirigeants; lorsqu'il est une société ou une personne morale étrangères faisant affaires au Québec, elle doit être donnée à son agent.

M e Charette fait valoir que le paragraphe d) de l’article 129 prévoit l’obligation de désigner un secrétaire de corporation pour la rédaction de procès-verbaux, tandis que le paragraphe c) de l’article 129 utilise le terme « représenter » du Code de procédure civile. Il n’est toutefois pas dit, insiste-t-il, que les officiers peuvent « agir » pour les corps publics ou privés.

M e Charette note que l’article 128 utilise les termes « plaider » ou « agir » et que le législateur parle plutôt de « représenter » et non « d’agir » à l’article 129 de la Loi sur le Barreau. Le mot « représenter » est un terme différent de celui « d’agir » et il s’agit, comme au Code de procédure civile, du droit d’un individu de témoigner pour une compagnie. Inversement, il souligne que si l’on donne un sens large au mot « représenter », comme à celui « d’agir », une personne ne pourrait pas rédiger une procédure, mais pourrait la déposer, n’aurait pas le droit d’assigner un témoin, mais pourrait le contre-interroger, et pourrait produire une demande de révision, mais sans plaider, notamment sur une objection. Ce qui, selon lui, est un non-sens.

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Selon M e Charette, le terme « représenter » est donc différent de celui « d’agir » et le mot « agir » inclut le dépôt d’une demande de révision à la Commission. Une entreprise ne peut donc ester en justice que par un avocat 13 . 13 Banque nationale du Canada c. Atomic Slipper Co. Ltd., [1991] 1 R.C.S. 1059; Thomassin c. General Finance Corporation Limited, [1953] B.R. 375; Papavasiliou c. Ville Marie Adjustement Bureau, [2000] C.A.I. 226; Société pour vaincre la pollution c. Ministère de l’Environnement, C.A.I. n o 90 02 06, 16 juillet 2001, c. Boissinot.

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Le Syndicat M e Cohen ne conteste pas le fait que le président du Syndicat ait déposé les demandes de révision à la Commission. Il est accepté, soumet-il, que le Syndicat est un corps privé. Il admet que la demande de révision du Syndicat est un document visé par l’article 128 (1) b) de la Loi sur le Barreau et que seul un avocat peut plaider et agir au sens du sous-paragraphe a) du paragraphe 2 de cet article. Toutefois, l’article 128 (2) renferme des exceptions, obtenues en grande partie par des revendications des syndicats, d’où les termes « plaider » et « agir » sont différents de ceux de « préparer » et « rédiger » inscrits à l’article 128 (1) b).

M e Cohen indique qu’il est impensable qu’un syndicat puisse « plaider » ou « agir » devant les tribunaux judiciaires. Il ne partage pas les arguments du Centre d’accueil que le Syndicat ne puisse « préparer » et « rédiger » des procédures. Il prétend que l’article 129 c) de la Loi sur le Barreau autorise le Syndicat, par l’exception visant les tribunaux quasi judiciaires, à faire ces documents. Il soutient que cet article 129 ne concerne pas les tribunaux judiciaires comme il l’a été évoqué dans l’affaire Thomassin c. General Finance Corporation Limited 14 soumise par le Centre d’accueil, mais à des organismes quasi judiciaires comme la Commission. Il avance que le mot « représenter » de cet article 129 est extrêmement large et revêt un caractère de mandater et de rédiger. La seule exception citée à cet article 129 c) est celle de « plaider » que nous trouvons à l’article 128 de la Loi sur le Barreau. « Plaider », souligne-t-il, a le sens de plaidoirie, soit tout ce que l’on dit au tribunal.

14 Précitée, note 13.

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M e Cohen souligne que l’affaire Papavasilou c. Ville Marie Adjustement Bureau 15 ne s’applique pas au sens de l’article 129 de la Loi sur le Barreau parce 15 Précitée, note 10.

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que le demandeur dans cette cause est une personne physique et n’est pas un corps public ou privé. Il fait valoir que, dans l’affaire Société pour vaincre la pollution c. Ministère de l'Environnement 16 , l’article 129 de la Loi sur le Barreau n’a pas été traité par la commissaire Boissinot.

M e Cohen soumet que, dans l’affaire Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Bureau de révision de la Ville d’Iberville 17 , la Cour du Québec s’est fondée sur l’article 128 de la Loi sur le Barreau (devenu depuis l’article 129 de cette loi) pour conclure que la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada pouvait se faire représenter, au sens large du terme, devant le Bureau de révision d’Iberville.

M e Cohen conclut en affirmant qu’il ne voit pas en quoi montrer les comptes d’honoraires des avocats du Centre d’accueil changerait quoi que ce soit aux dossiers de 1997 en appel à la Cour du Québec.

Réplique du Centre d’accueil M e Charette réplique que, dans l’affaire Paccar of Canada Ltd. c. Association canadienne des travailleurs des industries mécaniques 18 , le Syndicat était partie au litige, avait le droit de répondre et de réagir, ce qui est différent de notre cause la Commission et le Syndicat font front commun contre le Centre d’accueil devant la Cour du Québec.

M e Charette argue que le fondement dans l’affaire de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Bureau de révision de la Ville d'Iberville 19 16 Précitée, note 13. 17 J.E. 79-465 (C.P.). 18 Précitée, note 8. 19 Précitée, note 17.

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lui apparaît aujourd’hui précaire en droit, sinon mal fondé. Le juge Frédérick a conclu que le Bureau de révision, tout comme d’ailleurs les différentes commissions qui existaient à l’époque, dont la Commission des relations de travail, ne sont pas des tribunaux. Or, il est clair que, de nos jours, spécifie-t-il, aucun tribunal n’arriverait à la conclusion que l’expression « tribunal » n’inclut pas les tribunaux quasi judiciaires, telle que la Commission d’accès à l’information. Il ajoute que la présidente de la Commission a d’ailleurs refusé une demande de remise à une représentante de trois demanderesses lors d’une demande en ce sens adressée par une personne non membre du Barreau 20 . APPRÉCIATION Le conflit d’intérêts La décision majoritaire de la Cour suprême rendue dans l’affaire Committe for Justice and Liberty c. Office national de l'énergie 21 au sujet du critère à retenir pour décider s’il y a une crainte raisonnable de partialité est celle de la personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Dans cette cause, le président de l’Office national de l’énergie l’Office »), M. Crowe, avait fait partie d’un groupe de travail à titre de président de la Corporation de développement du Canada, dont les délibérations et décisions avaient abouti à la constitution de l’Office. Le Tribunal, après avoir examiné la nature et le degré de participation de M. Crowe et la Loi de l’Office, conclut à l’inhabilité de ce dernier et énonce que :

Lorsqu’il est important, comme en l’espèce, de ne pas avoir de préjugé sur les questions en litige (ni d’opinion préconçue) non seulement à l’égard de la décision sur une demande relative à un pipe-line en particulier mais aussi sur le principe même de la construction d’un pipe-line, la

20 Lettre de la présidente de la Commission datée du 21 janvier 2002 dans les dossiers n os 00 07 56, 00 07 53 et 00 07 57. 21 Précitée, note 6.

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participation de M. Crowe aux discussions et décisions menant à la demande faite par Pipeline de gaz arctique canadien Limitée en vue d’obtenir un certificat de commodité et nécessité publiques, ne peut, à mon avis, que donner naissance, chez des personnes bien renseignées, à une crainte raisonnable de partialité dans l’appréciation des questions à trancher sur une demande en vertu de l’art. 44.

Les deux autres causes soumises par le Centre d’accueil pour supporter les motifs de récusation sont des affaires de nature criminelle. Dans l’une, Brouillard dit Chatel c. La Reine 22 , la Cour suprême du Canada a relevé que le premier juge a participé activement à l’interrogatoire de l’accusé et d’un autre témoin de la défense, interrompant les avocats et témoins à maintes reprises et posant de nombreuses questions. Par ces événements, le juge a dépassé la mesure et donné l’impression d’assister l’avocat de la poursuite. La Cour ordonne la tenue d’un nouveau procès. Dans l’autre, Comeau c. Société Radio-Canada 23 , la Cour d’appel relate que le juge a procédé à l’audition d’une partie essentielle d’une requête en l’absence de l’intimée et du procureur du témoin et que :

L’examen de la preuve à l’aune de ce critère force à conclure qu’une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, en arriverait à la conclusion qu’il y a crainte raisonnable de partialité. En effet, il est indubitable que le juge Morier a posé au témoin Arsenault des questions sans aucun rapport avec les accusations qui pesaient sur l'appelant et les coaccusés, mais qui étaient au cœur du litige relatif à la divulgation de la preuve.

Le Centre d’accueil prétend non pas à la partialité du soussigné, mais à celle de la Commission en raison de l’intervention de cette dernière à la Cour du Québec.

22 Précitée, note 5. 23 Précitée, note 7.

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Dans les circonstances, les faits à la source des causes précitées trouvent difficilement référence dans le cas nous concernant.

Il importe de spécifier, comme on le sait, que la Commission doit donner aux parties l’occasion de présenter leurs observations, fixer les conditions qu’elle juge appropriées et rendre une décision écrite et motivée, selon les termes des articles 140 et 142 de la Loi et de l’article 27 des Règles de preuve et de procédure de la Commission 24 : 140. Lorsqu'elle est saisie d'une demande de révision, la Commission doit donner aux parties l'occasion de présenter leurs observations.

142. La Commission peut, en décidant d'une demande de révision, fixer les conditions qu'elle juge appropriées pour faciliter l'exercice d'un droit conféré par la présente loi.

27. La décision est rendue par les membres qui ont entendu la demande de révision et elle constitue la décision de la Commission. Elle est écrite et motivée.

Il est reconnu, et personne ne le conteste, qu’un tribunal administratif a qualité pour présenter devant un tribunal judiciaire ses arguments lors d’une question touchant sa compétence. Comme il l’est rapporté dans l’affaire Paccar of Canada Ltd. c. Association canadienne des travailleurs des industries mécaniques et assimilés, section locale 14 25 , les arguments soumis par un tribunal administratif à la cour peuvent non seulement lui expliquer le dossier dont elle est saisie, mais également montrer qu’elle est compétente pour entendre l’enquête. Ainsi, la Commission ne peut être considérée comme une partie, au sens plein du terme, dans les procédures d’appel de ses propres décisions.

24 Règles de preuve et de procédure de la Commission d'accès à l'information, décret 2058-84. 25 Précitée, note 8.

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La preuve ne permet pas d’ailleurs de relever que la Commission en Cour du Québec dans les dossiers de 1997 n’a pas agi dans la voie dictée par l’affaire Paccar of Canada Ltd. c. Association canadienne des travailleurs des industries mécaniques et assimilés, section locale 14 26 ou que le juge présidant l’appel en Cour du Québec a permis à la Commission de plaider autre chose que les éléments relatifs à sa juridiction. S’attache à ces faits celui que le litige débattu en Cour du Québec, à sa face même, porte sur la juridiction de la Commission de statuer, non pas sur les honoraires de frais du cabinet du procureur actuel du Centre d’accueil, mais sur une décision préliminaire statuant que la Commission avait juridiction pour trancher le litige concernant la main-d’œuvre indépendante engagée par le Centre d’accueil.

Pour ces divers motifs, je suis d'avis que la première objection préliminaire du Centre d’accueil ne peut être retenue. Une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, en arriverait à la conclusion qu’il y a pas de crainte raisonnable de partialité de la part de la Commission ou du soussigné.

En outre, et en toute déférence, une partie peut partager ou non une décision rendue par la Commission. D’une situation une décision n’est pas partagée par l’une des parties, la Commission ne devient pas pour autant partiale des faits et arguments qui pourraient lui être soumis dans une autre affaire. Ainsi, je crois qu’accéder à la requête du procureur du Centre d’accueil ne concourrait pas à une saine administration de la justice, et ce, de façon pratique, en paralysant tous les dossiers dont les mêmes parties seraient à la fois en appel d’une décision devant la Cour du Québec et sur une autre demande d’accès devant la Commission, mais pour des documents différents. À mon avis, la preuve ne

26 Précitée, note 8.

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supporte aucunement que la Commission se trouve dans une situation de conflit d'intérêts entraînant une partialité institutionnelle.

Le caractère nul du droit de révision du syndicat basé sur la Loi sur le Barreau

Dans l’affaire de la Banque Nationale du Canada c. Atomic Slipper Co. Ltd. 27 , la Cour suprême du Canada statua, en 1991, que : Devant notre Cour on ne saurait donc considérer valable la représentation d’une corporation autrement que par un membre en règle du Barreau. […] Atomic n’a pas comparu valablement […]

(soulignement ajouté)

En 1953, dans l’affaire Thomassin Limited, la Cour d’appel indique :

Une corporation ne peut ester en justice que par ministère d’avocat. En conséquence, le jugement obtenu par une corporation sur des procédures signées par son président est absolument nul […]

Ces deux dernières décisions concernent des tribunaux judiciaires. En ce qui concerne la cause Papavasilou c. Ville Marie Adjustment Bureau 29 , celle-ci n’est pas utile pour disposer de l’actuel litige. Il s’agit d’une personne physique qui veut représenter une autre personne physique.

Dans l’affaire Société pour vaincre la pollution c. Ministère de l'Environnement 30 , la commissaire déclare irrecevable la demande de révision formulée par M. Daniel Green pour et au nom de la demanderesse. La

27 Précitée, note 13, 1070-1071. 28 Précitée, note 13, 375. 29 Précitée, note 13. 30 Précitée, note 13.

28 c. General Finance Corporation

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commissaire signale toutefois que, malgré le rappel des dispositions de la Loi sur le Barreau le 28 mai 2001, seul son président est présent à l’audience du 11 juin et que le représentant de la Société pour vaincre la pollution a décliné l’offre de se constituer un avocat.

Dans le cas sous étude, la question que le Syndicat se constitue un avocat n’a pas fait l’objet de discussions parce que l’avocat de celui-ci est intervenu et a acquiescé, le 24 octobre 2001, à réunir les dossiers pour une même audience. Le Syndicat a donc remédié à cette situation. Est-ce que le débat soumis par M e Charette devient alors purement académique? Il importe de rappeler que toute personne, peu importe son intérêt, peut présenter une demande d’accès et de révision pour obtenir des documents détenus par un organisme public. L’intérêt de la personne est regardé par la Commission dans des cas très particuliers, notamment lors de motifs prévus aux articles 88.1, 94 ou 126 de la Loi :

88.1 Un organisme public doit refuser de donner communication d'un renseignement nominatif à l'administrateur de la succession, au bénéficiaire d'une assurance-vie, à l'héritier ou au successeur de la personne concernée par ce renseignement, à moins que cette communication ne mette en cause ses intérêts ou ses droits à titre d'administrateur, de bénéficiaire, d'héritier ou de successeur.

94. Une demande de communication ou de rectification ne peut être considérée que si elle est faite par écrit par une personne physique justifiant de son identité à titre de personne concernée, à titre de représentant, d'héritier ou de successeur de cette dernière, d'administrateur de la succession, de bénéficiaire d'assurance-vie ou comme titulaire de l'autorité parentale. Elle est adressée au responsable de la protection des renseignements personnels au sein de l'organisme public. Si la demande est adressée à la personne ayant la plus haute autorité au sein de l'organisme public, cette personne doit la transmettre avec diligence au responsable qu'elle a désigné en vertu de l'article 8, le cas échéant.

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126. La Commission peut, sur demande, autoriser un organisme public à ne pas tenir compte de demandes manifestement abusives par leur nombre, leur caractère répétitif ou leur caractère systématique. Il en est de même lorsque, de l'avis de la Commission, ces demandes ne sont pas conformes à l'objet des dispositions de la présente loi sur la protection des renseignements personnels. Un membre de la Commission peut, au nom de celle-ci, exercer seul les pouvoirs que le présent article confère à la Commission.

Le fardeau de la preuve, dans presque tous les cas de demandes d’accès, à la différence des tribunaux judiciaires le fardeau de la preuve incombe au demandeur, appartient à l’organisme. Il est d’intérêt de constater, à l’instar de la doctrine 31 , que la procédure applicable aux tribunaux judiciaires ne l’est pas aux tribunaux quasi judiciaires, à moins de dispositions expresses à cet effet, et sous réserve, bien entendu, du respect des règles de justice naturelle. Il n’existe pas de frais pour les recours à la Commission ni de dispositions, par exemple, similaires au dépôt de déclarations, comparutions (art. 110, 149 et suiv. C.p.c.) ou requêtes en matière non contentieuse (art. 862 et suiv. C.p.c.). M e Ouellette 32 rapporte d’ailleurs que : 2 o Les tribunaux judiciaires, dans l’exercice de leur juridiction de surveillance ou d’appel, doivent se garder d’imposer aux tribunaux administratifs leurs propres règles de procédure. Bref, la procédure judiciaire n’est pas nécessairement applicable au tribunal administratif par la volonté du tribunal judiciaire.

Le juge doit donc attribuer au tribunal administratif une mesure d’autonomie et de discrétion et le tribunal administratif « n’a pas à faire sien les rites d’une cour de justice ». […]

Les principaux pouvoirs de la Commission sont énoncés aux articles 139, 140, 141 et 142 de la Loi :

31 Yves OUELLETTE, Les tribunaux administratifs au Canada, procédure et preuve, Éditions Thémis, pp. 94 et suiv. 32 Id., 94.

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139. Un membre de la Commission peut, au nom de celle-ci, entendre seul une demande de révision.

140. Lorsqu'elle est saisie d'une demande de révision, la Commission doit donner aux parties l'occasion de présenter leurs observations.

141. La Commission a tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice de sa juridiction; elle peut rendre toute ordonnance qu'elle estime propre à sauvegarder les droits des parties et décider de toute question de fait ou de droit. Elle peut notamment ordonner à un organisme public de donner communication d'un document ou d'une partie de document, de s'abstenir de le faire, de rectifier, compléter, clarifier, mettre à jour ou effacer tout renseignement nominatif ou de cesser un usage ou une communication de renseignements nominatifs.

142. La Commission peut, en décidant d'une demande de révision, fixer les conditions qu'elle juge appropriées pour faciliter l'exercice d'un droit conféré par la présente loi.

L’article 146.1 de la Loi aborde la péremption d’instance, l’article 152 régit l’appel à la Cour du Québec et l'article 114 vise les recours extraordinaires. Ce sont les trois articles de la Loi référant au Code de procédure civile :

146.1 La Commission peut déclarer périmée une demande de révision s'il s'est écoulé une année depuis la production du dernier acte de procédure utile. Les articles 266 à 269 du Code de procédure civile s'appliquent à cette péremption d'instance, compte tenu des adaptations nécessaires.

152. L'appel est régi par les articles 491 à 524 du Code de procédure civile (chapitre C-25), compte tenu des adaptations nécessaires. Toutefois, les parties ne sont pas tenues de déposer de mémoire de leurs prétentions.

114. Aucun des recours extraordinaires prévus par les articles 834 à 850 du Code de procédure civile (chapitre C-25) ne peut être exercé, ni aucune injonction accordée contre la Commission ou un de ses membres agissant en sa qualité officielle. Deux juges de la Cour d'appel peuvent, sur requête, annuler sommairement tout bref délivré et toute ordonnance ou injonction prononcée à l'encontre de la présente loi relativement à un document.

En matière d’accès à l’information, la seule formalité pour le dépôt d’une demande de révision, outre que la demande d’accès doit être écrite, se trouve aux

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articles 4 et suivants des Règles de preuve et de procédures de la Commission. L’article 6 indique que :

6. La demande de révision doit être signée par le requérant ou, le cas échéant, par son représentant. Elle doit indiquer, dans ce cas, les nom, prénom et adresse du représentant.

Il faut noter également que la Loi n'exige pas, aux termes des articles 104 et 105, que les commissaires soient des avocats, même si, dans les faits, ils ont une formation juridique :

104. La Commission se compose de cinq membres dont un président. Les membres sont nommés, sur proposition du Premier ministre, par résolution de l'Assemblée nationale approuvée par au moins les deux tiers de ses membres. L'Assemblée détermine de la même manière la rémunération, les avantages sociaux et les autres conditions de travail des membres de la Commission. Les membres de la Commission exercent leur fonction à temps plein.

105. La durée du mandat des membres de la Commission est d'au plus cinq ans. Un membre de la Commission ne peut être nommé pour plus de deux mandats consécutifs complets. À l'expiration de son mandat, un membre demeure toutefois en fonction jusqu'à ce qu'il soit nommé à nouveau ou remplacé.

Si l’on ajoute à ces observations une lecture attentive du texte explicite de l’article 129 c) de la Loi sur le Barreau, celui-ci accorde à un corps public ou privé le droit de se faire représenter par ses officiers devant un organisme exerçant, comme la Commission, une juridiction quasi judiciaire. Cet officier ne peut toutefois plaider au sens de 2 e paragraphe de l’article 128 de la Loi. La Commission constate que le président du Syndicat, officier de celui-ci, a présenté une demande de révision à la Commission et que ce même Syndicat

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est représenté par avocat. Pour ces raisons, la Commission rejette la deuxième objection du Centre d’accueil.

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE les objections préliminaires soumises par le procureur du Centre d’accueil;

CONVOQUE les parties pour la poursuite de l’audience à une date à être fixée par le maître des rôles.

MICHEL LAPORTE Commissaire

Montréal, le 18 juillet 2002 M e François Charette LAVERY, de BILLY Procureur du demandeur

M e Michael Cohen MELANÇON MARCEAU & ASSOCIÉS Procureur de l'organisme

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