Dossier: 01 08 65 X, demandeur c. CENTRE HOSPITALIER RÉGIONAL DE LANAUDIÈRE, organisme _________________________________________________________________________ DÉCISION ________________________________________________________________________ L’OBJET DU LITIGE : X exige la destruction « complète et totale » des renseignements qui ont été inscrits dans son dossier d’usager les 12 et 13 mars 2001, avant son évaluation par la D re Luce Beaudry. L’organisme refuse d’acquiescer à cette demande en vertu du Règlement sur l’organisation et l’administration des établissements (L.R.Q., c. S-5, R.-5) qui prévoit qu’aucun original ou exemplaire unique d’une pièce ne peut être retiré d’un dossier, sauf sur l’ordre d’un tribunal. L’organisme invite cependant X à exiger l’enregistrement de sa demande dans son dossier. PREUVE et ARGUMENTATION : L’avocat de l’organisme soutient que son client ne peut, en vertu du Règlement sur l’organisation et l’administration des établissements, retirer des renseignements originaux d’un dossier d’usager ou encore éliminer un dossier d’usager ou partie de celui-ci : 61. Aucun dossier d’un bénéficiaire ne peut être sorti d’un établissement, et aucun original ou exemplaire unique d’une pièce ne peut être retiré d’un dossier, sauf sur l’ordre du tribunal,
01 08 65 2 pour l’application de la Loi sur les archives ou dans les cas prévus au présent article. Une ordonnance pour des médicaments, drogues ou poisons peut être retirée temporairement d’un dossier afin d’être remise au pharmacien dans l’établissement. Un dossier ou une partie de dossier peut être sorti temporairement d’un établissement pour être transmis à un autre établissement, lorsqu’un tel envoi est requis par un médecin ou un dentiste pour les fins d’un diagnostic ou d’un traitement médical ou dentaire. Un document d’imagerie médicale peut être sorti temporairement d’un établissement pour être transmis à un médecin ou à un dentiste, lorsqu’un tel envoi est requis pour les fins d’un diagnostic ou d’un traitement médical ou dentaire. 64. Un dossier ou une partie de dossier ne peut être éliminé que conformément à la Loi sur les archives. Dans le cas d’un centre hospitalier, lorsque le dossier d’une personne non décédée devient inactif et est éliminé conformément à la Loi sur les archives, un résumé comprenant les éléments suivants doit être conservé : 1° la feuille sommaire ; 2° le protocole opératoire ; 3° le protocole d’anatomopathologie. Le résumé peut être constitué de reproductions photographiques des éléments énumérés au deuxième alinéa. L’avocat de l’organisme soutient également que l’article 13 de la Loi sur les archives (L.R.Q., c. A-21.1) stipule que : 13. Sous réserve de ce que prévoit le calendrier de conservation, nul ne peut aliéner ou éliminer un document actif ou semi-actif d’un organisme public. Il souligne par ailleurs que l’article 91 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 permet à X de faire connaître son opposition à la conservation des renseignements en litige dans son dossier en exigeant que sa demande de destruction soit enregistrée: 1 L.R.Q., c. A-2.1.
01 08 65 3 91. Lorsque l'organisme public refuse en tout ou en partie d'accéder à une demande de rectification d'un fichier, la personne concernée peut exiger que cette demande soit enregistrée. L’avocat de l’organisme soutient essentiellement que l’organisme n’est pas habilité à détruire les renseignements visés par la demande; à son avis, cette demande est irrecevable. L’organisme, signale-t-il, ne peut, à la requête de X, modifier l’histoire. X témoigne sous serment. Référé par un médecin, X s’est présenté chez l’organisme dans le but d’obtenir un médicament dont il avait besoin et qu’il désigne comme étant léger et temporaire. Un médecin de l’urgence psychiatrique l’a écouté et l’a examiné avant de décider de le garder pour la nuit, de lui administrer un autre médicament et de le faire évaluer à nouveau dès le lendemain. Un autre médecin, la D re Beaudry, l’a donc examiné le lendemain, chez l’organisme; elle a posé un diagnostic qui diffère des renseignements inscrits la veille par le premier médecin. De l’avis de X, les observations et autres renseignements inscrits par le premier médecin doivent être détruits; selon X, ne doivent être conservés que les renseignements qui émanent de la D re Beaudry et qui donnent une image exacte de son état. X prétend que, contrairement au premier médecin qui l’a examiné, la D re Beaudry est psychiatre et a vu juste. La D re Beaudry lui a prescrit un médicament; X a choisi de reporter la consommation du médicament à plus tard (septembre 2001) et de réduire de lui-même la période de consommation de ce médicament. X est en désaccord avec les renseignements que le premier médecin a inscrits à son sujet; ces renseignements lui causent préjudice parce qu’ils ne correspondent pas, selon lui, à la
01 08 65 4 réalité. Il conteste particulièrement les renseignements voulant qu’il soit délirant et qu’il souffre de psychose. X dit se connaître. Il a donc verbalisé auprès du premier médecin son vécu des dix dernières années comme il a l’habitude de le faire avec des psychologues. X prétend que ce médecin a compris que ce long vécu, exprimé « dans toutes ses dimensions » par X, constituait son état réel global au moment de la consultation. X dit percevoir et estimer que ses propos, qui visent un vécu de 10 ans, ont amené ce médecin à établir un diagnostic erroné. X prétend enfin que la perception du premier médecin va au-delà de la réalité et qu’elle est erronée. L’avocat de l’organisme signale que la D re Beaudry est un médecin qui bénéficie de privilèges en psychiatrie et que rien ne démontre qu’elle soit psychiatre. Il fait entendre à ce sujet Mme Pierrette Nadeau, responsable de l’accès de l’organisme, qui témoigne sous serment. Mme Nadeau indique qu’elle ne sait pas si la D re Beaudry est psychiatre. Elle précise que les deux médecins qui ont traité X les 12 et 13 mars 2001 se consacrent exclusivement à la psychiatrie chez l’organisme. Elle ajoute que la majorité des médecins qui exercent en psychiatrie chez l’organisme sont des généralistes qui ont des privilèges en psychiatrie. L’avocat de l’organisme souligne que le dossier indique que le premier médecin s’est interrogé, après évaluation, quant à l’existence d’idées suicidaires et d’une psychose aiguë ou maniaco-dépressive chez X et qu’il s’est expressément limité à donner ses impressions avant de décider de garder X en observation dans la nuit du 12 au 13 mars 2001.
01 08 65 5 Il souligne aussi que le dossier indique clairement que X a été gardé en observation dans la nuit du 12 au 13 mars et que la D re Beaudry a, à l’occasion de l’examen effectué le lendemain: • noté que X s’était vu hospitaliser sans comprendre; • établi un diagnostic principal d’anxiété panique en rémission, avec agoraphobie en rémission et phobie sociale en rémission partielle; • prescrit un médicament; • recommandé un suivi en clinique externe. L’avocat de l’organisme soutient que des médecins ont inscrit leurs observations dans le dossier d’usager de X et que rien ne démontre que ces observations soient erronées. L’organisme ne peut légalement les détruire, avance-t-il. DÉCISION : La demande de rectification de X est régie par les articles 89 et suivants de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels : 89. Toute personne qui reçoit confirmation de l'existence dans un fichier d'un renseignement nominatif la concernant peut, s'il est inexact, incomplet ou équivoque, ou si sa collecte, sa communication ou sa conservation ne sont pas autorisées par la loi, exiger que le fichier soit rectifié. X demande la destruction d’un ensemble de renseignements qu’il considère erroné. Ces renseignements illustrent, de toute évidence, ce qui s’est produit, pendant le séjour de X chez l’organisme, les 12 et 13 mars 2001; ils constituent, en corrélation, les évaluation et
01 08 65 6 ordonnances du premier médecin ainsi que les observations et soins des infirmières alors en fonction. La Loi sur l’accès prévoit l’application de la règle de preuve suivante en matière de rectification de renseignements nominatifs : 90. En cas de contestation relative à une demande de rectification, l'organisme public doit prouver que le fichier n'a pas à être rectifié, à moins que le renseignement en cause ne lui ait été communiqué par la personne concernée ou avec son accord. Le témoignage de X démontre qu’il a lui-même exprimé des propos qui ont permis au premier médecin de s’interroger, en qualité de médecin, sur l’état de X, de le garder en observation pour la nuit et de le faire examiner à nouveau le lendemain. Le témoignage de X se limite à démontrer son insatisfaction quant aux notes, observations et évaluations du premier médecin et des infirmières qui ont précédé l’intervention de la D re Beaudry. Aucune preuve ne démontre que les renseignements constituant le dossier d’usager de X soient erronés. Aucune preuve ne démontre spécifiquement que le diagnostic de la D re Beaudry corrige ou remplace tout le travail antérieur effectué par le premier médecin et par le personnel infirmier le 12 et le 13 mars. La Commission est convaincue que la totalité du dossier constitué sur X en ce qui concerne les 12 et 13 mars 2001 illustre la réalité, à savoir : • les propos exprimés par X et retenus par le premier médecin; • le comportement et l’état de X, tels qu’ils ont été perçus et exprimés par des professionnels de la santé, avec nuance et questionnement, à l’occasion du premier
01 08 65 7 examen, alors qu’il était jugé approprié de le garder en observation et au moment où il était en observation; • l’état de X, tel qu’il a été perçu et exprimé par la D re Beaudry, ce, à la suite des soins et analyses demandés par le premier médecin, dans un contexte ultérieur et distinct, favorable à l’établissement d’un diagnostic et à l’octroi d’un congé. La Commission constate, somme toute, qu’aucune preuve ne démontre l’inexactitude de l’ensemble des renseignements en litige. Tous les renseignements recueillis et inscrits les 12 et 13 mars 2001 concernant X doivent, puisqu’ils illustrent ce qui s’est réellement passé, être conservés tels quels au dossier. Rien n’indique que les professionnels de la santé qui, le cas échéant, devront avoir accès aux renseignements en litige, leur donneront une interprétation identique à celle qu’en donne X. La décision de l’organisme de ne pas faire disparaître l’ensemble des renseignements en litige est maintenue. X demeure habilité à exiger l’enregistrement de sa demande à son dossier. PAR CES MOTIFS, la Commission REJETTE la demande de révision; FERME le dossier 01 08 65. HÉLÈNE GRENIER Commissaire Québec, le 2 juillet 2002.
01 08 65 8 M e Michel Bélair Ferland & Bélair Avocat de l’organisme.
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