Dossier : 02 08 74 Date : 30 janvier 2003 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. VILLE DE LAVAL Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS [1] Le 24 mai 2002, le demandeur s’adresse à la Ville de Laval (la Ville) pour obtenir une copie d’une plainte déposée « à mon égard par mon frère et possiblement d’autres personnes. J’en ignore la date et le numéro de dossier car les policiers m’ont refusé l’information. Il est impératif, dans le cadre d’une poursuite civile que j’obtienne ce document dans les plus brefs délais. ». [2] Le 4 juin 2002, le responsable de l’accès à l’information (Service de protection des citoyens) de la Ville l’informe qu’il ne peut donner suite à sa demande d’accès. Il refuse expressément de lui confirmer ou d’infirmer l’existence d’un renseignement obtenu par une personne chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, ce, en vertu de l’article 28 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 08 74 Page : 2 [3] Le 6 juin 2002, le demandeur intente un recours en révision de cette décision. Dans sa requête, il identifie les policiers auprès desquels la plainte en litige aurait été déposée et il affirme avoir entrepris différents recours contre ces policiers. À son avis, il a le droit d’obtenir, à des fins judiciaires, toutes les pièces à conviction détenues. Le demandeur profite de sa requête en révison pour élargir sa demande d’accès du 24 mai 2002 en demandant accès au complément d’enquête qui a été effectué par des policiers et pour savoir si les policiers « ont demandé un mandat pour voir le dossier médical de ma mère. ». L'AUDIENCE A) LA PREUVE i) de l'organisme [4] L’avocate de la Ville dépose la feuille qui était jointe à la demande d’accès du 24 mai 2002 et sur laquelle le demandeur précise qu’il doit, dans le cadre d’une poursuite civile, obtenir la plainte en litige (O-1). [5] Elle fait entendre M. Michel Tremblay qui témoigne sous serment. M. Tremblay affirme être assistant-directeur du Service de protection des citoyens de la Ville et responsable de l’accès aux documents détenus par la Ville pour ce service. [6] M. Tremblay a traité la demande d’accès du 24 mai 2002; son refus de confirmer l’existence de cette plainte ou d’en communiquer la copie est daté du 4 juin 2002. Il a pris connaissance de la demande de révision du 6 juin 2002. [7] Contre-interrogé, M. Tremblay explique que son refus porte sur les renseignements personnels qui ont été demandés. Il se rappelle avoir traité, le 24 mai 2002, une autre demande d’accès du demandeur, datée du 7 mai 2002 (dossier C.A.I. 02 08 15), demande visant l’obtention d’un dossier de police intégral que le demandeur a bien identifié et que la Ville a fermé le 12 juin 2002. Il affirme que la demande d’accès du 7 mai 2002 visait notamment l’obtention de la plainte en litige; à son avis, les 4 ième et 5 ième paragraphes du 1 er alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès s’appliquent à la demande d’accès du 24 mai 2002.
02 08 74 Page : 3 [8] La Commission reçoit à huis clos et ex parte le témoignage de M. Tremblay concernant la demande d’accès du 24 mai 2002. ii) du demandeur [9] Le demandeur ne présente aucune preuve. B) LES ARGUMENTS i) de l'organisme [10] L’avocate de la Ville prétend que la preuve présentée justifie la décision du responsable. [11] Elle précise que les 4 ième et 5 ième paragraphes du 1 er alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès s’appliquent en conséquence. ii) du demandeur [12] L’avocat du demandeur prétend qu’aucune preuve ne démontre que la divulgation de la plainte en litige serait susceptible de mettre en péril la sécurité d’une personne ou de causer un préjudice à une personne. À son avis, les 4 ième et 5 ième paragraphes du 1 er alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès ne peuvent recevoir application : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: 4° de mettre en péril la sécurité d’une personne; 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet;
02 08 74 Page : 4 [13] Il prétend que le demandeur soupçonne que les personnes qui ont requis l’intervention policière lors de l’événement visé par sa demande d’accès font partie de sa famille. [14] L’avocat du demandeur précise que son client croit que son frère serait la personne qui a requis l’intervention des policiers et il veut s’en assurer afin de le poursuivre; à son avis, la déclaration faite aux policiers par le frère du demandeur est neutre, factuelle et non nominative par rapport à son auteur. [15] Il soutient que la source d’une information obtenue par les policiers n’est pas un renseignement nominatif. [16] L’avocat du demandeur s’interroge enfin sur le caractère nominatif des renseignements qui ont été soustraits à l’accès. DÉCISION [17] La Commission examine le refus du responsable daté du 4 juin 2002 et portant uniquement sur la demande d’accès du 24 mai précédent. [18] La Commission n’a pas compétence pour examiner la demande d’accès que le demandeur a introduite dans sa demande de révision du 6 juin 2002; les demandes d’accès doivent être adressées au responsable de l’accès et traitées par lui conformément aux articles 42 et suivants de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. En révision, la compétence de la Commission s’exerce sur la décision qu’un responsable prend concernant une demande d’accès. [19] Une plainte telle que celle qui est visée par la demande d’accès du 24 mai 2002 est régie par les articles suivants de la loi précitée : 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 56. Le nom d'une personne physique n'est pas un renseignement nominatif, sauf lorsqu'il est mentionné avec un autre renseignement la concernant ou lorsque sa
02 08 74 Page : 5 seule mention révélerait un renseignement nominatif concernant cette personne. 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: 1° au procureur de cet organisme si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi que cet organisme est chargé d'appliquer, ou au Procureur général si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 2° au procureur de cet organisme, ou au Procureur général lorsqu'il agit comme procureur de cet organisme, si le renseignement est requis aux fins d'une procédure judiciaire autre qu'une procédure visée dans le paragraphe 1 o ; 3° à une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, si le renseignement est requis aux fins d'une
02 08 74 Page : 6 poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 4° à une personne à qui cette communication doit être faite en raison d'une situation d'urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne concernée; 5° à une personne qui est autorisée par la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 125, à utiliser ce renseignement à des fins d'étude, de recherche ou de statistique; 6° (paragraphe abrogé); 7° (paragraphe abrogé); 8° à une personne ou à un organisme, conformément aux articles 61, 67, 67.1, 67.2, 68 et 68.1. 9° à une personne impliquée dans un événement ayant fait l'objet d'un rapport par un corps de police, lorsqu'il s'agit d'un renseignement sur l'identité de toute autre personne qui a été impliquée dans cet événement, sauf s'il s'agit d'un témoin, d'un dénonciateur ou d'une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d'être mise en péril par la communication d'un tel renseignement. [20] Pareille plainte faite à un policier est également régie par les articles 87 et 88 de la même loi : 87. Sauf dans le cas prévu à l'article 86.1, un organisme public peut refuser de confirmer l'existence ou de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant, dans la mesure où la communication de cette information révélerait un renseignement dont la communication doit ou peut être refusée en vertu de la section II du chapitre II. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication
02 08 74 Page : 7 à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [21] La preuve révèle que les 4 ième et 5 ième paragraphes du 1 er alinéa de l’article 28, précités s’appliquent; ces dispositions sont opposables au demandeur en vertu de l’article 87. [22] La Commission souligne qu’un responsable qui traite une demande d’accès à une plainte doit notamment vérifier si le 1 er alinéa de l’article 59 de même que le 9 ième paragraphe du 2 ième alinéa de cet article, précités, s’appliquent; ces dispositions interdisent la communication de renseignements qui identifient un témoin, un dénonciateur ou une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d’être mise en péril par la communication de ces renseignements, à moins que ces personnes y consentent. [23] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [24] REJETTE la demande de révision. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Roger Paiement Avocat du demandeur M e Francine Payette Avocate de l’organisme
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