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DOSSIER: 99 21 46 SYNDICAT DES PROFESSIONNELLES ET PROFESSIONNELS DU GOUVERNEMENT DU QUÉBEC

Demandeur c. TOURISME QUÉBEC Organisme et BELL CANADA Tiers ________________________________________________________________________

DÉCISION ________________________________________________________________________

Le 16 juillet 1999, le demandeur («le syndicat») s’est adressé à Tourisme Québec afin d’obtenir «un exemplaire de l’entente intervenue entre Bell et Tourisme Québec». Le responsable de l’accès aux documents de Tourisme Québec a partiellement acquiescé à cette demande : il a extrait de l’entente, en vertu des articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 , les renseignements dont la communication a été refusée par Bell Canada ainsi que des renseignements nominatifs.

Le syndicat requiert la révision de cette décision; avis de cette demande a été donné à Bell Canada par la Commission.

Les parties sont entendues à Québec, le 23 mai 2000, le 24 octobre 2000 et le 13 février 2001.

1 L.R.Q., c. A-2.1 (Loi sur l'accès ou la Loi)

99 21 46 2 PREUVE : L’avocat de Bell Canada précise que la plupart des dispositions de l’entente cadre de partenariat visée par la demande ont été communiquées et que le litige ne porte que sur trois dispositions : les articles 7.1.5.2., 7.3.3.2 et 7.4.

Il fait entendre MM. André Gravel et Bertrand Morin qui témoignent sous serment. Les éléments essentiels de leur témoignage respectif sont énumérés ci-après.

Interrogatoire de monsieur André Gravel : Monsieur Gravel est à l’emploi de Bell Canada depuis près de 26 ans. Il y a occupé les fonctions suivantes dans le domaine des réseaux de communications et de télécommunications offerts au gouvernement du Québec : technicien, planificateur de réseaux, directeur des systèmes d’abonnés (grandes organisations) et directeur régional à l’ingénierie des systèmes.

Monsieur Gravel est, depuis juin 1998, directeur général des activités de solutions d’affaires électroniques. Ces solutions, qui intègrent des éléments de réseau de communication, des applications informatiques, des éléments d’Internet et de centre d’appel, sont complètes; elles sont élaborées pour des clients majeurs ou pour des industries particulières. Les solutions d’affaires électroniques de Bell Canada sont offertes au secteur public québécois.

Monsieur Gravel est responsable de la constitution des équipes de conception, de développement, d’implantation et d’exploitation de ces solutions d’affaires électroniques. Il

99 21 46 3 s’est surtout occupé, au cours des trois dernières années, des dossiers de Tourisme Québec et du rôle de cet organisme dans l’industrie touristique.

Bell Canada n’est pas la seule à offrir des solutions d’affaires électroniques : elle est en compétition avec les nombreuses entreprises de télécommunications qui occupent ce marché et qui incluent CGI, IBM, AT&T, Vidéotron et Compaq.

La préparation d’une solution d’affaires électronique complète requiert la constitution d’une équipe pluridisciplinaire regroupant des ressources de plusieurs entreprises telles que BCE Émergis, Technologie Multipart’R, New Trade Technology et Nurun. Pour la réalisation du projet d’inforoute touristique visé par l’entente cadre en litige, monsieur Gravel a eu recours à des ressources de Tourisme Québec ainsi qu’à 75 ressources fournies par Bell Canada (15 personnes) et d’autres entreprises.

Bell Canada cherche des occasions d’affaires par l’entremise de son unité d’affaires Bell Québec; les possibilités ou occasions de vendre des technologies identifiées par ses prospecteurs donnent lieu à la préparation et à l’implantation de solutions technologiques et d’affaires électroniques supervisées par le vice-président des technologies, monsieur Marcel Messier, supérieur de monsieur Gravel.

En janvier 1996, le gouvernement du Québec a autorisé la mise en place d’une infrastructure permettant l’implantation d’une inforoute touristique. Tourisme Québec a dès lors préparé un cahier de charges qu’il a présenté, en janvier 1997, dans le cadre d’un appel de propositions complété par un processus de sélection de partenaires. Ce cahier de charges faisait état des conditions du marché touristique, des enjeux ainsi que de certains constats concernant, notamment, le retard de l’industrie touristique québécoise; l’organisme y exposait une solution ainsi que des outils dont il voulait doter cette industrie, ce, nécessairement avec un partenaire disposant des compétences

99 21 46 4 technologiques et des effectifs de commercialisation requis de même que des ressources financières lui permettant d’investir et de partager le risque commercial associé au projet. Bell Canada savait déjà qu’une centrale de réservation touristique, mise en place par Tourisme Québec, avait fait faillite en 1993-1994; l’entreprise se devait donc de proposer une solution pouvant créer l’adhésion de toute l’industrie touristique malgré les intérêts divergents qui s’y retrouvent.

Le 10 mars 1997, Bell Canada a déposé ses réponses à la demande de sélection de partenaires, réponses dans lesquelles l’entreprise identifiait sa vision d’une solution possible eu égard au contexte décrit dans le cahier de charges; cette solution a été proposée par Bell Canada à Tourisme Québec à la fin de mars 1997.

Tourisme Québec a sélectionné Bell Canada comme partenaire en avril 1997; les parties ont dès lors négocié, jusqu’à la fin mai 1997, les dispositions d’un premier contrat devant définir la solution administrative et technologique en partenariat, solution destinée à susciter l’adhésion massive de l’industrie touristique et qui peut toujours être améliorée. Le coût de conception de cette solution était entièrement à la charge de Bell Canada.

En novembre 1997, le projet présentait un manque à gagner ainsi qu’un risque beaucoup trop élevé pour Bell Canada; les parties ont alors entrepris la négociation d’une entente de principe conclue en avril 1998 et à partir de laquelle les parties ont négocié, jusqu’à la fin novembre 1998, l’entente cadre de partenariat visée par la demande d’accès et signée le 25 mars 1999.

Bell Canada a cependant commencé à constituer des équipes de travail dès septembre 1998 afin d’élaborer, de mettre en place et de pouvoir appliquer la solution administrative et technologique aux saisons touristiques 1999 et 2000.

99 21 46 5 Bell Canada avait, déjà en 1995-1996, mis en place une solution Internet (Destination Québec) et avait été informée, en juin 1996, à la suite d’une invitation lancée par Tourisme Québec, des projets de l’organisme, des enjeux ainsi que des difficultés afférentes. Bell Canada a alors constitué une équipe de sept personnes qui a travaillé à l’élaboration d’une solution permettant de rencontrer les objectifs décrits par Tourisme Québec; le travail de cette équipe a nécessité, en septembre 1996, la conclusion d’alliances avec IBM et le Groupe Québécor Multimédia afin d’en arriver à une solution plus étendue qui rejoigne toutes les facettes d’une inforoute touristique. Bell Canada a dès lors investi près de deux millions de dollars en services professionnels, en équipement et documents, et en frais de représentation reliés à environ 120 à 150 congrès, focus groups, séminaires et rencontres d’associations.

L’entente cadre de partenariat visée par la demande d’accès concerne la conception, la réalisation, l’implantation et l’exploitation de la «Place d’affaires électronique de l’industrie touristique du Québec»; elle a pour objectif de favoriser la prospérité des entreprises touristiques québécoises en utilisant les connaissances de Tourisme Québec dans le domaine de l’industrie touristique et celles de Bell Canada dans le domaine des technologies de l’information et des communications (commerce électronique, Internet, téléphonie, centres d’appel). La solution d’affaires électronique adoptée par les parties est de nature à susciter et à favoriser, par l’amélioration de la plate-forme d’affaires électronique de l’ensemble de l’industrie touristique québécoise, la prospérité des entreprises touristiques québécoises. L’entente cadre prévoit la mise en commun, par les deux partenaires, de ressources complémentaires qui permettront que des solutions technologiques soient offertes à tous les membres de l’industrie touristique. Tourisme Québec disposait de systèmes désuets (gestion des envois de documentation et gestion du centre d’appels) et n’avait ni les compétences, ni les technologies pour moderniser ces systèmes, pour numériser sa banque de renseignements touristiques et pour les maintenir à jour afin de répondre aux demandes des consommateurs; l’organisme a donc voulu que

99 21 46 6 Bell Canada lui fournisse des systèmes ou outils qui permettent à ses ressources de numériser cette banque et de la gérer.

Au départ, Tourisme Québec ne prévoyait pas accorder de solution technologique à toutes les entreprises touristiques; l’organisme entendait simplement convertir son achalandage en réservations faites au bénéfice de l’industrie touristique québécoise, c’est-à-dire qu’il voulait que les renseignements communiqués aux consommateurs de toute provenance qui s’adressaient à lui amènent ces consommateurs à réserver immédiatement auprès d’hôteliers du Québec; l’organisme souhaitait également confier cette activité, exorbitante de sa mission, à une autre entreprise.

Monsieur Gravel a étroitement travaillé à l’élaboration de l’entente cadre qui est la première entente de partenariat conclue par Bell Canada avec un organisme gouvernemental, entente qui comprend, entre autres dispositions : les principes de ce partenariat; une définition du projet commun, sa portée, ses objectifs ainsi que les clientèles intéressées; les obligations des parties; les services à rendre avec les livraisons correspondantes et détaillées; la gestion conjointe de l’entente cadre et des contrats particuliers qui en résulteront; le cadre financier du projet (article 7). L’entente cadre, qui en est une de partenariat, ne crée pas d’entreprise; sa gestion, qui est conjointe, est assurée par un comité exécutif, co-présidé par un premier vice-président exécutif de Bell Canada et un sous-ministre associé de Tourisme Québec ainsi que par un comité directeur présidé par monsieur Gravel et monsieur Henri Chapdelaine, directeur de l’accueil et du renseignement touristique de Tourisme Québec. La mise en place du

99 21 46 7 projet est assumée par un comité de projet co-présidé par un chargé de projet de Tourisme Québec, monsieur Sylvain Lacombe, et un chargé de projet de Bell Canada. La mise en opération des services est assurée par un comité d’opération co-présidé de la même manière. Les 4 livraisons de services prévues par l’entente cadre sont effectuées selon leurs composantes, les deux premières concernant les services et outils reliés à l’information touristique ainsi que les outils et systèmes reliés à la réservation; chaque livraison comporte des stades (conception, réalisation, implantation et exploitation) et peut fonctionner de façon autonome.

Le cadre financier du projet prévoit une enveloppe budgétaire globale établie à 30 millions de dollars incluant la participation financière de Tourisme Québec qui ne dépassera pas 15 millions de dollars et qui comprend les coûts des livraisons 1 et 4; les coûts assumés par Bell Canada sont ceux des livraisons 2 et 3, livraisons concernant le déploiement de solutions d’affaires électroniques et le déploiement des fonctionnalités de réservation de produits (commerce électronique entre consommateurs et entreprises).

L’article 7.1.5.2, qui est en litige, est l’une des dispositions de l’entente cadre relatives aux coûts assumés par Bell Canada. Selon monsieur Gravel, cette disposition est constituée de renseignements financiers concernant les coûts des services professionnels ainsi que ceux de la conception de la solution administrative et technologique assumés par Bell Canada. Les coûts des services professionnels émanent de Bell Canada qui avait la responsabilité de s’entendre avec des fournisseurs et de comptabiliser ces coûts pour ses fins.

L’article 7.1.5.2 est constitué de renseignements qui sont confidentiels parce qu’ils permettent de connaître: la capacité de Bell Canada d’assumer un coût déterminé par jour/personne pour un projet similaire;

99 21 46 8 l’ampleur des investissements à risque qui peut être soutenue par Bell Canada pour un projet similaire; les éléments sur lesquels des clients éventuels pourraient faire pression sur Bell Canada en prévision de la conclusion d’un contrat, en exigeant notamment que Bell prenne à risque une somme équivalente.

De l’avis de monsieur Gravel, la divulgation de l’article 7.1.5.2 diminuerait fortement la compétitivité de Bell Canada sur les marchés se trouvent d’importants compétiteurs qui ont les moyens d’investir de semblables sommes.

L’article 7.3.3.2, en litige, se situe sous la rubrique «Participation de Bell au Fonds de partenariat touristique». Il est constitué de renseignements financiers qui identifient la marge de profit minimal attendue par Bell Canada dans un projet similaire et qui déterminent la mécanique par laquelle le profit net est calculé. La marge de profit minimal est celle que Bell Canada identifie comme étant le seuil en deçà duquel le projet ne sera pas réalisé; cette marge révèle les expectatives de Bell Canada ainsi que sa tolérance au risque. La divulgation de ces renseignements, qui émanent de Bell Canada, profiterait à tout compétiteur qui connaîtrait la tolérance au risque de Bell Canada et, conséquemment, le type d’investissement envisagé par celle-ci et sa capacité d’investir à risque dans un projet similaire; les avantages résultant de cette divulgation nuiraient fortement à la compétitivité de Bell Canada à l’occasion d’appels d’offres similaires.

L’article 7.4 est constitué de renseignements commerciaux qui identifient de quelle façon les parties entendent traiter d’autres occasions d’affaires. Ils révèlent le plan stratégique de Bell Canada en ce qui a trait à l’industrie touristique québécoise, les modalités de réalisation de ce plan ainsi que les partenaires envisagés. Ces renseignements, qui sont cruciaux, sont toujours traités de façon très confidentielle; leur divulgation auprès de

99 21 46 9 compétiteurs ou de futurs partenaires aurait pour effet d’augmenter les coûts de Bell Canada ou les risques à assumer par l’entreprise, les compétiteurs pouvant pour leur part se positionner avantageusement sur le marché avant même que Bell Canada y soit ; la divulgation du plan stratégique diminue les espérances de Bell Canada pour ce qui est du rendement de ses investissements dans le projet parce que les compétiteurs, partenaires ou clients éventuels seraient à même de mesurer l’importance de ce plan pour Bell dans l’évaluation globale de sa participation à l’autoroute touristique québécoise.

L’entente cadre est traitée de façon confidentielle par le service juridique de Bell Canada et porte le sceau confidentiel de ce service; elle est traitée comme les documents portant la mention «Bell Canada strictement réservé», tels que les plans stratégiques d’affaires. Seules les personnes qui doivent consulter cette entente dans l’exercice de leurs fonctions y ont accès; le nombre d’exemplaires est restreint à 10 et le document est conservé sur des systèmes informatiques protégés autant en logiciels qu’en accès physique. L’utilisation de ce document à l’extérieur se fait dans des valises barrées; le document est placé dans une enveloppe pré-adressée afin d’en assurer le retour en cas de perte.

Bell Canada fait du démarchage afin de conclure, avec différents clients, d’autres ententes de même nature que celle visée par la demande d’accès.

Contre-interrogatoire de monsieur André Gravel : Le premier contrat conclu entre Tourisme Québec et Bell Canada en 1997, soit le contrat portant sur la définition de la solution administrative et technologique, fait partie des ententes que Bell Canada ne dévoile pas de façon générale.

99 21 46 10 Bell Canada traite de façon confidentielle les réponses fournies à l’organisme en mars 1997 concernant le projet afin de protéger sa compétitivité dans des dossiers similaires. Toute entente commerciale chez Bell Canada est traitée confidentiellement parce qu’elle comprend des plans stratégiques ainsi que des ententes avec des partenaires. Les réponses fournies par Bell Canada concernant sa vision d’un projet sont déposées confidentiellement; Bell Canada y applique diverses mesures de protection afin qu’elles ne soient pas communiquées. Le dépôt confidentiel de ces réponses est enregistré comme tel auprès de l’organisme.

L’entente de principe a été remplacée par l’entente cadre de partenariat visée par la demande d’accès. Les parties devaient négocier l’entente en litige afin d’établir un cadre financier qui permette la viabilité du projet de solution administrative et technologique. Il fallait trouver, de façon conjointe, «dans quelle mesure et avec quels investissements le projet pouvait être viable pour l’ensemble de l’industrie touristique québécoise…la part de chacun dans le projet selon la mission qui lui est propre.». Le refus de Tourisme Québec de fournir la contribution financière requise pour le projet ne permettait pas le partenariat avec Bell Canada. Bell Canada se serait retirée du projet si sa participation ne lui paraissait pas rentable de façon générale.

L’entente cadre régit précisément les relations entre les deux partenaires ainsi que leurs responsabilités respectives; les responsabilités ont été définies selon les missions des partenaires; ceux-ci ont convenu de séparer le projet en fonction de ces missions complémentaires et de conclure une entente de collaboration fondée sur ces missions.

Les parties n’ont pas particulièrement négocié puisque leur entente résulte d’un processus de sélection de partenaire; les lignes directrices établies par Tourisme Québec étaient très claires et Bell Canada a tenté de trouver une solution commerciale et stratégique qui convienne à l’organisme.

99 21 46 11 La première solution proposée par Bell en 1997 n’était pas viable parce que l’ensemble des coûts du projet, même ceux associés à la mission spécifique de Tourisme Québec, était assumé par Bell Canada. L’entente de principe conclue par la suite prévoit un investissement par Tourisme Québec dans le projet, ce, aux fins de sa propre mission; cet investissement donne une marge de manœuvre qui permette de rentabiliser le projet.

La solution au départ proposée par Bell Canada, tant en ce qui concerne les éléments technologiques et d’affaires, n’a pas été modifiée; les parties ont aménagé le cadre financier selon les missions respectives des partenaires.

Les comités précités sont cogérés; les décisions sont normalement prises de façon paritaire; un partenaire peut se retirer, ce qui n’empêche pas l’autre de réaliser un élément seul.

L’entente cadre établit notamment : la répartition des responsabilités des deux partenaires en fonction de leur mission respective : la mission technologique de Bell Canada et la mission de développement de l’industrie touristique de Tourisme Québec; les garanties que se consentent les parties compte tenu des ressources complémentaires qu’elles mettent en commun; la durée de l’entente (25 mars 1999 au 31 décembre 2005) ainsi que les conditions de sa reconduction automatique pour trois périodes additionnelles successives d’une année.

Le niveau d’investissement de Bell Canada peut changer. Le seuil minimal de rentabilité ou taux de rentabilité attendu est une donnée stable et ne varie conséquemment pas dans l’analyse financière d’un dossier similaire.

99 21 46 12 Le niveau d’investissement peut varier d’un projet à l’autre; il varie cependant peu lorsqu’il s’agit de projets similaires ou d’ampleur semblable.

La disposition 7.1.5.2 en litige prévoit un montant qui sert de base pour l’étude de dossiers similaires. La divulgation de ce renseignement utilisé par Bell Canada dans ses modèles financiers peut permettre à des entreprises ou clients de l’utiliser aussi; ce montant révèle les coûts réellement assumés par Bell Canada dans ce contrat, renseignement financier que Bell Canada utilise dans l’évaluation d’autres occasions d’affaires parce qu’il correspond à une réalité. Ce montant concerne la conception d’une solution technique et administrative, c’est-à-dire la création et le développement d’un modèle d’affaires destiné à susciter l’adhésion de toute une industrie; bien qu’il ait été établi en 1997, ce montant est représentatif de ce qu’il en coûterait jusqu’en 2005 pour faire le même projet. Bell Canada s’attend à devoir supporter les mêmes coûts si un projet similaire était appliqué à une autre industrie.

Bell Canada module son investissement dans le projet en fonction du taux de rentabilité attendu par elle. L’article 7.1.5.2 définit précisément la façon dont Bell Canada calcule ce montant ou investissement; cette façon de calculer est propre à Bell Canada et sa divulgation profiterait à ses compétiteurs.

L’article 7.1.5.2 fait état de coûts antérieurs assumés par Bell Canada pour le contrat d’identification de la solution administrative et technologique, coûts auxquels réfère l’article 7.1.5.4 comme étant inclus dans l’apport financier de Bell Canada au projet. Le cahier de charges précisait que ces coûts étaient assumés par le partenaire dont la candidature serait retenue pour le projet, coûts que le partenaire pouvait cependant comptabiliser dans son apport financier au projet; le partenaire n’avait cependant pas l’obligation de révéler ses estimations de coûts.

99 21 46 13 L’enveloppe budgétaire globale (7.1.1) consacrée au projet, établie à 30 millions de dollars, a été décidée conjointement par les deux parties, compte tenu de la rentabilité du projet et de sa pertinence pour l’industrie. L’entente cadre prévoit la répartition des coûts (7.1) et des revenus commerciaux (7.3) en tenant compte de la mission respective de chaque partie et de la complémentarité de ces missions. Les revenus commerciaux de chacune sont donc ceux qui proviennent des services offerts par elle dans le cadre de sa mission propre.

L’article 7.3.3.1 établit que Bell Canada versera au Fonds de partenariat touristique 50% du surplus de ses revenus commerciaux engendrés par les livraisons 2 et 3. L’article 7.3.3.2, en litige, révèle un renseignement financier qui émane de Bell Canada et qui correspond au taux minimal de rentabilité que cette entreprise attend et applique de façon générale à un dossier de risque similaire. La divulgation de ce renseignement financier concernant le pourcentage en deçà duquel Bell Canada ne serait pas partenaire permettrait à un observateur de l’industrie de connaître le risque que Bell Canada est prête à assumer. Bell Canada définit toujours son profit de la même façon.

Bell Canada a déterminé une balise minimale de rentabilité pour sa participation au projet en tenant compte des risques et de l’importance de l’investissement qui devait être fait par elle; l’article 7.3.3.2 exprime cette balise minimale de rentabilité, balise en deçà de laquelle Bell ne participe pas au projet. La communication de l’article 7.3.3.2 permettrait à un observateur, un compétiteur notamment : de connaître très exactement le niveau de risque que peut supporter Bell Canada dans l’analyse de ses décisions d’investissement pour un contrat de même type, c’est-à-dire le taux minimal de profit net effectif recherché et retenu par Bell Canada; ce renseignement, fortement compétitif, est confidentiel;

99 21 46 14 de savoir très exactement comment le taux de profit net et le surplus des revenus commerciaux sont calculés; ces éléments particuliers utilisés par Bell Canada dans ce dossier sont novateurs et procurent un avantage concurrentiel en ce qui a trait à la marge de profit minimal recherché par Bell Canada pour tout dossier similaire comprenant les mêmes occasions d’affaires, investissements et risques commerciaux à supporter; d’anticiper la valeur de ce qui est prévu à l’article 7.4. L’article 7.3.3.2, ajouté à tous les renseignements de l’entente qui ont été communiqués, identifie le risque commercial que peut prendre Bell Canada dans un projet similaire, risque qui correspond à une marge de profit déterminée. Il exprime la façon particulière selon laquelle Bell détermine le profit qu’elle veut retirer de ce contrat.

L’entente cadre en litige vise un projet qui s’adresse à une clientèle non captive, libre d’y adhérer.

L’article 7.4 est constitué de renseignements commerciaux qui concernent le développement de l’inforoute touristique et qui établissent la façon de mettre en branle des possibilités d’affaires identifiées par Bell Canada. La divulgation de cet article permettrait à des partenaires éventuels de se positionner avantageusement pour négocier avec Bell Canada leur participation au projet d’inforoute touristique, ce, au détriment des avantages concurrentiels que cette entente procure à Bell Canada.

La confidentialité de l’entente cadre est exprimée par la mention «Bell Canada réservé»; le traitement qui lui est appliqué est celui qui est accordé aux documents portant la mention «Bell Canada strictement réservé».

99 21 46 15 Interrogatoire de monsieur Bertrand Morin : Monsieur Morin est membre de l’Ordre des comptables agréés du Québec et expert comptable depuis 1981. Associé de la société de comptables agréés Ernst & Young depuis 1991, il œuvre dans le secteur de la certification d’états financiers d’entreprises; son travail quotidien l’amène à consulter des renseignements, notamment des ententes commerciales, qui appuient les états financiers des entreprises et à donner des opinions sur la confidentialité de ces renseignements en tenant compte de ceux qui doivent être inscrits dans les états financiers ou dans les notes qui y sont jointes. Sa clientèle est diversifiée : institutions financières, entreprises manufacturières, de services et de technologie de l’information; aucune de celle-ci n’a la taille de Bell Canada. La société Ernst & Young n’agit pas comme vérificateur de Bell Canada mais elle lui fournit, à l’instar d’autres sociétés de comptables agréés, d’autres services.

De façon spécifique, monsieur Morin vérifie les états financiers d’entreprises et prépare des rapports de vérification; il a accès aux renseignements qui concernent les opérations financières annuelles sur lesquelles les états financiers à vérifier prennent appui.

Il a consulté l’entente cadre visée par la demande d’accès et il la commente, à partir de son expérience de comptable agréé, expérience qui lui vaut le statut de témoin expert.

L’entente de partenariat en cause, qui porte sur un projet de commerce électronique dans le domaine du tourisme et qui lie Tourisme Québec et Bell Canada, ne prévoit pas de rapport client/fournisseur entre les parties; celles-ci conviennent, en raison de l’ampleur du projet, d’agir en partenariat afin de partager les profits et les risques.

99 21 46 16 Les ententes de partenariat comprennent des renseignements financiers et stratégiques ainsi que des modèles d’affaires; les parties y précisent la façon de bâtir un projet, leurs rôle et objectifs respectifs, la rentabilité attendue ainsi que le partage des risques.

L’article 7.1.5.2, qui traite des coûts assumés par Bell Canada, réfère expressément au coût d’un contrat préliminaire, c’est-à-dire au montant assumé par Bell Canada pour la réalisation de la première étape du projet; ce renseignement, divulgué dans un marché en émergence (commerce électronique) pour lequel les standards et modèles d’évaluation des coûts ne sont pas encore fixés, avantagerait un compétiteur en ce qu’il lui permettrait de connaître, pour un projet comparable, le coût de l’étape préliminaire.

La divulgation de ce coût renseignerait également sur l’investissement risqué par Bell Canada pour le seul contrat préliminaire, ce, sans être assurée de la conclusion de l’entente cadre; ce renseignement avantagerait un compétiteur en lui permettant de s’ajuster, seul ou avec d’autres, à la capacité de Bell et de raffiner sa stratégie d’affaires afin de lui faire face à l’occasion d’un projet comparable.

Les renseignements constituant l’article 7.1.5.2 sont de la nature de ceux que les entreprises traitent très confidentiellement; les vérificateurs consultent ces renseignements aux fins de la préparation des états financiers dans lesquels ils seront cependant «agglomérés», les états financiers ne révélant généralement pas les paramètres financiers d’un contrat.

L’article 7.3.3.2, qui traite de la participation de Bell Canada au Fonds de partenariat touristique, exprime le mécanisme selon lequel cette participation sera déterminée ainsi que le pourcentage correspondant à la marge dont Bell Canada a tenu compte pour calculer sa participation. Bell Canada contribuera au Fonds en fonction d’un profit

99 21 46 17 excédentaire que cet article définit après avoir indiqué la marge précise de rentabilité nécessaire à Bell Canada.

Les renseignements constituant l’article 7.3.3.2 sont de nature très confidentielle. Leur divulgation révèle une partie du modèle financier de Bell Canada pour un projet semblable ainsi que la rentabilité exigée par Bell Canada; ces renseignements permettent à un compétiteur d’ajuster sa proposition en conséquence lorsqu’il doit faire face à Bell Canada. La divulgation du mécanisme précité, associé au montant qui sera effectivement versé au Fonds de partenariat touristique, permettra aussi de déterminer les coûts réellement assumés par Bell Canada pour la réalisation des biens qu’elle doit livrer et que définit l’entente cadre; les coûts réels constituent des renseignements que les entreprises traitent très confidentiellement, renseignements que les vérificateurs, qui doivent les consulter aux fins de la préparation des états financiers, regroupent nécessairement avec d’autres renseignements dans leur rapport.

L’article 7.4 traite des autres occasions d’affaires découlant du même projet; ces autres occasions tiennent compte de la répartition, que les partenaires veulent adéquate, des avantages et des risques associés au projet. Il s’agit d’une disposition contractuelle nouvelle, spécifique aux projets réalisés en partenariat par des investisseurs et utilisée lorsque le niveau de risque n’est pas facile à déterminer pour l’un des investisseurs partenaires.

Cet article définit les autres occasions d’affaires, les règles que les parties appliqueront lorsque ces occasions se présenteront ainsi qu’un élément stratégique du modèle d’affaires de Bell Canada; ces renseignements sont de nature très confidentielle, notamment parce que le marché du commerce électronique est en émergence et que les paramètres de partenariat pour un projet similaire ne sont pas généralement connus.

99 21 46 18 Contre-interrogatoire de monsieur Bertrand Morin : Bell Canada n’est pas une cliente de monsieur Morin. La clientèle de celui-ci est variée en importance et lui provient du marché de la ville de Québec.

Monsieur Morin est expert comptable. À ce titre, il conseille fréquemment ses clients en ce qui concerne les paramètres d’affaires compris dans leurs contrats, paramètres qu’il ne rédige pas et que ses clients traitent confidentiellement.

L’entente visée par la demande d’accès est la première entente de partenariat avec le gouvernement du Québec qui soit portée à sa connaissance. Le commerce électronique constitue une nouvelle façon de faire des affaires; le nombre peu élevé de projets ayant atteint l’étape de la réalisation demeure le fait de quelques entreprises, parce que ce marché n’est pas encore en pleine croissance.

L’entente visée par la demande indique que Bell Canada investit dans le projet, réalise une partie de celui-ci et s’attend à en retirer des revenus. Elle prévoit la répartition des coûts du projet entre les deux partenaires; la réalisation du projet n’aurait pas été régie par une entente de partenariat si Bell n’avait pas voulu investir en assumant des coûts.

Selon l’expérience du témoin, certaines dispositions d’une entente de partenariat, telles des exigences propres à chaque partie, ne sont pas négociables.

L’article 7.1.5.2 réfère à un montant déterminé inscrit dans l’entente cadre comme étant le coût déjà assumé par Bell Canada pour la réalisation de l’étape préliminaire. Il s’agit d’un montant que les vérificateurs de Bell Canada peuvent vérifier.

99 21 46 19 Les ententes de partenariat sont rarement de courte durée parce que les revenus attendus ne sont pas immédiats; leur durée est déterminée en fonction de la rentabilité attendue par chaque partenaire, le «retour sur investissement» demeurant l’élément fondamental de toute décision financière. Le développement de l’industrie touristique au Québec ainsi que les retombées financières qui en résulteront pour l’État constituent une partie du retour sur investissement prévu par Tourisme Québec et attendu de ce partenariat avec Bell Canada.

La divulgation des renseignements financiers en litige risquerait d’avantager des entreprises qui sont moins importantes que Bell Canada et qui tentent de se tailler une place sur le marché du commerce électronique, marché très fragmenté et ouvert. Bell Canada a investi pour réaliser, à un coût exprimé dans l’entente cadre, le contrat ou étape préliminaire, ce, à un moment la conclusion de l’entente cadre n’était pas certaine; ce renseignement, qui révèle le montant que Bell Canada a alors mis à risque, n’est pas connu du marché.

La capacité financière de Bell Canada est connue; les contrats qui permettent d’atteindre cette capacité comprennent cependant des renseignements confidentiels dont la divulgation nuirait à la compétitivité de Bell Canada.

Le projet prévu par l’entente cadre est novateur, peut-être unique. La plupart des entreprises ont des paramètres de rentabilité; la marge de profit souhaitée peut varier selon différents facteurs tels que le secteur d’activité, la demande, la possibilité d’effectuer une percée.

L’article 7.3.3.2 exprime le taux de profit requis par Bell Canada pour sa participation à ce projet ou à un projet similaire. La divulgation de ce taux permettra d’établir le coût réel

99 21 46 20 assumé par Bell Canada, c’est-à-dire son investissement propre, lequel inclut le coût du contrat préliminaire.

L’article 7.4 ne comprend pas de renseignements financiers. Les renseignements qui le constituent ne sont pas fournis par Bell Canada; ils expriment la volonté commune aux parties et prévoient des droits et obligations.

Témoignage de madame Lucie Rivard : Le procureur du Syndicat fait entendre madame Lucie Rivard qui témoigne sous serment. Madame Rivard est présidente fondatrice de EPC Services-Conseils depuis 1993, entreprise spécialisée en solutions d’affaires électroniques. Son curriculum vitae comprend le détail de sa formation académique en communication (baccalauréat et étude de maîtrise), celui de son expérience et de ses divers domaines d’intervention (D-1). Madame Rivard complète son curriculum vitae en faisant état des mandats à la réalisation desquels elle participe à titre de conseillère et qui sont confiés à son entreprise par Fiducie Desjardins et la CSST.

L’entreprise dirigée par madame Rivard compte, parmi ses clients, des organismes publics du Québec ainsi que des entreprises privées; elle a également un partenaire au Colorado.

EPC Services-conseils a développé une infrastructure particulière pour le commerce électronique, infrastructure dont la mise en marché est en cours. L’entreprise agit en partenariat avec des organismes publics œuvrant dans le secteur de la santé notamment.

99 21 46 21 Madame Rivard explique que son entreprise, qui emploie des ingénieurs, est spécialisée en évaluation de solutions d’affaires électroniques; elle intervient au niveau promotionnel, dynamique interactif, transactionnel ainsi qu’au niveau de l’intégration des liens directs avec les fournisseurs, les clients et les partenaires. L’entreprise dirigée par madame Rivard ne s’est cependant jamais vu confier de mandat concernant une solution d’affaires électronique applicable à toute une industrie.

Le savoir-faire de madame Rivard en ce qui a trait aux solutions d’affaires électroniques résulte de son expérience, telle qu’elle a été mise en preuve. C’est à cet égard que le statut de témoin expert lui est consenti.

Madame Rivard a pris connaissance de l’entente cadre de partenariat visée par la demande d’accès. Son entreprise n’est pas en mesure de concurrencer Bell Canada relativement au projet d’envergure prévu en partenariat avec Tourisme Québec; les compétiteurs de Bell Canada seraient Vidéotron Québecor et, possiblement en consortium avec d’autres entreprises, DMR.

La divulgation de l’article 7.1.5.2 ne procurerait pas d’avantage à une entreprise qui a la taille de celle qu’elle dirige puisque son entreprise n’a ni la capacité d’investir de Bell Canada, ni sa capacité d’assumer les coûts envisagés durant la période prévue par l’entente cadre, ni la capacité de proposer une solution complète à l’ensemble d’une industrie.

Dans la préparation d’une soumission, les entreprises tiennent compte du facteur de risque, de leurs ressources humaines et matérielles, de la récurrence du contrat, de la possibilité de trouver un partenaire pour exécuter le contrat, du potentiel d’affaires résultant du contrat, du risque technologique, de la marge bénéficiaire. Les entreprises savent ce que leurs compétiteurs ont à offrir parce qu’ils se connaissent, qu’ils partagent

99 21 46 22 les mêmes clients et que les taux et tarifs de l’industrie sont connus. Les entreprises savent également que les fusions ont permis l’arrivée de nouveaux compétiteurs et qu’elles doivent conséquemment réviser leur stratégie et les façons de réaliser les projets, ce, d’autant plus que les clientèles de même que les besoins ainsi que les façons de réaliser un projet changent. Les entreprises ont de plus en plus recours à des partenaires pour préparer une solution.

Chaque projet est différent. La divulgation de la marge bénéficiaire de Bell Canada (résultats réels) dans un contrat de la nature de celui qui est visé par la demande d’accès avantagerait les compétiteurs. Ceux-ci seront en mesure d’en prendre connaissance à la lecture du bilan, une fois le projet réalisé. La divulgation du modèle d’affaires ne procure aucun avantage puisque ce modèle est appelé à changer avec le temps. Les équipements requis pour la réalisation du projet évoluent rapidement; la formation des ressources humaines ainsi que la connaissance des entreprises qui ont réalisé des projets similaires sont essentielles et nécessitent un investissement constant. Les coûts généraux des services-conseils ont peu varié au cours des dernières années sur le marché de Québec.

Les entreprises ne recherchent pas et n’obtiennent pas la même marge de profit d’un contrat à l’autre; dans la préparation d’une soumission, elles évaluent notamment le potentiel et le risque que représente un projet ainsi que la marge de profit qu’elles peuvent obtenir.

Madame Rivard ne peut connaître la marge de profit recherchée par Bell Canada pour ce contrat tant que celui-ci ne sera pas terminé. Elle considère que les écueils rencontrés par Bell Canada pendant l’exécution du contrat, les facteurs de succès du projet ainsi que le profit réalisé par Bell Canada sont des outils stratégiques qui, s’ils étaient connus, lui

99 21 46 23 indiqueraient exactement si ce genre de projet est rentable, ce que lui coûterait et ce que lui rapporterait un projet similaire, outils qui lui permettraient d’orienter sa vision d’affaires en conséquence.

Contre-interrogatoire de madame Lucie Rivard : Bell Canada a des compétiteurs pour des projets similaires à celui visé par l’entente cadre de partenariat avec Tourisme Québec : Vidéotron Québecor et AT&T, Telus, DMR et Sprint dans le cadre d’un consortium; d’autres entreprises peuvent aussi concurrencer Bell Canada par l’entremise d’un consortium. L’entreprise présidée par madame Rivard pourrait faire partie d’un consortium qui concurrencerait Bell Canada.

La marge bénéficiaire que recherchent les entreprises est connue : à Québec, elle est environ de 5% alors qu’elle peut atteindre 10% sur le marché de Montréal; les résultats de fins d’année financière le démontrent. Le potentiel d’affaire à long terme peut amener une entreprise à majorer son investissement et à réduire sa marge de profit.

La marge bénéficiaire évaluée et recherchée par une entreprise n’est pas, contrairement à l’investissement et au partage des revenus, inscrite dans le contrat qui la lie à son client ou dans une entente de partenariat.

La marge de profit recherchée par une entreprise peut varier d’un contrat à l’autre; c’est à l’entreprise de la déterminer préalablement.

L’entreprise que préside madame Rivard n’offre pas encore de services électroniques intégrés ou «mur à mur» comme ceux fournis par Bell Canada en vertu de l’entente cadre de partenariat. Son entreprise est actuellement à implanter une infrastructure qui lui

99 21 46 24 permettra d’intégrer des solutions lorsqu’elle sera commercialisée. Madame Rivard ignore si la marge bénéficiaire que recherchera son entreprise lorsque cette infrastructure sera commercialisée sera la même que celle qu’elle recherche actuellement.

Le procureur du Syndicat dépose enfin une copie d’un document intitulé «Le vérificateur général du Québec- Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 1999-2000- tome concernant le partenariat d’affaires public-privé (D-2).

ARGUMENTATION : A) Tourisme Québec : La procureure de Tourisme Québec rappelle que le responsable a refusé de communiquer les renseignements qui demeurent en litige en vertu des articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels parce que Bell Canada, qui les a fournis à l’organisme, n’a pas consenti à cette communication.

Elle précise que ces renseignements font partie de la section 7 intitulée «Cadre financier du projet» et des sous-sections 7.1.5 «Coûts assumés par Bell», 7.3.3 «Participation de Bell au Fonds de partenariat touristique» et 7.4 «Autres occasions d’affaires».

Elle soutient que le document visé par la demande d’accès constitue une entente cadre de partenariat qui comprend des renseignements fournis par Bell Canada, renseignements visés par les articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès 2 . 2 Hydro-Pontiac inc. c. St-Ferréol-Les-neiges, [1997] C.A.I. 53, 64; Cogénération Kingsey c. Burcombe, [1996] C.A.I. 420 (C.Q.).

99 21 46 25 B) Bell Canada : Le procureur de Bell Canada rappelle que cette entente cadre de partenariat prévoit que les deux partenaires s’associent selon un modèle de partenariat pour, entre autres, la conception, la réalisation, l’implantation et l’exploitation d’une place d’affaires électroniques qui permette à l’industrie touristique québécoise de vendre ses produits et services et aux consommateurs de se renseigner.

Il avance que la preuve démontre que l’article 23 de la Loi sur l'accès s’applique aux renseignements en litige qui sont financiers, commerciaux, de nature confidentielle et qui sont fournis par Bell Canada qui les traite habituellement de façon confidentielle.

À son avis, le témoin Gravel, qui est le principal intervenant dans le projet, a établi que l’entente a été conclue à la suite d’un processus de sélection de partenaire, non pas à la suite d’un appel d’offres et que la conclusion de cette entente a nécessité la mobilisation de nombreux effectifs de Bell Canada et qu’elle a donné lieu à dépenses de près de 2 millions de dollars assumées par Bell Canada.

Il souligne que l’entente cadre de partenariat prévoit une répartition des revenus commerciaux et des risques et qu’elle identifie le degré de risque accepté par Bell Canada pour occuper un champ précis d’activités. À son avis, la divulgation des renseignements en litige, qui ont été fournis par Bell Canada comme le révèle le témoignage de monsieur Gravel, avantagerait les compétiteurs de Bell Canada ainsi que les contractants éventuels de l’entreprise qui, en conséquence, en subirait un préjudice.

Il soutient que la preuve démontre que l’article 7.1.5.2 quantifie l’apport financier de Bell Canada au projet ainsi que le coût du projet préliminaire antérieurement assumé par cette entreprise. À son avis, la divulgation de cet article identifiant le degré de risque accepté

99 21 46 26 par Bell Canada dans un marché en émergence risquerait vraisemblablement d’entraver une négociation en vue de la conclusion de contrats potentiels et de nuire de façon substantielle à la compétitivité de Bell Canada.

Le procureur de Bell Canada soutient également que l’article 7.3.3.2 indique la marge de profit minimal attendu par sa cliente dans ce projet, renseignement fourni par Bell Canada et non négocié.

Il soutient enfin que l’article 7.4 «Autres occasions d’affaires» est constitué de renseignements commerciaux qui identifient la stratégie ou modèle d’affaires de Bell Canada dans l’industrie touristique; la divulgation de cette disposition risquerait vraisemblablement d’affecter le profit attendu par Bell Canada dans le projet, l’entreprise ayant accepté de conclure l’entente cadre en raison de la potentialité d’autres occasions d’affaires dans ce marché.

À son avis, monsieur Gravel a par ailleurs clairement établi que Bell Canada traite habituellement de façon confidentielle les renseignements en litige alors que monsieur Morin a démontré la nature confidentielle de ces renseignements dont la divulgation révèlerait le niveau de risque ainsi que le plan stratégique de Bell Canada et risquerait par conséquent de causer un important préjudice à l’entreprise.

Il signale que la preuve révèle que madame Rivard n’a jamais participé à une entente de l’envergure de celle qui est visée par la demande et qui résulte d’un processus de sélection de partenaire.

À son avis, madame Rivard a aussi admis qu’elle ne connaît pas les marges bénéficiaires attendues pour ce genre d’entente et qu’elle aimerait les connaître.

99 21 46 27 Il rappelle, à l’instar de la procureure de l’organisme, que c’est la nature des renseignements qui doit être prise en considération et non la nature du document dans lequel ils se trouvent 3 . Il souligne que la Commission a antérieurement considéré que les coûts et stratégies d’une entreprise sont confidentiels, leur divulgation risquant vraisemblablement de procurer un avantage appréciable à une autre personne 4 . Il souligne également que la Cour du Québec a décidé que le risque de préjudice découlant de la divulgation de renseignements de nature confidentielle est proportionnel au degré de confidentialité même de ces renseignements qui sont perçus comme confidentiels justement parce que leur divulgation risquerait de nuire à la compétitivité d’une entreprise. 5 Il rappelle que la Commission a aussi réitéré : «qu’en dépit de l’absence de preuve par le tiers quant à la nature confidentielle des renseignements en litige, la Commission a reconnu…le caractère objectivement confidentiel des renseignements portant, entre autres, sur les coûts ventilés… que la divulgation de renseignements provenant de l’expertise de l’entreprise et de son savoir-faire pouvait, au terme de l’article 24 de la loi, avantager de façon appréciable les autres concurrents œuvrant dans le même secteur d’activités; que ce n’est pas parce que nous sommes en présence d’un contrat que les articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès ne peuvent recevoir application…» 6 . Il souligne que la Commission a déjà reconnu que la divulgation d’une solution d’affaires profitable, réutilisable et fournie par un tiers œuvrant dans un contexte concurrentiel

3 Entretien Sani Choc inc. c. Musée de la Civilisation, [1993] C.A.I. 184, 188. 4 Idem. 5 Cogénération Kingsey c. Burcombe, [1996] C.A.I. 420, 424. 6 Norstan Canada c. Université de Sherbrooke et Bell Canada, [1997] C.A.I. 226, 240, 242.

99 21 46 28 risquerait vraisemblablement de procurer un avantage appréciable à une autre personne et de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers. 7 Le procureur de Bell Canada soutient enfin que les stratégies de négociation et de développement rentable d’un projet, comme celles prévues à l’article 7.4 de l’entente cadre, sont confidentielles en vertu des articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès 8 . Il signalera en réplique que : l’article 7.1.1 et 7.1.2 sont précis concernant l’investissement de Bell Canada; l’article 3.2 est précis en ce qui a trait à la durée limitée de l’entente cadre; Bell Canada a développé un modèle novateur transposable et exportable; Bell Canada est un gros joueur à l’intérieur d’un marché mondial; la preuve présentée par Bell Canada n’a pas été contredite. C) le Syndicat : Le procureur du Syndicat rappelle que la Cour Suprême a souligné que l’accès à l’information est un principe qui a pour objet général de favoriser la démocratie en aidant à garantir que les citoyens possèdent l’information nécessaire pour participer utilement au processus démocratique et que les politiciens et bureaucrates demeurent comptables envers l’ensemble de la population; la Cour, signale-t-il, a notamment indiqué que les lois sur l’accès à l’information présupposent que les renseignements pertinents sur le plan politique devraient faire l’objet d’une diffusion aussi large que raisonnablement possible 9 . À moins, d’ajouter le procureur, que les renseignements proviennent clairement de tiers.

7 Joli-Cœur, Lacasse, Lemieux, Simard, St-Pierre c. Québec (Ministère du revenu), [1998] C.A.I. 34, 47. 8 Hydro-Pontiac inc. c. St-Ferréol-Les-Neiges, [1997] C.A.I. 53, 64. 9 Dagg c. Canada (Ministre des Finances), [1997] 2 R.C.S. 403, 432-434.

99 21 46 29 Référant au rapport que le vérificateur général a déposé à l’Assemblée nationale sur le partenariat d’affaires public-privé (D-2, pages 311, 313, 321) et qui, entre autres, porte sur le projet visé par l’entente cadre, le procureur du Syndicat cite les extraits suivants :

«11.24 Nos travaux confirment que les projets montrent certaines des caractéristiques attendues d’un partenariat d’affaires public-privé… Par contre, il est impossible de savoir s’il y a répartition équitable des investissements financiers, des responsabilités et des risques, eu égard au partage des bénéfices rattachés à une solution donnée. En général, les ententes-cadres font ressortir l’instauration d’une relation dont les attributs correspondent davantage à ceux du rapport client-fournisseur traditionnel. Ainsi, les assises d’un véritable partenariat n’ont pas été clairement établies. 11.25 Par ailleurs, il importe de souligner que les conditions favorisant le respect des principes de transparence, d’équité et d’obtention des biens et services requis de façon économique n’ont pas toujours été respectées… 11.66 Lors de la négociation d’un contrat, les entités gouvernementales doivent prendre les moyens nécessaires pour que le document rédigé traduise les conditions d’un partage équitable des investissements financiers, des risques, des responsabilités et des bénéfices. Or, aucune des ententes-cadres que nous avons parcourues ne reflète un tel partage. 11.67 Nos travaux indiquent plutôt une reprise des conditions caractéristiques de l’approche client-fournisseur Ainsi, les fournisseurs répondent en général à chacune des attentes des entités, tandis qu’ils sont rémunérés selon des taux journaliers fixes; on ne saurait parler d’une juste répartition des investissements financiers et des risques».

99 21 46 30 À son avis, le vérificateur général conclut, contrairement à ce que prétend Bell Canada, que ces contrats ne sont pas de véritables ententes de partenariat et qu’il est impossible de connaître les investissements, risques, bénéfices et responsabilités des partenaires privés. Il avance qu’il importe de qualifier la nature de l’entente visée par la demande afin de déterminer la provenance des renseignements en litige, renseignements qui, selon le vérificateur, sont impossible à savoir. À son avis également, le principe de transparence des contrats conclus avec l’État doit être totalement respecté, ces contrats étant constitués de dispositions nécessairement négociées, donc non imposées par l’une ou l’autre des parties. Il soutient à cet égard que même la recette ou le modèle de Bell Canada résulte d’une négociation entre les parties, négociation qui a donné lieu à une entente qui n’en est pas une de partenariat.

Le procureur du Syndicat soutient particulièrement que les renseignements en litige ne sont pas fournis par un tiers, les restrictions invoquées par Tourisme Québec ne pouvant dès lors recevoir application. La Commission, rappelle-t-il, a décidé que seuls les renseignements provenant exclusivement d’un tiers, donc à l’exclusion de l’organisme, sont réputés avoir été fournis par un tiers 10 . Il soutient que les parties ont discuté des conditions de l’entente et défini leurs obligations réciproques, renseignements que Bell Canada n’a pas imposés à Tourisme Québec. Il souligne que la Commission a déjà décidé qu’un contrat entre un organisme public et un tiers ne peut contenir de renseignements fournis par un tiers, qu’un contrat est avant tout le résultat d’une négociation qui consigne les conditions auxquelles les parties ont accepté de se soumettre et qu’il est impossible de savoir quelle partie a pris l’initiative de telle ou telle condition 11 . À son avis, la Commission doit être convaincue qu’un renseignement résulte de l’initiative du tiers pour considérer qu’il a été fourni par un tiers. 10 Norstan Canada inc. c. Université de Sherbrooke et Bell Canada, [1997] C.A.I. 226, 240, 243. 11 Boucher c. Québec (Ministère des Affaires municipales) et Compo-Haut-Richelieu inc., [1996] C.A.I. 378, 384; Joncas c.Centre de santé de la Basse Côte-Nord, [1992] C.A.I. 319; Marcouiller inc. c. Hydro-Québec et Cégerco Constructeur inc., [1995] C.A.I. 168, 172; Nadeau c. Société d’habitation et de développement et Hippodrome Blue Bonnets inc., [1992] C.A.I. 197, 201; Syndicat canadien de

99 21 46 31 Il avance également que l’entente cadre visée par la demande, elle-même soumise à des facteurs qui varieront dans le cas d’une autre entente, concerne un projet unique au Québec; selon le procureur du Syndicat, la divulgation des renseignements en litige ne risquerait pas, vraisemblablement, d’avoir l’un des effets prévus par l’article 24 de la Loi sur l'accès 12 . Le procureur rappelle que le Code civil du Québec prévoit, par son article 1378, que le contrat est un accord de volonté, par lequel une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres à exécuter une prestation. Le contrat, soutient-il, est un tout reflétant les obligations mutuelles des parties, le fruit de concessions réciproques sur chaque point.

Il énumère certaines des dispositions de l’entente cadre visée par la demande qui, à son avis, confèrent un caractère unique et exclusif à cette entente et qui contrecarrent toute atteinte à la compétitivité de Bell Canada dans le domaine touristique : son objet, qui consiste à établir les principes directeurs et les modalités cadres qui régiront les relations entre les parties pour la réalisation du projet, cette entente cadre devant être complétée par des contrats particuliers (article 3.1); sa longue durée, du 25 mars 1999 jusqu’au 31 décembre 2005, avec reconduction automatique pour trois périodes additionnelles successives d’une année (article 3.2); les principes directeurs, non imposés parce que convenus par les parties, voulant que le projet soit conjointement géré par elles, qu’il y ait transfert mutuel des connaissances (article 3.3.3), que des mécanismes de contrôle rigoureux des coûts du projet soient implantés (3.3.4) et que les coûts et revenus commerciaux soient répartis entre les parties (article 3.3.6);

la fonction publique c.Centre hospitalier Anna-Laberge et Salubriko, [1990] C.A.I. 302, 305. 12 Journal de Montréal c. Société immobilière de Québec, [1993] C.A.I. 244, 246.

99 21 46 32 les obligations réciproques précises relatives au partage des coûts et des revenus entre les parties, lesquelles comprennent les renseignements en litige inscrits aux articles 7.1.5.2 et 7.3.3.2 .

À son avis, les obligations relatives aux coûts assumés par Bell Canada ne sont pas fournies par ce tiers et n’ont pas été imposées par lui; ces obligations, incluant l’article en litige 7.1.5.2, résultent de négociations intervenues entre les parties et ne proviennent pas exclusivement de Bell Canada qui, finalement, les a acceptées.

Le procureur du Syndicat soutient, compte tenu de la durée de l’entente cadre et de l’unicité du projet, à son avis confirmées par la preuve, que la concurrence avec Bell Canada n’est pas possible et que la divulgation de l’article 7.1.5.2 concernant les coûts assumés par Bell Canada ne risquerait pas vraisemblablement d’avoir l’un des effets prévus par l’article 24 de la Loi sur l'accès.

La preuve, avance-t-il particulièrement, démontre que la capacité financière de Bell Canada, société publique, est connue. Cela étant, la divulgation des renseignements en litige ne saurait risquer vraisemblablement de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de Bell Canada.

À son avis, l’article 4 de l’entente (responsabilités générales des parties), qui a été communiqué, exprime déjà la recette, la stratégie ou le modèle de Bell Canada; la divulgation de l’article 7.1 en entier, qui ne constitue que le pendant financier de l’article 4, ne saurait, selon lui, risquer vraisemblablement d’avoir l’un des effets prévus par l’article 24 de la Loi sur l'accès. Enfin, l’article 7.1.5.2 en litige est une disposition obligatoire de l’entente, contrepartie obligatoire qui doit être assumée par Bell Canada.

99 21 46 33 Il soutient que le témoignage de monsieur Gravel établit que l’entente prévoit un cadre global constitué des droits et obligations que les parties ont négociées après avoir réalisé que la solution proposée en 1994 n’était pas viable et après avoir aménagé un autre cadre financier négocié. À son avis, la preuve démontre que les coûts en litige sont ceux de 1997, que la technologie évolue rapidement, que le marché est en émergence et que les approches, façons de faire et coûts ne sont plus les mêmes, chaque projet étant «taillé sur mesure». Il soutient que la preuve démontre clairement que le niveau d’investissement peut varier considérablement d’un projet à l’autre puisque le nombre de variables est important; conséquemment, signale-t-il, la divulgation des renseignements en litige ne saurait ni révéler l’investissement que consentirait Bell Canada dans un autre projet, ni procurer un avantage appréciable à une autre personne.À son avis également, la preuve démontre que le profit ou la perte ne peuvent s’apprécier qu’une fois un projet terminé; la divulgation des renseignements en litige ne sauraient donc révéler ces renseignements.

Il rappelle que monsieur Gravel a affirmé que tous les dossiers ne sont pas semblables et que les investissements sont modulés selon les intérêts de celui qui les fait.

Il soutient spécifiquement que : l’article 7.1.5.2 est constitué d’obligations réciproques et ne révèle pas de recette ou de modèle; l’article 7.3.3.2 est constitué d’obligations nécessairement négociées, non imposées ou fournies par Bell Canada; il ne comprend ni analyse financière, ni secret; la divulgation du pourcentage qui y est exprimé quant au profit est sans effet si aucune analyse financière ne complète ce renseignement; l’article 7.4 n’émane pas exclusivement de Bell Canada; cette disposition exprimerait plutôt une volonté commune et serait constituée d’obligations mutuelles et négociées.

99 21 46 34 Il soutient enfin que, pour l’application des restrictions invoquées, la preuve doit démontrer que les renseignements en litige ne sont pas communs aux parties, qu’ils ne résultent pas de leurs négociations et qu’ils proviennent exclusivement de Bell Canada 13 . Il rappelle que les renseignements en litige ne sont pas des éléments constitutifs d’une soumission fournie par Bell Canada ou d’un projet d’entente cadre encore loin de son aboutissement.

DÉCISION : J’ai pris connaissance de l’entente cadre de partenariat qui a été conclue le 25 mars 1999; je note que sa durée de six ans et neuf mois est minimale puisqu’elle comprend des dispositions relatives à sa reconduction automatique; je note également qu’elle est constituée de 36 pages et que l’équivalent de 35 pages a été communiqué au syndicat.

Cette entente a pour objet de régir les relations entre deux partenaires, Tourisme Québec et Bell Canada, non seulement pour la conception, la réalisation et l’implantation d’un projet commun, mais également pour l’exploitation de ce projet que les partenaires veulent viable, projet qu’ils s’engagent à faire évoluer et qu’ils définissent ainsi : «Place d’affaires électronique de l’industrie touristique du Québec».

L’entente cadre de partenariat prévoit, notamment, la répartition des responsabilités, des coûts et des revenus commerciaux entre les partenaires ainsi qu’une volonté commune de s’avantager mutuellement dans la réalisation de leur mission respective, les avantages obtenus par Bell Canada étant obtenus pour ses clients et actionnaires.

13 Waxman c. Hydro-Québec, [1992] C.A.I. 72.

99 21 46 35 Les partenaires ont aménagé un cadre financier en fonction de leur mission respective; ils mettent en commun leurs ressources, expertises, compétences ainsi que les produits et services de Bell Canada. Les dispositions en litige font partie du cadre financier du projet; elles en sont, avec d’autres, des éléments constitutifs.

Je dois, en examinant la décision du responsable de l’organisme, vérifier si ces renseignements sont, compte tenu de leur libellé, de l’ensemble de l’entente et de la preuve, visés par les restrictions impératives prévues par les articles 23 et 24 de la Loi sur l'accès.

À mon avis, la rédaction de ces trois dispositions ne nécessite pas interprétation; elle est, à l’instar de la preuve qui a été présentée, claire.

Je souligne que monsieur André Gravel est le seul témoin qui soit étroitement associé tant à la solution d’affaires électronique qui a été proposée par Bell Canada, qu’à l’élaboration de l’entente cadre de partenariat et à la gestion du projet commun; son témoignage, dont certains éléments ont été réitérés en contre-interrogatoire, m’aura particulièrement convaincue.

Je souligne également que la preuve démontre que Bell Canada, dans le cadre de ses affaires relatives à la vente de technologies : a proposé à Tourisme Québec une solution commerciale et stratégique complète en réponse à l’appel de propositions lancé par l’organisme, solution nouvelle et réutilisable; a spécifiquement proposé, en fonction de sa mission propre, son investissement dans des éléments déterminés du projet commun, éléments incluant un investissement déjà effectué et dont le montant établi, assumé par Bell Canada, est inscrit dans l’entente;

99 21 46 36 le refus de Tourisme Québec de fournir la contribution financière requise pour le projet ne permettait pas le partenariat avec Bell Canada; a spécifiquement proposé le profit attendu de son partenariat dans le projet; Bell Canada se serait retirée du projet si sa participation ne lui avait pas semblé rentable de façon générale; a spécifiquement proposé une solution commerciale et stratégique relative au potentiel d’affaires du même projet; ne détient pas l’exclusivité dans le commerce des solutions d’affaires électroniques; ses propositions commerciales sont en compétition avec celles d’autres joueurs majeurs ou de joueurs dont la capacité de concurrencer est augmentée par la conclusion de fusions, d’alliances ou la participation à un consortium; effectue des démarches pour participer à des projets similaires et recherche des contrats similaires; investit, dans le projet en partenariat, des ressources financières dans une certaine mesure, partage le risque commercial que représente ce projet commun et s’attend à retirer de l’exploitation de ce projet un profit minimal qu’elle définit et qui fait partie de sa stratégie d’investisseur; n’aurait pas participé au projet si elle n’avait pas obtenu ses conditions; fournit au projet, en plus de ressources financières, des compétences technologiques et des effectifs de commercialisation; traite habituellement de façon confidentielle les dispositions financières et commerciales en litige, lesquelles sont réutilisables aux fins de projets similaires; a proposé sa solution commerciale et stratégique, son modèle de partenariat applicable à des projets similaires, ce, dans le cadre d’un marché encore en émergence.

A) L’article 7.1.5.2 :

99 21 46 37 Cet article traite de certains coûts assumés par Bell Canada; il comprend les renseignements financiers suivants: les coûts assumés par Bell Canada pour la réalisation du contrat préliminaire; certains autres coûts assumés par Bell Canada. La preuve me convainc que ces renseignements financiers et commerciaux: expriment l’ampleur des investissements à risque que Bell Canada accepte de soutenir pour ce projet et pour un projet similaire; définissent précisément la façon dont Bell Canada calcule son investissement; cette façon de calculer est stratégique et propre à Bell Canada et sa divulgation profiterait à ses compétiteurs; sont utilisés par Bell Canada dans l’évaluation d’autres occasions d’affaires semblables parce qu’ils correspondent à une réalité que sauraient aussi utiliser des compétiteurs de Bell; émanent de Bell Canada qui les a proposés à Tourisme Québec afin d’établir le cadre financier incluant le partage des coûts du projet commun; expriment une partie de la solution commerciale et stratégique de Bell Canada, solution réutilisable; indiquent conséquemment les éléments sur lesquels des clients éventuels pourraient faire pression sur Bell Canada en prévision de la conclusion d’un contrat, en exigeant notamment que Bell prenne un risque équivalent; sont nécessairement fournis par Bell Canada; sont habituellement traités de façon confidentielle par Bell Canada; sont de nature confidentielle. Les conditions d’application de l’article 23, qui se lit comme suit et qui a été invoqué par le responsable, sont réunies :

99 21 46 38 23. Un organisme public ne peut communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle fourni par un tiers et habituellement traité par un tiers de façon confidentielle, sans son consentement.

La preuve me convainc particulièrement que la divulgation de l’article 7.1.5.2 risquerait vraisemblablement de nuire de façon substantielle à la compétitivité de Bell Canada sur les marchés se trouvent d’importants compétiteurs qui ont les moyens d’investir dans la même mesure ou d’assumer de pareils coûts en ce qui concerne des projets similaires; la preuve me convainc également que la divulgation de cette disposition risquerait vraisemblablement de procurer un avantage appréciable à une autre personne. Les conditions d’application de l’article 24, restriction impérative qui se lit comme suit et qui a aussi été invoquée par le responsable, sont réunies : 24. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement fourni par un tiers lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à ce tiers, de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers, sans son consentement.

B) L’article 7.3.3.2 : Cette disposition renseigne précisément sur le taux de rentabilité attendu par Bell Canada pour sa participation au projet.

La preuve me convainc que ce renseignement financier et commercial : identifie le risque commercial que soutient Bell Canada ainsi que la marge de profit minimal attendue par Bell Canada dans un projet similaire; détermine spécifiquement la mécanique stratégique selon laquelle Bell Canada calcule toujours son profit net; révèle les expectatives de Bell Canada ainsi que sa tolérance au risque; est nécessairement fourni par Bell Canada;

99 21 46 39 correspond au taux minimal de rentabilité que cette entreprise attend et applique de façon générale à un dossier de risque similaire; est habituellement traité par Bell Canada de façon confidentielle; est de nature confidentielle. La preuve me convainc que la divulgation de ce renseignement, nécessairement fourni par Bell Canada et concernant le pourcentage en deçà duquel l’entreprise ne serait pas partenaire, permettrait à un observateur de l’industrie de connaître le risque que Bell Canada est prête à assumer pour un projet similaire.

La preuve me convainc que la divulgation de ce renseignement profiterait à tout compétiteur qui connaîtrait la tolérance au risque de Bell Canada, le type d’investissement envisagé par celle-ci et sa capacité d’investir à risque dans un projet similaire; les avantages appréciables résultant de cette divulgation nuiraient substantiellement à la compétitivité de Bell Canada à l’occasion d’appels d’offres concernant des projets similaires.

Les conditions d’application des articles 23 et 24, restrictions impératives précitées, sont réunies.

C) L’article 7.4 : Comme l’a indiqué le témoin Gravel, cette disposition concerne les autres occasions d’affaires concernant la «Place d’affaires électronique de l’industrie touristique du Québec» visée par l’entente cadre, occasions qui se présenteront pendant la durée déterminée de cette entente.

99 21 46 L’article 7.4 définit précisément ce potentiel d’affaires. Il est essentiellement constitué de renseignements commerciaux précisant le plan stratégique proposé par Bell Canada dans le domaine de l’industrie touristique québécoise. La preuve me convainc que la divulgation du plan stratégique diminue les espérances de Bell Canada pour ce qui est du rendement de ses investissements dans le projet parce que les compétiteurs, partenaires ou clients éventuels de Bell seraient à même de mesurer l’importance de ce plan d’affaires pour Bell dans l’évaluation globale de sa participation à l’autoroute touristique québécoise. vraisemblablement de procurer un avantage appréciable à une autre personne.

La preuve démontre que ces renseignements sont toujours traités confidentiellement par Bell Canada et qu’ils sont de nature confidentielle.

La pièce D-2 : Je tiens à assurer le procureur du syndicat que j’ai pris connaissance de la pièce D-2 qu’il a déposée et dont une partie du contenu a appuyé son argumentation. J’ajouterai que les commentaires du vérificateur général, dont l’exactitude et la pertinence ne sauraient ici être discutées, n’ont pas eu d’effet direct sur la preuve qui m’a convaincue.

Le renseignement personnel : Le responsable de l’organisme a enfin extrait de l’entente cadre un renseignement nominatif dont le caractère confidentiel, en vertu de l’article 53 de la Loi sur l'accès, est évident : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale;

40 La divulgation de ce plan risquerait

99 21 46 41 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion.

54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier.

PAR CES MOTIFS, la Commission rejette la demande. HÉLÈNE GRENIER Commissaire

Québec, le 8 janvier 2002. M e Denis Bradet, Grondin, Poudrier, Bernier avocat du demandeur.

M e Lise Collins, Tourisme Québec avocate de l’organisme.

M e Robert Guertin, Laroche, Bich avocat du tiers.

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