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01 02 58 UGOLINI, Bruno Demandeur c. COMMISSION SCOLAIRE ENGLISH MONTREAL Organisme LA DEMANDE M. Bruno Ugolini demande, auprès de la Commission scolaire English Montreal (lorganisme), par lettre datée du 8 janvier 2001, accès aux « […] minutes of meeting for the Executive Committee of the Council of Commissioners since July l999, including attachments ». Le Secrétaire-général et directeur des archives, Madame Joanne Bisbikos, lui répond le 22 janvier 2001 que les réunions de ce comité sont confidentielles et quelle doit, en conséquence, refuser cette demande. Le 19 février 2001, M. Ugolini demande de faire réviser cette décision par la Commission d'accès à l'information (la Commission). Laudience a lieu à Montréal le 25 mai 2001. LAUDIENCE La remise des documents Lors de laudience, le conseiller juridique de lorganisme fait valoir que celle-ci avait cru de bonne foi, au moment de recevoir la demande de M. Ugolini, que ces documents étaient inaccessibles mais, quaprès analyse juridique, elle a modifié sa position. Mme Johanne Bisbikos, responsable de l'accès, explique qu'elle avait cru que les séances du comité exécutif
01 02 58 2 n'étant pas de la nature d'une assemblée publique, les procès-verbaux n'étaient pas accessibles. La nouvelle position de l'organisme était que tous ces procès-verbaux étaient accessibles, sauf en ce qui concerne les renseignements nominatifs qui sy trouvaient et qui devaient être gardés confidentiels en vertu de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la Loi), d'une part, et d'autre part, des références aux opinions juridiques et aux litiges en cours. Selon la preuve non-contredite, entre juillet l999 et le 8 janvier 2001, date de la demande daccès, il y a 13 procès-verbaux qui ont été adoptés. Quatre de ces procès-verbaux, soit ceux du 25 août l999, 29 septembre 1999, 26 avril 2000 et 27 septembre 2000 étaient remis au demandeur, M. Ugolini, au début de laudience. Lorganisme sest engagé à remettre au demandeur, dans la semaine qui suivait la date de laudience, les autres procès-verbaux élagués. Les positions des parties respectives quant aux informations pour lesquelles laccès est refusé La suite de laudience a porté sur la justification de la position prise par lorganisme, à savoir que certaines informations devaient être masquées dans les procès-verbaux. Le demandeur, M. Ugolini, a fait valoir son point de vue à leffet que l'article 167 de la Loi sur linstruction publique 2 oblige lorganisme à concéder la nature publique des réunions de son comité de direction. Il cite à ce sujet un jugement de la Cour supérieure de l998, The Gazette v. English Montreal School Board 3 . Selon lui, linformation provenant des réunions du comité exécutif devrait être accessible. 1 L.R.Q., c. A-2.1. 2 L.R.Q., ch. I-13.3. 3 C.S. Montréal, n o 500-05-046607-980, 9 décembre 1998, j. Tellier.
01 02 58 3 La position de lorganisme se résume simplement. Madame Joanne Bisbikos témoigne quil ny a pas de pièces jointes aux treize procès-verbaux remis au demandeur. Les informations masquées dans neuf de ces procès-verbaux le sont pour deux raisons prévues à la Loi : soit quil y a des opinions juridiques ou des informations se rapportant aux litiges en cours, soit quil y figurent des renseignements nominatifs concernant des tierces personnes. Lexamen des informations devant être masquées, selon lorganisme, sest poursuivi en dehors de la présence des demandeurs. Le procureur de lorganisme a fait valoir le point de vue de lorganisme, notamment en référant au secret professionnel qui s'étend aux avis juridiques et aux litiges auxquels celui-ci était toujours associé. Selon lui, ces informations seraient soustraites à l'accès en vertu des articles 31 et 32 de la Loi et l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 4 : 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire. 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel. En outre, il soumet que le caractère nominatif de certains renseignements concernant ses employés loblige, en vertu des articles 53 et suivants de la Loi, à garder confidentielles des informations à leur sujet si le caractère public n'est pas prévu expressément et s'il n'y a pas de consentement à leur divulgation. 4 L.R.Q., c. C-12.
01 02 58 4 Lorganisme a fait valoir, à l'occasion de l'audience, une position de principe quant à l'effet que les séances du comité exécutif n'étaient pas publiques et ceci en vertu des articles 167, 181 et 182 de la Loi sur l'Instruction publique. LES FAITS ET LE DROIT PERTINENT Les motifs d'exclusion facultatifs invoqués hors délai L'organisme invoque trois motifs pour retirer certaines parties des documents en litige du regard du demandeur. Ces motifs sont : la protection de renseignements personnels, le secret professionnel et les litiges en cours. Ces exceptions à l'accès furent invoquées tardivement, en dehors du délai de 20 jours prévu à l'article 47 de la Loi : 47. Le responsable doit, avec diligence et au plus tard dans les vingt jours qui suivent la date de la réception d'une demande: 1° donner accès au document, lequel peut alors être accompagné d'informations sur les circonstances dans lesquelles il a été produit; 2° informer le requérant des conditions particulières auxquelles l'accès est soumis, le cas échéant; 3° informer le requérant que l'organisme ne détient pas le document demandé ou que l'accès ne peut lui y être donné en tout ou en partie; 4° informer le requérant que sa demande relève davantage de la compétence d'un autre organisme ou est relative à un document produit par un autre organisme ou pour son compte; 5° informer le requérant que l'existence des renseignements demandés ne peut être confirmée; ou 6° informer le requérant qu'il s'agit d'un document auquel le chapitre II de la présente loi ne s'applique pas en vertu du deuxième alinéa de l'article 9. Si le traitement de la demande dans le délai prévu par le premier alinéa ne lui paraît pas possible sans nuire au déroulement normal des activités de l'organisme public, le responsable peut, avant l'expiration de ce délai, le prolonger d'une période n'excédant pas dix jours. Il doit alors en donner avis au requérant par courrier dans le délai prévu par le premier alinéa. 50. Le responsable doit motiver tout refus de donner communication d'un renseignement et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie. Or, selon une jurisprudence qui remonte à la fin des années '80, la Commission a souvent refusé d'accepter les motifs d'exclusion à l'accès invoqué en dehors des délais et des modalités
01 02 58 5 de l'article 47 5 . Pour accepter des motifs hors délai, il faut d'abord examiner s'il n'y a pas, dans la Loi, des contraintes inhérentes à l'accès. Deuxièmement, il faut examiner les circonstances de chaque dossier afin de voir les raisons qui pourraient justifier à un organisme de soulever, hors délai, de nouveaux motifs pour restreindre l'accès. En premier lieu, on note que la Loi fait une exception générale à l'accès en ce qui concerne les renseignements nominatifs. Ce motif, qui est impératif, peut par conséquent être soulevé en tout temps. L'organisme a le devoir de protéger les renseignements nominatifs concernant ses employés en tout temps. Des motifs d'exclusion reliés aux articles 53 et suivants peuvent être soulevés en tout temps et ils sont d'ordre public. Cependant, il faut observer que certaines informations sur des personnes sont réputées être de nature publique à cause des fonctions de celles-ci au sein d'un organisme public. Dans ce dernier cas, il faut examiner si, en vertu de l'article 57, les informations sur les personnes ne seraient pas visées par un des paragraphes de cet article. Dans l'affaire Michel Bolduc c. Les Atelier le Cap-Centre d'Accueil Sénécal 6 , le Commissaire Michel Laporte a conclu que les renseignements suivants sont publics : Entre autres, les renseignements concernant les années de service dans le réseau, date de transfert, date d'accumulation de journées de maladie, date de changement d'emploi, date de changement de statut sont, à mon avis, des renseignements liés à la fonction, à la classification et au traitement du directeur général au sens du paragraphe 1 de l'article 57 de la loi. 7 Quant aux opinions juridiques visées par l'article 31 de la Loi, elles bénéficieront d'une restriction obligatoire dans la mesure elles répondent à la notion de secret professionnel, un droit fondamental consacré à l'article 9 de la Charte des droits et libertés. Le droit au secret professionnel doit être soulevé d'office par le tribunal : En effet, il appartient à un tribunal de soulever d'office toute question relative à la protection du secret professionnel, or 5 Mike Mosca c. Cité de Côte Saint-Luc [1996] C.A.I. 259. 6 [1996] C.A.I. 30. 7 [1996] C.A.I. 32.
01 02 58 6 cet argument du secret professionnel s'applique à toute communication entre un avocat et son client mais également aux documents préparés à la demande de l'avocat d'une partie. Il doit être soulevé d'office, en tout temps, par tout tribunal administratif ou judiciaire saisi d'une question y relative. En conséquence, la Commission devrait pouvoir et devoir soulever cet argument si cela lui apparaît nécessaire et cela même si elle doit le soulever d'office. C'est la mesure des obligations que la loi lui impose 8 . Si le respect des droits fondamentaux, que ce soit le droit à la vie privée, en l'occurrence la protection de renseignements personnels, et le droit au respect du secret professionnel, peuvent être invoqués en tout temps, on ne peut pas en dire autant de tous les documents qui contiennent des références à des opinions juridiques. Il n'y a pas d'adéquation automatique entre une discussion portant sur un avis juridique et un secret professionnel. Le secret professionnel réfère surtout aux confidences ou aveux dont l'avocat est dépositaire. Son opinion sur l'application de la Loi à des faits divers de connaissance publique est une opinion professionnelle, certes, mais qui n'a pas nécessairement cette qualité de dépositaire de confidence d'autrui qui l'associe à l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 9 . Par exemple, des discussions générales par des tiers sur des avis juridiques révélés par ceux qui les ont demandés ne rejoignent pas, à mon avis, la notion de secret professionnel 10 . Le troisième motif invoqué par l'organisme pour masquer l'information, est l'effet de sa divulgation sur une procédure judiciaire. Ce motif est également invoqué après l'expiration du délai accordé par la Loi. On a fait état du contexte fort litigieux dans lequel sinscrit la présente demande. Les parties sopposent devant dautres forums sur des questions afférentes à ladministration et lutilisation pour des fins scolaires ou d'autres du parc immobilier de lorganisme English Montreal. 8 Ministère de la Justice c. David Schulze [2000] C.A.I. 416. 9 Paul Revere, Compagnie d'assurance-vie, Dr Yvan Gauthier c. Claude Chaîné, C.Q. Montréal, n o 500-02-068439-988, 27 avril 2000, j. Pauzé. 10 Marc-François Bernier c. Société de transport de la communauté urbaine de Québec [1999] C.A.I. 312. Dans l'affaire Ministère de la Sécurité publique c. Euclide Joncas et C.A.I., C.Q. Québec, n o 200-02-
01 02 58 7 À l'égard de ces deux derniers motifs de refus fondés sur les articles 31 et 32 de la Loi, la Commission peut décider de les accepter même s'ils sont soulevés hors délai. Toutefois, il est nécessaire pour la Commission d'exercer sa discrétion à chaque fois qu'elle prend une décision quant à l'acceptation ou le rejet des motifs facultatifs soulevés hors délai. La Commission doit évaluer les faits en présence afin de déceler des raisons justifiant, compte tenu du cadre général de la Loi, que l'on puisse invoquer tardivement des motifs facultatifs de refus d'accès. Dans l'éventail des tribunaux administratifs, ceux qui exercent des fonctions de régulation et de surveillance en plus de leurs fonctions d'adjudication, peuvent tenir compte dans leurs décisions des motifs d'opportunité administrative tout en respectant leur devoir d'agir de manière impartiale. Bien que la Commission nait pas de fonction de régulation, elle est néanmoins un organisme de surveillance et un organisme aviseur qui doit soumettre au législateur un rapport périodique sur le fonctionnement de la loi : 123. La Commission a également pour fonctions: 1° de surveiller l'application de la présente loi, de faire enquête sur son fonctionnement et sur son observation; 2° d'approuver les ententes conclues entre les organismes en vertu de l'article 172; 3° de donner son avis sur les projets de règlement qui lui sont soumis en vertu de la présente loi, sur les projets d'entente de transfert de renseignements, de même que sur les projets de décrets autorisant l'établissement de fichiers confidentiels; 4° d'établir, si elle le juge opportun, les règles de tenue du registre visé à l'article 67.3; 5° de veiller au respect de la confidentialité des renseignements personnels contenus dans les dossiers ayant trait à l'adoption d'une personne et détenus par un organisme public; 6° de veiller au respect de la confidentialité des renseignements personnels contenus dans le dossier que le curateur public détient sur une personne qu'il représente ou dont il administre les biens. 179. La Commission doit, au plus tard le 1er octobre 1987, et par la suite tous les cinq ans, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la présente loi, sur l'opportunité de la maintenir en vigueur et, le cas échéant, de la modifier. Ce rapport est déposé dans les quinze jours suivants devant l'Assemblée nationale si elle siège ou, si elle ne siège pas, auprès de son président. 020583-980, 11 juin 1999, j. Villeneuve, la Cour arrive à l'opinion contraire quant à la qualification des opinions juridiques et les délais pour soulever cette exception à la divulgation.
01 02 58 8 Dans un arrêt récent, la Cour d'appel rappelle que certains tribunaux administratifs peuvent exercer plusieurs fonctions : Bien que le raffinement des structures administratives ait entraîné la création de plus en plus fréquente de tribunaux administratifs à seule fonction d'adjudication, il n'en demeure pas moins, ainsi que le rappelait notre Cour […] que l'usage d'une fonction discrétionnaire est une caractéristique fondamentale des tribunaux administratifs par rapport aux tribunaux judiciaires 11 . Elle peut donc interpréter la Loi afin de faciliter son application immédiate et transparente, ce qu'elle fait dans la majorité des cas en déclarant forclos après examen des circonstances le recours à d'autres exceptions à l'accès à lexpiration des délais prévus par la Loi. En adoptant une interprétation de la Loi qui encourage les détenteurs de documents recherchés à expliciter, dans un délai statutaire, les raisons dun refus d'accès plutôt que de multiplier les différents motifs jusqu'à la culmination des procédures de révision, la Commission remplit pleinement son rôle de tribunal administratif ayant aussi une fonction d'analyse et de surveillance. Dans le cas des organismes multifonctionnels, il n'y a pas, par le fait même, de crainte raisonnable de partialité puisque le cumul des fonctions est autorisé par la Loi selon l'interprétation de la Cour Suprême tel que lenseigne le professeur Patrice Garant : L'existence de la multifonctionnalité a été constatée formellement par la jurisprudence, notamment dans l'arrêt Brosseau en 1989. La Cour suprême affirme que le législateur est «libre de choisir la structure» qui lui convient et «si la loi autorise un certain chevauchement de fonctions, ce chevauchement […] n'est généralement pas per se contraire à la doctrine de la crainte raisonnable de partialité» (Brosseau c. Alberta Securities Commission, [1989] 1 R.C.S. (301). 12 Tenant compte de ce qui précède, examinons les démarches de l'organisme. Dans l'affaire Schulze précitée, on dit en évaluant la légitimité du refus des motifs facultatifs hors délai : 11 La procureure générale du Québec c. Barreau de Montréal et Association des juges administratifs du Québec, ainsi que ses membres, C.A. Montréal, n o 500-09-009148-002, 5 septembre 2001, jj. Brossard, Dussault, Deschamps, p. 33. 12 Patrice GARANT, Précis de droit des administrations publiques, 3 e éd., Éditions Yvon Blais, 1995, p. 62.
01 02 58 9 Ainsi, un responsable d'accès, qui n'est pas nécessairement un avocat, peut très bien se méprendre sur la nature des motifs qu'il peut utiliser au plan technique. Ce qui est important ici est de s'assurer du respect des droits des uns et des autres, conformément à l'intention du législateur en fonction des textes de loi 13 . Toutefois, cette observation ne peut se lire pour cacher le fait que la responsabilité de l'administration de la Loi, tant dans son volet accès à l'information que son volet protection de renseignements personnels, incombe à l'organisme. La responsabilité est institutionnelle. Dans le cas qui nous occupe, le responsable croit que les réunions du comité exécutif n'étant pas ouvertes au public, les procès-verbaux sont inaccessibles. Lorsque le conseiller juridique prend connaissance du dossier peu avant l'audience, il est d'avis que les documents sont accessibles, avec les restrictions invoquées. Certains des documents sont remis au demandeur séance tenante et les autres lui sont acheminés (avec des parties masquées) dans les jours qui suivent l'audience. Des raisons pour appliquer des motifs facultatifs hors délai peuvent exister même en tenant compte de la préoccupation de la Commission pour lapplication efficace de la Loi. Ainsi le Commissaire Michel Laporte, dans sa décision récente Noël et al c. Régie des Installations Olympiques 14 qualifie la déchirure de la toile formant le toit du Stade olympique comme « événement hors du contrôle de l'organisme […] imprévue et exceptionnelle » justifiant l'application, en dehors des délais habituels, des motifs facultatifs de refus. La question préliminaire mérite une réponse avant d'examiner chaque argument quant à l'exception au principe de l'accès. Existe-t-il des situations ou raisons en dehors du contrôle de l'intimé ou autrement exceptionnelles pour justifier l'invocation de ce motif de refus hors délais ? Les faits de la présente cause suggèrent que la seule explication de l'omission de soulever ces motifs de refus dans les délais fut l'absence d'un conseiller juridique au moment de formuler la réponse à la demande d'accès. 13 Supra note 8.
01 02 58 10 En conclusion, il est impératif de retenir les restrictions à l'accès protègeant les renseignements nominatifs. L'exception invoquée hors délai au sujet de l'opinion juridique ne s'applique d'office que si lon est en présence de confidences méritant la protection de l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne, soit un secret professionnel. L'exception quant aux litiges en cours devait être soulevée dans les délais prescrits par la loi tel qu'indiqué dans l'affaire Milliard c. Axa Assurances inc. 15 la Commissaire Diane Boissinot réfère à la règle impérative de la communication contenue à la Loi. L'obligation de divulguer doit donc s'exécuter dans les délais indiqués; ce qui comprend l'invocation des exceptions à la communication. Cette position est confirmée par la Cour du Québec dans l'arrêt Paul Revere, Compagnie d'Assurance-Vie, Dr. Yvan Gauthier c. Claude Chaîné 16 et se justifie largement par la nécessité de répondre aux demandes d'accès dans un temps raisonnable. Si le droit à l'information dans la mesure prévue par la loi, telle qu'inscrite à la Charte des droits et libertés de la personne, a une portée réelle, il doit s'exécuter ou être débattu dans les délais qui tiennent compte du fait que le temps participe à lessence même du droit daccès. Un document a généralement une valeur à un moment donné. Cette valeur diminue souvent avec le temps. Ce droit à l'information s'exerce en premier lieu par l'application du droit d'accès contenu à l'article 9 de la Loi. Cette mise au point sur les restrictions facultatives invoquées hors délai faite, je dois cependant tenir compte, dans le cas sous étude, des dispositions législatives particulières applicables dans le secteur scolaire. 14 C.A.I., n o 99 03 34, 6 septembre 2001, c. Laporte. 15 [1999] C.A.I. 305. Il s'agit ici de la Loi sur le secteur privé. Toutefois, la Loi sur le secteur privé et celle s'appliquant aux organismes publics énoncent de façon similaire les obligations de répondre aux demandes d'accès dans les délais. 16 Supra note 9.
01 02 58 11 L'application de la Loi sur l'Instruction publique La décision The Gazette v. English Montreal School Board précitée par le demandeur porte sur les réunions du conseil des commissaires. La discussion que lon y trouve sur la nature publique des réunions ne semblent référer quaux réunions du conseil. En labsence de toute mention du comité exécutif, cette décision ne fait mention d'aucun élément permettant de conclure, tel que le soutient le demandeur, que les réunions du comité exécutif sont publiques. Examinons maintent les procès-verbaux en litige qui émanent du comité exécutif de lorganisme. Larticle 167 de la Loi sur linstruction publique prévoit que les séances du conseil des commissaires sont publiques : 167. Les séances du conseil des commissaires sont publiques; toutefois, le conseil peut décréter le huis clos pour étudier tout sujet qui peut causer un préjudice à une personne. Larticle 181 de la même loi prévoit que le comité exécutif exerce les fonctions et pouvoirs délégués par le conseil des commissaires. Larticle 182 fait état des articles de la Loi qui s'appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires, au comité exécutif. On note que larticle 167, qui établit la nature publique de ces séances ne figure pas dans cette énumération d'articles applicables : 181. Le comité exécutif exerce les fonctions et pouvoirs que lui délègue, par règlement, le conseil des commissaires. 182. Les articles 154 à 166, 169, 170, 171, 172, 173, 175.4 à 177.2 s'appliquent au comité exécutif, compte tenu des adaptations nécessaires. Toutefois, on note que les articles 170 et 172 qui édictent : 170. Le procès-verbal des délibérations du conseil des commissaires doit être consigné dans un registre appelé «Livre des délibérations». Après avoir été lu et approuvé, au commencement de la séance suivante, il est signé par la personne qui préside et contresigné par le secrétaire général.
01 02 58 12 Dispense de lecture. Le conseil des commissaires peut par résolution dispenser le secrétaire général de lire le procès-verbal pourvu qu'une copie en ait été remise à chaque membre présent au moins six heures avant le début de la séance il est approuvé. 172. Le procès-verbal de chaque séance approuvé par le conseil des commissaires et signé par le président de la séance et le secrétaire général est authentique. Il en est de même des documents et des copies qui émanent de lorganisme ou font partie de ses archives, lorsqu'ils sont attestés par le président de lorganisme, par le secrétaire général ou par une personne autorisée à le faire par règlement de lorganisme. Renseignements. Les renseignements contenus dans le registre des procès-verbaux ont un caractère public. Il ressort de l'ensemble de ces dispositions que, même si les séances du comité exécutif ne sont pas obligatoirement publiques, les procès-verbaux de ces séances le sont. C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle en vient le professeur Patrice Garant dans son ouvrage Droit scolaire. Sous le titre « Le comité exécutif » on peut lire : En ce qui a trait au fonctionnement de ce comité, l'article 181 rend applicables, mutatis mutandis, plusieurs dispositions régissant le conseil des commissaires. Un procès-verbal des délibérations doit être tenu et, dans la mesure les conditions mentionnées à l'article 172 de la Loi sont respectées, celui-ci est authentique. Les renseignements contenus au registre des procès-verbaux ont un caractère public. Les articles 167 et 168 n'étant pas expressément rendus applicables, on en déduit que le comité exécutif peut décider lui-même de la forme que prendront ses réunions 17 . Dans le même sens, le Commissaire Pierre Cyr a déjà décidé, dans la décision de l'Association de l'Enseignement du Nouveau-Québec c. Commission scolaire crie 18 , que les procès-verbaux du comité de direction d'une commission scolaire sont accessibles en vertu de la Loi sur l'Instruction publique. Bien que cette loi ait été modifiée depuis cette décision, le principe du caractère public et par conséquent accessible des procès-verbaux est maintenu par le biais des articles 170 et 172 précités. Or, en décrétant, à l'article 172 de la Loi sur l'Instruction publique, le caractère public des renseignements contenus au registre des procès-verbaux, le législateur conférait à ce type de 17 Éditions Yvan Blais, Cowansville, 1999, p. 192. 18 [1992] C.A.I. 193.
01 02 58 13 documents un droit d'accès élargi, ce que reconnaît précisément le paragraphe 1 de l'article 171 de la Loi : 171. Malgré les articles 168 et 169, la présente loi n'a pas pour effet de restreindre: 1° l'exercice du droit d'accès d'une personne à un document résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le 1er octobre 1982, à moins que l'exercice de ce droit ne porte atteinte à la protection des renseignements personnels; […] Tel que la Commission a eu à le rappeler à quelques reprises déjà 19 , l'article 171 paragraphe 1 de la Loi a pour but d'éviter que la Loi sur l'accès ne restreigne la communication de documents dont l'accessibilité est reconnue dans des lois sectorielles. Dans ces cas, les restrictions énoncées aux articles 18 à 41 de la Loi ne sappliquent pas. Cependant on doit, en tout temps, assurer la protection des renseignements personnels 20 . Appliqué à la situation présente, l'organisme ne peut donc se prévaloir des articles 31 et 32 de la Loi pour refuser de communiquer les procès-verbaux du comité exécutif. Quant à l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne, il ne peut trouver application puisqu'en portant les éléments juridiques aux procès-verbaux en litige il y a, de ce fait, renonciation à la confidentialité et au secret professionnel puisque les procès-verbaux des réunions du comité exécutif, comme nous venons de le voir, ont un caractère public en vertu de l'article 172 de la Loi sur l'Instruction publique. 19 Goulet c. CLSC des Prés-Bleus [1994] CAI 185, Mouvement au courant c. Ministère de l'Environnement et de la Faune [1994] CAI 92, Giguère c. Ville d'East Angus [1994] CAI 65. 20 André OUIMET, « L'accès aux documents administratifs et aux renseignements personnels : un éventail de droits », Communication présentée dans le cadre de la formation permanente, Barreau du Québec, 19 avril 2001.
01 02 58 14 LA DÉCISION Compte tenu des éléments mentionnés plus haut, jen conclus : Le procès-verbal du 6 juillet l999 Ce document est accessible. Les paragraphes que l'organisme souhaite masquer contiennent un résumé de sa stratégie quant aux différentes issues possibles de litiges en cours à ce moment-là. Ils contiennent aussi les opinions d'un conseiller juridique, rapportées par un tiers, ainsi que la mention d'une contribution à la discussion par un autre conseiller juridique. Les paroles et opinions attribuées aux avocats ne s'apparentent pas à la divulgation d'un secret professionnel au sens de l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne. Le procès-verbal du 27 octobre l999 Ce document est accessible en totalité. Les paragraphes que l'organisme souhaite masquer contiennent les renseignements nominatifs relatifs aux conditions demploi dun membre du personnel de lorganisme, soit le lieu il travaille et le prêt de service avec remboursement de salaire. Larticle 57 (2) de la Loi décrit les renseignements concernant les employés qui ont un caractère public. Ces informations sont des renseignements liés à l'adresse au travail et à la classification de l'employé et sont de nature publique. Ces paragraphes sont accessibles.
01 02 58 15 Le procès-verbal du 23 novembre l999 Ce document est accessible pour les mêmes raisons que celles évoquées dans le procès-verbal de juillet 1999. Le procès-verbal du 23 février 2000 Ce document est accessible car les informations sur un employé sont réputées être publiques pour les raisons discutées en rapport avec le procès-verbal d'octobre 1999. De plus, l'opinion juridique qui s'y trouve ne s'apparente pas à un secret professionnel protégé par l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne. Le procèsverbal du 31 mai 2000 Ce document est accessible. Les renseignements concernant un employé sont de nature publique pour les mêmes raisons que celles exposées dans le cas du procès-verbal d'octobre 1999. Le procès-verbal du 20 juin 2000 Ce document est accessible en totalité pour les mêmes raisons que celles expliquées dans les procès-verbaux d'octobre 1999 et de février 2000. Le procès-verbal du 28 juin 2000 Ce document est accessible. L'information que l'organisme souhaite masquer ne relève pas du secret professionnel.
01 02 58 16 Le procès-verbal du 30 août 2000 Ce document est accessible en totalité à l'exception des trois premiers mots de la deuxième ligne du premier paragraphe sous 3.1. protégés par l'article 53 de la Loi sur l'accès. Ici on réfère à une personne qui n'est pas un employé et qui n'a pas consenti à leur divulgation. Pour la même raison, la dernière phrase du même paragraphe doit être masquée, ainsi que le troisième paragraphe au complet. Les autres renseignements nominatifs sont publics pour les mêmes raisons que celles expliquées dans le procès-verbal d'octobre 1999. Le procès-verbal du 29 novembre 2000 Ce document est accessible. Les renseignements nominatifs concernant les employés ont un caractère public pour les mêmes raisons que celles expliquées dans le procès-verbal d'octobre 1999. POUR TOUS CES MOTIFS, la Commission : CONSTATE que le demandeur a reçu, à l'occasion et à la suite de laudience, les procès-verbaux élagués. ACCUEILLE en partie la demande de révision; et
01 02 58 17 ORDONNE à lorganisme de communiquer une copie de tous les documents en litige à lexception des trois premiers mots de la deuxième ligne du premier paragraphe sous le point 3.1, la dernière phrase du même paragraphe et le troisième paragraphe au complet au procès-verbal du 30 août 2000. Montréal, le 21 novembre 2001 JENNIFER STODDART Commissaire M e Yann Bernard Procureur de lorganisme
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