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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 02 08 23 Date : Le 10 mars 2005 Commissaire : M e Diane Boissinot COMPLEXE HOSPITALIER DE LA SAGAMIE Organisme requérant ou organisme c. X intimé DÉCISION SUR LA REQUÊTE FORMULÉE PAR LORGANISME DANS LE BUT DOBTENIR LAUTORISATION DE NE PAS TENIR COMPTE DE LA DEMANDE DACCÈS DE LINTIMÉ (Requête découlant de lart. 126 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 ) OBJET [1] Lorganisme requérant allègue que la demande daccès de lintimé est revêtue dun caractère abusif tant par le nombre de renseignements quelle vise que par son caractère systématique. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 08 23 Page : 2 [2] Lorganisme requérant allègue également que cette demande a pour objet lobtention dun nombre considérable de renseignements concernant des personnes physiques, notamment des tiers et des chercheurs, renseignements dont la protection est prévue aux dispositions du chapitre II de la Loi. [3] Larticle 126 de la Loi se lit : 126. La Commission peut, sur demande, autoriser un organisme public à ne pas tenir compte de demandes manifestement abusives par leur nombre, leur caractère répétitif ou leur caractère systématique. Il en est de même lorsque, de l'avis de la Commission, ces demandes ne sont pas conformes à l'objet des dispositions de la présente loi sur la protection des renseignements personnels. Un membre de la Commission peut, au nom de celle-ci, exercer seul les pouvoirs que le présent article confère à la Commission. [4] À lappui de cette requête formulée le 29 mai 2002, lorganisme y annexe la demande daccès de lintimé du 6 novembre 2001 (R-1) ainsi que la demande de révision de la décision adressée le 21 décembre 2001 par lintimé à la Commission (R-2) dans laquelle lorganisme y décèle des précisions à la demande daccès. [5] Selon lorganisme, il ressort de ces deux documents que la demande daccès comprend trois éléments. [6] Le premier élément est reproduit en ces termes, à partir de la lettre du 6 novembre 2001 (R-1) : Je souhaiterais obtenir une copie des politiques, règlements ou orientations [de lorganisme] (ou de ses instances appropriées, notamment de lUnité de recherche clinique et des comités déthique clinique et déthique de la recherche) touchant les normes éthiques formellement adoptées et appliquées en recherche et en intervention en génétique. Je suis plus précisément intéressé aux conditions entourant ladministration de tests génétiques, aux procédures détude et aux critères dapprobation des protocoles de recherche en génétique, aux normes touchant linformation des participants, lobtention de leur consentement, la confidentialité, les modalités de conservation (lieu, forme et durée) et de circulation des données personnelles et familiales ainsi que des prélèvements biologiques. Advenant labsence de compilation ou le caractère fragmentaire et inachevé des politiques, normes ou orientations actuelles, je souhaiterais avoir une copie de la portion pertinente des procès-verbaux et documents afférents
02 08 23 Page : 3 relatifs aux procédures dadministration de tests génétiques et aux conditions générales dapprobation de projets de recherche en génétique dans votre établissement au cours des cinq dernières années. (les inscriptions entre crochets sont de la Commission) [7] La précision de ce premier élément est apportée le 21 décembre suivant (R-2) et se lit : […] Les documents listés en page 1 de la réponse sont dordre tout à fait général et ne répondent en aucune manière à ma requête spécifique. Un seul document fait référence à la génétique Présentation dun projet de recherche ») : il sagit dun simple exemple de formulation, pour les formulaires dinformation et de consentement, dune clause sur les risques et inconvénients des tests génétiques. La réponse ne mindique pas les dispositions de la Loi justifiant que lon ne me communique pas les renseignements spécifiques demandés. Or, pour avoir participé comme membre aux travaux du Comité déthique de la recherche [de lorganisme] entre juin 1995 et décembre 1998, je sais quà loccasion de ses travaux durant cette période, tout au moins, le CÉR a discuté et adopté diverses propositions à caractère général sur les conditions de la recherche en génétique. Même si elles nont pas fait lobjet de compilation, elles sont présentes dans les procès-verbaux et pourraient en être facilement extraites. Des normes et orientations générales peuvent aussi être appliquées de facto à loccasion de lévaluation de projets particuliers, sans avoir jamais été formulées comme telles : une « jurisprudence » interne, en quelque sorte. Elles pourraient cependant être déduites de létude des projets particuliers adoptés par le CÉR. D le deuxième élément de ma requête : (les inscriptions entre crochets sont de la Commission) [8] Le deuxième élément de la demande daccès sextrait de la lettre du 6 novembre 2001 (R-1) en ces termes : Je souhaiterais également avoir un sommaire (ou accès aux documents pertinents) me permettant de connaître la nature des projets de recherche en génétique adoptés au cours des cinq dernières années, lidentité des chercheurs responsables, des partenaires, des commanditaires ou organismes subventionnaires, et obtenir une copie de la résolution dacceptation du comité déthique ainsi que du formulaire dinformation et de consentement à lintention des participants de chacun de ces projets. [9] La précision du 21 décembre 2001 (R-2) se lit essentiellement comme suit : […] Jai reçu pour les années 1995 à 1998 un très bref résumé des objectifs des projets, comportant le nom des chercheurs, des partenaires et des organismes subventionnaires. Il sera difficile de se faire une idée sur la
02 08 23 Page : 4 « nature » des projets dont la description fournie par [lorganisme] ne dit rien de la durée, du montant des subventions reçues ou même, dans la plupart des descriptions (1996-1998, 1999-2000), du nombre de participants recrutés. Précisons que le rapport des travaux de recherche de 1999-2000 se résume à une liste de 38 inscriptions de 2 à 4 lignes par projet en donnant essentiellement le titre, les noms des chercheurs et des commanditaires. Quant à lannée 2001, on ne ma rien communiqué sur les projets de recherche en génétique approuvés ou renouvelés durant cette période. Bref, en regard des documents transmis, plus on avance dans le temps et plus linformation disponible tend vers zéro. (les inscriptions entre crochets sont de la Commission) [10] Le troisième élément de la demande (R-1) vise laccès aux documents suivants : […] […] Je souhaiterais consulter les rapports annuels du comité des cinq dernières années et obtenir une copie de la portion des procès-verbaux du [Conseil dAdministration de lorganisme] relatifs à la discussion et lacceptation de chacun de ces rapports annuels. (les inscriptions entre crochets sont de la Commission) [11] Ce troisième élément de la demande daccès est précisé en ces termes dans la demande de révision (R-2) : […] […] À lépoque jétais membre du CÉR, ce rapport dactivités annuel consistait essentiellement en un rassemblement dans un cahier des procès-verbaux du CÉR. [12] Lintimé a déposé une demande de révision à la Commission dune décision de lorganisme rendue le 13 décembre 2001 et lui refusant en partie laccès aux documents demandés. Un dossier distinct en révision portant le numéro 01 20 12 est assigné à la soussignée par la présidente de la Commission. [13] Les parties sont convoquées à laudition de la présente requête en même temps que celle de la demande de révision 01 20 12. [14] Demblée, laudition du dossier de révision 01 20 12 est suspendue par la soussignée le 28 février 2003 jusquà ce quune décision soit rendue sur le bien-fondé de la présente requête faite en vertu de larticle 126 puisque la conclusion de la Commission dans le présent dossier décidera de la pertinence pour la Commission dentendre ou non la demande de révision de lintimé. [15] En effet, il deviendrait inutile que la Commission se prononce sur la demande de révision de lintimé dune décision du Responsable de laccès de lorganisme (le Responsable) refusant en partie laccès aux documents faisant lobjet de la présente demande daccès si lorganisme est par ailleurs autorisé par
02 08 23 Page : 5 la Commission à ne pas tenir compte de cette demande daccès en vertu de larticle 126 de la Loi. [16] Laudience sur la présente requête se tient en la ville de Jonquière les 28 février 2003 et 22 juin 2004. [17] Le délibéré qui devait commencer le 22 juin 2004 est tout de même suspendu en raison de labsence de temps à la disposition de la soussignée pour ce faire vu sa nomination par lAssemblée nationale à la fonction de présidente par intérim de la Commission, vu lexercice de cette fonction qui sest prolongé jusquau 24 septembre 2004 et vu les vacances annuelles qui ont suivi jusquau 12 octobre 2004. Ce délibéré, comme tous les autres délibérés suspendus dans dautres causes pour ces mêmes raisons, a pu commencer ou recommencer le 12 octobre 2004, en même temps que tous les autres. LAUDIENCE A. REQUÊTE EN IRRECEVABILITÉ [18] Lors de la séance du 28 février 2003, lintimé fait valoir à la Commission que par décision dans laffaire Trudel c. Hydro-Québec 2 , le commissaire Iuticone a refusé de permettre à Hydro-Québec de présenter une requête faite en vertu de larticle 126 de la Loi après que celle-ci ait répondu à la demande daccès visée par la requête : Le soussigné est dopinion que cet article de la loi peut être invoqué en tout temps conditionnellement à ce que l'organisme nait pas répondu à la demande daccès. Cet article permet à l'organisme de ne pas tenir compte de la demande daccès. Comment peut-on prétendre que l'organisme puisse être autorisé à ne pas tenir compte de la demande daccès, alors quil en a déjà tenu compte en répondant à la demande dans la négative, et en invoquant les articles de la Loi sur l'accès à lappui de son refus? Dans le cas qui nous occupe, l'organisme a motivé son refus et est donc forclos de soulever larticle 126 de la Loi sur l'accès. [19] Or, plaide-t-il, la présente requête faite en vertu de larticle 126 de la Loi ainsi que la demande de révision y annexée sous la cote R-2 établissent que lorganisme requérant avait déjà répondu à la demande daccès le 13 décembre 2001. 2 Trudel c. Hydro-Québec, CAI Montréal n° 98 788, le 26 juin 2001.
02 08 23 Page : 6 [20] Il demande donc à la Commission de déclarer lorganisme requérant forclos de présenter, le 29 mai 2002, soit plus de six mois après avoir adressé une réponse à lintimé, la présente requête et, en conséquence de la déclarer irrecevable. [21] De son côté, lorganisme plaide que la Cour du Québec, dans laffaire Bolduc 3 , a permis à lorganisme de présenter une requête en vertu de larticle 126, même dans le cas dun refus dit « réputé » de sa part 4 suivi dune demande de révision de ce refus réputé déposée en vertu de larticle 135, Ainsi statuait la Cour à la page 443 de ce jugement : […] En décidant que la demande est irrecevable parce que lautre partie a déjà demandé la révision du refus la Commission ajoute une condition dexercice à larticle 126, ce que ne fait pas le législateur. Au contraire, lorganisme qui découvre, même tardivement, que les conditions dexercice de la demande sous larticle 126 sont présentes peut alors en demander lapplication. Il appartient, dans ces cas, à la Commission daccès à linformation de décider de cette demande in limine litis. [22] Lavocat de lorganisme requérant plaide que les faits au soutien de la présente requête faite sous 126 sont essentiellement les mêmes que ceux qui ont été considérés dans laffaire Bolduc. [23] Séance tenante, compte tenu du précédent créé par le jugement de la Cour du Québec dans laffaire Bolduc précitée, la Commission souscrit à la position de lavocat de lorganisme requérant et déclare recevable la présente requête. B. LA PREUVE SUR LE FOND DE LA REQUÊTE PRINCIPALE i) de lorganisme requérant Témoignage de monsieur Jean-Claude Otis [24] Monsieur Otis déclare quil a exercé diverses fonctions au sein de lorganisme depuis 1978 dont, notamment, la recherche en santé publique, la qualité des soins, la direction des ressources humaines. En outre, il y a œuvré 3 Service de réadaptation lIntégrale c. Bolduc, [1998] CAI 439 (C.Q.) 4 Le refus « réputé » sinfère de larticle 52 de la Loi, qui se lit : 52. À défaut de donner suite à une demande d'accès dans les délais applicables, le responsable est réputé avoir refusé l'accès au document. Dans le cas d'une demande écrite, ce défaut donne ouverture au recours en révision prévu par la section I du chapitre V, comme s'il s'agissait d'un refus d'accès.
02 08 23 Page : 7 pendant presque 20 ans dans le domaine de lenseignement et de la recherche. Sa fonction actuelle au sein de lorganisme est celle du directeur de la mission Enseignement et Recherche dans le domaine médical, avec un mandat axé sur le développement et les relations avec les universités. [25] Il expose longuement et de façon précise en quoi consistent les activités de recherche de lorganisme et plus particulièrement celles de son comité déthique qui relève directement du conseil dadministration. Il précise que le comité déthique est composé dune quinzaine de membres qui agissent bénévolement en grande majorité. [26] À chaque année, de plus en plus de projets de recherches sont examinés et approuvés par le comité détique de lorganisme. [27] Le comité détique produit au conseil dadministration un rapport annuel de ses activités, cest-à-dire une revue de tous les projets quil a étudiés et approuvés durant lannée. Il est davis que la tâche du comité déthique est de plus en plus lourde. [28] Il déclare que le nombre de personnes se livrant à des activités de recherche au sein de lorganisme a beaucoup augmenté ces dernières années. Il est passé de deux ou trois en 1990 à environ 70-75 en 2003. Il sagit de médecins chercheurs, dassistants de recherches, dinfirmières, de personnes travaillant dans les laboratoires ou du personnel de secrétariat. [29] Le témoin explique que la recherche ne se fait plus en vase clos, aujourdhui. En général, dit-il, les acteurs en ce domaine sont dautres établissements, des centres de recherches associés à des hôpitaux, des entreprises pharmaceutiques, des centres de recherche universitaires, des centres de recherches situés à lextérieur du Québec ou du Canada. Les pharmaceutiques, par exemple, peuvent devenir des partenaires contractuels privés des médecins oeuvrant au sein de lorganisme. Participent également aux activités de recherche, des « fonds » de recherches publics du Québec ou du Canada, par exemple, qui subventionnent des projets. Ainsi, des alliances peuvent se former entre des pharmaceutiques et des organismes subventionnaires publics. [30] Sans avoir passé en revue systématiquement tous les projets de recherche examinés par le comité déthique de lorganisme au cours des cinq dernières années, le témoin évalue approximativement, et sous toute réserve, à une dizaine, le nombre dentreprises pharmaceutiques participantes, peut-être un peu plus. [31] Il dépose, en liasse sous la cote O-1 et sous le sceau de la confidentialité, une série de 6 documents numérotés 1 à 6 à titre dexemples typiques de documents pouvant se trouver dans des dossiers de projet de recherche soumis au comité détique. [32] À son avis, ces documents pourraient faire lobjet de lanalyse du Responsable de laccès à la suite de la demande daccès en cause ici. Cest
02 08 23 Page : 8 pourquoi il demande quils soient lobjet dun interdit de publication, de diffusion ou de communication par la Commission, ce qui est accordé séance tenante. [33] Il déclare que, lors de la réception de la demande daccès du 6 novembre 2001 par lorganisme, la personne qui occupait le poste de responsable de laccès en vertu de la Loi était madame Suzanne Lévesque. Madame Lévesque occupe toujours ce poste. Alors et encore aujourdhui, madame Lévesque occupe aussi le poste adjointe au directeur général et responsable des communications. [34] Il explique quil ny a aucun lien de subordination entre lui et la responsable de laccès, les deux postes étant dégal niveau hiérarchique. [35] La responsable de laccès a fait appel à ses connaissances en matière de dossiers recherche afin quil la conseille sur la portée de la demande daccès et le repérage de documents. [36] Le témoin exprime lopinion quil est la personne ressource idéale pour la Responsable de laccès qui, il en est convaincu, ne pourrait exécuter rapidement, efficacement et convenablement cette tâche de répondre à la demande daccès en cause ici sans son aide. [37] Le témoin affirme que le comité déthique a passé en revu, analysé et approuvé 199 projets nouveaux et 74 renouvellements de projets durant la période qui intéresse lintimé, soit durant les cinq années précédant le 6 novembre 2001, date de la demande daccès. [38] Il estime à 914 le nombre de points de correspondance relatifs aux interventions du comité déthique dans ces 199 projets et 74 renouvellements. Ces points de correspondance (variant dune page à des dizaines de pages) sajoutent aux documents de présentation et danalyse des nouveaux projets et des renouvellements. [39] Le témoin explique que chaque projet de recherche ou renouvellement contient généralement et minimalement les documents suivants : 1) un protocole de recherche 2) une analyse des effets secondaires (risques, inconvénients) et des bienfaits ou léquivalent 3) un formulaire de consentement. [40] Il affirme que chaque projet de recherche contient une documentation de présentation variant de 100 à 150 pages. [41] Il est convaincu que la demande daccès, telle que rédigée et précisée loblige à passer en revue tous les documents mentionnés au paragraphe précédent. Il ne peut se limiter à lexamen des seuls dossiers qui, à la lecture du titre quil porte, semble concerner des projets de recherche en génétique. [42] Par exemple, dit-il, la lecture des documents numéros 3 et 4 de la liasse O-1, présentés en preuve sous le sceau de la confidentialité, démontre quun projet de recherche donné visant à évaluer lefficacité et la sûreté dun médicament (O-1, doc. # 3) peut se transformer, au cours dune sous-étude dun même projet de recherche (O-1 doc. # 4), en projet de recherche pharmacogénétique.
02 08 23 Page : 9 [43] Le titre du projet de recherche O-1 doc. #3 ne peut révéler son aspect génétique. [44] Le témoin affirme quil ne pourrait conseiller adéquatement la Responsable sur létendue réelle de la demande daccès sans passer en revue tous les projets de recherche et les renouvellements des cinq années visées. [45] Il émet également lopinion que la définition de ce quest une « recherche en génétique » peut varier considérablement dune personne bien informée à une autre personne bien informée. Il conclut donc que cette particularité constitue une difficulté supplémentaire qui augmente nécessairement la difficulté dun repérage adéquat des documents faisant lobjet de la demande daccès. [46] Ce travail de repérage exécuté en guise de support à la Responsable, travail que lui seul dans lorganisme peut accomplir, exige de sa part un effort considérable en temps et énergie et ce, en supplément au temps et aux efforts quil doit consacrer à ses tâches habituelles. Il devra également offrir à la Responsable un support dans lanalyse de laccessibilité des renseignements que contiennent les dossiers repérés, quil sagissent de déterminer par exemple si ces renseignements sont nominatifs ou sils sont visés par les articles 23 ou 24 de la Loi et, le cas échéant, communiquer avec chacun des tiers concernés et les consulter. La Responsable doit également appliquer larticle 14 de la Loi et faire lélagage des parties inaccessibles des documents. [47] En matière de ressources disponibles au sein de lorganisme pour faire ce travail essentiel de support à la Responsable, et après avoir passé en revue toutes les possibilités, le témoin affirme quil ne reste que son propre temps libre, c'est-à-dire le temps qui lui reste au-delà des 45 heures/semaines consacrées à ses tâches normales, auquel viendrait sajouter la moitié du temps dune secrétaire, qui est déjà par ailleurs fort occupée. ii) de lintimé [48] Lintimé témoigne. [49] Il a été membre du comité déthique de lorganisme de 1995 à 1998; il nen fait plus partie. Il était alors professeur de philosophie au Cégep de Chicoutimi. [50] Malgré que la Loi nexige pas quil le fasse, il tient à justifier sa demande daccès comme suit : il sintéresse profondément aux questions philosophiques et étiques que soulève le nombre croissant des recherches en génétique à partir de données à caractère génétique émanant du milieu démographique spécifique à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean ou puisées à même ce milieu. Il sinquiète du manque de moyen, de directives et dencadrement dont dispose, pour faire un travail de plus en plus ardu et lourd, le comité détique de lorganisme composé en très grande majorité de bénévoles. Il craint, entre autres, que labsence totale
02 08 23 Page : 10 dorientation sur les enjeux inédits, dans cette région, de la recherche en génétique ne permette léclosion dune discrimination à caractère génétique contre la population de cette région. Il désire protéger cette population et sassurer que toutes les précautions sont prises pour la protéger de ce danger, en particulier en vérifiant si des normes satisfaisantes déthique sont édictées. [51] Il dépose, à lappui de son témoignage et du contre-interrogatoire du témoin Jean-Claude Otis, les documents suivants, dont plusieurs ont fait lobjet de lexamen de lintimé alors quil siégeait sur le comité détique de lorganisme : D-1 Copie dun extrait du Rapport annuel du Vérificateur général du Québec 2000-2001 (ses paragraphes 4.43 à 4.60); D-2 Copie dun document intitulé « Lobtention du consentement des sujets de recherche dans le cadre du programme de maladies complexes » accompagné dun projet de formulaire de consentement comportant certaines annotations manuscrites; D-3 Copie dun feuillet dinformation au participant à un projet de recherche sur les troubles affectifs bi-polaires accompagné dun formulaire de consentement pour ce projet spécifique le tout, comprenant des ratures et annotations manuscrites; D-4 Photocopie dextraits du Rapport annuel 1996-97 du sous-comité de bioéthique de recherche du Comité régional de bioéthique de lorganisme remis en septembre 1997; et D-5 Photocopie du compte rendu de la réunion du 9 avril 1998 du comité de bioéthique à la recherche, comprenant aussi des ratures et des annotations manuscrites. [52] Considérant la nature des documents D-2 à D-5 et vu le consentement des parties, la soussignée les frappe, séance tenante, dun interdit de publication, de diffusion ou de divulgation par la Commission. [53] Lintimé déclare que sa demande ne vise que les recherches en génétique et quil est aisé de les distinguer des autres recherches. [54] Il estime que sa demande ne vise pas les protocoles de recherche ni la correspondance. [55] Il désire obtenir les consentements qui circulent de toute façon entre les mains de ceux qui les ont signés ainsi que les normes et la jurisprudence qui guident les comités déthique dans leur étude des projets en génétique. [56] Il estime que la définition de génétique est claire et que les lexiques récents utilisent également le mot « génomique » comme équivalent. Il ne croit pas que lorganisme aurait à faire la revue de tous les projets de recherche et de renouvellement présentés au comité déthique pour répondre à sa demande.
02 08 23 Page : 11 C. LES REPRÉSENTATIONS SUR LE FOND DE LA REQUÊTE PRINCIPALE FAITE EN VERTU DE LARTICLE 126 i) de lorganisme requérant [57] Lavocat de lorganisme plaide que, compte tenu que la preuve démontre que certains projets de recherches non génétique au départ peuvent se transformer en projet de recherche à caractère, il en découle que le travail de repérage et danalyse porte sur les milliers de documents 5 . [58] Il estime que les nombreuses facettes de la demande daccès imposent une profonde analyse de ces milliers de documents 6 dans le but de dégager la jurisprudence ou les propositions générales qui guident les comités déthique dans leur travail dapprobation des projets de recherche en génétique. [59] La Loi na pas pour objectif de faciliter laccès dune seule personne, en si peu de temps, à un si grand nombre de documents [60] Il estime que la définition de ce quest la « génétique » ou « la recherche en génétique » nest pas unique, d la difficulté de trouver le bon angle danalyse et d la complexité de la détermination à effectuer. [61] Il plaide que preuve est faite que les ressources de lorganisme pour répondre à une demande daccès faisant appel à des compétences très pointues comme celle qui nous occupe sont limitées. [62] Il pense que la preuve démontre quelles sont en fait largement insuffisantes, compte tenu du temps dont dispose lorganisme pour ce faire, savoir 30 jours au maximum 7 . [63] Lavocat de lorganisme plaide que sa requête est justifiée et que la Commission doit autoriser celui-ci à ne pas tenir compte de cette demande daccès. 5 [1991] CAI 359 C.Q. 363. 6 Id. ib. 7 Dupuis, Louiselle c. Commission scolaire de la Tourelle, CAI n° 92 04 72 Québec, le 19 janvier 1993, Paul-André Comeau, commissaire, p. 6 et 8; Commission scolaire de Bersimis c. Clermont Martel, [1994] CAI, 284, 288. Ministère des Transports c. Roderic McLauchlan, [2000] CAI 7, 12; Municipalité de Vassan c. Comité des citoyens de Vassan, [2001] CAI 475, 480; Desloges, Normand c. Hôpital Sainte-Justine, CAI n° 00 11 94 et 00 12 28, Montréal, le 28 janvier 2002, Jennifer Stoddart, commissaire.
02 08 23 Page : 12 ii) de lintimé [64] Lintimé plaide en substance que sa demande nest pas abusive. Elle ne contient pas autant de documents que lorganisme le prétend et le travail pour le repérage et lanalyse nest pas si exigeant que lorganisme le croit. Il est convaincu que sa demande est suffisamment ciblée et précise pour permettre le repérage rapide des documents demandés par simple examen de la liste des projets dans les rapports annuels du comité détique au conseil dadministration de lorganisme et ce, pour les années visées par la demande daccès. [65] Il plaide que lorganisme na pas établi quil verrait son fonctionnement entravé par leffort quil mettrait à répondre à sa demande daccès. En effet, lorganisme na pas même établi quel personnel serait affecté à ce travail. [66] Il fait dailleurs remarquer que lorganisme na pas fait témoigner le meilleur témoin en la matière qui est discutée ici savoir, la responsable de laccès. Il argue que cette lacune dans la preuve de lorganisme devrait lui être fatale. [67] Il soutient que lorganisme tente de donner à sa demande une ampleur quelle na pas afin de justifier linvocation de larticle 126 de la Loi. [68] Il demande à la Commission de rejeter la requête de lorganisme et de commencer létude sur le fond de sa demande de révision formulée en vertu de larticle 135 de la Loi. DÉCISION [69] La Commission tient à souligner que les inquiétudes de lintimé sont légitimes, que le but quil poursuit est noble et que les questions quil soulève doivent trouver réponse. [70] Toutefois, la Commission doit sassurer que toutes les demandes daccès, de diverses provenances, reçoivent le traitement requis dans le délai maximum de trente jours prévu par la Loi. [71] Une des raisons dêtre de larticle 126 de la Loi, précité, est de permettre dexempter un organisme de répondre à une demande daccès lorsquil est vraisemblablement impossible dy répondre dans ce délai, et, de surcroît, lorsque y consacrer tout ce temps empêcherait lorganisme daccorder aux autres demandes daccès le traitement statutaire quelles méritent.
02 08 23 Page : 13 [72] Lexamen des documents 1 à 6 de la liasse O-1 convainc la Commission que la simple consultation des listes annuelles des titres des projets approuvés ou renouvelés par le comité détique, telles que relatées dans les rapports annuels de ces comités au conseil dadministration de lorganisme, nest pas suffisant pour distinguer de façon certaine les projets de recherche en génétique des autres projets de recherche. [73] La preuve tant documentaire que verbale convainc la Commission que le repérage adéquat des documents demandés passe par la consultation de tous les projets de recherche ou des renouvellements de recherche, donc par la consultation de milliers de pages, pouvant aller jusquà 20 000 pages. [74] La preuve a établi quun repérage adéquat exige également un travail danalyse presque philosophique pour déterminer si certains documents sont visés par la demande ou non. [75] Ensuite un deuxième travail danalyse, fastidieux celui-là, devrait être accompli afin de séparer les parties des documents qui seraient accessibles de ceux qui seraient vraisemblablement visés, à première vue, par les articles 53, 59 alinéa premier, 23 et 24, donc qui devraient demeurer confidentiels. Dautres exceptions à laccès pourraient être également applicables à lexamen approfondi. [76] Il est connu de la Commission, de par sa spécialisation, que lorsque les articles 23 et 24 de la Loi sont en cause, lorganisme doit souvent contacter les tiers qui lui ont fourni les renseignements techniques, scientifiques, commerciaux ou autres afin de les consulter, ce qui implique une charge certaine de travail. [77] Une fois le travail de repérage, danalyse et de consultation accompli, il est connu de la Commission, en raison de sa spécialité, que lorganisme doit motiver par écrit les refus de communiquer, en tout ou en partie les documents repérés, traiter lenvoi des documents ou de partie des documents accessibles après en avoir fait des photocopies et reclasser le tout au bon endroit, le tout, faut-il le rappeler, dans un maximum de 30 jours de la réception de la demande daccès. [78] La preuve ainsi que la connaissance spécialisée de la Commission dans ce domaine établissent que la responsable de laccès de lorganisme avec laide exceptionnellement judicieuse et nécessaire, dans le cas qui nous occupe ici, de personnes ressources oeuvrant à lextérieur de son équipe, ne pourrait répondre à la demande daccès dans le délai le plus long permis par la Loi, savoir dans le délai de 30 jours et ce, même si tout ce temps était entièrement consacré à traiter cette seule demande daccès.
02 08 23 Page : 14 [79] La Commission est convaincue que la demande daccès en cause non seulement ne pourrait être traitée dans le délai prévu par la Loi, mais que tentant tout de même de le faire, lorganisme serait empêché de répondre aux autres demandes daccès quil pourrait recevoir durant cette période. [80] De plus, vu la preuve, il nest pas déraisonnable de conclure quune fois complétée lanalyse complexe quexige la demande daccès telle que formulée, des centaines de pages risquent dêtre considérées comme visées par la demande daccès. [81] À ce sujet et à linstar de la cour du Québec dans laffaire Ville de Montréal c. Winters 8 , a Commission est davis que : […] généralement, des demandes daccès portant sur des centaines, voire des milliers de documents à la fois sont juridiquement irrecevables au sens de la Loi sur laccès. [82] POUR TOUTES CES RAISONS, la Commission ACCUEILLE la requête formulée en vertu de larticle 126 de la Loi; AUTORISE lorganisme à ne pas tenir compte de la demande daccès du 6 novembre 2001; FRAPPE dun INTERDIT DE PUBLICATION, DE DIFFUSION ET DE DIVULGATION, par la Commission, les documents déposés en preuve sous la liasse O-1, tel interdit devant valoir à lencontre de lintimé; FRAPPE dun INTERDIT DE PUBLICATION, DE DIFFUSION ET DE DIVULGATION, par la Commission, les documents déposés en preuve ainsi que sous les cotes D-2 à D-5. M e DIANE BOISSINOT commissaire Avocat de lorganisme : M e Sylvain Poirier (Heenan Blaikie, avocats) 8 Op. cit. supra, note 5.
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