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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 06 05 30 Date : Le 12 septembre 2007 Commissaire : M e Christiane Constant INNOCENCE McGILL Demanderesse c. VILLE DE MONTRÉAL Organisme DÉCISION LE LITIGE DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE DACCÈS À DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS, selon les termes de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 [1] Le 25 janvier 2006, M. François Beaudry informe M e Paul Quézel, alors directeur des Affaires juridiques et responsable de laccès aux documents au sein du Service de police de la Ville de Montréal (lOrganisme), qu’« au nom du groupe Innocence McGill », il souhaite recevoir une copie des déclarations écrites ou transcrites ainsi que des notes manuscrites des policiers concernant les 1 L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur laccès.
06 05 30 Page : 2 déclarations orales faites par A. O. et M. A. en rapport avec le meurtre de […] survenu à Montréal le 11 octobre 1979. Il ajoute cependant que les déclarations orales de M. A. ont été prises par les policiers le lendemain de ce meurtre. [2] M. Beaudry précise de plus que [A], coupable de ce meurtre, est incarcéré dans un pénitencier. Afin de recevoir une copie des documents mentionnés au paragraphe précédent, M. Beaudry transmet à M e Quézel une autorisation portant la signature de [A] [3] Le 10 février 2006, M. Yves Charette, directeur adjoint, chef de la Direction stratégique et responsable de laccès à linformation au sein de lOrganisme, transmet à M. Beaudry un accusé de réception et l'informe quil recevra une réponse au plus tard le 26 février suivant. [4] N'ayant pas reçu de réponse de l'Organisme, M. Beaudry sollicite pour la demanderesse, le 24 mars 2006, lintervention de la Commission daccès à linformation (la Commission) afin que soit révisée la décision de lOrganisme sur le refus présumé de celui-ci dacquiescer à sa demande. LAUDIENCE [5] Laudience de la présente cause se tient, le 16 avril 2007 à Montréal, en présence des témoins des parties, de M e Caroline Brisebois, procureure de lOrganisme, et de M e Anne Hébert, procureure de la demanderesse. Précisions [6] M e Hébert indique à la Commission le contexte de la demande et les motifs pour lesquels [A] consent par écrit à ce quInnocence McGill ait accès aux documents visés par la demande. [7] Après avoir examiné la demande daccès, laccusé de réception de lOrganisme et la demande de révision auprès de la Commission, jen viens à la conclusion que [A] nest pas le demandeur dans la présente cause, mais que c'est plutôt Innocence McGill.
06 05 30 Page : 3 LA PREUVE DE LORGANISME [8] Interrogée par M e Brisebois, M me Lyne Trudeau déclare quelle est conseillère auprès de M e Alain Cardinal, responsable de laccès aux documents au sein de lOrganisme. Elle a pris connaissance de la demande formulée par la demanderesse et de laccusé de réception qui lui a été adressé par lOrganisme. [9] M me Trudeau déclare que ses recherches lui ont permis de retracer un document de six pages visé par la demande. Ce document traite dun meurtre à propos duquel des policiers de lOrganisme ont mené une enquête. Le dossier a été par la suite transféré pour enquête au Bureau du coroner. LOrganisme na pas repris possession de ce dossier. [10] M me Trudeau émet des commentaires relativement à la réponse que M e Cardinal a fait parvenir le 20 avril 2006 à M. Beaudry (pièce O-1). Elle reconnaît que lOrganisme a invité tardivement la demanderesse à formuler sa demande daccès au Bureau du coroner, à savoir par une lettre du 8 mars 2007 (pièce O-2), à laquelle était joint un extrait de la Loi sur la recherche des causes et des circonstances de décès 2 (la Loi sur les décès). [11] M e Brisebois produit, sous le sceau de la confidentialité, les documents en litige. Contre-interrogatoire de M me Lyne Trudeau [12] Contre-interrogée par M e Hébert, M me Trudeau indique que lOrganisme invoque comme motifs de refus aux documents en litige les articles 28 (6 e paragraphe) et 53 de la Loi sur laccès. [13] M me Trudeau précise quelle est policière depuis 20 ans dont quatre ans à titre de conseillère au responsable de laccès aux documents. Elle ignore si lOrganisme a déjà transmis à [A] une copie des rapports dévènement dans le dossier de meurtre le concernant. Elle ajoute quhabituellement, lOrganisme refuse de faire parvenir à un demandeur copie de ce type de documents. Le dossier denquête étant transféré au Bureau du coroner, il appartiendra à celui-ci de décider sil donnera ou non à la demanderesse accès aux documents, incluant les rapports dévénement, et ce, sur permission du ministre de la Sécurité publique. 2 L.R.Q., c. R-0.2.
06 05 30 Page : 4 [14] M me Trudeau souligne que, lorsque lenquête policière et le procès sont terminés, le dossier est transféré au Service des archives. Cest la raison pour laquelle elle sest adressée à ce service en se servant du numéro dévénement inscrit dans la demande daccès de la demanderesse afin de recevoir les documents recherchés. [15] Quant aux autres documents décrits par M e Hébert et qui pourraient être visés par la demande, M me Trudeau indique quelle na pas effectué de recherche en ce sens. Elle sengage cependant à effectuer une recherche additionnelle et fera parvenir, sous le sceau de la confidentialité, ces documents à la Commission. Toutefois, si les documents sont inexistants, elle transmettra à celle-ci et à M e Hébert une déclaration solennelle dans un délai précis. M e Hébert pourra émettre les commentaires de la demanderesse dans un délai de trente jours suivant la date de laudience. [16] Sur ce point, M e Hébert explique les motifs pour lesquels il est probable quelle ne soit pas en mesure de faire parvenir ses commentaires à la Commission dans le délai requis. [17] Considérant les motifs sérieux mentionnés par M e Hébert et le consentement de M e Brisebois, la Commission autorise M e Hébert à lui faire parvenir les commentaires de la demanderesse au mois de juin 2007. DE LA DEMANDERESSE Témoignage de M. François Beaudry [18] Interrogé par M e Hébert, M. Beaudry affirme quil est directeur par intérim de la demanderesse. Celle-ci a pour mission deffectuer des recherches concernant des individus ayant été reconnus coupables injustement par des tribunaux judiciaires. Ses principales fonctions consistent, entre autres, à coordonner le travail à faire au sein de la demanderesse. [19] Dans le cas sous étude, M. Beaudry explique le processus suivi par la demanderesse avant de formuler la demande daccès auprès de lOrganisme et limplication des étudiants en droit qui sont encadrés par des procureurs expérimentés en droit criminel quil identifie. Il a pris connaissance du dossier judiciaire et des notes sténographiques du procès devant la Cour supérieure du Québec de [A]. Il a constaté que A. O. et dautres personnes ont été identifiés dans le « Précis des faits ».
06 05 30 Page : 5 [20] M e Hébert souligne quelle fera parvenir à la Commission une copie des notes sténographiques du « Précis des faits » sur lesquelles apparaissent les noms de A. O. et dautres personnes. [21] Poursuivant son témoignage, M. Beaudry indique que la demanderesse est en train dexaminer tous les renseignements en sa possession concernant [A], afin de prendre une décision dans le dossier de celui-ci. Cest le motif pour lequel elle cherche à avoir accès aux documents visés par la demande. [22] Il souligne par ailleurs quil a pris connaissance de deux décisions rendues par la Commission dans des cas similaires au présent dossier aux documents recherchés par la demanderesse. Témoignage de M. N. [23] Interrogée par M e Hébert, M. N. déclare quelle travaille dans le dossier concernant [A]. depuis le mois de février 2006, ayant préalablement consenti à la divulgation de tout document le concernant (pièce D-1). Elle confirme lessentiel du témoignage de M. Beaudry relativement, entre autres, à lanalyse des documents accessibles à la demanderesse et aux rapports de police que lOrganisme a déjà transmis à [A]. [24] M. N. affirme quelle a pris connaissance de deux décisions rendues par la Commission concernant [A]. (pièces D-2 et D-3). [25] M. N. signale que lobjectif de la demande est que la demanderesse soit en mesure de connaître ce qui sest passé entre 1979 et 1982, puisquà son avis et dans le cadre du procès pour meurtre, plusieurs informations nont pas été communiquées aux procureurs de [A]. [26] M. N. affirme de plus quelle a fait une demande daccès aux documents auprès de M e Pierre Morin, du Bureau du coroner, relativement au meurtre pour lequel [A] a été reconnu coupable par une instance judiciaire. Le Bureau du coroner lui a répondu quil ne possédait pas de documents pour la période se situant avant lannée 1986, tel quil appert dune note que lui a fait parvenir M. Marois, du ministère de la Sécurité publique (pièce D-4). [27] Contre-interrogée par M e Brisebois, M. N. spécifie que M e Pierre Morin du Bureau du coroner la informée que cet organisme ne possédait pas de documents pour la période se situant avant lannée 1986. Ceux-ci se trouveraient plutôt « aux Archives nationales ».
06 05 30 Page : 6 LES ARGUMENTS RECUEILLIS LE 16 AVRIL 2007 DE LORGANISME [28] M e Brisebois résume le témoignage de M me Trudeau, celle-ci ayant indiqué les motifs pour lesquels lOrganisme invoque le 1 er alinéa de larticle 53 de la Loi sur laccès relativement à la demande daccès formulée par la demanderesse au mois de janvier 2006. LOrganisme aurait plutôt référer celle-ci au Bureau du coroner afin quelle puisse formuler sa demande daccès. Cette invitation a été faite tardivement. [29] Elle fait remarquer subsidiairement que la preuve démontre que lOrganisme a transmis les déclarations des témoins au Bureau du coroner en chef, selon les termes de larticle 96 (2 e paragraphe) de la Loi sur les coroners 3 . Elle ajoute que le rapport de lagent de la paix est annexé à celui du Coroner. Ces documents revêtent un caractère confidentiel et ne sont pas accessibles au public. [30] Elle plaide néanmoins que le Coroner en chef ne peut publier ou diffuser le rapport dun agent de la paix sans la permission expresse du ministre de la Sécurité publique, au sens de larticle 100 (2 e alinéa) de la Loi sur les coroners. [31] Elle argue par ailleurs que larticle 180 de cette loi prévoit que celle-ci a préséance sur la Loi sur laccès. Conséquemment, une personne qui en fait la demande ne pourrait pas avoir accès à un document, tel le cas sous étude, ajoutant que l «on ne peut passer outre la Loi sur les coroners ». [32] Elle indique que, dans laffaire Association des résidants de Côte-des-Neiges c. Ville de Montréal 4 , la Commission a déjà statué que les dispositions de la Loi sur les coroners sappliquent au rapport dun agent de la paix, lequel est annexé à celui du Coroner. Les articles 28 (6 e paragraphe) et 53 de la Loi sur laccès [33] Elle souligne subsidiairement que lOrganisme invoque le 1 er alinéa du 6 e paragraphe de larticle 28 de la Loi sur laccès, en ce quune enquête policière concernant [A] a été menée par une personne chargée de prévenir, détecter et réprimer le crime ou les infractions aux lois. La divulgation des documents en litige serait susceptible de révéler les composantes dun système de communication destiné à cette personne chargée dassurer lobservation de la loi. 3 L.R.Q., c. C-68. 4 C.A.I. Montréal, n os 05 02 27 et 05 07 75, 13 février 2006, c. Laporte.
06 05 30 Page : 7 [34] M e Brisebois fait de plus remarquer que les documents en litige contiennent des renseignements personnels (nominatifs) concernant les personnes physiques qui y sont mentionnées au sens de larticle 53 de la Loi sur laccès. Il na pas été établi que celles-ci aient consenti à la divulgation des renseignements les concernant. Ceux-ci doivent demeurer confidentiels. DE LA DEMANDERESSE [35] M e Hébert réfère aux témoignages des témoins de la demanderesse, eu égard à la mission de celle-ci, dont lobjectif est de vérifier si des personnes ont été reconnues coupables injustement par les tribunaux judiciaires. La preuve démontre que des étudiants en droit travaillent dans les dossiers concernant ces personnes, sous la supervision davocats expérimentés en droit criminel. Dans le cas de [A], celui-ci a été reconnu coupable le 23 juin 1983 à la suite du procès pour le meurtre de […]. [36] M e Hébert plaide que la demanderesse a formulé sa demande daccès auprès de lOrganisme, selon les termes de larticle 9 de la Loi sur laccès, afin de recevoir les documents en litige. LOrganisme lui a fait connaître tardivement, soit le 8 mars 2007, des motifs additionnels de refus daccès à ces documents. [37] Elle commente les deux décisions de la Commission déposées en preuve, en ce que celle-ci ordonne à lOrganisme de faire parvenir au demandeur les rapports dévénement en litige (pièce D-3). Sur ordonnance de la Commission, lOrganisme a transmettre au demandeur certains documents (pièce D-4). [38] Elle fait remarquer que les documents en litige permettront à « la demanderesse de faire la lumière sur larrestation de [A [39] M e Hébert argue par ailleurs quen vertu de larticle 50 de la Loi dinterprétation 5 , il existe une présomption générale de non-rétroactivité dune loi lorsque celle-ci est silencieuse sur des points précis. Si le législateur avait voulu appliquer la rétroactivité de certains éléments de cette loi, il laurait indiqué expressément. 50. Nulle disposition légale n'est déclaratoire ou n'a d'effet rétroactif pour la raison seule qu'elle est énoncée au présent du verbe. 5 L.R.Q., c. I-16.
06 05 30 Page : 8 [40] Elle plaide quà son avis, la Loi sur les coroners remplacée par la Loi sur les décès est inapplicable dans la présente cause, puisque celle-ci est entrée en vigueur le 3 mars 1986, tel que mentionné par la commissaire Grenier dans laffaire Beaudoin c. Ministère de la Sécurité publique 6 . Dans cette décision, un accès partiel aux documents en litige a été accordé au demandeur en vertu de la Loi sur les coroners alors applicable. La permission du ministre de la Sécurité publique nétait pas obligatoire. Les articles 28 (6 e paragraphe) et 53 de la Loi sur laccès [41] M e Hébert argue que la règle générale est quune personne qui en fait la demande doit avoir accès à un document selon les termes de larticle 9 de la Loi sur laccès, dautant plus que, dans le cas sous étude, [A] consent à ce que la demanderesse puisse obtenir les documents en litige. LOrganisme ne peut se réfugier derrière le droit au secret pour refuser de transmettre à la demanderesse les documents en litige, conformément à laffaire Conseil de la magistrature du Québec c. Commission daccès à l'information 7 , lorsque la Cour dappel du Québec indique notamment : […] Tout citoyen, sauf exception caractérisée et motivée par la préservation d'un intérêt supérieur (dont, par exemple, le respect de la vie privée), doit pouvoir avoir accès aux documents détenus par un organisme public. Le gouvernement et ses organismes ne peuvent plus désormais se réfugier derrière le silence administratif ou le droit au secret pour, d'une part, refuser de dévoiler des informations mêmes sensibles et d'autre part, éviter de subir l'imputabilité de leurs décisions. L'administration de la chose publique doit avoir une grande transparence, garantie, pour le citoyen, de l'exercice démocratique de ses droits. La Loi sur l'accès à l'information de 1982 représente à cet égard un remarquable pas en avant dans la recherche de la transparence de la gestion et de l'administration publique. [42] Elle indique subsidiairement que le 6 e paragraphe de larticle 28 de la Loi sur laccès est inapplicable dans la présente cause, lenquête policière étant terminée. De plus, cet article doit être interprété de façon restrictive et constitue une exception à la règle de la confidentialité, conformément à laffaire Beaudoin 8 . 6 [2003] C.A.I. 339. 7 [2000] C.A.I. 447. 8 Précitée, note 6.
06 05 30 Page : 9 [43] Elle plaide par ailleurs que le 2 e paragraphe de larticle 53 de la Loi sur laccès sapplique dans la présente cause. La preuve démontre que des témoins, à savoir A. O. et M. A., ont été rencontrés par des policiers, membres dun organisme public. Leurs noms apparaissent dans le rapport denquête de la police. [44] Commentant laffaire Association des résidants de Côte-des-Neiges 9 , mentionnée par M e Brisebois, M e Hébert fait remarquer que cette décision a été rendue après la date dentrée en vigueur de la Loi sur les décès. [45] M e Brisebois réplique que lOrganisme est tenu dappliquer la loi en vigueur au moment de la demande, comme dans le présent cas, d le motif pour lequel la loi ci-dessus mentionnée sapplique. COMPLÉMENT DE PREUVE [46] Pour faire suite à lengagement pris par lOrganisme à laudience, M e Brisebois transmet à la Commission un affidavit daté du 4 mai 2007, portant la signature de M me Trudeau. Celle-ci déclare essentiellement quelle a effectué des recherches eu égard à la demande daccès formulée par M. Beaudry. Les seuls documents quelle a pu repérer sont ceux joints en annexe à son affidavit. Commentant laffaire Beaudoin 10 citée par M e Hébert [47] M e Brisebois réplique par écrit à largumentation de M e Hébert relativement à cette décision. Elle indique que cette dernière « ne traite aucunement de leffet rétroactif de la Loi sur les décès ». Elle ajoute notamment que : Selon notre compréhension de cette décision, c'est donc en raison de la preuve établissant que certains renseignements ont acquis un caractère public préalablement à la demande d'accès que la Commission ordonne, au paragraphe (59), la communication de ces seuls renseignements. En l'absence d'une telle preuve, la Commission déclare les renseignements confidentiels et refuse la communication. […] En l'espèce, la partie demanderesse n'a pas fait la preuve que les documents demandés ont, dans le passé, été rendus publics, que ce soit lors du procès criminel de 9 Précitée, note 4. 10 Précitée, note 6.
06 05 30 Page : 10 monsieur [A] ou lors d'une enquête publique tenue par un coroner en vertu de l'article 32 de la Loi sur les coroners. Au contraire, la partie demanderesse a admis, lors de l'audition du 16 avril 2007, que si tel avait été le cas, il aurait été inutile d'adresser une demande d'accès à l'organisme, puisque les documents auraient été en sa possession. Par conséquent, nous sommes d'avis que le cas qui nous concerne se distingue de celui de l'affaire Beaudoin et que les dispositions impératives de la «Loi sur les décès» que nous avons invoquées lors de l'audition doivent recevoir application. Ainsi, l'organisme n'avait d'autre choix que de refuser de transmettre les documents demandés. [48] Le 21 juin 2007, M e Hébert réplique à largumentation écrite de M e Brisebois, précisant que la demanderesse reconnaît que laffaire Beaudoin ne traite pas de leffet rétroactif et que les documents ayant fait lobjet dune ordonnance de divulgation par la Commission avaient, préalablement, été rendus publics, notamment lors dune enquête publique tenue par le Bureau du coroner. [49] M e Hébert souligne cependant : Même si la commissaire partage l'avis du Service au sujet de la rétroactivité de la Loi sur les décès, nous soulignons que cette loi ne vise que les documents formellement annexés au rapport du Coroner. L'arrêt Louis Pinsonnault c. Ville de Trois-Rivières applique la Loi sur les décès seulement aux rapports annexés au rapport du Coroner et traite tout autre document selon la Loi sur l'accès. Également, dans l'arrêt Carole Blouin c. Ministère de la culture et des communications, la Loi sur les décès est appliquée seulement aux rapports annexés au rapport du Coroner. En effet, dans cet arrêt, M. Yves Laliberté vient témoigner que les documents en litige étaient annexés au rapport du Coroner. En l'espèce, le Service n'a pas établi en preuve que le rapport émis à la Commissaire était annexé au rapport du Coroner. Par conséquent, la divulgation des documents demandés serait régie par les provisions plus favorables à la transparence de la Loi sur l'accès.
06 05 30 Page : 11 DÉCISION [50] Les documents visés par la demande du 25 janvier 2006 sont des déclarations écrites ou transcrites, ou des notes manuscrites des policiers concernant les déclarations orales faites par A. O. et M. A, relatives au meurtre de […] survenu à Montréal, le 11 octobre 1979. [51] Il est opportun de préciser que le principe général est laccès aux documents recherchés par un demandeur au sens de larticle 9 de la Loi sur laccès, sous réserve de certaines dispositions législatives, tels les articles 28 et 53 de la Loi sur laccès : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; […] 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. [52] Dans le cas sous étude, lOrganisme ma remis, sous le sceau de la confidentialité, les 16 avril et 4 mai 2007, les documents en litige : un rapport
06 05 30 Page : 12 dévènement de six pages retranscrit sous forme dactylographique, une déclaration dun témoin portant la signature de celui-ci, un extrait dune page dun « rapport général » de police et un sommaire des faits impliquant [A]. [53] Afin de supporter le bien-fondé de sa demande et pour compléter ses arguments recueillis lors de laudience, la demanderesse ma transmis des extraits de notes sténographiques de linterrogatoire de [A. O.], tenu le 21 octobre 1982 devant le coroner Maurice C. Laniel, relativement à lévènement impliquant [A], des extraits des notes sténographiques datées du 24 janvier 1983 lors de son enquête préliminaire, de linterrogatoire de [A. O.] tenu lors du procès de [A], du « Précis » des faits émanant de la « Communauté urbaine de Montréal » et la jurisprudence. [54] Jai examiné les documents ci-dessus mentionnés et le consentement portant la signature de [A] (pièce D-1). Cependant, le fait quil ait autorisé par écrit la demanderesse à avoir accès aux documents en litige le concernant ne donne pas nécessairement à celle-ci un droit daccès. [55] Laccès aux documents peut se faire en application des dispositions prescrites notamment dans la Loi sur laccès. [56] Relativement à lexamen des documents mentionnés au paragraphe 53 de la présente décision, la preuve na fait pas fait ressortir dinformation voulant que les documents en litige aient été rendus publics lors de lenquête du coroner ou lors du procès concernant [A], tenus en 1982 et en 1983 ou à tout autre moment précédant la demande daccès. [57] Par ailleurs, lexamen des documents en litige décrits au paragraphe 52 de la présente décision démontre que, dans le cadre de leur enquête, les policiers décrivent notamment le lieu, lheure, la date auxquels lévènement impliquant [A] sest produit et sa nature. Ces documents contiennent également les coordonnées des témoins à rencontrer et de ceux qui ont été rencontrés par des policiers. [58] Larticle 28 de la Loi sur laccès invoqué par lOrganisme, étant une exception à laccès aux documents, il doit être interprété restrictivement. De plus, lorsquun organisme démontre que lune ou lautre des situations prescrites à cet article est rencontrée, laccès à un document doit être refusé à un demandeur, conformément aux affaires Beshro c. Québec (Ville de) 11 et Côté c. Ministère de la sécurité publique 12 . 11 [2005] C.A.I., 134-137. 12 [2005] C.A.I., 174-185.
06 05 30 Page : 13 [59] Dans le cas sous étude, la preuve établit que les documents en litige sont protégés par le 6 e paragraphe du 1 er alinéa de larticle 28 de la Loi sur laccès précité. Il est évident que leur divulgation serait susceptible de révéler les composantes dun système de communication destiné à lusage dune personne chargée dassurer lobservation de la loi. [60] De plus, il est exact que les documents en litige concernent [A], les renseignements quils contiennent ne portent pas la signature de celui-ci. Ils visent plutôt des renseignements relativement à des tiers, à savoir des témoins eu égard à lévènement en question. [61] En ce sens, même si larticle 28 de la Loi sur laccès était inapplicable dans la présente cause, il aurait été impossible à la Commission dordonner à lOrganisme de communiquer à la demanderesse les documents en litige en vertu de larticle 53 de cette loi précité. En effet, ces derniers sont truffés de renseignements personnels (nominatifs) concernant des personnes autres que [A]. [62] En labsence de consentement écrit de ces personnes, lOrganisme était en outre fondé à refuser de communiquer à la demanderesse les renseignements contenus dans les documents en litige, selon larticle 88 de la Loi sur laccès, tel quil se lisait au moment du traitement de la demande : 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [63] En raison de ce qui précède, il ny a donc pas lieu de commenter la rétroactivité des lois, tel que débattu par les procureures dans la présente cause. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [64] DÉCLARE que le lOrganisme était fondé à refuser de faire parvenir à la demanderesse les documents en litige;
06 05 30 Page : 14 [65] REJETTE conséquemment la demande de révision de la demanderesse contre lOrganisme et; [66] FERME le dossier. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Anne Hébert Procureure de la demanderesse M e Caroline Brisebois Procureure de lOrganisme
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