Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 17 79 Date : Le 11 mars 2005 Commissaire : M e Michel Laporte X Demandeur c. HÔPITAL CHARLES LeMOYNE Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION [1] Le demandeur conteste la décision de l’Hôpital Charles LeMoyne (« l’Hôpital ») ne lui ayant remis que le Bulletin de décès de sa femme, morte le 9 avril 2003, et non une copie complète du dossier médical. [2] Une audience a lieu à Montréal le 16 février 2005.
03 17 79 Page : 2 L'AUDIENCE A) LA PREUVE De l'Hôpital et du demandeur Le demandeur [3] Le demandeur confirme avoir reçu le Bulletin de décès de l’Hôpital (pièce O-1), mais pas le dossier médical complet de sa conjointe de fait depuis 29 ans. Il atteste que sa conjointe n’a pas laissé de testament, mais seulement un bout de papier constatant ses dernières volontés (pièce D-1). Il indique que ce dernier document, vu les coûts, n’a pas été authentifié par la Cour. [4] Le demandeur explique que le médecin a informé sa conjointe lors de son hospitalisation qu’il ne lui restait qu’un an à vivre. Il soutient que sa conjointe se portait bien jusqu’au moment où elle a reçu une piqûre juste avant son décès. Il tient à connaître le détail de ce qui est survenu la journée du décès. M me Francine Lavergne [5] M me Lavergne, archiviste médicale et responsable de l’accès, mentionne avoir traité la demande d’accès. Elle affirme avoir communiqué avec le demandeur pour obtenir une preuve de sa qualité d’héritier, sans succès. Elle précise que la pièce D-1 lui était inconnue jusqu’à ce jour. [6] M me Lavergne signale avoir expliqué au demandeur que sa demande ne respectait pas les conditions de l’article 23 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi ») et qu’elle ne pouvait, dans les circonstances, y donner suite. [7] M me Lavergne fait remarquer qu’elle a référé le demandeur au D r Trudeau, oncologue, pour qu’il puisse obtenir plus d’informations sur l’état de santé de sa conjointe. Elle ajoute qu’elle a donné le nom du D r Trudeau parce que celui-ci est reconnu pour son humanisme. [8] Le demandeur réplique que le D r Trudeau ne l’a pas rappelé. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 17 79 Page : 3 B) LES ARGUMENTS De l'Hôpital [9] La procureure de l’Hôpital, M e Mélanie Sauriol, allègue que le dossier médical d’un usager est confidentiel 2 , ne pouvant être communiqué que selon les conditions spécifiques prévues à l’article 23 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 3 : 23. Les héritiers et les représentants légaux d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure où cette communication est nécessaire à l'exercice de leurs droits à ce titre. Il en est de même de la personne ayant droit au paiement d'une prestation en vertu d'une police d'assurance sur la vie de l'usager ou d'un régime de retraite de l'usager. Le conjoint, les ascendants ou les descendants directs d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication des renseignements relatifs à la cause de son décès, à moins que l'usager décédé n'ait consigné par écrit à son dossier son refus d'accorder ce droit d'accès. Malgré le deuxième alinéa, les personnes liées par le sang à un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure où cette communication est nécessaire pour vérifier l'existence d'une maladie génétique ou d'une maladie à caractère familial. [10] M e Sauriol soumet que le demandeur n’a pu établir sa qualité d’hériter ni l'exercice d’un droit à ce titre. L’Hôpital était donc justifié de lui en refuser l’accès 4 . DÉCISION [11] L’article 19 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux énonce que le dossier d’un usager est confidentiel, sauf si les conditions prévues au 1 er alinéa de l’article 23 sont satisfaites au cas sous étude : 2 Rodrigue c. Centre local de services communautaires, [1999] C.A.I. 381; Martin HÉBERT, Aspects juridiques du dossier de santé et de services sociaux, Aqam, juillet 2002. 3 L.R.Q., c. S-4.2. 4 X. c. Institut Philippe-Pinel de Montréal, [1997] C.A.I. 304; X. c. Hôpital du St-Sacrement, [1996] C.A.I. 33; L… c. S…, [1999] R.J.Q. 2927 (C.S.).
03 17 79 Page : 4 19. Le dossier d'un usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n'est avec l'autorisation de l'usager ou de la personne pouvant donner une autorisation en son nom, sur l'ordre d'un tribunal ou dans le cas où la présente loi prévoit que la communication de renseignements contenus dans le dossier peut être requise d'un établissement. Toutefois, un professionnel peut prendre connaissance d'un tel dossier à des fins d'étude, d'enseignement ou de recherche, avec l'autorisation du directeur des services professionnels ou, à défaut d'un tel directeur, avec l'autorisation du directeur général, accordée conformément aux critères établis à l'article 125 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., chapitre A-2.1). [12] Les termes du 1 er alinéa de l’article 23 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux impliquent que la communication par l’Hôpital de renseignements contenus dans le dossier d’un usager ne peut s’effectuer que dans la mesure où le demandeur possède le titre d’héritier, et ce, aux fins d’exercer, à ce titre, un droit réel et circonscrit 5 . Il découle que cette « […] communication doit non seulement être utile mais nécessaire à l’exercice […] » de ses droits d’héritier 6 . Dans l’affaire X. c. Hôpital du St-Sacrement 7 , la Commission expose que : […] Le critère de nécessité est plus exigeant que celui de la simple utilité; il implique que sans la communication de ces renseignements, l’héritier ne pourra vraisemblablement exercer ses droits. De plus, l’emploi des termes «exercice des droits» à la suite des mots «nécessaire à» impose logiquement qu’au moment où il fait la demande, l’héritier puisse identifier ou décrire un événement, un fait ou une irrégularité qui, à sa face même, laisse raisonnablement supposer qu’il a un droit à faire valoir à ce titre, en raison de la survenance de cet événement, de cette irrégularité ou en raison de l’existence de ce fait. […] 5 X. c. Centre hospitalier universitaire de Québec, C.A.I. Québec, n o 03 06 64, 4 mars 2004, c. Grenier, p. 10. 6 L… c. S…, précitée, note 4. 7 Précitée, note 4, 39.
03 17 79 Page : 5 [13] La preuve non contredite démontre que le demandeur, tant au moment de la demande d’accès qu’à l’audience, n’a pu réunir les conditions lui permettant de satisfaire les exigences du 1 er alinéa de l’article 23 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [14] REJETTE la demande de révision du demandeur. MICHEL LAPORTE Commissaire Heenan Blaikie (M e Mélanie Sauriol) Procureurs de l’organisme
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