Commission d’accès à l’information du Québec Dossier: 04 03 72 Date: 16 février 2005 Commissaire: M e Christiane Constant X Demandeur c Ville de Montréal (Arrondissement de Westmount) Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS [1] Le demandeur requiert de la Ville de Montréal (l’« organisme ») une copie d’une plainte déposée contre lui alors qu’il travaillait comme « parking inspector for the Borough of Westmount. » [2] Le 19 décembre suivant, l’organisme lui refuse l’accès en vertu des articles 53, 54, 55, 56, 57, 58 et 59 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès »). 1 L.R.Q., c. A-2.1
04 03 72 Page : 2 [3] Le 19 janvier 2004, le demandeur s’adresse à la Commission d’accès à l’information (la « Commission ») pour qu’elle révise la décision de l’organisme. L’AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause se tient à Montréal, le 25 janvier 2005, en présence du demandeur. L’organisme est représenté par M me Lise Raymond, stagiaire en droit, accompagnée de M e Hélène Simoneau, du cabinet d’avocats Jalbert, Séguin, Caron. M e Simoneau dépose, sous le sceau de la confidentialité, les documents en litige. LA PREUVE [5] Le demandeur affirme solennellement qu’au moment de la demande d’accès, il était inspecteur au stationnement dans l’Arrondissement de Westmount, et membre du Syndicat des fonctionnaires de Montréal, local 429. Il affirme avoir rencontré son directeur qui l’a informé que des citoyens ont déposé des plaintes contre lui, mais qu’il a refusé de lui en donner une copie. Il indique vouloir connaître les éléments faisant l’objet de ces plaintes, afin d’apporter éventuellement des modifications dans sa façon de travailler. [6] En contre interrogatoire mené par M e Simoneau, le demandeur déclare qu’au moment de la demande d’accès, il était à l’emploi de l’organisme. Par la suite, en compagnie de son représentant syndical, M. Michel Poulin, il a rencontré le directeur de la sécurité publique, et ce, en rapport avec lesdites plaintes. [7] Par ailleurs, le demandeur précise qu’il serait prêt à obtenir une copie élaguée des documents, sans les noms et les adresses des signataires de ces plaintes. LES ARGUMENTS [8] M me Lise Raymond plaide que les documents en litige sont constitués de deux plaintes formulées par deux citoyens contre le demandeur. Elle argue que celui-ci exerce un droit pour avoir accès à ces documents le concernant selon les termes de l’article 83 de la Loi sur l’accès, sous réserves des dispositions législatives prévues à l’article 88 de ladite loi.
04 03 72 Page : 3 [9] M me Raymond plaide cependant que l’organisme refuse d’acquiescer à cette demande, car les documents contiennent des renseignements nominatifs, tels les nom et prénom, l’adresse et le n o de téléphone de chacun des plaignants. Ces renseignements sont protégés par les articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès. Elle ajoute que les signataires de ces plaintes ont fait part à l’organisme d’une situation précise qu’ils ont vécue avec le demandeur. Leur identité et le contenu de leurs déclarations devraient demeurer confidentiels, tel que mentionné notamment dans l’affaire Hébert c. Régie de l’assurance maladie du Québec 2 indiquant que « l’identité de l’auteur d’une plainte est un renseignement nominatif par rapport à cette personne. » [10] M me Raymond précise de plus, que rien n’indique que les plaignants ont consenti à la divulgation des renseignements nominatifs les concernant selon les termes de l’article 88 de la Loi sur l’accès. LA DÉCISION [11] En formulant sa demande auprès de l’organisme, le demandeur a exercé un droit d’accès qui lui est reconnu par l’article 83 de la Loi sur l’accès. 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [12] Cette demande vise l’obtention, en tout ou en partie, de deux lettres, sous forme de dénonciation, que deux personnes ont formulé contre le demandeur, alors que celui-ci occupait la fonction d’inspecteur au stationnement pour l’organisme. Ce droit d’accès fait partie des droits de la personnalité que lui reconnaît le législateur selon les termes de l’article 3 du Code civil du Québec 3 . 2 [1994] C.A.I. 136. 3 L.Q., 1991, c. 64.
04 03 72 Page : 4 3. Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l'inviolabilité et à l'intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée. Ces droits sont incessibles. [13] L’examen de ces deux lettres démontre qu’elles ont été adressées à M. Richard McEnroe, directeur de la Sécurité publique de l’organisme au cours de l’année 2003. Chacun des plaignants lui fait part d’un évènement précis qui les concerne et qui implique le demandeur. Ils se réfèrent, entre autres, au comportement de celui-ci à leur endroit et émettent des commentaires personnels à son égard. [14] Citant la décision Église de scientologie c. Commission des normes du travail dans l’affaire Rousseau c. Centre hospitalier régional de l’Outaouais 4 , il est indiqué notamment que les : […] déclarations des plaignants ont été déclarées nominatives à l’égard des personnes qui les ont faites, lorsque les plaignants y relataient, dans leurs propres mots, ce qu’ils considéraient être leurs griefs contre le demandeur et qu’elles étaient assorties de commentaires personnels, bref qu’elles traduisaient leur subjectivité. […] [15] La soussignée est d’avis que la divulgation des renseignements contenus dans ces lettres révèlerait un renseignement nominatif concernant les signataires de ces plaintes. De plus, il n’est pas démontré que ceux-ci aient autorisé l’organisme à communiquer au demandeur lesdits renseignements selon les termes de l’article 88 de la Loi sur l’accès. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. 4 [1988] C.A.I. 35 à 38.
04 03 72 Page : 5 [16] Par ailleurs, le demandeur a indiqué au cours de son témoignage qu’il accepterait une copie élaguée des documents en litige. La soussignée ne peut pas acquiescer à cette demande, même si les renseignements qu’ils contiennent le concernent personnellement. Le législateur prévoit à la Loi sur l’accès qu’un renseignement nominatif concernant une personne physique doit demeurer confidentiel, lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement de révéler un renseignement nominatif concernant une autre personne physique. C’est le cas sous étude. [17] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION: REJETTE la demande de révision du demandeur contre la Ville de Montréal, Arrondissement de Westmount; FERME le présent dossier portant le n o 04 03 72. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Hélène Simoneau Jalbert, Séguin, Caron Procureurs de la Ville de Montréal (Arrondissement de Westmount)
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