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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 03 15 22 Date : 2 février 2005 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. Hôpital Sainte-Justine Organisme public DÉCISION LOBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 11 août 2003, la demanderesse sadresse à lhôpital Sainte-Justine lorganisme»), afin dobtenir une copie intégrale des documents contenus au dossier médical de sa fille mineure décédée. [2] Le 14 août, par lentremise de M me Martine Dubé qui occupe, entre autres, les fonctions de responsable de laccès aux documents, lorganisme lui en refuse laccès. Il invoque à cet effet larticle 23 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux 1 L.s.s.s.s. »). 1 L.R.Q., c. S-4.2.
03 15 22 Page : 2 [3] Le 22 août 2003, la demanderesse sollicite lintervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») pour que soit révisée cette décision de lorganisme. LAUDIENCE [4] À la demande de la demanderesse, laudience de la présente cause a été reportée à une reprise. Elle se tient, le 8 décembre 2004, en la ville de Joliette, en présence de M me Martine Dubé, témoin de lorganisme, celui-ci étant représenté par M e Anne De Ravinel. LE CONTEXTE [5] Le matin de laudience, la demanderesse informe la Commission quelle ne sy présenterait pas en raison des conditions climatiques. [6] M me Dubé informe la Commission que, dans le but de permettre à la demanderesse de participer à laudience, lorganisme est prêt à acquitter ses frais de déplacement (aller-retour), incluant son transport par taxi. [7] À cet effet, un membre du personnel de la Commission a tenté, sans succès, de rejoindre la demanderesse par téléphone à deux reprises, afin de lui faire part de loffre de lorganisme; deux messages sont laissés dans sa boîte vocale pour quelle communique avec la Commission. Sans nouvelles de la demanderesse à ce moment, laudience se tient tel quil est indiqué à lavis de convocation. LA PREUVE DE LORGANISME [8] M me Dubé déclare solennellement quelle occupe notamment les fonctions de responsable de laccès aux documents. Elle affirme que la demanderesse a formulé plusieurs demandes daccès auprès de lorganisme. Elle dépose, en preuve, les documents suivants démontrant léchange de correspondance intervenue entre les parties :
03 15 22 Page : 3 a) Pièce O-1 : le 4 novembre 2002, la demanderesse formule une demande pour avoir un accès intégral aux documents contenus au dossier de sa fille mineure qui avait moins de 14 ans au moment de son décès; b) Pièce O-2 : le 11 novembre, lorganisme lui transmet certains documents. Il lui refuse laccès au reste, invoquant à cet effet larticle 23 de la L.s.s.s.s.; c) Pièce O-3 : lorganisme lui communique une feuille sommaire datée du 7 avril 2000 contenant, entre autres, « le diagnostic principal, les autres diagnostics, les problèmes relatifs à létat de santé et les traitements fournis » à lenfant mineure; d) Pièce O-4 : le 28 mars 2003, la demanderesse formule une nouvelle demande daccès. M me Dubé inscrit au bas de la 2 e page de cette demande une note manuscrite selon laquelle elle affirme avoir parlé au père de lenfant mineure pour linformer que lorganisme est lié par les dispositions législatives prévues à larticle 23 de la L.s.s.s.s. Celui-ci lui a dit quil ne veut pas entreprendre de recours judiciaires contre lorganisme. Il estime cependant avoir le droit dobtenir une copie intégrale desdits documents, parce quun autre centre hospitalier la informé quil a le droit de les obtenir; e) Pièce O-5 : la demanderesse formule une autre demande daccès, le 11 août 2003, laquelle fait lobjet de la présente demande de révision; f) Pièce O-6 : le 14 août, lorganisme communique à la demanderesse sa réponse et précise notamment quen raison des dispositions législatives prévues à la L.s.s.s.s, il doit lui refuser laccès intégral auxdits documents, à moins « que cette communication est nécessaire à lexercice dun droit ou pour vérifier lexistence dune maladie génétique ou dune maladie à caractère familial. » Les inscriptions en caractères gras émanent de lorganisme g) Pièce O-7 : le 22 août, la demanderesse sadresse à la Commission pour que soit révisée la décision de lorganisme.
03 15 22 Page : 4 LARGUMENTAIRE [9] M e De Ravinel plaide que les articles 17 à 23 de la L.s.s.s.s. régissent les dossiers des usagers; ces articles déterminent les conditions selon lesquelles une personne, incluant le titulaire de lautorité parentale ou le tuteur de lenfant, peut exercer son droit daccès. Lavocate argue de plus, que le législateur a établi des « règles extrêmement sévères quant à la communication du dossier hospitalier dune personne décédée». À son avis, ces règles sont incontournables, la Commission ne peut y passer outre, et ce, tel quindiqué dans la décision Grignet c. Hôpital Saint-Charles-Borromée 2 . [10] M e De Ravinel signale que le législateur, nayant pas fait de distinction entre un usager majeur dun usager mineur, elle estime que les articles ci-dessus mentionnés sappliquent aux documents contenus au dossier de la fille mineure décédée de la demanderesse. [11] M e De Ravinel considère de plus que si le législateur voulait donner à un demandeur un accès intégral au dossier dun usager décédé, il laurait indiqué expressément dans sa loi habilitante. Or, il ne la pas fait. [12] M e De Ravinel souligne par ailleurs, que larticle 21 de la L.s.s.s.s., indiquant le droit du titulaire de lautorité parentale davoir accès au dossier dun usager mineur, constitue une exception au principe général de confidentialité du dossier médical. Ce droit doit sinterpréter restrictivement, et ce, tel quil est mentionné par la Commission dans laffaire St-Cyr c. Centre hospitalier Malartic 3 . [13] De plus, M e De Ravinel plaide que, malgré le décès de la fille mineure de la demanderesse, la règle de confidentialité des renseignements personnels la concernant, demeure, et ce, conformément, entre autres, aux décisions B., c. Hôpital Louis-H. Lafontaine 4 et X c. Centre hospitalier affilié universitaire de Québec 5 . [14] En regard des trois exceptions prévues à larticle 23 de la L.s.s.s.s, M e De Ravinel émet les commentaires suivants sur: 2 C.A.I. Montréal, n o 95 02 11, 14 août 1996, c. Comeau. 3 C.A.I. Québec, n o 99 07 67, 16 décembre 1999, c. Comeau. 4 C.A.I. Montréal, n o 92 09 06, 9 février 1993, c. Miller. 5 C.A.I. Québec, n o 03 05 89, 5 décembre 2003, c. Grenier.
03 15 22 Page : 5 les « héritiers, les légataires particuliers et les représentants légaux dun usager décédé », lorsque ces renseignements sont nécessaires à lexercice dun droit. À son avis, cette exception est inapplicable dans la présente cause, car la demanderesse ne cherche pas à obtenir les renseignements à ce titre; « Le conjoint, les ascendants ou les descendants directs dun usager décédé ont le droit de recevoir communication » desdits renseignements, lesquels sont relatifs à la cause de son décès. Sur ce point, M e De Ravinel précise que la preuve a révélé que ce motif a été retenu par lorganisme qui a communiqué à la demanderesse une feuille sommaire contenant « le diagnostic principal, les autres diagnostics, les problèmes relatifs à létat de santé et les traitements fournis » à son enfant mineure; « Les personnes liées par le sang à un usager décédé ont le droit de recevoir communication » de ces renseignements, si « cette communication est nécessaire pour vérifier lexistence dune maladie génétique ou dune maladie à caractère familial ». Lavocate souligne que la demanderesse na fourni à lorganisme aucune indication ou de preuve pouvant lui permettre de considérer cet aspect. LA DÉCISION Dispositions législatives applicables dans la présente instance : [15] Les articles 19, 21 et 23 L.s.s.s.s. : 19. Le dossier d'un usager est confidentiel et nul ne peut y avoir accès, si ce n'est avec le consentement de l'usager ou de la personne pouvant donner un consentement en son nom, sur l'ordre d'un tribunal ou d'un coroner dans l'exercice de ses fonctions, dans le cas la présente loi prévoit que la communication de renseignements contenus dans le dossier peut être requise d'un établissement ou dans le cas un renseignement est communiqué pour l'application de la Loi sur la santé publique (chapitre S-2.2). 21. Le titulaire de l'autorité parentale a droit d'accès au dossier d'un usager mineur.
03 15 22 Page : 6 Restriction. Toutefois, un établissement doit refuser au titulaire de l'autorité parentale l'accès au dossier d'un usager mineur dans les cas suivants: 1° l'usager est âgé de moins de 14 ans et il a fait l'objet d'une intervention au sens de l'article 2.3 de la Loi sur la protection de la jeunesse (chapitre P-34.1) ou il est visé par une décision prise en vertu de cette loi et l'établissement, après avoir consulté le directeur de la protection de la jeunesse, détermine que la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager; 2° l'usager est âgé de 14 ans et plus et, après avoir été consulté par l'établissement, refuse que le titulaire de l'autorité parentale reçoive communication de son dossier et l'établissement détermine que la communication du dossier de l'usager au titulaire de l'autorité parentale cause ou pourrait causer un préjudice à la santé de cet usager. 23. Les héritiers, les légataires particuliers et les représentants légaux d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure cette communication est nécessaire à l'exercice de leurs droits à ce titre. Il en est de même de la personne ayant droit au paiement d'une prestation en vertu d'une police d'assurance sur la vie de l'usager ou d'un régime de retraite de l'usager. Le conjoint, les ascendants ou les descendants directs d'un usager décédé ont le droit de recevoir communication des renseignements relatifs à la cause de son décès, à moins que l'usager décédé n'ait consigné par écrit à son dossier son refus d'accorder ce droit d'accès. Malgré le deuxième alinéa, les personnes liées par le sang à un usager décédé ont le droit de recevoir communication de renseignements contenus dans son dossier dans la mesure cette communication est nécessaire pour vérifier l'existence d'une maladie génétique ou d'une maladie à caractère familial.
03 15 22 Page : 7 [16] Le législateur prévoit, à larticle 19 de la L.s.s.s.s., que le dossier dun usager revêt un caractère confidentiel. Dans la décision X c. Centre hospitalier affilié universitaire de Québec 6 , la Commission note, entre autres, que le : […] législateur a choisi dattribuer un caractère confidentiel au dossier de lusager dun établissement de santé et de services sociaux. Il a aménagé certaines exceptions à ce principe de confidentialité, notamment lorsque lusager est décédé; ces exceptions sont appliquées selon des conditions précises et neutres le dossier de lusager demeure le sien, malgré la douleur de ses proches; seules les exceptions prévues à larticle 23 permettent, dans une mesure définie, laccès à son dossier lorsque les conditions dapplication de ces exceptions sont réunies. […] [17] Toutefois, à larticle 23 de la L.s.s.s.s., le législateur prévoit des exceptions au principe de la confidentialité; elles doivent recevoir une interprétation restrictive. [18] Le témoin de lorganisme, M me Dubé, a précisé, à laudience, quelle doit respecter cette exigence législative, d le motif principal pour lequel elle a refusé de communiquer à la demanderesse lintégralité des renseignements contenus au dossier de sa fille mineure décédée. [19] Conformément au 2 e alinéa de larticle 23 de la L.s.s.s.s., la preuve a démontré que lorganisme a communiqué à la demanderesse un extrait des renseignements (pièce O-3 précitée). [20] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CONSTATE labsence de la demanderesse de laudience; 6 Id., 5
03 15 22 Page : 8 PREND ACTE que, conformément à L.s.s.s.s., lhôpital Sainte-Justine a communiqué à la demanderesse une copie partielle des renseignements contenus au dossier de sa fille mineure; REJETTE, quant au reste, la demande de révision; FERME le présent dossier n o 03 15 22. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Anne De Ravinel Procureure de lhôpital Sainte-Justine
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