Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : CV 03 17 98 Date : Le 9 décembre 2004 Commissaires : M e Diane Boissinot M e Christiane Constant M e Michel Laporte X Plaignante c. CAISSE POPULAIRE LAVAL-DES- RAPIDES Entreprise intimée DÉCISION OBJET PLAINTE EN MATIÈRE DE COLLECTE DE RENSEIGNEMENTS PERSONNELS PAR UNE ENTREPRISE [1] La plaignante dénonce à la Commission la collecte par l’entreprise ou ses mandataires de renseignements personnels la concernant, auprès de tiers et ce, sans son consentement, contrairement aux prescriptions du premier alinéa de l’article 6 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 : 6. La personne qui recueille des renseignements personnels sur autrui doit les recueillir auprès de la personne concernée, à 1 L.R.Q., c. P-39.1, ci-après appelée « la Loi ».
CV 03 17 98 Page : 2 moins que celle-ci ne consente à la cueillette auprès de tiers. Toutefois, elle peut, sans le consentement de la personne concernée, recueillir ces renseignements auprès d'un tiers si la loi l'autorise. Elle peut faire de même si elle a un intérêt sérieux et légitime et si l'une ou l'autre des conditions suivantes se réalise: 1°les renseignements sont recueillis dans l'intérêt de la personne concernée et ils ne peuvent être recueillis auprès de celle-ci en temps opportun; 2° la cueillette auprès d'un tiers est nécessaire pour s'assurer de l'exactitude des renseignements. [2] L’entreprise prétend, de son côté, que la plaignante avait consenti à cette collecte, que le consentement était manifeste, libre et éclairé et donné à des fins spécifiques conformément à l’article 14 de la Loi : 14. Le consentement à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel doit être manifeste, libre, éclairé et être donné à des fins spécifiques. Ce consentement ne vaut que pour la durée nécessaire à la réalisation des fins pour lesquelles il a été demandé. Un consentement qui n'est pas donné conformément au premier alinéa est sans effet. [3] L’entreprise soutient également que cette collecte s’est effectuée dans le cadre de l’objet du dossier et que ces renseignements étaient nécessaires à l’objet de ce dossier conformément à l’article 5 de la Loi : 5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d'y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier. Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites.
CV 03 17 98 Page : 3 A. LES FAITS NON CONTESTÉS [4] L’enquête a révélé les faits non contestés et pertinents qui suivent. [5] L’entreprise a cueilli ou fait cueillir par son mandataire auprès de tiers des renseignements personnels concernant la plaignante se trouvant à sa fiche de crédit chez ce tiers et ce, à trois reprises, soit les 25 février, 4 mars et 16 octobre 1998. [6] À ces trois dates, et depuis 1991 de façon ininterrompue jusqu’en 2000, l’entreprise est créancière d’une obligation de la société Gestion Diphyllode d’Albert inc. (GDA), soit à titre de débiteur principal ou à titre de caution, aux termes d’un acte de prêt hypothécaire au montant originaire de 154 000 $ affectant une propriété sise au 66 rue Tourangeau à Laval. [7] Le 5 avril 1994, par contrat intitulé « Cautionnent général », la plaignante s’est personnellement portée caution envers l’entreprise pour toute dette ou obligation, présente ou future, que GDA doit ou devra à cette dernière, tel cautionnement étant toutefois limité à la somme de 50 000 $. [8] Le 4 mars 1996, la plaignante donne les consentements suivants : CONFORMÉMENT AUX LOIS VISANT LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS, LES CONSENTEMENTS SUIVANTS SONT DONNÉS, SOIT : 1) Je consens à ce que la caisse recueille auprès de toute personne et détienne tous les renseignements jugés nécessaires à la prestation de tous services financiers requis dans le cadre de l’objet du dossier. Ce consentement s’applique également à la mise à jour des renseignements aux fins de permettre à la caisse de réanalyser les engagements que j’ai envers elle, notamment dans le cadre de renouvellements, d’amendements ou de changements dans les relations d’affaires. 2) Je consens à ce que toute personne communique à la caisse de tels renseignements même si ceux-ci figurent dans un dossier fermé ou inactif. 3) Je consens à ce que la caisse divulgue des renseignements me concernant à toute institution financière, agent de renseignements personnels, coemprunteur, caution éventuelle, évaluateur ou toute autre personne avec laquelle la caisse ou moi-même entretenons des relations d’affaires dans le cadre de la prestation de services financiers requis conformément à l’objet du dossier. B. CONCLUSION DE DROIT SUR CES FAITS
CV 03 17 98 Page : 4 [9] La Commission reconnaît que les relations d’affaires entre la plaignante, l’entreprise et la société DGA ont été nombreuses et se sont poursuivies, nouées et dénouées durant une période de presque 10 ans. [10] Il est toutefois certain qu’entre le 4 mars 1996, date du consentement, et le 16 octobre 1998, date de la dernière cueillette de renseignements reprochée, les droits et obligations existant entre ces trois personnes étaient ceux et celles décrites au chapitre A précédent. [11] La plaignante n’a pas convaincu la Commission que cette conclusion n’est pas fondée. DÉCISION [12] La Commission a examiné le dossier, la copie des pièces et documents déposés par la plaignante et par l’entreprise, la correspondance ainsi que les représentations écrites de la plaignante et des représentants de l’entreprise. [13] La Commission considère qu’entre le 5 avril 1994, date de la signature par la plaignante du cautionnement général, et le 16 octobre 1998, date de la dernière cueillette de renseignements reprochée, l’entreprise avait un intérêt sérieux et légitime de constituer un dossier sur la plaignante au sens de l’article 4 de la Loi : 4. Toute personne qui exploite une entreprise et qui, en raison d'un intérêt sérieux et légitime, peut constituer un dossier sur autrui doit, lorsqu'elle constitue le dossier, inscrire son objet. Cette inscription fait partie du dossier. [14] En effet, en sa double qualité de créancière d’une obligation hypothécaire ou d’un cautionnement souscrit par la société DGA en sa faveur et de bénéficiaire d’un cautionnement souscrit par la plaignante pour endosser le paiement ou l’exécution de toutes les dettes et obligations de DGA envers elle jusqu’à concurrence de la somme de 50 000 $, l’entreprise avait le droit de détenir des renseignements personnels concernant la plaignante et de verser ces renseignements dans un dossier. [15] L’objet de ce dossier est, pour l’entreprise, de s’assurer que le cautionnement consenti en sa faveur par la plaignante le 5 avril 1994 produise tous les effets désirés. [16] Les renseignements recueillis, i.e. les renseignements contenus à la fiche de crédit de la plaignante, sont nécessaires à l’objet du dossier au moment de leur cueillette, conformément à l’article 5 de la Loi (précité).
CV 03 17 98 Page : 5 [17] Le 4 mars 1996, la plaignante consent explicitement à ce que l’entreprise collecte auprès d’un tiers les renseignements nécessaires à l’objet de ce dossier dans le but spécifique de mettre à jour des renseignements aux fins de permettre à l’entreprise d’analyser à nouveau les engagements pris par la plaignante envers elle, notamment dans le cadre de renouvellements, d’amendements ou de changements dans les relations d’affaires. [18] La Commission est d’avis que ce consentement est manifeste puisqu’il est écrit, spécifique puisqu’il encadre la cueillette proposée, limité puisqu’il ne s’étend pas au-delà de la période où s’accomplira l’objet du dossier, et éclairé et libre puisque l’objet du dossier est bien connu de la plaignante et est clairement défini dans les termes du cautionnement général qu’elle a elle-même signé. [19] La Commission croit que le consentement du 4 mars 1996 répond aux exigences de l’article 14 de la Loi, précité. [20] La Commission est d’avis que l’entreprise n’a pas contrevenu à la Loi en cueillant ou en faisant cueillir auprès d’un tiers, aux dates ci-dessus indiquées, les renseignements de crédit concernant la plaignante. [21] EN CONSÉQUENCE, la Commission DÉCLARE LA PLAINTE NON FONDÉE LA REJETTE; et FERME le dossier. Signé à Québec le décembre 2004 M e DIANE BOISSINOT commissaire Signé à Montréal le décembre 2004 M e CHRISTIANE CONSTANT commissaire Signé à Montréal le décembre 2004 M e MICHEL LAPORTE commissaire Avocat de l’entreprise : M e Paul-André Martel (Dunton Rainville, avocats)
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