Commission d’accès à l’information du Québec Dossier: 03 22 52 Date: 15 novembre 2004 Commissaire: M e Christiane Constant X Demanderesse c. Ville de Boisbriand Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D’ACCÈS [1] Le 3 novembre 2003, la demanderesse s’adresse à la Ville de Boisbriand (l’« organisme »), afin d’obtenir une copie des documents se trouvant dans un dossier de police qui concerne une autre personne qu’elle identifie; elle fournit les coordonnées de cette personne. [2] Le 26 novembre, par l’entremise de M. Louis Gratton, responsable de l’accès aux documents, l’organisme lui transmet un accusé de réception et l’avise qu’un délai additionnel de dix jours est requis pour le traitement de la demande. Le 28 novembre, il lui communique une partie des documents car elle est « partie à la plainte » dans un dossier qu’il nomme. Il ajoute qu’il ne peut « confirmer l’existence du renseignement » recherché.
03 22 52 Page : 2 [3] Le 15 décembre suivant, la demanderesse requiert l’intervention de la Commission d’accès à l’information (la « Commission ») pour qu’elle révise cette décision. L’AUDIENCE [4] L’audience de la présente cause se tient à Montréal, le 27 octobre 2004, en présence de M. Louis Gratton, témoin de l’organisme qui est représenté par M e Lise Boily-Monfette, de la firme d’avocats Deveau, Lavoie, Bourgeois, Lalande & Associés. LA PREUVE [5] M. Louis Gratton déclare solennellement qu’il est adjoint administratif au Service de police et responsable de l’accès depuis 1989, mais qu’il travaille pour l’organisme depuis 1975. [6] Il affirme avoir traité la demande d’accès et y a donné suite. Il précise avoir communiqué à la demanderesse un rapport d’évènement élagué, celle-ci ayant été témoin d’un évènement; elle connaît déjà les renseignements qui la concerne. Il ajoute que la demanderesse cherche à obtenir des documents additionnels qui concernent une autre personne, en l’occurrence la mère de celle-ci. Il dépose, sous le sceau de la confidentialité, des documents. [7] À la demande de l’organisme, une preuve ex parte est soumise en vertu de l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission 1 . 20. Un organisme public peut refuser de communiquer un renseignement lorsque sa divulgation entraverait vraisemblablement une négociation en cours avec un autre organisme public dans un domaine de leur compétence. LES ARGUMENTS DE L’ORGANISME [8] M e Boily-Monfette rappelle à la Commission que la demanderesse a été témoin d’un évènement qui a nécessité la rédaction d’un rapport d’évènement par un policier. L’organisme lui a communiqué une copie élaguée de ce rapport de police. 1 L.R.Q. [A-2.1, r.2] D. 2058-84.
03 22 52 Page : 3 [9] Quant aux autres documents convoités par la demanderesse, l’avocate réfère au premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès et au témoignage de M. Gratton obtenu lors de la preuve ex parte pour plaider que c’est à bon droit que l’organisme refuse de lui confirmer l’existence de documents additionnels ou de lui en donner accès. [10] Elle argue que comme l’a indiqué la Commission dans l’affaire Bagnall c. Commission de protection des droits de la jeunesse 2 , le droit de refuser de confirmer l’existence d’un document est « une question de droit susceptible d’appel. Le fait de procéder à l’identification du document anéantirait ce droit d’appel ». LA DÉCISION [11] Il est établi, à l’audience, que la demanderesse désire obtenir une copie des documents se trouvant dans un dossier détenu par l’organisme concernant une personne qu’elle identifie à sa demande d’accès. [12] M. Gratton, pour sa part, a démontré que l’organisme a communiqué à la demanderesse une copie élaguée d’un rapport d’évènement, celle-ci ayant été témoin de l’évènement qui y est mentionné. [13] Il refuse, au nom de l’organisme, de confirmer l’existence de documents additionnels selon les termes du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès et des paragraphes 2, 3, 4, 5 et 6 de cet article. Au cours de la preuve ex parte, M. Gratton a fourni à la Commission des exemples concrets sur les motifs de ce refus. 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 2° d'entraver le déroulement d'une enquête; 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; 2 [1990] C.A.I. 158.
03 22 52 Page : 4 4° de mettre en péril la sécurité d'une personne; 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet; 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; […] [14] D’emblée, il importe de préciser que la demanderesse s’est adressée à l’organisme pour avoir accès à des documents détenus par son Service de police. Il a été démontré à l’audience que des renseignements ont été recueillis ou obtenus auprès de celle-ci par un policier qui, en vertu de la loi, est chargé de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois du Québec. Ces renseignements ont été colligés dans un rapport d’évènement par un policier qui travaille au Service de police de l’organisme; celui-ci lui en a communiqué une copie élaguée, ayant été témoin d’un évènement. [15] Citant, entre autres, la décision Bureau du commissaire des incendies de la Ville de Québec c. l’Assurance Royale 3 , les auteurs Duplessis Hétu 4 indiquent qu’« il suffit de démontrer que les renseignements, sous quelque forme qu’ils soient reproduits, ont été « obtenus » par une personne visée par l’article 28 de la Loi sur l’accès. » L’organisme devra, par la suite, prouver des conséquences de la divulgation des renseignements selon les critères prévus aux paragraphes 1 à 9 de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [16] Commentant l’affaire P.G. du Québec c. Allaire 5 , ces auteurs ajoutent que 6 : […] Ce n’est pas parce que les demandeurs connaissent l’identité des déclarants et le contenu de la déclaration ou encore qu’ils ont déjà pris connaissance de ladite déclaration que les dispositions de l’article 28 de la Loi sur l’accès doivent être écartées. Elles le seront si l’organisme n’a pas prouvé les conditions prévues aux paragraphes 1 3 [1999] C.A.I. 497, (C.Q.) 4 Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L’accès à l’information et la protection des renseignements personnels, Loi indexée, commentée et annotée, volume 2, publications CCH ltée, 2003, p. 69 705. 5 [2002] C.A.I. 443 (C.Q.). 6 Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L’accès à l’information et la protection des renseignements personnels, Loi indexée, commentée et annotée, volume 2, publications CCH ltée, 2003, p. 69 702.
03 22 52 Page : 5 à 9 de cet article 28. Si preuve est faite par l’organisme de l’une ou l’autre des situations prévues à cet article, une seule conclusion s’impose : il doit refuser de confirmer même l’existence d’un renseignement. […] [17] La Commission considère que la preuve recueillie lors de l’audience ex parte l’amène à conclure que la décision Allaire rendue par la Cour du Québec ci-dessus mentionnée, s’applique à la présente cause. L’organisme était donc fondé de refuser de confirmer l’existence de renseignements visés par la demande. [18] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE partiellement la demande de révision de la demanderesse contre la Ville de Boisbriand; PREND ACTE que l’organisme a communiqué à celle-ci une copie élaguée d’un rapport d’évènement qui la concerne; PREND ÉGALEMENT ACTE que l’organisme est fondé de refuser de lui communiquer l’existence des renseignements recherchés; REJETTE, quant au reste, ladite demande; FERME le présent dossier portant le n o 03 22 52. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Lise Boily-Monfette DEVEAU LAVOIE BOURGEOIS LALANDE & ASSOCIÉS Procureurs de la Ville de Boisbriand
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