Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 19 22 Date : 21 octobre 2004 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. Université Concordia Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 17 septembre 2003, la demanderesse formule comme suit sa demande auprès de l’Université Concordia (l’ « organisme ») : […] I am writing to request that any all files, notes, or incident reports processed through Concordia University Security offices, or through the Administration that have my name in them, or refer to me in relation to the events of September 9, even if only description, be fully disclosed to me, in hard copy version, in a timely fashion. […]
03 19 22 Page : 2 [2] Le 23 septembre, M me Suzanne M. Birks, conseillère juridique de l’organisme a communiqué à la demanderesse un accusé de réception et le 6 octobre suivant, il lui refuse l’accès aux documents de la manière suivante: […] Your request seeking access to information relating to you and any involvement you might have had in the event on September 9, 2002, has been reviewed by our office. your request for “files, notes, or incident reports processed through Concordia University Security offices or through the Administration” is directed at security information and implicitly contains two elements (1) a request to know whether any such information concerning you is held by the University; and (2) if the University holds such information to have it communicated to you. Under section 28 of the Access Act, we are obliged to refuse your request. […] [3] Le 3 novembre suivant, la demanderesse requiert la révision de cette décision auprès de la Commission d’accès à l’information (la « Commission »). L’AUDIENCE [4] L'audience de cette cause se tient à Montréal, le 14 septembre 2004, en présence de la demanderesse et du témoin de l’organisme qui est représenté par M e Stéphane Filion, du cabinet d’avocats Heenan Blaikie. LA PREUVE A) TÉMOIGNAGE DE M e SUZANNE M. BIRKS [5] M e Stéphane Filion fait entendre, sous serment, M me Birks. Celle-ci affirme que le 9 septembre 2002, la demanderesse ainsi que d’autres personnes ont été impliquées dans un incident; des agents provenant du Service de sécurité de l’organisme les ont filmées dans un édifice appartenant à celui-ci. La demanderesse a été identifiée par ces agents. [6] Se basant sur les dispositions législatives prévues au premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la
03 19 22 Page : 3 protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès »), M me Birks précise que l’organisme doit refuser de confirmer l’existence de renseignements obtenus par une personne chargée de prévenir, détenir ou réprimer des infractions aux lois. [7] Afin de pouvoir fournir d’informations additionnelles à ce sujet, l’organisme demande à la Commission de soumettre une preuve ex parte, laquelle fut accordée conformément à l’article 20 des Règles de preuve et de procédure de la Commission 2 . La demanderesse se retire de la salle d’audience. 20. La Commission peut prendre connaissance, en l'absence du requérant et à huis clos, d'un document que l'organisme public ou le tiers prétend devoir être soustrait à l'accès en vertu d'une restriction prévue à la section II de la Loi. Poursuite de l’audience B) TÉMOIGNAGE DE LA DEMANDERESSE [8] À la poursuite de l’audience, la demanderesse affirme solennellement que le 9 septembre 2002, alors qu’elle était étudiante, elle faisait partie d’un groupe de personnes qui ont manifesté contre la tenue d’une conférence à cette date dans les locaux de l’organisme. [9] Des manifestants, incluant la demanderesse, ont été filmés par des agents de sécurité; elle a été identifiée et une plainte a été déposée par M. Jacques Lachance, enquêteur au Service de sécurité de l’organisme, l’accusant d’avoir agi de manière irrespectueuse à l’égard de celui-ci. [10] Pour pouvoir répondre aux accusations portées contre elle, elle indique qu’elle a été traduite, en audience, devant un panel composé de trois autres étudiants connu sous l’appellation « Student Panel Hearing ». Elle signale qu’elle a été reconnue responsable desdites accusations et doit effectuer « 50 heures de travaux communautaires ». Elle veut connaître, entre autres, la manière selon laquelle l’organisme a pu l’identifier parmi les manifestants. [11] La demanderesse signale qu’elle s’est prévalue de son droit d’appel auprès de l’organisme, lequel fut rejeté par un autre panel d’étudiants. 1 L.R.Q., c. A-2.1 2 L.R.Q., [A-2.1-r. 2], D. 2058-84.
03 19 22 Page : 4 [12] Par ailleurs, la demanderesse considère que l’article 28 de la Loi sur l’accès est inapplicable dans la présente cause car, depuis le 9 septembre 2002, elle fait l’objet d’une suspension; elle ne peut pas suivre ses cours universitaires et l’accès au campus de l’organisme lui est interdit. LA PLAIDOIRIE DE L’ORGANISME [13] M e Filion réfère la Commission à la preuve recueillie lors de l’audience ex parte pour faire valoir l’application de l’article 28 de la Loi sur l’accès dans la présente cause. À son avis, les agents de sécurité ayant filmé les manifestants rencontrent les critères permettant à l’organisme de refuser de confirmer l’existence des documents recherchés par la demanderesse. Intervention de la Commission [14] Après discussion sur l’application ou non de cet article dans cette cause, l’organisme maintient cette position. Les parties ont toutefois convenu de se rencontrer. [15] Le 20 septembre 2004, par l’entreprise de son procureur, M e Filion, l’organisme informe la Commission qu’il renonce à invoquer l’article 28 de la Loi sur l’accès. Il ajoute entre autres : […] However, as explained during the ex parte hearing, Concordia University does not have in its possession any files, notes or incident reports processed through the University’s Security Offices or through the Administration, containing Ms. Mouammar’s name, or referring to her in relation to the event of September 9, 2002, that have not already been disclosed to Ms. Mouammar. In other words, Concordia University has already provided Ms. Mouammar with all the documents that she requested, the whole as explained by Mtre Birks on September 14, 2004. […] [16] La demanderesse, pour sa part, a fait parvenir, le 12 octobre 2004, à la Commission ses observations eu égard au contenu de la lettre de l’organisme.
03 19 22 Page : 5 Elle se dit insatisfaite des renseignements additionnels fournis par celui-ci; pour les motifs qu’elle invoque, elle ajoute notamment : […] Therefore, I remain completely dissatisfied with the University’s response to date. My rights to access this information in a timely fashion have not been fulfilled. From the outset of this process and on until today, there has been much stalling, equivocation, and had faith on the part of the University. I am unconvinced that what has been disclosed this far represents the totality of the documents covered by my request. […] LA DÉCISION [17] Pour voir à l’application de l’article 28 de la Loi sur l’accès, le législateur exige une condition primordiale que l’auteur d’un renseignement nominatif doit être une personne chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois. Les dispositions législatives contenues à cet article sont impératives et doivent être interprétées restrictivement, tel qu’en a décidé la Cour du Québec dans l’affaire Québec (Procureur général) c. Beaulieu 3 . [18] Dans le cas sous étude, la preuve a démontré que les agents de sécurité ne sont ni des policiers ni enquêteurs au sens du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès; ils ne rencontrent donc pas les critères prévus au 1 er alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès. [19] La Commission considère, par exemple, qu’en filmant des manifestants, incluant la demanderesse, ces agents ont effectué un travail de nature administrative. Ayant été identifiée, l’enquêteur Lachance, du Service de Sécurité, a déposé une plainte contre la demanderesse en vertu des clauses prévues à cet effet dans le « Code of rights and responsibilities » de l’organisme. [20] De ce qui précède et suivant la nouvelle évaluation faite par l’avocat de l’organisme, la Commission prend acte que celui-ci renonce à invoquer l’article 28 de la Loi sur l’accès. [20] Par ailleurs, la Commission comprend que la demanderesse a formulé sa demande en vertu des articles 1 et 83 de la Loi sur l’accès ci-après mentionnés : 3 [1993] C.A.I. 315 (Q.C.).
03 19 22 Page : 6 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. [21] Tel que mentionné par la Commission dans l’affaire Montreuil c. CEGEP François-Xavier-Garneau 4 : Les articles 83 et suivants de la Loi sur l’accès régissent le droit d’une personne de recevoir communication des renseignements nominatifs la concernant, l’article 83 établissant, d’une part, le principe voulant que cette personne ait le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant alors que les articles 86 et suivants prévoient, d’autre part, des restrictions à ce droit d’accès. […] [22] Se trouvant dans la Section IV traitant des « droits de la personne concernée par un renseignement nominatif », il importe de préciser que ces dispositions législatives doivent être interprétées de façon restrictive, et ce, tel qu’il est indiqué à la décision P.L. c. Commission administrative des régimes de retraite et d’assurances 5 . 4 C.A.I. Québec, n o 98 15 60, 24 juin 1999, c. Grenier. 5 [1988] C.A.I. 355 en référence dans Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L'accès à l'information et la protection des renseignements personnels. Loi indexée, commentée et annotée, vol. 3, Publications CCH ltée, 2003, folio 210 101.
03 19 22 Page : 7 [23] Néanmoins, bien que la demanderesse estime que l’organisme ne lui a pas communiqué tous les documents la concernant, la preuve a plutôt démontré qu’il n’en existe pas d’autres. [24] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE la demande de révision de la demanderesse contre l’Université Concordia; PREND ACTE que l’organisme renonce à invoquer l’article 28 de la Loi sur l’accès; CONSTATE que l’organisme a communiqué à la demanderesse les documents qui la concernent; FERME le présent dossier portant le n o 03 19 22. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M e Stéphane Filion Heenan Blaikie Procureurs de l’Université Concordia
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