Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 16 70 Date : 28 septembre 2004 Commissaire : M e Christiane Constant X Demanderesse c. Ville de Laval Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 4 août 2003, la demanderesse requiert de la Ville de Laval (l’« organisme »), une copie du rapport de police et du dossier d’un enquêteur. [2] Le 20 août, l’organisme, par l’entremise de M. Serge Bélisle, assistant-directeur et responsable de l’accès aux documents, lui communique une copie d’un rapport d’évènement, après avoir épuré des renseignements nominatifs; il invoque les articles 28 (5), 31, 53, 54, 87 et 88 de la Loi sur l’accès aux
03 16 70 Page : 2 documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès »). [3] Le 19 septembre suivant, la demanderesse sollicite l’intervention de la Commission d’accès à l’information (la «Commission ») pour qu’elle révise la décision de l’organisme. L’AUDIENCE [4] L’audience se tient à Montréal, le 20 août 2004, en présence de la demanderesse et de M. Serge Bélisle, témoin de l’organisme qui est représenté par M es Geneviève Asselin et Annie Tremblay du cabinet d’avocats Allaire & Associés. LA PREUVE A) DE L’ORGANISME [5] M e Asselin fait témoigner, sous serment, M. Serge Bélisle. Celui-ci déclare qu’il est assistant-directeur et responsable de l’accès aux documents. Il affirme avoir communiqué à la demanderesse, le 20 août 2003, une copie des documents recherchés. [6] À son avis, les seuls documents demeurant en litige sont deux opinions juridiques que M e Dominic St-Laurent, Substitut du procureur général avaient adressées à l’organisme en regard d’un cas précis. M. Bélisle dépose confidentiellement les deux documents. B) TÉMOIGNAGE DE LA DEMANDERESSE [7] La demanderesse confirme solennellement le témoignage de M. Bélisle voulant que deux documents demeurent en litige. Elle apporte donc un amendement à sa demande, laquelle vise maintenant lesdits documents. Elle ajoute que ceux-ci font partie du rapport de police, ils devraient lui être accessibles. 1 L.R.Q., c. A-2.1
03 16 70 Page : 3 LES ARGUMENTS [8] M e Asselin rappelle le témoignage de M. Bélisle selon lequel l’organisme a fourni à la demanderesse une série de documents, à l’exception de deux opinions juridiques qui ont été émises par M e Dominic St-Laurent, Substitut du procureur général à l’organisme en rapport avec un cas particulier. [9] L’avocate plaide que l’article 31 de la Loi sur l’accès accorde à un organisme public un pouvoir discrétionnaire pour refuser à une personne qui en fait la demande, l’accès à une opinion juridique. Elle indique que, dans le cas sous étude, M e St-Laurent a émis une opinion juridique à l’organisme propre à un cas spécifique, en se basant sur les faits et l’état de la jurisprudence. L’avocate commente à cet effet l’affaire Ministère de la Justice du Québec c. Broasca (Chambre civile, Québec 200-02-027507-013) selon laquelle la Cour du Québec a notamment statué qu’une […] série de faits se rapportant à un cas particulier est un élément essentiel et constitutif de cet article. Ils ne peuvent être séparés de « l’opinion juridique; ils en font partie intégrante comme un tout indivisible. […] [10] L’avocate plaide également que les documents en litige sont protégés par le secret professionnel; elle invoque à cet effet l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne 2 (la « Charte »). Secret professionnel. 9. Chacun a droit au respect du secret professionnel. Divulgation de renseignements confidentiels. Toute personne tenue par la loi au secret professionnel et tout prêtre ou autre ministre du culte ne peuvent, même en justice, divulguer les renseignements confidentiels qui leur ont été révélés en raison de leur état ou profession, à moins qu'ils n'y soient autorisés par celui qui leur a fait ces confidences ou par une disposition expresse de la loi. Devoir du tribunal. Le tribunal doit, d'office, assurer le respect du secret professionnel. 2 L.R.Q., c. C-12
03 16 70 Page : 4 LA DÉCISION [11] La Commission prend acte de l’amendement apporté par la demanderesse à sa demande. Celle-ci souhaite maintenant avoir accès aux deux documents portant la signature de M e Dominic St-Laurent, Substitut du procureur général, que celui-ci a adressés à l’organisme. [12] La demanderesse a formulé sa demande selon les termes de l’article 9 de la Loi sur l’accès qui stipule que : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [13] Elle exerce un droit fondamental, lequel a un caractère prépondérant selon les dispositions législatives prévues à l’article 168 de la Loi sur l’accès. 168. Les dispositions de la présente loi prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraire, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la présente loi. [14] Par ailleurs, la Commission a pris connaissance des deux documents en litige. Il s’agit de deux lettres formulées sous forme d’opinion juridique, datées respectivement du 18 novembre 2002 et du 4 juillet 2003 que M e St-Laurent a fait parvenir à un membre du Service de police de l’organisme. L’article 31 de la Loi sur l’accès s’applique dans la présente cause. 31. Un organisme public peut refuser de communiquer une opinion juridique portant sur l'application du droit à un cas particulier ou sur la constitutionnalité ou la validité d'un texte législatif ou réglementaire, d'une version préliminaire ou d'un projet de texte législatif ou réglementaire.
03 16 70 Page : 5 [15] Tel qu’indiqué dans l’affaire Broasca précitée, la Cour du Québec indique entre autres que : […] Le secret professionnel au sens de la charte s’applique à la relation avocat-client. La Cour d’appel du Québec a déjà précisé que le procureur général n’était pas le client du substitut et que ce dernier agissait sous son autorité. Le fait que le secret professionnel ne puisse être invoqué en l’espèce ne veut pas dire que les documents en litige soient publics. La confidentialité demeure. […] Il est dans l’intérêt public que la confidentialité des opinions juridiques soit préservée. La confidentialité s’étend à tous les faits révélés et à tous les documents rédigés aux fins ou à l’occasion d’une consultation juridique. Elle couvre aussi le cheminement intellectuel d’analyse et d’évaluation juridique d’une situation donnée. […] [16] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : PREND ACTE de l’amendement apporté par la demanderesse à sa demande; CONSTATE que l’organisme a communiqué à celle-ci des documents élagués; REJETTE, quant au reste, sa demande de révision contre la Ville de Laval; FERME le présent dossier portant le n o 03 16 70. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire M es Geneviève Asselin et Annie Tremblay ALLAIRE & ASSOCIÉS Procureurs pour la Ville de Laval
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