Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 14 22 Date : 20040824 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Assurances générales des Caisses Desjardins Entreprise DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE D'EXAMEN DE MÉSENTENTE SUR L’ACCÈS [1] Le 16 juillet 2003, le demandeur requiert de l’entreprise une copie intégrale des documents se trouvant à son dossier ainsi que « l’estimé des coûts des travaux de reconstruction fait par Les Évaluations Robert Savard inc. avec les montants » (sic). [2] Le 25 juillet 2003, l’entreprise répond partiellement à la demande, en lui communiquant une copie de certains documents; elle lui refuse cependant l’accès aux autres documents, invoquant à cet effet le deuxième alinéa de l’article 39 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 (la « Loi sur le privé »). 1 L.R.Q., c. P-39.1
03 14 22 Page : 2 [3] Le demandeur formule, le 4 août suivant, auprès de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») une demande d’examen de mésentente. L’AUDIENCE [4] L’audience de cette cause se tient par lien téléphonique, le 16 août 2004, à laquelle y participent le demandeur, M. Paul Barr est le témoin de l’entreprise qui est représentée par M e Paule Émond, du cabinet d’avocats Pelletier D’Amours; M e Émond informe la Commission que M e Christian Charrette assiste à cette audience. LA PREUVE A) LE TÉMOIGNAGE DE M. PAUL BARR [5] M e Émond fait témoigner M. Paul Barr qui affirme solennellement qu’il est représentant de l’entreprise en matière d’évaluation de dommages. Il dit connaître le litige opposant le demandeur à l’entreprise eu égard à une demande d’indemnité qu’il avait formulée auprès de celle-ci qui refuse de lui accorder le montant réclamé à titre d’indemnité. [6] Il précise qu’à l’ouverture du dossier au bureau de l’entreprise et considérant la nature de la réclamation, il était convaincu qu’un recours de nature civile serait imminent et conséquemment au moment de la demande d’accès, l’entreprise ne pouvait pas y répondre positivement. Il indique qu’effectivement, le demandeur a entrepris ledit recours devant la Cour des petites créances auquel sont annexés des documents que le témoin réfère comme les pièces P-1 à P-12 (mais pièce E-1 en liasse pour la présente cause). Ces documents ont été déposés par le demandeur dans sa cause à la Cour des petites créances. B) TÉMOIGNAGE DU DEMANDEUR [7] Le demandeur, pour sa part, témoigne sous serment qu’il a obtenu de la Cour des petites créances, une copie du rapport de « Les Évaluations Robert Savard inc. », mais qu’il voudrait obtenir l’intégralité du dossier que détient l’entreprise à son égard.
03 14 22 Page : 3 ARGUMENTS [8] M e Émond résume le témoigne de M. Barr qui a notamment affirmé que l’entreprise devait refuser au demandeur l’accès aux documents, en raison d’une procédure judiciaire et qui s’est, par la suite, concrétisée par le dépôt de la réclamation du demandeur devant la Cour des petites créances; l’entreprise compte se servir des documents en litige devant cette cour. [9] L’avocate plaide de plus que la Commission devrait rejeter la demande de révision en application de l’article 39 (2) de la Loi sur le privé. [10] Le demandeur, pour sa part, réitère son désir d’avoir un accès intégral au dossier que détient l’entreprise à son égard. LA DÉCISION [11] L’article 39 (2) de la Loi sur le privé ci-après cité stipule que : 39. Une personne qui exploite une entreprise peut refuser de communiquer à une personne un renseignement personnel la concernant lorsque la divulgation du renseignement risquerait vraisemblablement: […] 2° d'avoir un effet sur une procédure judiciaire dans laquelle l'une ou l'autre de ces personnes a un intérêt. [12] À la demande de la Commission, M e Émond a communiqué confidentiellement à celle-ci, avant l’audience, les documents faisant l’objet du présent litige, lesquels sont constitués, entre autres, de : • La procédure judiciaire intentée par le demandeur, réclamant une somme de 7000 $, plus les frais, datée du 9 janvier 2004 à laquelle est jointe la contestation de l’entreprise datée du 26 janvier 2004; • La procédure datée du 17 février 2004 vise une réclamation de 1523,06 $; • Une lettre datée du 29 avril 2004 adressée à M. Barr par l’expert en sinistres, M. Pierre Bérard, de la compagnie CGI, Experts en sinistres inc. qui lui transmet ladite procédure, à laquelle sont annexées les pièces P-1 à P-12 que la Cour des petites créances lui a fait parvenir;
03 14 22 Page : 4 • Une lettre datée du 19 avril 2004 de M. Bérard également adressée à M. Barr à laquelle est annexée une série de documents portant le titre « Livres - Relevé des dommages » ainsi qu’un formulaire de « Demande d’indemnisation provisoire en assurance de biens (incendie) » dûment complété et portant le nom du demandeur comme étant l’Assuré de l’entreprise et une page frontispice d’un envoi par télécopieur destinée à une autre personne; • Une lettre de M. Bérard à l’entreprise datée du 19 janvier 2004, dont est jointe une série de documents, tels des factures diverses, copie d’une lettre qu’il a fait parvenir au demandeur et copie d’un chèque que l’entreprise a émis au nom du demandeur; • Une lettre datée du 29 avril 2002 contenant, sous forme d’évaluation approximative, le coût pour le remplacement de l’immeuble incendié; des croquis, des photographies et autres documents ayant servi à cette évaluation sont joints à cette lettre. [13] L’examen de la procédure judiciaire intentée par le demandeur, portant sa signature les 9 janvier et 17 février 2004, contre l’entreprise dans le dossier de la Cour des petites créances (700-32-013231-046) relate les faits entourant le déclenchement de cette procédure. La résidence du demandeur ayant été incendiée, l’entreprise lui a versée un montant substantiel; il réclame une indemnité additionnelle de 7000 $ pour les motifs qu’il décrit à sa procédure. À l’appui de cette réclamation, le demandeur a produit une série de documents qu’il a cotés P-1 à P12 (soit la pièce E-1 en liasse précitée pour les fins de la présente audience devant la Commission); sur réception de ces documents, le greffier en a transmis une copie à la compagnie CGI. Le contenu de ces documents peut se résumer ainsi : • La demande d’indemnité du demandeur à l’entreprise; • Pièce P-1 : l’acte de vente de la résidence au demandeur; • Pièce P-2 : un mémo, sous forme manuscrite, que M. Pierre Bérard a transmis au demandeur; • Pièce P-3 en liasse : une preuve indiquant que l’entreprise a transmis à celui-ci une série de chèques; • Pièce P-4 en liasse : une lettre que Me Stéphane Sansfaçon, avocat du demandeur a fait parvenir à M. Bérard et d’autres lettres que celui-ci a communiquées à d’autres personnes occupant diverses fonctions au sein de l’entreprise;
03 14 22 Page : 5 • Pièce P-5 en liasse : réponse de M. Bérard à l’avocat du demandeur et réponses aux lettres de celui-ci; • Pièce P-6 : la « Police d’assurance habitation » intervenue entre l’entreprise et le demandeur; • Pièce P-7 : une lettre du directeur général de l’entreprise, M. Jean Vaillancourt, au demandeur; • Pièce-P-8 : une lettre du demandeur à M. Bérard; • Pièce P-9 : un « Contrat d’exécution de travaux » intervenu entre le demandeur, un tiers et une entreprise en construction; • Pièce P-10 : une « Licence d’entrepreneur en construction »; • Pièce P-11 : une « Soumission » émise pour la construction d’une résidence pour le demandeur; • Pièce P-12 en liasse : une série de factures et copie d’un chèque émis au nom du demandeur. [14] La Commission constate que ces documents font partie de ceux qui sont déposés, sous le sceau de la confidentialité, par l’entreprise pour les fins de la présente cause. Ces documents, cotés E-1 en liasse, sont déjà accessibles au demandeur, ils ont été adressés à celui-ci ou à son avocat. [15] Une deuxième catégorie de documents contient un formulaire intitulé « Livres – Relevé des dommages » dans lequel sont inscrits, entre autres, à chaque section des renseignements sur des items bien identifiés, leur date approximative d’achat, la valeur de ces items au jour du sinistre et le « solde de l’indemnité demandée », etc.. [16] Ces documents sont inaccessibles au demandeur, car ils contiennent effectivement des renseignements qui peuvent avoir un impact sur la procédure en cours. La preuve a de plus démontré que la teneur de la demande d’accès (datée du 16 juin 2003), d’une part, et d’autre part, le refus de l’entreprise à lui verser le montant réclamé laissent prévoir qu’un recours, de nature civile, serait entrepris par le demandeur sur ce sujet. C’est ce qu’il a fait les 9 janvier et 17 février 2004 dans la cause portant le n o du dossier de la Cour des petites créances : 700-32-013231-046. [17] Après avoir examiné les divers documents en litige, la preuve a démontré de l’effet qu’ils peuvent avoir sur la procédure judiciaire présentement en cours, et
03 14 22 Page : 6 ce, tel qu’a statué la Commission dans les affaires Deschênes c. Banque CIBC 2 et X c. Promutuel Beauce 3 . L’entreprise a donc utilisé son pouvoir discrétionnaire de ne pas communiquer au demandeur certains documents en application de l’article 39 (2) de ladite loi. [18] Quant au deuxième exemplaire de la demande d’indemnité que le demandeur a adressée à l’entreprise, ce document lui est accessible. [19] Pour la troisième catégorie de documents, elle est constituée de : • Une lettre que M. Bérard a fait parvenir à l’entreprise en rapport avec le litige l’opposant au demandeur; • Un autre exemplaire des « Livres – Relevé des dommages » indiquant notamment la valeur d’achat approximative de chaque item, sa valeur au jour du sinistre, sa « valeur à neuf remplacement » et le « solde de l’indemnité demandée ». Des factures sont jointes à ce document; • Une lettre de M. Bérard adressée au demandeur le 19 janvier 2004. [20] Les deux premières parties, telles que décrites au paragraphe précédent, sont inaccessibles au demandeur, et ce, pour les mêmes motifs que ceux invoqués aux paragraphes 16 et 17. Toutefois, la lettre datée du 19 janvier 2004 lui est accessible, car tout laisse croire qu’il détient l’original de ce document qui lui est adressée personnellement. [21] La dernière série de documents est composée d’un rapport d’expertise provenant de « Les Évaluations Robert Savard inc. » auquel sont joints des photographies, des croquis, etc. Le demandeur a indiqué, à l’audience, qu’il a reçu ce document et que celui-ci n’est plus en litige. Il n’est donc pas nécessaire pour la Commission de statuer sur ces documents. [22] Outre les documents cités au paragraphe 13 que détient déjà le demandeur, la Commission considère que l’entreprise devra communiquer à celui-ci la lettre datée du 19 janvier 2004 que M. Pierre Bérard lui a déjà fait parvenir. 2 [2003] C.A.I. 249. 3 [2003] C.A.I. 301.
03 14 22 Page : 7 [23] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE, en partie, la demande d’examen de mésentente du demandeur contre les Assurances générales des Caisses Desjardins; ORDONNE à l’entreprise de transmettre au demandeur le document tel qu’indiqué au paragraphe 22; REJETTE, quant au reste, ladite demande; FERME le présent dossier portant le n o 03 14 22. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 24 août 2004 M e Paule Émond Pelletier D’Amours Procureurs de l’entreprise
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