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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 03 10 55 Date : 20040721 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Commission scolaire Marie-Victorin Organisme public DÉCISION LOBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 23 mai 2003, le demandeur requiert de la Commission Scolaire Marie-Victorin (l « organisme »), de lui fournir copie « de tous les documents concernant des bonis forfaitaires qui ont été octroyés de manière confidentielle aux cadres supérieurs de la Commission Scolaire Marie Victorin et à « son personnel de direction, à compter de lannée 2000-2001» jusquà la date de cette demande. [2] Sans réponse, le demandeur formule, le 17 juin 2003, auprès de la Commission daccès à linformation (la « Commission ») une demande pour que soit révisée le refus présumé de lorganisme à lui donner accès auxdits documents.
03 10 55 Page : 2 LAUDIENCE [3] L'audience de cette cause se tient à Montréal, le 27 avril 2004, en présence du demandeur et des témoins des parties. LA PREUVE A) DE LORGANISME [4] M e François Houde déclare, sous son serment doffice, quil est avocat, secrétaire général et responsable de laccès aux documents. Il indique que lorganisme possède soixante-dix établissements, incluant un centre déducation pour adultes. [5] Il reçoit, sur une base mensuelle, entre 120 et 140 demandes daccès, lesquelles visent particulièrement les résultats scolaires des étudiants. Le traitement de la majorité de ces demandes se situe entre vingt-quatre et quarante-huit heures. [6] M. Houde signale que le demandeur lui a transmis sa demande, en se servant de la télécopie de lécole Antoine Brossard, propriété de lorganisme; le numéro de téléphone ny était pas inscrit; d le motif principal, à son avis, il ny a pas donné suite dans le délai légal prévu à la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur laccès »). Les bonis forfaitaires [7] M. Houde déclare également que lorganisme a un directeur général et trois directeurs adjoints. Une évaluation de la performance de ce directeur général est effectuée par le conseil des commissaires de cet organisme; celui-ci possède un pouvoir discrétionnaire daccorder ou non un boni forfaitaire aux « hors cadres » ci-dessus mentionnés pour les années scolaires précédentes, incluant celles recherchées par le demandeur. M. Houde précise que ce boni inclut le traitement de base, les vacances, les avantages, tel quil appert dun document intitulé « le traitement versé au directeur général et aux directeurs généraux adjoints (pièce O-1). 1 L.R.Q. c. A-2.1
03 10 55 Page : 3 [8] Ce boni est établi conformément à larticle 48.1 du Règlement sur les conditions demploi des gestionnaires des commissions scolaires 2 , ci-après nommé le « Règlement » stipulant, entre autres, que : La Commission peut accorder un boni forfaitaire le 1 er juillet de chaque année scolaire au hors cadre qui est en fonction à titre de directeur général ou de directeur général adjoint le 1 er juillet et le 30 juin de lannée scolaire précédente afin de souligner lexcellence au niveau des hors cadres. […] le boni forfaitaire est accordé en un seul versement au hors cadre qui a dépassé de beaucoup des attentes et se situe entre 4% et 6% du traitement au 30 juin de lannée scolaire précédente; cependant, le maximum est fixé à 5% du traitement au 30 juin de lannée scolaire précédente dans le cas du hors cadre qui a dépassé les attentes. Le boni forfaitaire est égal ou inférieur à 2% dans le cas du hors cadre dont le cadre a été équivalent aux attentes. [9] Il ajoute quaucun boni nest accordé à un hors cadre dont le rendement nest pas satisfaisant. [10] Il indique de plus que les décisions sur ce sujet sont prises, lors dune séance ordinaire, par ladoption dune résolution par les commissaires pour les années scolaires visées par le demandeur dans sa demande (pièce O-2 en liasse). Il dépose, à titre confidentiel, trois documents qui contiennent les renseignements recherchés. [11] Selon M. Houde, le directeur général procède à lévaluation de la performance des directeurs généraux adjoints et décide du pourcentage du boni forfaitaire auxquels ceux-ci ont droit suivant les critères décrits à larticle 48.1 du Règlement précité. Les directeurs de service, pour leur part, nont pas droit à ce boni. Clarification recherchée par le demandeur [12] Le demandeur rappelle à M. Houde quil veut connaître le montant forfaitaire exact que lorganisme a accordé à son directeur général et aux trois directeurs adjoints pour les périodes inscrites à sa demande daccès. 2 L.R.Q., c. I-13.3, r.0.003.1
03 10 55 Page : 4 [13] M. Houde réitère lessentiel de sa déposition initiale et réfère le demandeur aux dispositions prévues à larticle 48.1 dudit Règlement. B) DÉPOSITION DU DEMANDEUR [14] Le demandeur, qui témoigne sous serment, confirme une partie de la déposition de M. Houde eu égard aux résolutions adoptées, en assemblée ordinaire, par les commissaires, accordant au directeur général de lorganisme un boni forfaitaire; il voudrait connaître le montant exact de ce boni. C) S.P., TÉMOIN # 1 DU DEMANDEUR [15] S.P., qui est le témoin du demandeur, affirme solennellement quelle est, entre autres, parent commissaire, membre dun Conseil détablissement; elle assiste aux réunions des commissaires, dont celle au cours de laquelle ceux-ci ont adopté une résolution, afin daccorder au directeur général un boni forfaitaire, mais le montant exact nest pas divulgué. D) R.S., TÉMOIN # 2 DU DEMANDEUR [16] Après avoir été assermenté, R.S. déclare quil est « ouvrier certifié en entretien » et représentant syndical au niveau des « cols bleus. » Il se demande si le moment est approprié pour accorder au directeur général un boni forfaitaire eu égard aux périodes précitées, puisque lorganisme a lintention de procéder « à des coupures dans le domaine des cols bleus ». E) J.L., TÉMOIN # 3 DU DEMANDEUR [17] J.L. déclare solennellement quil est technicien en bâtiment pour lorganisme. Il affirme que, le 26 novembre 2002, les commissaires ont adopté une résolution, daccorder au directeur général un boni forfaitaire; il a tenté de connaître le montant de ce boni; ce qui lui a été refusé, lorganisme prétend que cest un renseignement confidentiel. Il se questionne sur le moment choisi par les commissaires pour le faire, dautant quil dit connaître les besoins des élèves dans certaines écoles qui auraient pu être comblés par ce montant.
03 10 55 Page : 5 COMMENTAIRES A) DE M e HOUDE, POUR LORGANISME [18] M. Houde reconnaît le caractère public du traitement accordé au directeur général et les directeurs adjoints de lorganisme au sens du 1 er alinéa de larticle 57 de la Loi sur laccès. Il tente cependant de démontrer quil existe un lien direct entre le boni forfaitaire accordé à ces hors cadres et lévaluation de leur prestation de travail pour lannée scolaire antérieure; ce boni, lui étant accordé en raison de son rendement exceptionnel, est un renseignement nominatif le concernant selon les termes de larticle 53 de ladite loi. Ce raisonnement sapplique également au boni forfaitaire que lorganisme a versé à ses trois directeurs adjoints pour les mêmes années scolaires. [19] Il ajoute par ailleurs que lorganisme exerce un pouvoir discrétionnaire tel quétabli à larticle 48.1 du Règlement précité qui stipule également qu « aucun boni nest accordé au hors cadre dont le rendement nest pas satisfaisant ». [20] Dans le cas présent, lorganisme a exercé son pouvoir discrétionnaire pour verser à ses hors cadres, un certain montant dargent, et ce, conformément audit article. B) DU DEMANDEUR [21] Le demandeur, pour sa part, réitère les mêmes éléments quil a fait ressortir lors de sa déposition à laudience. LA DÉCISION [22] La Commission tient à préciser quelle nest pas habilitée à déterminer ou à statuer sur la manière selon laquelle lorganisme devrait distribuer un montant dargent (le boni forfaitaire) ou à qui il devrait le verser; ce nest pas le bon forum. [23] Il sagit de déterminer si le boni forfaitaire inscrit dans les trois documents déposés à laudience par lorganisme, sous le sceau de la confidentialité, sont accessibles au demandeur. [24] Celui-ci a formulé sa demande daccès au sens du 1 er alinéa de larticle 9 de la Loi sur laccès.
03 10 55 Page : 6 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [25] Ce droit sinscrit dans le cadre défini par larticle 1 de ladite loi, à savoir que ces documents existent et sont détenus, sous une forme physique, par le présent organisme dans lexercice de ses fonctions 3 . [26] Lorganisme refuse de communiquer au demandeur le montant du boni forfaitaire quil a octroyé à ses hors cadres pour lannée scolaire 2000-2001, 2001-2002 et 2002-2003, au motif que ce renseignement revête un caractère nominatif. [27] La Commission ne partage pas cet avis. [28] En effet, ce boni forfaitaire revête plutôt dun caractère public, et ce, conformément aux articles 55 et 57 à son 4 e paragraphe qui prévoient que : 55. Un renseignement personnel qui a un caractère public en vertu de la loi n'est pas nominatif. 57. Les renseignements suivants ont un caractère public: […] 4° le nom et l'adresse d'une personne qui bénéficie d'un avantage économique conféré par un organisme public en vertu d'un pouvoir discrétionnaire et tout renseignement sur la nature de cet avantage. […] [29] De plus, il a été mis en preuve que lorganisme a exercé son pouvoir discrétionnaire que lui confère larticle 48.1 du Règlement précité pour verser, en un seul versement, à ses hors cadres ce boni, suivant le pourcentage retenu pour souligner leur contribution exceptionnelle. [30] Dans laffaire Syndicat de professionnelles et professionnels du Gouvernement du Québec (SPGQ) c. Commission administrative des régimes de retraite et dassurance (CARRA) 4 , la Commission a notamment statué que : 3 Raymond Doray et François Charrette, Accès à linformation, Loi annotée, Jurisprudence, analyse et commentaires, volume 2, Editions Yvon Blais, 2003, II/9-2. 4 [2003], C.A.I. 467.
03 10 55 Page : 7 […] La distinction entre les employés dits « à rendement exceptionnel » qui reçoivent le boni et les autres qui ne le reçoivent pas nest vraisemblablement pas reliée au genre de poste quils occupent mais bien à lévaluation qualitative que lemployeur fait de leur rendement à ce poste. […] La Commission considère que les bonis de rendement exceptionnel sont des avantages économiques […] [30] Le boni forfaitaire que lorganisme a versé à ses hors cadres pour leur contribution exceptionnelle au travail représentent des avantages économiques au sens de larticle 57 au 4 e paragraphe précité. Lorganisme devra donc communiquer au demandeur une copie des documents indiquant le montant du boni forfaitaire quil a produit, à laudience, et quil a accordé respectivement à son directeur général et aux trois directeurs généraux adjoints pour les années scolaires 2000-2001, 2001-2002 et 2002-2003. [31] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE la demande de révision du demandeur contre la Commission scolaire Marie-Victorin; ORDONNE à lorganisme de communiquer au demandeur les bonis forfaitaires, ces informations se trouvant dans les documents déposés, à laudience, à titre confidentiel; FERME le présent dossier portant le n o 03 10 55. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 21 juillet 2004 M e Alice Raynard Procureure de la Commission scolaire Marie-Victorin
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