Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 03 14 03 Date : 9 juillet 2004 Commissaire : M e Hélène Grenier X Demandeur c. VILLE DE SAGUENAY Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le demandeur s’adresse à l’organisme le 2 juillet 2003 pour obtenir « une copie intégrale de mon dossier #JQR030330008 que votre service de police arrondissement de Jonquière a en sa possession. ». [2] Le 9 juillet 2003, le responsable de l’accès aux documents de l’organisme lui donne avis de la réception de sa demande reçue le 4 juillet; il l’informe que des recherches sont entreprises pour retracer le dossier requis. [3] Le 28 juillet 2003, le demandeur s’adresse à la Commission pour dénoncer le défaut de l’organisme d’avoir traité sa demande dans le délai de 20 jours prévu par la Loi ainsi que le refus de l’organisme de lui donner accès au dossier demandé.
03 14 03 Page : 2 PREUVE i) de l’organisme [4] L’avocate de l’organisme dépose une copie de la demande d’accès reçue le 4 juillet 2003 ainsi qu’une copie de la décision du responsable, M. Pierre Brassard, datée du 7 août 2003 (O-1, en liasse). Par cette décision, le responsable transmet au demandeur une copie de la déclaration solennelle faite par celui-ci; il refuse cependant de lui communiquer tous les autres documents qu’il considère confidentiels en vertu des articles 26, 28, 53, 54 et 59 (9 e ) de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [5] L’avocate précise que l’article 26 de la Loi précitée n’est plus invoqué. Elle reconnaît que l’organisme n’a pas donné suite à la demande dans le délai de 20 jours prévu par la Loi; elle souligne cependant que les motifs de refus invoqués par le responsable s’appuient sur des restrictions impératives qui s’appliquent malgré l’expiration de ce délai. ii) du demandeur [6] Le demandeur témoigne sous serment. Il affirme que son ex-conjointe l’a dénoncé au Directeur de la protection de la jeunesse en mars 2003, dénonciation à la suite de laquelle il aurait été blanchi le jour même. Il ajoute que son ex-conjointe a également porté plainte contre lui pour harcèlement et menace en avril 2003, plainte à la suite de laquelle le dossier en litige aurait été constitué; il mentionne avoir alors enregistré l’entretien qui a eu lieu entre le policier qui a enquêté chez lui, une représentante du Directeur de la protection de la jeunesse (M me Larouche), sa nouvelle conjointe et lui-même. Le demandeur reconnaît n’avoir pu enregistrer la conversation que la représentante du Directeur de la protection de la jeunesse (M me Larouche) a eue avec son fils mineur dont il a la garde. [7] Il explique demander accès au dossier en litige afin d’être en mesure de se défendre contre son ex-conjointe lorsqu’elle porte plainte contre lui et pour démontrer sa mauvaise foi « lorsqu’elle me traîne en cour ». 1 L.R.Q., c. A-2.1
03 14 03 Page : 3 [8] Il réclame conséquemment des dommages-intérêts punitifs de 200 $ en raison du défaut de l’organisme d’avoir traité sa demande dans le délai de 20 jours prévu par Loi : 167. À moins que le préjudice ne résulte d'une force majeure, l'organisme public qui conserve un renseignement personnel est tenu de la réparation du préjudice résultant d'une atteinte illicite à un droit reconnu par le chapitre III. En outre, lorsque l'atteinte est intentionnelle ou résulte d'une faute lourde, le tribunal accorde des dommages-intérêts punitifs d'au moins 200 $. ARGUMENTATION i) de l’organisme [9] La « Loi sur l’accès » prévoit qu’à défaut de donner suite à une demande d’accès dans les délais applicables, le responsable est réputé avoir refusé l’accès à un document; un organisme n’est conséquemment jamais forclos d’invoquer une restriction 2 : 52. À défaut de donner suite à une demande d'accès dans les délais applicables, le responsable est réputé avoir refusé l'accès au document. Dans le cas d'une demande écrite, ce défaut donne ouverture au recours en révision prévu par la section I du chapitre V, comme s'il s'agissait d'un refus d'accès. [10] L’article 167 de la « Loi sur l’accès », invoqué par le demandeur, ne reçoit pas application, vu l’article 52 précité. [11] Les restrictions impératives à l’accès peuvent être invoquées en tout temps et ne laissent aucune discrétion au responsable; ainsi : • l’article 28 de la Loi précitée appuie le refus du responsable puisqu’un policier a fait enquête à la suite de la plainte de harcèlement et de menace portée contre le demandeur par son ex-conjointe; 2 Joncas c. Ministère de la sécurité publique [1999] CQ Québec 200-02-020553-980, 1999-06-11.
03 14 03 Page : 4 • l’article 59 (9 e ), de même que les articles 53 et 54 de la même Loi appuient également le refus du responsable. [12] L’organisme est tenu de refuser l’accès en vertu des dispositions impératives précitées; le demandeur en a été avisé le 7 août 2003 et il ne subit aucun préjudice résultant du retard du responsable. DÉCISION [13] J’ai pris connaissance du dossier en litige tel qu’il m’a été remis par l’avocate de l’organisme. Il s’agit, comme le démontre la preuve, d’un dossier constitué de renseignements obtenus par un policier agissant dans l’exercice de ses fonctions d’enquêteur. [14] Aucune preuve ne démontre cependant que la divulgation des renseignements obtenus par le policier aurait l’un ou l’autre des effets prévus par l’article 28 de la « Loi sur l’accès » : 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible : 1° d'entraver le déroulement d'une procédure devant une personne ou un organisme exerçant des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires; 2° d'entraver le déroulement d'une enquête; 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; 4° de mettre en péril la sécurité d'une personne; 5° de causer un préjudice à une personne qui est l'auteur du renseignement ou qui en est l'objet;
03 14 03 Page : 5 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; 7° de révéler un renseignement transmis à titre confidentiel par un corps de police ayant compétence hors du Québec; 8° de favoriser l'évasion d'un détenu; ou 9° de porter atteinte au droit d'une personne à une audition impartiale de sa cause. Il en est de même pour un organisme public, que le gouvernement peut désigner par règlement conformément aux normes qui y sont prévues, à l'égard d'un renseignement que cet organisme a obtenu par son service de sécurité interne, dans le cadre d'une enquête faite par ce service et ayant pour objet de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, susceptibles d'être commis ou commis au sein de l'organisme par ses membres, ceux de son conseil d'administration ou son personnel, lorsque sa divulgation serait susceptible d'avoir l'un des effets mentionnés aux paragraphes 1° à 9° du premier alinéa. [15] Le dossier en litige est, par ailleurs, majoritairement constitué de renseignements nominatifs concernant des personnes autres que le demandeur; ces renseignements nominatifs sont confidentiels et ne peuvent être communiqués en vertu des articles 53 et 59 (9 e ) de la Loi précitée. La décision du responsable de refuser l’accès à ces renseignements est donc fondée. [16] Le dossier en litige comprend enfin des renseignements qui concernent le demandeur et qui doivent lui être communiqués en vertu de l’article 83 de la « Loi sur l’accès »; ces renseignements sont inscrits : • dans la décision du substitut du procureur général; la page constituant cette décision est accessible sauf les 2 mots suivant immédiatement la rubrique « Commentaires »; • dans la 1 re page du rapport d’événement, sous la rubrique « Remarques du responsable » : les 2 premières lignes concernent le demandeur et lui sont accessibles; • dans la 1 re page du rapport d’événement, sous la rubrique « Rapport sommaire de l’enquêteur » : la dernière phrase de ce rapport concerne le demandeur et lui est accessible;
03 14 03 Page : 6 • à partir de la mention « 15 h 55 min » et jusqu’à la fin de la 1 re page du « Rapport de progression d’une enquête »; ces renseignements sont accessibles au demandeur; • aux 2 dernières lignes de la 2 e page du « Rapport de progression d’une enquête »; ces renseignements sont accessibles au demandeur. [17] L’application de la disposition en vertu de laquelle le demandeur réclame des dommages punitifs relève de la compétence d’un tribunal judiciaire, non pas de celle que le législateur attribue à la Commission : 167. À moins que le préjudice ne résulte d'une force majeure, l'organisme public qui conserve un renseignement personnel est tenu de la réparation du préjudice résultant d'une atteinte illicite à un droit reconnu par le chapitre III. En outre, lorsque l'atteinte est intentionnelle ou résulte d'une faute lourde, le tribunal accorde des dommages-intérêts punitifs d'au moins 200 $. [18] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ORDONNE à l’organisme de donner au demandeur communication des renseignements qui doivent lui être communiqués dans la mesure déterminée plus haut; REJETTE la demande quant au reste. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Hélène Savard Avocate de l’organisme.
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.