Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 03 14 42 Date : 23 juin 2004 Commissaire : M e Hélène Grenier X. Demanderesse c. VILLE DE QUÉBEC Organisme DÉCISION OBJET DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] La demanderesse s’est adressée à l’organisme le 9 juillet 2003 pour obtenir des documents et renseignements «suite à un refoulement d’égout ayant causé des dommages à notre propriété». Sa demande identifie l’information à laquelle elle souhaite avoir accès, à savoir : • Les rapports produits par la compagnie SARP de St-Romuald «lorsqu’ils ont débouché et inspecté les conduits sanitaires de la rue de l’Esplanade» près de la résidence de la demanderesse, rapports produits après 2 interventions de SARP en mars 2003; • Le rapport d’inspection produit par l’ingénieure Nancy Giroux de la firme Michaud et Frères inc. dans la semaine du 17 mars 2003 concernant les installations de la demanderesse;
03 14 42 Page : 2 • La date du dernier entretien des conduits d’égout de la rue de l’Esplanade effectué par la Ville. [2] L’accès aux documents et renseignements demandés a été refusé, le 6 août 2003, par le responsable de l’accès aux documents de l’organisme en vertu des articles 14, 32, 37 et 39 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. [3] Insatisfaite, la demanderesse soumet une demande de révision le 7 août 2003. PREUVE i) de l’organisme [4] L’avocat de l’organisme remet à la Commission et sous pli confidentiel une copie du seul document qui est visé par la demande d’accès et qui est détenu; ce document n’a pas été préparé par la compagnie SARP mais bien par l’entreprise Michaud et Frères inc., souligne-t-il. [5] L’avocat produit une copie de la demande introductive d’instance que la demanderesse et son conjoint ont déposée devant la Cour du Québec, division des petites créances, le 18 septembre 2003 (O-1, en liasse), demande par laquelle ceux-ci réclament de l’organisme le paiement de la somme de 6 626,00 $ représentant les dommages causés à leur résidence et à leurs biens lors du refoulement survenu le 7 mars 2003. Cette demande fait état des pièces qu’ils ont déposées au dossier de la Cour, soit leur résumé des faits, le dossier de leur réclamation présentée à l’organisme, le dossier de la demande de révision soumise à la Commission, les pièces justificatives appuyant leur réclamation ainsi que la mise en demeure qu’ils ont adressée à l’organisme. [6] L’avocat dépose une copie de la contestation produite par l’organisme le 8 octobre 2003 à l’encontre de la demande (O-1, en liasse); l’organisme nie sa responsabilité, indique que les motifs de la contestation suivront sous peu et ne dépose alors aucune pièce. Ce dossier n’a pas encore été entendu par la Cour du Québec au moment de l’audience devant la Commission est il est pendant (O-1, en liasse).
03 14 42 Page : 3 ii) de la demanderesse [7] La demanderesse témoigne sous serment. Elle affirme qu’une ingénieure a inspecté l’intérieur de sa résidence à la suite du refoulement d’égout survenu le 7 mars 2003. À son avis, la compagnie SARP aurait pour sa part fait une expertise à l’extérieur; la demanderesse ajoute avoir parlé avec M. Jean-Yves Aubé de la compagnie SARP concernant un document qui porterait sur les causes de ce refoulement. Selon la demanderesse, des employés de la compagnie SARP auraient travaillé à déboucher un conduit appartenant à l’organisme pour en arriver à mettre fin au refoulement. [8] La demanderesse a daté sa demande d’accès du 9 juillet 2003; sa mise en demeure adressée à l’organisme est datée du 2 septembre suivant. [9] La demanderesse mentionne que l’ingénieure qui a inspecté sa résidence lui a fait des recommandations concernant les tuyaux situés à l’intérieur de sa résidence. Selon la demanderesse, l’ingénieure aurait changé son rapport d’inspection pour attribuer à la demanderesse et à son conjoint une part (50%) de la responsabilité pour les dommages subis. La demanderesse ajoute que l’agente de réclamation de l’organisme semblait souscrire à un pareil partage de responsabilité. [10] La demanderesse signale qu’elle veut obtenir le document qui est en litige pour faire sa preuve devant la Cour du Québec et pour savoir s’il y a des problèmes dans les conduits de la rue de l’Esplanade. ARGUMENTATION i) de l’organisme [11] Le document en litige comprend une analyse des faits concluante ainsi que l’opinion d’un ingénieur. La communication de ce document, qui est en rapport direct avec la réclamation de la demanderesse et son conjoint, aurait un effet sur la procédure judiciaire qu’ils ont entreprise contre l’organisme et qui est pendante (O-1, en liasse).
03 14 42 Page : 4 [12] La relation existant entre le document en litige et la procédure judiciaire (O-1, en liasse) est claire; la stratégie de l’organisme est perceptible à la lecture de ce document. [13] Le document en litige a été préparé par un expert externe, à la demande de l’organisme, à la suite de l’événement visé par la réclamation (O-1); il se rapporte directement aux questions que la Cour du Québec sera appelée à trancher. L’article 32 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels s’applique donc nécessairement : 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. ii) de la demanderesse [14] Le document en litige a été préparé par l’ingénieure Giroux de l’entreprise Michaud et Frères inc. Ce document résulte d’une inspection effectuée dans la résidence de la demanderesse et comprend une liste des biens endommagés; il est également susceptible de comprendre des recommandations qui concernent la demanderesse en qualité de copropriétaire de cette résidence. DÉCISION [15] J’ai pris connaissance du rapport qui est détenu et qui a été préparé par l’ingénieure Nancy Giroux de l’entreprise Michaud et Frères inc. à la suite du refoulement d’égout visé par la réclamation de la demanderesse, par sa demande d’accès ainsi que par la poursuite judiciaire qu’elle a entreprise avec son conjoint et qui est en cours (O-1, en liasse). Ce rapport concerne la demanderesse en sa qualité de copropriétaire de la résidence endommagée lors de ce refoulement; la demande d’accès est conséquemment régie par les articles 83 et suivants de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. [16] La Commission comprend que le préjudice matériel visé par la demande a été subi le 7 mars 2003 et, selon le document en litige, que la réclamation de la demanderesse était déjà produite auprès de l’organisme le 18 mars suivant. La Commission comprend également que cette réclamation a fait l’objet d’une
03 14 42 Page : 5 expertise par une ingénieure qui, agissant à la requête de l’organisme, s’est rendue sur les lieux, a enquêté, analysé les faits et conclu. La Commission comprend que l’agente de réclamation de l’organisme a par la suite évoqué auprès de la demanderesse la possibilité d’un partage de responsabilité avec la demanderesse et son conjoint qui, pour leur part, ont manifesté leur désaccord. Ceux-ci ont formulé leur demande d’accès le 9 juillet 2003, demande qu’ils ont fait suivre d’une mise en demeure formelle le 2 septembre 2003 et d’une poursuite déposée le 18 septembre 2003. [17] Il faut donner raison à l’avocat de l’organisme lorsqu’il prétend que ce rapport comprend une analyse dont la divulgation risquerait vraisemblablement d’avoir un effet sur une procédure judiciaire (O-1, en liasse). L’analyse est effectivement constituée d’un examen des faits et du préjudice subi par la demanderesse et son conjoint à la suite du refoulement du 7 mars 2003 ainsi que d’une conclusion sur la cause de ce préjudice. La divulgation des pages 2 et 3 du document aurait vraisemblablement pour effet de révéler prématurément la preuve de l’organisme qui, depuis la réclamation de mars 2003, n’a toujours rien payé et qui nie sa responsabilité. L’accès aux pages 2 et 3 du rapport de l’ingénieure pouvait donc, en vertu des articles 87 et 32 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, être refusé par l’organisme en raison du caractère essentiellement analytique de ces pages et de l’effet de leur divulgation sur une procédure judiciaire qui était imminente vu le contexte litigieux mis en preuve: 87. Sauf dans le cas prévu à l'article 86.1, un organisme public peut refuser de confirmer l'existence ou de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant, dans la mesure où la communication de cette information révélerait un renseignement dont la communication doit ou peut être refusée en vertu de la section II du chapitre II. 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. [18] Le témoignage de la demanderesse confirme l’effet de la divulgation de cette analyse sur la procédure judiciaire qu’elle a entreprise avec son conjoint contre l’organisme (O-1, en liasse).
03 14 42 Page : 6 [19] La page 1 du rapport de même que tous les documents constituant les annexes A, B et C ne constituent pas des analyses et doivent être communiqués à la demanderesse en vertu de l’article 83 de la loi précitée. [20] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE partiellement la demande; ORDONNE à l’organisme de communiquer à la demanderesse copie du document produit par l’entreprise Michaud et Frères inc., incluant ses annexes, à l’exception des pages 2 et 3 du rapport du 7 avril 2003. HÉLÈNE GRENIER Commissaire M e Serge Giasson Avocat de l’organisme
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.