Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 02 17 70 Date : 20040614 Commissaire : M e Christiane Constant Le Groupe Commerce Compagnie d’assurances Partie demanderesse c. Ministère de la Sécurité publique Organisme public DÉCISION L'OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 16 août 2002, la partie demanderesse, par l’entremise de son procureur, M e Jean Rivard, du cabinet d’avocats PICARD GARCEAU PASQUIN PAGÉ VIENS, requiert de la Sûreté du Québec (la « S.Q. »), Section des crimes contre la personne, de lui donner une copie d’un rapport qu’elle aurait rédigé, à la suite d’un incendie qui serait survenu le ou vers le 30 mai 1999 à un immeuble situé dans la municipalité de Sorel-Tracy (la « municipalité »). [2] Les 4 et 20 septembre suivant, la partie demanderesse rappelle à la S.Q. qu’elle attend toujours une réponse de sa part.
02 17 70 Page : 2 [3] Le 11 octobre 2002, d'une part, M. André Marois, responsable de l’accès aux documents pour le ministère de la Sécurité publique (l’ « organisme ») informe la partie demanderesse qu’il a reçu, le 26 septembre précédent, la demande qu’elle avait adressée à la S.Q.; il l’avise qu’un délai de trente jours est nécessaire pour le traitement de ladite demande, d’autre part. Il ajoute qu’en l’absence de réponse dans le délai imparti, la partie demanderesse pourra formuler devant la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») une demande pour que soit révisé le refus présumé de l’organisme. [4] Celui-ci lui transmet, le 17 octobre 2002, une copie d’un extrait dudit rapport. Quant au reste, il invoque comme motif de refus l’article 28 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l'accès »). [5] Il ajoute, entre autres, que le dossier contient un formulaire « Rapport d’intervention » émanant du Service d’incendie de la municipalité. Il invite la partie demanderesse à s’adresser à celle-ci, afin d’obtenir une copie de ce document, selon les termes de l’art. 48 de la Loi sur l’accès. 48. Lorsqu'il est saisi d'une demande qui, à son avis, relève davantage de la compétence d'un autre organisme public ou qui est relative à un document produit par un autre organisme public ou pour son compte, le responsable doit, dans le délai prévu par le premier alinéa de l'article 47, indiquer au requérant le nom de l'organisme compétent et celui du responsable de l'accès aux documents de cet organisme, et lui donner les renseignements prévus par l'article 45 ou par le deuxième alinéa de l'article 46, selon le cas. Lorsque la demande est écrite, ces indications doivent être communiquées par écrit. [6] La partie demanderesse formule, le 12 novembre 2002, une demande auprès de la Commission pour que soit révisée la décision de l’organisme. L'AUDIENCE [7] Cette audience, qui était tout d’abord fixée au 20 mai 2003, a été suspendue, par la Commission, à la demande du procureur de la partie demanderesse; elle se tient à Montréal, le 20 novembre suivant, en présence du témoin de l’organisme qui est représenté par M e Jean-François Boulais, du 1 L.R.Q., c. A-2.1.
02 17 70 Page : 3 cabinet d’avocats Bernard Roy & Associés. La partie demanderesse, pour sa part, est représentée par M e Chantal Cameron, du même bureau d’avocats ayant formulé la demande de révision devant la Commission. PRÉCISIONS DE M e JEAN-FRANÇOIS BOULAIS [8] D’emblée, M e Boulais résume le contenu des documents se trouvant au dossier de l’organisme. Il indique que le corps policier soupçonne une personne d’avoir incendié une maison privée, dans laquelle abrite un commerce. L’avocat ajoute que l’article 28 est invoqué pour l’ensemble des documents constituant le rapport d’enquête. Parmi les documents en litige se trouvent : a) Un rapport d’événement émanant du Service de police de la municipalité; b) Les trois lignes se trouvant dans un rapport de « Scène d’incendie » de l’organisme comme étant un renseignement nominatif; c) Un rapport de « l’équipe cinophile » avec un chien renifleur; d) Un rapport de scène judiciaire et médico-légale; e) Un rapport d’enquête rédigé par l’agent enquêteur M. Patrice Abbel. LA PREUVE A) DÉPOSITION DE M. ANDRÉ MAROIS, POUR L’ORGANISME [9] Après avoir été assermenté, M. Marois déclare qu’il est notamment responsable ministériel de l’accès aux documents pour l’organisme. Dans le cadre de ses fonctions, il examine les demandes d’accès, dont la majeure partie est adressée à la S.Q. [10] Dans le cas en espèce, il affirme que la municipalité a requis l’intervention de la S.Q. à la suite d’un incendie survenu à une propriété immobilière privée, dont une partie abritait un commerce. La S.Q. a mené une enquête criminelle, des éléments factuels ont été recueillis auprès de témoins; à son avis, ces éléments contiennent également des renseignements nominatifs qui ne devraient pas être accessibles à la partie demanderesse.
02 17 70 Page : 4 [11] Il dépose, sous le sceau de la confidentialité, une copie intégrale du rapport d’enquête faisant l’objet du présent litige. B) CONTRE-INTERROGATOIRE PAR M e CHANTAL CAMERON, POUR LA PARTIE DEMANDERESSE [12] M e Cameron exhibe une note datée du 16 juillet 2002 (pièce D-1) adressée à M e Patrick Ouellet et signée par l’agent Patrice Abel, du Service des enquêtes sur les crimes contre la personne. Se référant à cette note, M. Marois relate les propos de cet agent. [13] L’avocate a voulu connaître, entre autres, le motif pour lequel M. Marois n’a pas fait mention de l’existence de ce document dans le traitement de la demande. Il répond que M me Josée Gagné, de l’organisme, l’avait informé qu’un autre avocat, responsable du dossier civil (eu égard à cet incendie) en avait déjà reçu copie; il n’a donc pas jugé nécessaire d’en faire mention une nouvelle fois. [14] De plus, selon M. Marois, dans le but d’effectuer son enquête, l’agent Patrice Abel a préparé un plan pouvant l’aider dans son travail; ce plan décrit une méthode à utiliser (art. 28, 1 er alinéa, au 3 e par.). Il indique que le dossier contient de plus des notes personnelles de l’agent qui réfèrent à des informations confidentielles sur des personnes à rencontrer, etc. La divulgation de ces notes révélerait une méthode d’enquête utilisée par l’agent qui va recueillir des informations pouvant l’aider dans son enquête; il prétend de plus que leur divulgation risque vraisemblablement d’identifier ces personnes (art. 53 et 54). [15] Par ailleurs, M. Marois précise, par exemple, que le rapport de « l’équipe cynophile » réfère à des informations confidentielles recueillies durant l’enquête et dont s’est servi l’agent. Il signale de plus que les croquis réfèrent à des endroits précis touchés par le sinistre; ces croquis font partie intégrante du rapport d’enquête et ne peuvent pas être communiqués à la partie demanderesse (art. 28 (3)). [16] M. Marois ajoute que l’agent Abel est régulièrement en communication avec d’autres agents travaillant dans ce dossier d’incendie; ce qui lui permet de suivre l’évolution de l’enquête. [17] Tentant de savoir s’il existe d’autres documents reliés au sinistre et qui ne se trouvent pas dans le dossier, M. Marois répond par la négative. [18] Cependant, la Commission accorde à celui-ci un délai de quinze jours suivant l’audience, afin qu’il puisse effectuer une vérification additionnelle auprès
02 17 70 Page : 5 de M. Patrice Abel, enquêteur. Celui-ci fera parvenir à la partie demanderesse un affidavit, dont une copie sera transmise à la Commission traitant de l’existence ou non de tous documents additionnels relatifs à l’enquête sur l’incendie en question et les lui transmettra confidentiellement, le cas échéant. Mise au point de Jean-François Boulais [19] M e Boulais avise la soussignée que l’organisme a, en différentes occasions, communiqué à la partie demanderesse, en tout ou en partie, une série de documents, dont ceux mentionnés aux sections 1 et 2 du rapport, ainsi que les photographies prises après le sinistre. LES ARGUMENTS A) DE L’ORGANISME [20] M e Boulais précise que l’article 28 de la Loi sur l’accès est invoqué pour l’ensemble du rapport d’enquête. Il commente chaque document en litige tout en plaidant d’autres articles de la Loi sur l’accès invoqués comme motif de refus. La « Table des matières (2 pages) contient neuf sections, incluant celles mentionnées au paragraphe 19 : • Les sections 3, 6 et 8 ainsi que leurs sous-sections respectives contiennent des renseignements confidentiels eu égard notamment à l’implication d’un agent dans le dossier et des éléments dont il pourra se servir pour mener son enquête. De plus, leur divulgation risquerait notamment de révéler une méthode d’enquête, une source confidentielle d’information et un plan d’action préparés par cet enquêteur afin de détecter un crime ou infractions à une loi (art. 28, par. 3, 53 et 54). La section 8 (Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale) traite d’éléments matériels recueillis par des agents sur les lieux du sinistre (art, 28 (3) et 14); • L’avocat argue notamment que la personne faisant l’objet de l’enquête et qui rencontre un enquêteur n’est pas nécessairement au courant de toutes les étapes de cette enquête; l’agent Patrice Abel, enquêteur a procédé à des vérifications concernant la propriété incendiée. Il plaide également que la preuve a démontré que cet enquêteur est régulièrement en communication avec les autres agents afin d’être en mesure notamment de mieux évaluer l’évolution de ladite enquête;
02 17 70 Page : 6 • La section 4 (Description des assurances ) contient, entre autres, les coordonnées de personnes physiques, des renseignements les concernant, des renseignements à caractère financier, etc. Ce sont des informations nominatives qui devraient être refusées à la partie demanderesse (art. 53 et 54); • La section 5 et ses sous-sections 5.1 à 5.3.8 (Témoins) décrivent les témoins rencontrés par l’agent enquêteur. Ceux-ci donnent leur version des faits eu égard au sinistre; ils émettent des commentaires personnels, sous forme de questions/réponses, prises en lettres manuscrites et dactylographiques, concernant une personne physique; la divulgation de ces renseignements permettrait d’identifier ces témoins (art. 53 et 54). • En ce qui concerne la section 7 et ses sous-sections (Support technique), l’avocat réitère les mêmes motifs que ceux argumentés pour les sections 3, 6 et 8 ci-dessus mentionnées. L’avocat fournit en exemple le rapport de « l’équipe cynophile » qui, avec l’aide d’un chien renifleur cherche une preuve faisant partie intégrante du rapport d’enquête. Il plaide que l’organisme ne peut pas communiquer une partie de ces renseignements, sans toucher l’essentiel même de ces documents (art. 14, 28 (3)). 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. • Quant à la section 9 (Conclusion), l’agent fait un résumé de la situation à partir des éléments recueillis à l’enquête; il indique de plus les motifs pour lesquels il est arrivé à la conclusion telle que décrite; l’avocat plaide qu’un élagage rendrait cette partie du document incompréhensible (art. 14); • Pour ce qui est du « Rapport d’événement – Incendie », l’avocat rappelle que seul un paragraphe de trois lignes référant à des renseignements confidentiels sur une personne physique est refusé à la partie demanderesse (art. 53 et 54);
02 17 70 Page : 7 • Pour le document informatisé d’une page, à savoir une « carte d’appel » émanant de la municipalité, l’avocat plaide que celle-ci représente une composante du système de communication dont se sert un agent policier (art. 28 (6)) dans le cadre de son enquête; • Un document portant la pagination « 32 de 29 », l’avocat plaide que la personne physique à laquelle réfère l’enquêteur, a fait l’objet d’une enquête de nature criminelle, celle-ci est soupçonnée d’avoir incendié la propriété immobilière; son nom devient un renseignement nominatif, puisqu’il est mentionné avec un autre renseignement la concernant (art. 56); B) DE LA PARTIE DEMANDERESSE [21] D’emblée, l’avocate de la partie demanderesse reconnaît que l’organisme lui a fait parvenir certains documents; elle conteste cependant l’interprétation faite par celui-ci de l’article 28 de la Loi sur l’accès pour refuser à sa cliente l’accès à des documents additionnels. [22] En effet, elle argue que la Loi sur l’accès prévoit le principe fondamental du droit d’accès à des documents; l’article 28 de la Loi constitue une exception à ce principe et doit être interprété de façon restrictive, et ce, tel qu’il est mentionné à la décision Alexander et un autre c. Communauté urbaine de Montréal 2 où la Commission a statué, entre autres, que : (…) l’article 28, qui est une disposition impérative, doit être interprété du point du vue de l’ordre public et de la bonne administration de la justice et non pas de celui de l’intérêt propre de l’organisme. Dans ce contexte, le fait de permettre la communication des documents en litige n’entraverait pas le déroulement de la poursuite. Le droit d’obtenir les renseignements nécessaires à une défense pleine et entière de sa cause est reconnu par notre système juridique. Cette tendance à favoriser la communication de la preuve avant l’audition a été amorcée dans le but d’assurer le droit à une défense pleine et entière, d’éviter des arguments inutiles et d’encourager des règlements à l’amiable.(…) [23] L’avocate argue qu’en communiquant, partiellement, à la partie demanderesse, une série de documents, l’organisme a renoncé implicitement à son droit d’invoquer ledit article. Elle estime d’ailleurs que la personne visée dans 2 [1989] C.A.I. 241.
02 17 70 Page : 8 le rapport d’enquête connaît déjà le résultat de l’enquête. À son avis, les motifs de refus invoqués par l’organisme sont non fondés. [24] De plus, elle plaide qu’il ne suffit pas pour l’organisme d’invoquer l’article 28, par. 3 de la Loi sur l’accès eu égard à son application relative, par exemple, à un « technique d’enquête »; il lui incombe de le prouver. Or, elle plaide que cette preuve n’a pas été établie. Sur ce point, elle réfère à la décision Alexander précitée, lorsque la Commission mentionne notamment qu’elle « ne croit pas que la divulgation de ce renseignement serait susceptible de « révéler une méthode d’enquête, une source confidentielle d’information, ni un programme ou un plan d’action destiné à prévenir, […] ou réprimer le crime ou les infractions aux lois » au sens du paragraphe 3. » [25] De ce qui précède, l’avocate argue que les documents refusés à sa cliente devraient lui être accessibles. C) LES COMPLÉMENTS DE PREUVE [26] En complément de preuve, M e Boulais a communiqué à M e Cameron et à la Commission deux affidavits signés, les 4 décembre 2003 et 17 mars 2004, par l’agent Patrice Abel, membre de la Sûreté du Québec, affirmant solennellement : • Qu’il a rédigé le rapport d’enquête faisant l’objet du litige; • Qu’à la demande de M. Marois, il a pris connaissance de l’ensemble des documents « pertinents à ce rapport »; • Que le 16 juillet 2002, il a fait parvenir à M e Patrick Ouellet, une lettre indiquant l’inexistence de rapport ou d’expertise, autres que ceux déjà au dossier d’enquête, d’une part; • Qu’il « n’existe aucun document relatif à ce dossier d’incendie autre que ceux qui ont été remis sous pli confidentiel à la Commission et à ceux qui ont été remis aux procureurs de Groupe Commerce. » • Qu’il confirme l’inexistence d’aucun document, autre que ceux déjà remis à la Commission sous le sceau de la confidentialité et ceux qui ont été remis aux avocats de la partie demanderesse, d’autre part. LA DÉCISION [27] Le délibéré débute le 17 mars 2004.
02 17 70 Page : 9 [28] La partie demanderesse cherche à obtenir des documents selon les termes de l’article 9 de la Loi sur l’accès, à son premier paragraphe qui stipule que : 9. Toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Ce droit ne s'étend pas aux notes personnelles inscrites sur un document, ni aux esquisses, ébauches, brouillons, notes préparatoires ou autres documents de même nature. [29] Outre les documents déjà cités au paragraphe 8, le dossier d’incendie contient également les documents suivants : • Une télécopie adressée à l’agent Abel par un tiers, ainsi qu’un document joint (6 pages); • Un formulaire, en deux exemplaires, dûment complété intitulé « Autorisation de perquisitionner ». [30] Il s’agit de déterminer si les documents demeurant en litige peuvent en tout ou en partie être accessibles à la partie demanderesse. [31] La preuve non contredite a démontré qu’une propriété immobilière privée dans laquelle abritait un commerce a été incendiée; les autorités policières auraient des soupçons que l’incendie serait d’origine criminelle. [32] En raison de ce sinistre, la municipalité a fait appel à la S.Q. qui a mandaté l’un de ces policiers enquêteurs afin de mener une enquête criminelle. Pour ce faire, la preuve tant testimoniale que documentaire indique que l’agent Patrice Abel a été chargé de cette enquête et a signé le rapport d’enquête. [33] Par ailleurs, il importe de préciser que, bien qu’il existe une présomption en faveur des policiers voulant que le travail effectué par ceux-ci vise la prévention, la détection ou la répression du crime ou des infractions aux lois du Québec, il appartient à un organisme public de démontrer que ceux-ci agissent en ce sens. Comme l’indiquent les auteurs Duplessis et Hétu 3 : […] la preuve d’un lien suffisant entre leur mandat et l’enquête effectuée, ou d’une croyance de bonne foi que la 3 Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L’accès à l’information et la protection des renseignements personnels, Loi indexée, commentée et annotée, volume 2, publications CCH ltée, 2003, p. 28-7.
02 17 70 Page : 10 personne sous enquête a pu commettre ou s’apprête à commettre une infraction suffit. […] [34] Dans le cas sous étude, l’examen de tous les documents en litige ainsi que les clarifications apportées par M. Marois, à l’audience, permet d’établir que l’organisme a mené une enquête relative à l’incendie survenu dans l’immeuble. Au moment de cette enquête, la preuve a démontré qu’il existe des soupçons voulant qu’une personne identifiée ait commis une infraction criminelle, c’est-à-dire qu’elle serait l’auteure de cet incendie. Les critères contenus au 1 er alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès sont donc rencontrés, et ce, tel qu’en a décidé la Commission notamment dans les affaires Bélisle c. Centre des services sociaux Laurentides-Lanaudière 4 et Renoir c. Commissaire à la déontologie policière 5 . i) ARTICLE 28, 1 er ALINÉA, LES 3 e ET 6 e PARAGRAPHES 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 3° de révéler une méthode d'enquête, une source confidentielle d'information, un programme ou un plan d'action destiné à prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois; […] 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; [35] Les sections 3, 6 et 8 ainsi que leurs sous-sections respectives indiquent notamment les moyens entrepris par des policiers de la municipalité pour préserver le lieu incendié, en attendant l’arrivée des membres de la S.Q. qui devaient procéder à l’enquête, d’une part. La section 3 contient des renseignements relatifs à la manière selon laquelle un agent de la S.Q. comptait faire pour mener son enquête. La section 6 réfère notamment au résumé d’un renseignement nominatif recueilli auprès d’un tiers. La section 8, pour sa part, vise particulièrement le processus même de cette enquête (par ex. des vérifications et différents tests effectués, etc.). L’organisme ne peut pas dévoiler ces renseignements, car elles constituent une méthode d’enquête dont s’est servi l’agent dans le cadre de ses fonctions, tel qu’en a décidé la Commission dans 4 [1986] C.A.I. 105. 5 [2001] C.A.I. 65.
02 17 70 Page : 11 l’affaire Cloutier c. Ville de Lévis 6 . Cette partie est inaccessible à la partie demanderesse. [36] Un autre document contient également une « carte d’appel » émanant du corps policier de la municipalité. Sa divulgation risquerait de révéler les composantes de ce système de communication destiné à son usage; le 6 e paragraphe de l’article 28 s’applique. La partie demanderesse ne peut donc pas y avoir accès. ii) ARTICLES 53, 54 ET 88 DE LA LOI SUR L’ACCÈS 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 4 o de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [37] Le rapport d’enquête contient 13 déclarations statutaires de témoins inscrites sous forme manuscrite, lesquelles sont reproduites sous forme dactylographique. À la lecture de chacune d’elles, sont indiqués, entre autres, les noms des témoins, leur date de naissance, leur adresse personnelle, leur 6 [1987] C.A.I. 465. – Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L’accès à l’information et la protection des renseignements personnels, Loi indexée, commentée et annotée, volume 2, publications CCH ltée, 2003, p. 77 503.
02 17 70 Page : 12 occupation respective ainsi que le lien direct ou indirect existant entre eux et une personne sur qui pèse les soupçons d’être l’auteur de l’incendie. [38] Ces témoins émettent de plus des commentaires personnels sur des tiers, lesquels commentaires ne sont pas neutres. Ce sont tous des renseignements nominatifs, dont la divulgation permettrait effectivement d’identifier ces témoins (art. 53 et 54). Il n’est pas démontré que ceux-ci aient autorisé l’organisme à communiquer les renseignements les concernant (art. 88) [39] Le même raisonnement s’applique pour les trois lignes contenues au « Rapport d’événement – Incendie » que l’organisme refuse de fournir à la partie demanderesse. [40] Les auteurs Duplessis et Hétu 7 (3 e vol p. 157 103) commentent en ce sens l’article 53 de la Loi sur l’accès : [...] les renseignements nominatifs contenus dans un document bénéficient d’une protection absolue puisqu’ils sont décrétés confidentiels par l’article 53 de la Loi sur l’accès et qu’ils constituent un aspect du droit au respect de la vie privée enchâssée dans les chartes des droits, tant canadienne que québécoise » ce, tel que mentionné notamment aux arrêts Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal c. Université de Montréal 8 et Nadeau c.Ville de Laval 9 . [41] Par ailleurs, la Commission considère, outre les documents déjà remis à la partie demanderesse, celle-ci pourra avoir accès au : • Formulaire (en 2 exemplaires) intitulé « Autorisation de perquisitionner », à l’exception des adresses, des notes manuscrites et des signatures; [42] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : ACCUEILLE, en partie, la demande de révision de la partie demanderesse contre le ministère de la Sécurité publique; 7 Yvon DUPLESSIS et Jean HÉTU, L’accès à l’information et la protection des renseignements personnels, Loi indexée, commentée et annotée, volume 3, publications CCH ltée, 2003, p. 157 103. 8 [1994] C.A.I. 68. 9 [2002] C.A.I. 54.
02 17 70 Page : 13 ORDONNE à l’organisme de lui communiquer accès au document tel que décrit au paragraphe 41; REJETTE, quant au reste, la demande; FERME le présent dossier portant le n o 02 17 70. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 14 juin 2004 M e Jean-François Boulais BERNARD ROY & ASSOCIÉS Procureurs pour le ministère de la Sécurité publique M e Chantal Cameron PICARD GARCEAU PASQUIN PAGÉ VIENS Procureurs pour le Groupe Commerce, compagnie d'assurances
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