Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 02 13 51 et 02 13 52 Date : 20040608 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Ville de Terrebonne Organisme public DÉCISION L’OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 11 juillet 2002, le demandeur requiert de la Ville de Terrebonne (l'« organisme ») de lui communiquer « le nom de la personne dans une maison voisine de mon ancienne résidence qui a appelé la police le soir du 22 septembre 1993, lorsqu’elle m’a vu devant chez moi car j’aurais de bonne raison de croire que celle-ci aurait ou est en mesure de fournir des renseignements important dans cette affaire. » […]
02 13 51 et 02 13 52 Page : 2 [2] Le 30 juillet, l'organisme, par l’entremise de M. Alain Dupré, Directeur, Service de la Sécurité publique, donne suite à la demande en indiquant, entre autres, que : […] Nous désirons vous informer qu’à la lecture dudit document, aucun nom de la personne ayant signalé votre présence devant chez vous n’y figure (appel anonyme). De toute façon, même si tel nom (témoin et/ou plaignant) y apparaissait, nous serions dans l’obligation de vous en refuser l’accès en vertu de l’article 59(9) de la Loi sur l’accès à l’information.[…] [3] Insatisfait, le demandeur sollicite, le 3 septembre 2002, l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») afin de réviser la décision de l’organisme. L’OBJET DU LITIGE DANS LE DOSSIER PORTANT LE N o 02 13 52 [4] Le demandeur cherche à savoir auprès de l’organisme, le 11 juillet 2002, « si ce dossier contient une déclaration statutaire d’un témoin qui est inaccessible en vertu des articles 53 et 54 » de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l’accès »). Le demandeur réfère l’organisme à un dossier portant le n o « TRB-93-0922-047 ». [5] Le 30 juillet, M. Dupré, pour l’organisme répond, entre autres, que : […] Concernant votre lettre demandant que soient considérés les dossiers énumérés ci-dessous et vous concernant, soyez avisé que nous avons donné suite à votre demande et verrons à les conserver : TRB-93-0922-047. Concernant votre lettre visant à obtenir la confirmation que le dossier TRB-93-0922-047 contient une déclaration statutaire inaccessible en vertu des articles 53 et 54 de la Loi sur l’accès à l’information, la loi ne nous permet pas de confirmer ce fait. » […] [6] Le 3 septembre 2002, le demandeur requiert l’intervention de la Commission pour que soit révisée cette décision de l’organisme. 1 L.R.Q. c. A-2.1
02 13 51 et 02 13 52 Page : 3 L'AUDIENCE [7] L’audience de cette cause, qui a été remise une fois à la demande de l’avocate de l’organisme, est entendue le 15 mars 2004, à Montréal, en présence du demandeur et du témoin de cet organisme qui est représenté par M e Lise Boily-Monfette, de la firme d’avocats Deveau Lavoie & Associés. Une preuve conjointe est faite et est versée au dossier portant le numéro 02 13 52, impliquant les mêmes parties, avec les adaptations nécessaires. LE CONTEXTE [8] Le demandeur a formulé d’autres demandes auprès de l’organisme pour avoir accès, soit à des documents, soit à des renseignements dans trois dossiers additionnels de la Commission portant les n os 04 00 92, 04 00 93 et 04 00 94. LA PREUVE POUR LE DOSSIER PORTANT LE N O 02 13 51 A) M. ALAIN DUPRÉ, RESPONSABLE DE L'ACCÈS AUX DOCUMENTS [9] M e Lise Boily-Monfette, avocate de l’organisme, fait témoigner, sous serment, M. Dupré. Celui-ci déclare qu’au moment de la demande, il était Directeur du Service de la Sécurité publique (le « Service ») et responsable de l’accès aux documents. Il est présentement conseiller à la direction générale et coordonnateur pour l’organisme; il continue d’occuper les fonctions de responsable d’accès, et ceci, jusqu’à ce qu’une nouvelle personne soit désignée à ce titre par l’organisme. [10] M. Dupré indique qu’il a procédé à la lecture des documents se trouvant au dossier (TRB 930922-047) et n’a pas retracé le nom de la personne ayant fait appel au Service de police le 22 septembre 1993. Il ajoute que le dossier contient une indication « appel anonyme ». [11] Répondant à une question du demandeur, M. Dupré indique qu’il n’occupe plus le poste de directeur depuis le 12 janvier 2004; cependant, il continue d’agir à titre de responsable de l’accès, et ce, jusqu’à la désignation d’une autre personne par l’organisme.
02 13 51 et 02 13 52 Page : 4 B) DÉPOSITION DU DEMANDEUR [12] Le demandeur, qui témoigne sous serment, déclare que M. Dupré ne devrait pas continuer d’agir à titre de responsable de l’accès, étant donné que celui-ci occupe de nouvelles fonctions au sein de l’organisme. [13] Par ailleurs, le demandeur considère que l’organisme est tenu de dévoiler le nom de la personne qu’il cherche à obtenir, car, à son avis, cette information se retrouve au dossier (TRB 930922-047). LE DOSSIER PORTANT LE N o 02 13 52 [14] Concernant la confirmation de l’existence d’une déclaration statutaire, M. Dupré indique avoir avisé le demandeur que « la loi ne nous permet pas de confirmer ce fait. » Il déclare que le dossier (TRB 930922-047) réfère à une catégorie de déclaration se trouvant effectivement au dossier de l’organisme, mais il ne peut pas lui donner accès pour les motifs ci-après énoncés, notamment : • Elle contient des renseignements nominatifs (art. 53 de la Loi sur l’accès) qui ne peuvent pas être dévoilés, afin de préserver l’identité de la personne mentionnée (art. 54); • Celle-ci ne l’ayant pas autorisé à divulguer les renseignements qui la regardent; • M me X est considérée comme témoin dans la cause au criminel. [15] Le demandeur, pour sa part, déclare que l’organisme agit de façon « illégale » en lui refusant l’accès à ce document. Il prétend de plus que, dans le cadre d’une procédure de nature criminelle, il n’a pas pu se défendre adéquatement, parce qu’il n’a pas eu notamment accès à la déclaration statutaire qu’il tente maintenant d’obtenir. RÉPLIQUE DE L’ORGANISME [16] À ces dernières allégations soulevées par le demandeur, M. Dupré réplique qu’à la demande du bureau des Substituts du Procureur général, l’organisme a communiqué à celui-ci, le 10 juin 2002, une copie des données pertinentes, incluant ladite déclaration après avoir masqué l’adresse et le n o de téléphone du déclarant. Il affirme que l’organisme n’intervient pas dans le travail des Substituts
02 13 51 et 02 13 52 Page : 5 du procureur général; celui-ci voit à la divulgation de sa preuve, et ce, en respect de l’arrêt Stinchcombe c. Sa majesté la Reine 2 . LES ARGUMENTS N o 02 13 51 [17] M e Boily-Monfette résume la déposition de M. Dupré, témoin pour l’organisme, et rappelle qu’au dossier de celui-ci (TRB 930922-047) n’apparaît pas le nom de la personne recherchée par le demandeur. L’avocate argue que le demandeur ne peut pas exiger de l’organisme de lui fournir un renseignement non existant. N o 02 13 52 [18] Quant à la déclaration statutaire, M e Boily-Monfette plaide que celle-ci contient des renseignements nominatifs qui sont confidentiels (art. 53 de la Loi sur l’accès), lesquels concernent une personne physique. L’avocate argue que, dans le cadre de son enquête, l’agent a rencontré des témoins qui lui ont fait des déclarations; de ladite enquête s’en est suivi un rapport. Ces déclarations revêtent un caractère nominatif; de plus, la déclaration de M me X que cherche à obtenir le demandeur devrait demeurer confidentiel, et ce, pour les mêmes motifs. [19] De plus, M e Boily-Monfette signale que M me X n’a pas consenti à la divulgation des renseignements la concernant au sens de l’article 88 de cette loi et conformément à la décision Mercier c. Office municipal d’Habitation de Saint-Damien de Buckland 3 où la Commission a notamment statué que : […] j’estime que la totalité de leur contenu révèlerait vraisemblablement à la demanderesse l’identité des plaignants. Tous les documents manuscrits ont été confectionnés par des personnes côtoyant la demanderesse ou par un représentant de l’organisme principalement à partir d’une lettre manuscrite de plainte annexée au manuscrit du représentant. […] 2 [1995] 1 R.C.S. p. 755. 3 [1995] C.A.I. 144.
02 13 51 et 02 13 52 Page : 6 DÉCISION [20] Les articles pertinents à la présente cause sont : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 83. Toute personne a le droit d'être informée de l'existence, dans un fichier de renseignements personnels, d'un renseignement nominatif la concernant. Elle a le droit de recevoir communication de tout renseignement nominatif la concernant. Toutefois, un mineur de moins de quatorze ans n'a pas le droit d'être informé de l'existence ni de recevoir communication d'un renseignement nominatif de nature médicale ou sociale le concernant, contenu dans le dossier constitué par l'établissement de santé ou de services sociaux visé au deuxième alinéa de l'article 7. 88. Sauf dans le cas prévu par le paragraphe 40 de l'article 59, un organisme public doit refuser de donner communication à une personne d'un renseignement nominatif la concernant lorsque sa divulgation révélerait vraisemblablement un renseignement nominatif concernant une autre personne physique ou l'existence d'un tel renseignement, à moins que cette dernière n'y consente par écrit. [21] La soussignée a examiné tous les documents que l’organisme a déposés à l’audience, sous le sceau de la confidentialité, (TRB 930922-047), parmi lesquels se trouve un document, daté du 22 septembre 1993, intitulé « Demande d’intenter
02 13 51 et 02 13 52 Page : 7 des procédures ». Ce dernier indique clairement que l’organisme a reçu « un appel anonyme » l’avisant de la présence du demandeur à un endroit précis. Cette information est dans un document. [22] Dans le cas en espèce, la preuve tant testimoniale que documentaire a démontré que le renseignement que cherche à obtenir le demandeur lors d’un appel effectué auprès de l’organisme, le 22 septembre 1993, est inexistant. [23] Par ailleurs, dans l’autre cause (portant le n o de la Commission 02 13 52), le demandeur cherche également à obtenir une autre déclaration statutaire d’une personne physique qu’il nomme. [24] Ce document manuscrit (2 pages) contient, entre autres, la date de naissance, le n o de téléphone d’une personne, la version des faits relatée par celle-ci à un policier. Ce sont tous des renseignements nominatifs (art. 53 précité). [25] Par ailleurs, il importe de préciser que le contenu de cette déclaration vise directement le demandeur; les actes posés ou agissements de celui-ci dans des circonstances bien précises le concernent (art. 83). Toutefois, il ne peut pas y avoir accès, car M. Dupré a formellement indiqué que la personne, dont le nom est ressorti à l’audience, n’a pas autorisé l’organisme à divulguer les renseignements qui la concernent (art. 88); il est donc inaccessible au demandeur. [26] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE les deux demandes de révision du demandeur contre Ia Ville de Terrebonne dans les dossiers portant les n os 02 13 51 et 02 13 52 et FERME ces deux dossiers. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 8 juin 2004 M e Lise Boily-Monfette DEVEAU, LAVOIE, BOURGEOIS, LALANDE & ASSOCIÉS Procureurs de la Ville de Terrebonne
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