Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 03 10 57 Date : 20040521 Commissaire : M e Christiane Constant X Demandeur c. Ville de Montréal Organisme public DÉCISION L'OBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE D'ACCÈS [1] Le 20 mai 2003, le demandeur requiert de l'organisme, une copie d’un « rapport policier relatif à l’intervention policière» le concernant, survenue le 2 mai précédent ainsi que tout autre document se trouvant à son dossier. [2] Le 27 mai, l'organisme, par l’entremise de M e Suzanne Bousquet, Chef de la Division des affaires juridiques et responsable de l’accès aux documents, lui communique un accusé de réception et le 10 juin suivant, l’organisme lui refuse l’accès audit rapport, invoquant à cet effet l’article 53 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur l'accès »). [3] Le 16 juin 2003, le demandeur sollicite l’intervention de la Commission d'accès à l'information (la « Commission ») pour que soit révisée le refus de l’organisme à lui donner accès audit document. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 10 57 Page : 2 L'AUDIENCE [4] L’audience de cette cause se tient, le 30 avril 2004, à Montréal, en présence du demandeur et de M me Isabelle Dicaire, du « Mouvement Action Justice ». L’organisme, pour sa part, est représenté par M e Paul Quézel. CONTEXTE ET PRÉCISIONS [5] M e Quézel informe la Commission que le rapport d‘événement recherché par le demandeur est inexistant, tel que fait foi la copie d’un document intitulé « Relevé de l’historique d’appel » qu’il lui a remis avant l’audience. L’avocat informe également la Commission que l’organisme n’a pas de témoin à faire entendre; il fera des représentations en droit eu égard au document recherché faisant l’objet du présent litige. [6] L’avocat dépose, sous le sceau de la confidentialité, une copie intégrale du « Relevé de l’historique d’appel» (3 pages). LA PREUVE A) DU DEMANDEUR [7] Le demandeur, qui témoigne sous serment, affirme que M e Quézel lui a remis une copie élaguée du « Relevé de l’historique d’appel », lequel contient certains renseignements. Il voudrait cependant en obtenir une copie intégrale, incluant les noms des personnes physiques qui y sont indiqués. INTERVENTION DE L’AVOCAT [8] À cette étape de la déposition du demandeur, M e Quézel dépose en preuve un document contenant un numéro d’événement concernant le demandeur; ce document indique cependant que ledit numéro d’événement est annulé (pièce O-1). En conséquence, le rapport d’événement convoité est inexistant. B) INTERVENTIONS DE M me ISABELLE DICAIRE [9] M me Dicaire déclare, sous serment, qu’elle n’est pas témoin dans la présente cause. Elle soutient qu’elle provient du « Mouvement Action Justice » et dit accompagner le demandeur dans sa démarche auprès de la Commission pour l’obtention du document.
03 10 57 Page : 3 [10] Elle tente de faire des représentations au nom du demandeur; M e Quézel s’y objecte, car n’étant pas avocate, membre du Barreau du Québec, M me Dicaire n’est donc pas habilitée à plaider pour autrui. Celle-ci confirme qu’effectivement, elle n’est pas avocate et n’est pas membre du Barreau du Québec. [11] Dans ces circonstances, la soussignée accorde l’objection après avoir fourni à M me Dicaire des explications additionnelles relatives à l’article 128 de la Loi sur le Barreau 2 traitant de ce sujet. LES ARGUMENTS DE L’ORGANISME [12] L’avocat précise que le 2 mai 2003, des policiers ont mené une enquête policière concernant une personne physique, le demandeur, mais celui-ci n’était pas la personne recherchée. [13] L’avocat invoque, comme motif de refus à l’intégralité du document, les articles 28, premier alinéa (par. 6), 53 et 54 de la Loi sur l’accès. Il plaide en effet que le « Relevé de l’historique d’appel » de trois pages contenant une série d’informations ne devraient pas être accessibles au demandeur. ARTICLE 28, PREMIER ALINÉA, 6 e PARAGRAPHE DE LA LOI SUR L’ACCÈS [14] Pour les chiffres inscrits aux sections « Code avant » et « Code après » (pages 1 et 2) du document, l’avocat plaide que ce sont des renseignements confidentiels se référant à la nature de l’événement; ces chiffres représentent les composantes d’un système de communication destiné aux policiers chargés de mener, au sens du premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès, à son 6 e paragraphe, une enquête policière dont le demandeur a fait l’objet. L’avocat plaide également que la Commission a déjà statué que des documents émanant d’un corps de police portant la mention « Code avant » et « Code après » sont protégés par le 6 e paragraphe de cet article. ARTICLES 53 ET 54 DE LA LOI SUR L’ACCÈS [15] Par ailleurs, l’avocat argue que les pages 1 et 3 dudit document contiennent des renseignements nominatifs, tels l’identification d’une personne ayant fait appel au Service de police et le nom de son ex-conjoint. Le numéro de la plaque d’immatriculation du véhicule automobile d’une personne, autre que le demandeur, y est inscrit. L’avocat plaide que la Loi sur l’accès exige d’un 2 Loi sur le Barreau, L.R.Q., c. B-1
03 10 57 Page : 4 organisme public à ne pas divulguer ces renseignements qui doivent demeurer confidentiels selon les termes des articles 53 et 54 de ladite Loi. [16] De plus, l’avocat précise que le « Relevé de l’historique d’appel » élagué qu’il a remis au demandeur indique qu’il y a eu « erreur sur la personne ». [17] Le demandeur, pour sa part, réitère sa volonté à vouloir obtenir l’intégralité du document en litige. LA DÉCISION [18] Le demandeur désire avoir accès à un rapport d’événement que des policiers travaillant pour l’organisme auraient rédigé à son égard à la suite d’une intervention policière l’impliquant survenue le 2 mai 2003. [19] La Commission est d’avis que, si ledit rapport existait, le numéro d’événement, tel qu’indiqué à la case « (Option 2) », aurait dû s’y retrouver. Or, la preuve documentaire démontre plutôt que ledit numéro est annulé, tel que fait foi la copie d’un document portant la mention « Événement annule au registre » (pièce O-1) (sic). Ajoutant à cette preuve les précisions apportées, à l’audience, par l’avocat de l’organisme, la Commission est d’avis que le rapport d’événement relatif à l’incident survenu le 2 mai 2003 impliquant le demandeur est inexistant. [20] Par ailleurs, il importe de rappeler que l’article 1 de la Loi sur l’accès prévoit que la présente loi ne s’applique qu’à des documents que détient un organisme public, dans l’exercice de ses fonctions, quelque soit leur forme . 1. La présente loi s'applique aux documents détenus par un organisme public dans l'exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l'organisme public ou par un tiers. Elle s'applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [21] Ces renseignements doivent être consignés dans un document au sens de l’article 15 de ladite loi. 15. Le droit d'accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements.
03 10 57 Page : 5 [22] Une jurisprudence constante de la Commission vient appuyer ces énoncés tels que stipulés aux deux articles précités, notamment dans les décisions Morin c. Ministère de la Main-d’œuvre, de la sécurité du revenu et de la formation professionnelle 3 , d’une part, et Lacombe c. Ministère de la Sécurité publique 4 , d’autre part. LE RELEVÉ DE L’HISTORIQUE D’APPEL [23] Par ailleurs, le demandeur reconnaît que l’avocat de l’organisme lui a remis, avant l’audience, une copie élaguée du « Relevé de l’historique d’appel » relatif à cet événement. ARTICLE 28, PREMIER ALINÉA, (PAR. 6) DE LA LOI SUR L’ACCÈS 28. Un organisme public doit refuser de confirmer l'existence ou de donner communication d'un renseignement obtenu par une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, lorsque sa divulgation serait susceptible: […] 6° de révéler les composantes d'un système de communication destiné à l'usage d'une personne chargée d'assurer l'observation de la loi; […] [24] De plus, il importe de préciser que, dans la présente cause, les policiers ont recueilli des renseignements nominatifs dans le cadre de leurs fonctions. Il ne fait aucun doute que ces personnes sont chargées de prévenir, détecter et réprimer un crime ou des infractions à une loi, au sens du premier de l’article 28 de ladite loi. Tant la preuve documentaire que la déposition du demandeur, il est démontré que, le 2 mai 2003, une intervention policière, impliquant le demandeur est survenue. Cependant, cette preuve documentaire a également démontré qu’il y a eu « erreur sur la personne » (page 3 du document). [25] À ce document, se retrouvent des numéros de codes référant à ce type d’événement, et ce, jusqu’à la fin de l’intervention policière. La Commission est 3 [1993], C.A.I. 126. 4 [2000], C.A.I. 274.
03 10 57 Page : 6 d’avis que ces renseignements doivent demeurer confidentiels, car leur divulgation risque effectivement de révéler des composantes d’un système de communication destiné à l’usage d’une personne chargée d’assurer l’observation de la loi, et sont donc protégés par le premier alinéa de l’article 28 de la Loi sur l’accès, à son 6 e paragraphe. [26] Citant la décision Lebel c. Ministère de la Sécurité publique du Québec 5 , dans l’affaire Lacombe précitée (p. 276), la Commission a statué, entre autres, que : […] ces derniers documents requis par le demandeur bénéficient de la restriction de l’article 28 de la loi et parce qu’ils sont truffés de codes qui rendent inapplicable l’article 14 de la loi . 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. […] ARTICLES 53 ET 54 DE LA LOI SUR L’ACCÈS [27] Ce document de trois pages cite le nom d’une personne ayant fait appel aux autorités policières de l’organisme le 2 mai 2003. Les noms d’autres personnes y apparaissent également; ce document contient de plus le numéro d’immatriculation du véhicule automobile d’une autre personne qui n’est pas le demandeur. Ce sont tous des renseignements nominatifs qui doivent rester confidentiels au sens de l’article 53 de la Loi sur l’accès et notamment en conformité avec les décisions Fleury c Tribunal du Québec 6 et Simard c. Ministère de la culture et des communications et le Groupe Vidéotron 7 . [28] Les renseignements nominatifs que contient ce document sont soumis à la règle de la confidentialité et les personnes physiques, dont les noms y apparaissant, ne doivent pas être identifiées (art. 53 et 54), et ce, conformément 5 [1999], C.A.I., 372. 6 [2000], C.A.I.,94. 7 [2000, C.A.I.,180.
03 10 57 Page : 7 aux décisions Labelle c. Communauté urbaine de Montréal 8 et Chiasson c, Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l’Ile de Montréal 9 . 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1° leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2° ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 54. Dans un document, sont nominatifs les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l'identifier. [29] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : CONSTATE que l'organisme a communiqué au demandeur une copie élaguée du « Relevé de l’historique d’appel » le concernant; REJETTE, quant au reste, la demande de révision; FERME le présent dossier n o 03 10 57. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 21 mai 2004 Me Paul Quézel Procureur de la Ville de Montréal 8 C.A.I. Montréal, n o 01 11 31, 2 décembre 2002, c. Laporte 9 [1994], C.A.I. 76.
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