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Commission d'accès à l'information du Québec Dossier : 03 06 65 Date : 20040520 Commissaire : M e Michel Laporte X Demandeur c. MUNICIPALITÉ DE CONTRECŒUR Organisme DÉCISION L'OBJET DEMANDE DE RÉVISION [1] Le demandeur conteste la décision de la Municipalité de Contrecœur (la « Municipalité ») de lui refuser laccès, selon les termes des articles 32 et 53 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi »), à la « […] lettre du 14 février 2003 […] adressée au ministère de lEnvironnement, […] en rapport avec le dossier du ministère de l'Environnement numéro : 7430-16-01-0075300 relativement à une plainte de moi-même […] ». 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 06 65 Page : 2 [2] Une audience se tient à Montréal le 20 avril 2004. L'AUDIENCE A) LE LITIGE [3] Les parties confirment que le seul objet du litige consiste à décider de laccessibilité de la lettre explicative fournie au ministère de lEnvironnement (le « Ministère ») par la Municipalité à la suite dune plainte déposée par le demandeur. B) LA PREUVE i) De la Municipalité M. Yves Beaulieu [4] M. Yves Beaulieu, responsable de laccès, remet à la Commission d'accès à l'information (la « Commission »), sous pli confidentiel, la lettre de deux pages en litige. Il explique que le dossier prend ses origines vers la fin de lannée 2000. À ce moment, le voisin du demandeur sapprête à remblayer une partie de son terrain situé sur le bord de leau. La Municipalité intervient et exige denlever la terre ayant servi à remblayer le terrain. [5] M. Beaulieu soutient que ces derniers événements ont depuis donné lieu à de nombreuses interventions, dont une série de plaintes de la part du demandeur contre son voisin. [6] M. Beaulieu signale quil a rédigé la lettre en litige en réponse à celle reçue du Ministère lenjoignant de faire respecter les règlements de la Municipalité (pièce O-1 en liasse). Cette lettre donne au Ministère la position de la Municipalité dans cette affaire. [7] M. Beaulieu avance que la Municipalité croit en limminence dune poursuite judiciaire, en raison notamment de lintervention policière à la suite daltercations verbales entre les voisins et de mises en demeure de la part du demandeur (pièce O-1 en liasse). Il refuse donc laccès à cette lettre en vertu de larticle 32 de la Loi, laquelle donne des informations, livre des commentaires, analyse la situation et fournit la position de la Municipalité. Il soumet que cette lettre pourrait avoir un impact sur une procédure judiciaire.
03 06 65 Page : 3 [8] M. Beaulieu spécifie que la lettre en litige na jamais été déposée à une séance du conseil ni aux archives de la Municipalité. Il ajoute que le document en litige renferme également, selon les termes de larticle 53 de la Loi, des informations concernant une autre personne physique que le demandeur. ii) Du demandeur [9] Le demandeur confirme quun litige subsiste avec son voisin au sujet du remblayage du terrain de ce dernier. Il considère que le document en litige le diffame et lui est préjudiciable. [10] Le demandeur spécifie que lobjet exact de sa demande nest pas davoir accès à la lettre en litige, mais plutôt dexiger de la Municipalité quelle la détruise. Il allègue que la Municipalité a pris la défense de son voisin, malgré le fait que ce dernier ne respecte pas les lois sur lenvironnement. La Commission [11] Interrogé par la Commission, le demandeur répète que lobjet de sa demande vise à ce que la Municipalité retire du dossier la lettre en litige et la détruise. Il prétend que cette lettre est diffamatoire à son endroit et nuit à sa réputation. [12] La Commission prévient le demandeur que sa demande du 31 mars 2003 mentionne spécifiquement de lui « […] faire parvenir copie de la lettre du 14 février 2003 que vous avez adressée au ministère de lEnvironnement […] ». La demande ne discute aucunement de la destruction du document en litige. C) LES ARGUMENTS i) De la Municipalité [13] Le procureur de la Municipalité, M e Jean-François Coudé, soumet que la lettre en litige écrite par M. Beaulieu analyse la situation à partir de deux versions pour en tirer une conclusion 2 . Dans les circonstances, fait-il valoir, la Municipalité était justifiée de refuser laccès au document en litige en vertu des articles 14 et 32 de la Loi 3 : 2 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à linformation, loi annotée, Éditions Yvon Blais, vol. 1, 26 novembre 2003. 3 Pelchat c. Ministère de la sécurité publique, C.A.I. Montréal, n o 01 11 77, 20 février 2002, c. Michel Laporte.
03 06 65 Page : 4 14. Un organisme public ne peut refuser l'accès à un document pour le seul motif que ce document comporte certains renseignements qu'il doit ou peut refuser de communiquer en vertu de la présente loi. Si une demande porte sur un document comportant de tels renseignements, l'organisme public peut en refuser l'accès si ces renseignements en forment la substance. Dans les autres cas, l'organisme public doit donner accès au document demandé après en avoir extrait uniquement les renseignements auxquels l'accès n'est pas autorisé. 32. Un organisme public peut refuser de communiquer une analyse lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'avoir un effet sur une procédure judiciaire. [14] M e Coudé indique quun différend oppose le demandeur et son voisin depuis de nombreuses années. Les mises en demeure du demandeur démontrent, entre autres, la justesse de la position de la Municipalité selon laquelle le document pourrait vraisemblablement avoir un impact dans le cadre dune procédure judiciaire 4 . [15] M e Coudé allègue que le document en litige renferme lopinion de son auteur, constituant un renseignement nominatif visé par larticle 53 de la Loi : 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. 4 Lapierre c. Ville de Longueuil, [1986] C.A.I. 462; Association des citoyens et citoyennes de Saint-Colomban [1993] C.A.I. 162; Plante c. Municipalité de Saint-Pierre-de-LÎle-DOrléans, C.A.I. Québec n o 01 10 47, 26 février 2002, c. Grenier.
03 06 65 Page : 5 ii) Du demandeur [16] Le demandeur réitère quil sest adressé à la Commission pour éviter des frais davocats à la Municipalité. Il veut que la lettre en litige soit retirée du dossier et détruite, sagissant dun document discriminatoire à son endroit. Il comprend difficilement pourquoi la Commission ne pourrait pas accéder à sa demande. Il avance que si la Commission ne lui donne pas raison, dautres tribunaux pourront le faire. DÉCISION [17] Le seul objet du litige que la Commission est habilitée à trancher dans le cadre de lactuel dossier consiste à décider de laccessibilité ou non de la lettre en litige. [18] Dailleurs, il na pas été contesté que la Municipalité détient la lettre en litige, laquelle fait partie du dossier encore actif impliquant le demandeur à son voisin. À lévidence, la preuve a démontré que lobjet pour lequel le dossier a été constitué nest pas terminé, selon les termes des articles 64 et 73 de la Loi : 64. Nul ne peut, au nom d'un organisme public, recueillir un renseignement nominatif si cela n'est pas nécessaire à l'exercice des attributions de cet organisme ou à la mise en œuvre d'un programme dont il a la gestion. 73. Lorsque l'objet pour lequel un renseignement nominatif a été recueilli est accompli, l'organisme public doit le détruire, sous réserve de la Loi sur les archives (chapitre A-21.1). [19] Jai examiné le document en litige. Il sagit dune lettre que le directeur général de la Municipalité, M. Yves Beaulieu, adresse au directeur régional de la Direction de lenvironnement de la Montérégie, Pierre-Hugues Boisvenu, concernant le respect de normes environnementales. [20] Cette lettre forme un tout cohérent et nest pas quun simple exposé de faits. Lon retrouve une sélection et comparaison des faits, une description sommaire de la problématique et une évaluation de la situation. La lecture attentive de cette lettre mamène à conclure quelle revêt un caractère analytique dune situation litigieuse au sens de larticle 32 de la Loi.
03 06 65 Page : 6 [21] En outre, la preuve me convainc de limpact que pourrait vraisemblablement avoir cette lettre sur une procédure judiciaire, laquelle, compte tenu de lexistence des mises en demeure du demandeur lors de la demande daccès, est réelle (pièce O-1 en liasse). POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [22] REJETTE la demande de révision du demandeur. MICHEL LAPORTE Commissaire M e Jean-François Coudé Procureur de l'organisme
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