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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 03 08 18 Date : 20040422 Commissaire : M e Christiane Constant DÉCISION LOBJET DU LITIGE LA DEMANDE DE RÉVISION EN MATIÈRE DE RECTIFICATION [1] Le 12 mai 2003, la demanderesse requiert de la Commission scolaire de la Rivière-du-Nord (l’« organisme »), renseignements contenus au dossier de son fils, dont la majeure partie serait erronée. [2] Le lendemain, soit le 13 mai, M. Rémi Tremblay, secrétaire général adjoint pour lorganisme lui refuse laccès aux documents, invoquant à cet effet notamment larticle 89 de la Loi sur laccès aux documents des organismes X Demanderesse c. Commission scolaire de La Rivière-du-Nord Organisme public de procéder à la rectification des
03 08 18 Page : 2 publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (la « Loi sur laccès »). [3] Le 15 mai, la demanderesse sollicite lintervention de la Commission daccès à linformation (la « Commission ») pour quelle révise cette décision de lorganisme. LAUDIENCE [4] L'audience de cette cause se tient à Montréal, le 31 mars 2004, en présence de la demanderesse, du fils de celle-ci, de MM. Denis Corbeil et Rémi Tremblay, témoins de lorganisme. LA PREUVE A) DE LORGANISME [5] M . Tremblay dépose, en preuve, une résolution adoptée par le conseil municipal de lorganisme, le 30 mars 2004, le nommant avec M me Louise Dostaler, responsables de laccès aux documents (pièce O-1). Il précise quaprès avoir reçu la demande de rectification de la demanderesse, il a fait parvenir à celle-ci la réponse de lorganisme indiquant son refus dapporter les rectifications demandées, et particulièrement celui suivant les termes de larticle 89 de la Loi sur laccès (pièce O-2). [6] De plus, il affirme avoir pris connaissance de tous les autres documents que la demanderesse a communiqués à lorganisme, lesquels, à son avis, contiennent des propos diffamatoires à légard de personnes physiques oeuvrant au sein de lorganisme. M. Tremblay indique que lorganisme compte examiner, de manière plus approfondie, lesdits documents et décidera des mesures à prendre le cas échéant. Il ajoute cependant que lorganisme pourrait réévaluer la situation si la demanderesse retire ses propos inexacts. [7] La demanderesse, pour sa part, après avoir été assermentée, déclare quelle refuse de se rétracter. 1 L.R.Q., c. A-2.1.
03 08 18 Page : 3 B) DÉPOSITION DE M. DENIS CORBEIL [8] M. Corbeil, qui témoigne sous serment, dépose, sous le sceau de la confidentialité, le dossier intégral concernant le fils de la demanderesse; il déclare quil est psychologue depuis douze ans, il travaille à ce titre pour lorganisme et décrit ses fonctions. Il ajoute quil œuvre au niveau secondaire. [9] M. Corbeil déclare également quà la demande de la direction dune école, il procédera, entre autres, à lévaluation psychologique dun élève vivant une situation particulière. À cet effet, il communique dabord avec les parents de cet élève qui lautorisent, par écrit, à le faire. Il précise quil nenregistre pas les conversations ou les renseignements obtenus auprès des tiers concernant cet élève. Cependant, il collige, au dossier personnel de celui-ci, les dates dintervention et les informations pertinentes ainsi obtenues. À son avis, ces informations lui permettent, entre autres, détablir, par exemple, un diagnostic sur cet élève. [10] Dans le cas sous étude, M. Corbeil indique quil y a plus de quatre ans, le fils de la demanderesse fréquentait « lÉcole Frenette ». En raison de comportements particuliers que présentait cet élève, la direction de lécole lui a demandé de procéder à son évaluation psychologique. Il a alors communiqué avec la demanderesse afin de fixer un rendez-vous, dont lentrevue avec celle-ci sest tenue en présence dune représentante de la direction. Après avoir obtenu lautorisation écrite de la demanderesse, il a pu, par la suite, rencontrer le fils de celle-ci, et ce, dans le cadre de ses fonctions de psychologue. Constatant la situation dans laquelle se trouvait cet élève, M. Corbeil affirme avoir suggéré à la demanderesse que son fils soit « suivi en pseudo-psychiatrie ». Cette suggestion a été refusée par la demanderesse qui la, par la suite, avisé quelle mettait un terme aux rencontres. [11] En ce qui concerne la demande de rectification recherchée par la demanderesse, M. Corbeil indique quil a examiné et revu toutes les notes quil a inscrites lui-même au dossier personnel du fils de la demanderesse. Il considère que les renseignements colligés sont exacts et refuse dy apporter les rectifications. B) DÉPOSITION DE LA DEMANDERESSE [12] La demanderesse, qui témoigne sous serment, déclare que 98 % des renseignements nominatifs se trouvant au dossier de son fils sont inexacts. Par exemple, la plupart des dates dintervention ainsi que les notes du psychologue sont erronées; un commentaire du psychologue visant le père de son fils nest pas
03 08 18 Page : 4 tout à fait exact, etc. À son avis, M. Corbeil, naurait pas inscrire la majeure partie de ces renseignements audit dossier; elle en fournit dautres exemples pour maintenir sa position. [13] De plus, prenant un autre exemple, la demanderesse tente de démontrer que la date et linformation se trouvant à une autre page sont inexactes. À son avis, presque toutes ces informations auraient être inscrites de manière différente au dossier de son fils. C) DÉPOSITION DU FILS DE LA DEMANDERESSE [14] Après avoir été assermenté, le fils de la demanderesse nous réfère, pour sa part, à une note inscrite à son dossier par M. Corbeil; il déclare que ce renseignement est inexact. Il fournit une explication différente de ce qui y est indiqué. RÉPLIQUE [15] M. Corbeil refuse dapporter les rectifications au dossier. À son avis, il na commis aucune erreur; les renseignements qui sy trouvent sont exacts. Les faits, les commentaires rapportés, les dates mentionnées ainsi que lévaluation quil a fait de cet élève à des moments précis sont également exactes. COMMENTAIRES A) DE LORGANISME [16] M. Tremblay indique que la Loi sur linstruction publique 2 prévoit, entre autres, que lorganisme est tenu de fournir des services complémentaires à ses élèves. Cest ce quil a fait dans le présent cas. [17] M. Corbeil, pour sa part, souligne que le fils de la demanderesse éprouvait des difficultés à lécole et quil la rencontré dans le but détablir un diagnostic. Il estime quil na pas commis derreur nécessitant des rectifications. B) DE LA DEMANDERESSE [18] La demanderesse, pour sa part, réitère les mêmes motifs pour lesquels elle souhaite voir rectifier la presque totalité des renseignements contenus au dossier personnel de son fils. 2 L.R.Q., c. 1-13.3.
03 08 18 Page : 5 LA DÉCISION [19] La Commission tient à préciser quelle nest pas habilitée à entendre ou à statuer sur un litige relatif à des propos de nature désobligeante ou ayant une connotation diffamatoire que la demanderesse aurait pu tenir à légard des membres du personnel ou dautres personnes oeuvrant au sein de lorganisme; ce nest pas le forum approprié. [20] Lexamen des documents en litige démontre quau moment de la demande daccès, le fils de la demanderesse était un mineur, d la demande formulée par sa mère. Le dossier personnel, déposé par lorganisme, sous pli confidentiel, contient vingt-quatre pages de documents qui contiennent des renseignements nominatifs concernant particulièrement le fils et sa mère. M. Corbeil a fourni des exemples tout au long de son témoignage. [21] La Commission retient essentiellement de la preuve les éléments suivants : M. Denis Corbeil est psychologue. Dans le cadre de ses fonctions et à la demande de la direction de lÉcole Frenette, il a rencontré le fils de la demanderesse qui éprouvait des difficultés à lécole; M. Corbeil en a fourni des exemples; La demanderesse affirme que 98 % des renseignements, tels les dates dintervention et les notes, se trouvant dans ledit dossier sont inexacts. Elle veut faire corriger, extraire ou modifier presque toutes ces notes, en suivant linterprétation ou lexplication quelle fournit à laudience; M. Corbeil, pour sa part, refuse dapporter les rectifications recherchées, et ce, pour les motifs quil indique également à laudience. [22] La demanderesse a formulé la présente demande de révision selon les termes de larticle 135 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 3 (la « Loi sur laccès ») : 135. Une personne dont la demande écrite a été refusée en tout ou en partie par le responsable de l'accès aux documents ou de la protection des renseignements personnels peut demander à la Commission de réviser cette décision. 3 L.R.Q., c. P-39.1.
03 08 18 Page : 6 Une personne qui a fait une demande en vertu de la présente loi peut demander à la Commission de réviser toute décision du responsable sur le délai de traitement de la demande, sur le mode d'accès à un document ou à un renseignement, sur l'application de l'article 9 ou sur les frais exigibles. Ces demandes doivent être faites dans les trente jours qui suivent la date de la décision ou de l'expiration du délai accordé par la présente loi au responsable pour répondre à une demande. La Commission peut toutefois, pour un motif raisonnable, relever le requérant du défaut de respecter ce délai. [23] La Commission considère que la demande de rectification faisant lobjet du présent litige est faite par la demanderesse au sens de larticle 89 de ladite Loi sur laccès : 89. Toute personne qui reçoit confirmation de l'existence dans un fichier d'un renseignement nominatif la concernant peut, s'il est inexact, incomplet ou équivoque, ou si sa collecte, sa communication ou sa conservation ne sont pas autorisées par la loi, exiger que le fichier soit rectifié. [24] Le législateur prévoit, à cet article, les conditions devant être respectées par un organisme public, afin de pouvoir procéder à la rectification de renseignements nominatifs contenus dans un document. [25] Dans le cas en lespèce, la demanderesse exige la rectification de 98 % des renseignements nominatifs que contient le dossier de son fils, car elle les considère inexacts. En sorte, elle souhaite voir modifier, extraire ou réécrire lesdits renseignements. Cette rectification pourrait se faire, dans la mesure elle est capable de démontrer que lesdits renseignements sont inexacts, incomplets ou équivoques. En dautres mots, pour que cette demande de rectification soit recevable, la demanderesse devrait prouver ces éléments, tel que la indiqué la Commission à la décision X c. Hôpital Louis-H. Lafontaine 4 . [26] Or, elle a plutôt indiqué, entre autres, que M. Corbeil aurait extraire des notes du dossier, ou encore les écrire de façon différente. À la décision Tshani-Bisumbulé c. ministère de la Solidarité sociale 5 , la Commission a souligné que « la 4 C.A.I. Montréal, n o 02 19 05, 13 janvier 2004, c. Constant 5 [2002] C.A.I. 42.
03 08 18 Page : 7 perception du comportement dune partie par rapport à lautre est toujours subjective et ne peut être rectifiée que par lobservateur lui-même. » Une jurisprudence constante de la Commission visant linterprétation et lapplication de larticle 89 de la Loi sur laccès le confirme notamment aux décisions F. c. Hôpital général Lakeshore 6 et X c. Centre hospitalier universitaire de Québec 7 . [27] La Commission considère que la demanderesse ne sest pas déchargée de la preuve voulant que les renseignements nominatifs se trouvant au dossier personnel de son fils sont soit inexacts, soit incomplets ou soit équivoques; sa demande de rectification ne peut donc être accueillie. [28] Comme le stipulent les auteurs Doray et Charette 8 , « On ne peut pas effacer ni réécrire le passé ». Cette prémisse est soutenue par la Commission dans la décision Bédard c. Régie des rentes du Québec 9 par laquelle le retrait de documents déposés à son dossier lui est refusé. [29] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE la demande de révision de la demanderesse sur la rectification du dossier de son fils contre la Commission scolaire de la Rivière-du-Nord; FERME le présent dossier n o 03 08 18. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 23 avril 2004 6 [1986] C.A.I. 490. 7 [2001] C.A.I. 160. 8 Raymond DORAY et François CHARETTE, Accès à l'information, Loi annotée Jurisprudence- Analyse et commentaires, volume 1, Éditions Yvon Blais, 2003, f. III/89-12. 9 C.A.I., nos 93 04 93 et 93 04 96, 30 septembre 1994, c. Miller.
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