99 19 94 2744-3522 Québec inc. (Somma Auto 1989 inc.) ci-après appelée «la demanderesse» c. MINISTÈRE DU REVENU ci-après appelé «l’organisme» Le 16 septembre 1999, la demanderesse requiert l’obtention de «tous les renseignements et documents» la concernant ou faisant partie de son dossier qui sont détenus par l’organisme et qui se rapportent à la vérification effectuée en matière de taxe du Québec (TVQ) et de taxe sur les produits et services (TPS) pour les années 1996, 1997 et 1998, ce, quelle que soit la forme de ces renseignements et documents. La demanderesse requiert spécifiquement la «copie du rapport de vérification du MRQ se rapportant à la vérification en matière de TPS/TVQ effectuée pour les années 1996, 1997 et 1998» ainsi que «toute lettre, mémoire, mémoire d’opinion, opinion, notes personnelles, manuscrites ou non, émanant de tout fonctionnaire ou employé de la Direction générale de la législation et se rapportant à Somma ou faisant partie de son dossier…» ainsi que «l’ensemble de la documentation émanant du ministère du Revenu national ainsi que l’ensemble de la correspondance échangée entre les fonctionnaires ou employés du MRQ avec ceux du ministère du Revenu national relativement à Somma ou faisant partie de son dossier. ». Le responsable de l’accès de l’organisme lui communique certains documents après en avoir extrait des renseignements en vertu de l’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu (L.R.Q., c. M-31) et en vertu des articles 53, 54 et 88 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., c. A-2.1, ci-après appelée «Loi sur l’accès»).
99 19 94 2 Le responsable refuse également de lui communiquer 195 pages entières en vertu des mêmes dispositions. Il extrait enfin des documents communiqués à la demanderesse tous les renseignements relatifs à la Loi sur la taxe d’accise (L.R.C. (1985), c. E-15) afin que l’autorité fédérale compétente puisse traiter la demande d’accès à cet égard; il appuie notamment son refus sur l’article 19 de la Loi sur l’accès. La demanderesse requiert la révision de la décision du responsable; elle conteste les motifs invoqués au soutien de son refus. Les parties sont entendues le 26 mars 2001, à Montréal. PREUVE : Les renseignements relatifs à la taxe sur les produits et services (TPS) : Le procureur de l’organisme rappelle que l’accès aux renseignements relatifs à la taxe sur les produits et services (TPS) prévue par la Loi sur la taxe d’accise relève du gouvernement fédéral et que ces renseignements ne peuvent conséquemment être communiqués par l’organisme. Le procureur de la demanderesse admet que sa cliente s’est adressée à l’autorité fédérale compétente et qu’elle a ainsi obtenu les documents la concernant qui avaient été transmis à cette autorité fédérale par l’organisme; à son avis, l’organisme détient d’autres documents qu’il a omis de communiquer à l’autorité fédérale, tels que des rapports de vérification et des factures, de sorte que sa cliente n’a pu y avoir accès en s’adressant à l’autorité fédérale.
99 19 94 3 Les parties s’entendent comme suit : les documents qui ont été transmis par l’organisme à l’autorité fédérale ne sont plus en litige; l’organisme s’engage spécifiquement à transmettre à l’autorité fédérale les renseignements qui auraient dû lui être transmis concernant la demanderesse et relatifs à la TPS afin qu’elle puisse traiter la demande d’accès de la demanderesse de façon complète. Les autres renseignements : Le procureur de l’organisme fait entendre monsieur Marcel Carbonneau de la direction générale de la législation et des enquêtes de l’organisme qui, sous serment, témoigne avoir traité la demande d’accès et avoir obtenu des services de l’organisme les documents visés par cette demande; il a, aux fins du traitement de la demande, communiqué à différentes reprises avec le vérificateur concerné et travaillé en collaboration avec lui afin de déterminer la provenance et le contenu des documents. Monsieur Carbonneau indique que : • certains des renseignements inscrits dans les 35 pages portant sur la vérification effectuée ont été extraits parce qu’ils ont été fournis par des tiers; • parmi les 195 pages qui ont été intégralement soustraites à l’accès : a) 158 pages sont constituées de renseignements qui proviennent de la Société d’assurance automobile du Québec, ces renseignements ayant été fournis par des tiers et concernant des tiers identifiés, personnes physiques ou morales, étant entendu que la demanderesse est identifiée sur quelques-unes de ces pages; b) les 37 pages restantes sont constituées de renseignements fournis par des tiers, personnes physiques et morales, renseignements qui concernent ces tiers et qui les identifient.
99 19 94 4 Monsieur Carbonneau affirme que les tiers concernés n’ont pas consenti à la communication des renseignements en litige à la demanderesse. Contre-interrogé, il précise ne pas leur avoir demandé s’ils consentaient à la communication de ces renseignements. ARGUMENTATION : Le procureur de l’organisme rappelle qu’il s’est engagé, séance tenante et au nom de son client, à transmettre à l’autorité fédérale compétente les renseignements qui, le cas échéant, auraient dû lui être transmis afin que celle-ci traite, de façon complète, la demande d’accès de la demanderesse. Il soumet, en ce qui concerne les renseignements qui demeurent en litige, que ces renseignements permettent d’identifier les tiers qui n’ont pas consenti par écrit à leur divulgation et à celle de leur provenance. À son avis l’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu ainsi que les articles 53, 54 et 88 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels exigent du responsable le respect du caractère confidentiel de ces renseignements. Le procureur de la demanderesse soumet que les 195 pages qui sont en litige concernent sa cliente parce qu’elles sont dans son dossier; à son avis ces documents lui sont conséquemment accessibles. Il soumet que les renseignements nominatifs ne visent, en vertu de la Loi sur l’accès, que les personnes physiques. Il soumet particulièrement que l’article 69.0.1 de la Loi sur le ministère du Revenu, qui, à son avis, s’applique à la demande d’accès, prévoit que :
99 19 94 5 69.0.1 Malgré l’article 69, un fonctionnaire peut : c) communiquer à une personne un renseignement confidentiel qu’il est raisonnable de considérer comme nécessaire à l’application ou à l’exécution d’une loi fiscale à son égard; Il prétend que cette disposition doit avoir effet puisque l’organisme «est en train d’appliquer une loi fiscale» à l’égard de la demanderesse. À son avis également, la Commission doit réviser la discrétion exercée par le responsable de l’organisme qui s’est limité à appliquer l’article 69. Il reconnaît qu’aucun avis de cotisation n’est en preuve. Il soumet, en ce qui concerne les renseignements qui ont été extraits des 35 pages précitées, que ces renseignements concernent sa cliente puisqu’ils sont dans son dossier. Il soumet particulièrement que ces renseignements ne permettent pas nécessairement d’identifier un tiers. Le procureur de l’organisme réplique, en ce qui concerne l’article 69.0.1 invoqué par la demanderesse, qu’aucune cotisation n’est en preuve et qu’aucune preuve ne démontre que les renseignements en litige qui sont dans le dossier de vérification ont bel et bien été utilisés dans l’application d’une loi fiscale à l’égard de la demanderesse. Il soumet que la Commission doit respecter l’exercice de la discrétion prévue à l’article 69.0.1. Il rappelle à cet égard que l’organisme a communiqué certains des documents ou renseignements requis dans la demande d’accès.
99 19 94 6 Il soumet enfin que l’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu vise tout renseignement qui concerne ou qui vise un tiers, personne physique ou morale. DÉCISION : J’ai pris connaissance des documents qui m’ont été remis par l’organisme et qui incluent ou qui sont constitués des renseignements qui demeurent en litige. Je comprends que ces renseignements ont été obtenus dans l’application d’une loi fiscale, à des fins de vérification concernant les activités de la demanderesse. Le paragraphe c) de l’article 60.0.1 de la Loi sur le ministère du Revenu: Cette disposition se lit comme suit : 69.0.1 Malgré l’article 69, un fonctionnaire peut : c) communiquer à une personne un renseignement confidentiel qu’il est raisonnable de considérer comme nécessaire à l’application ou à l’exécution d’une loi fiscale à son égard; Elle habilite un fonctionnaire à communiquer à une personne, malgré toutes les restrictions relatives à la communication de renseignements prévues par l’article 69, tout renseignement confidentiel qu’il est raisonnable de considérer comme nécessaire à l’application ou à l’exécution d’une loi fiscale à l’égard de cette personne. Je comprends, dans le contexte qui m’est présenté, que le responsable a jugé, lorsqu’il a pris sa décision, que les renseignements qui sont en litige n’étaient pas de ceux que vise ce paragraphe c) et qu’il a estimé que les restrictions relatives à la
99 19 94 7 communication de renseignements prévues par l’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu s’appliquaient entre autres. Je dois souligner qu’aucune preuve relative à l’application du paragraphe c) précité, invoqué par la demanderesse, n’a été faite devant la Commission. Je signale également que la Commission révise, à la requête de la demanderesse, la décision du responsable. Si cette requête était complètement accueillie, le droit d’accès de la demanderesse ne serait conséquemment plus restreint. L’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu : Je comprends que l’accès aux renseignements en litige a notamment été refusé en vertu de l’article 69 de la loi précitée dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit : 69. Sont confidentiels tous renseignements obtenus dans l’application d’une loi fiscale. Il est interdit à tout fonctionnaire de faire usage d’un tel renseignement à une fin non prévue par la loi, de communiquer ou de permettre que soit communiqué à une personne qui n’y a pas légalement droit un tel renseignement ou de permettre à une telle personne de prendre connaissance d’un document contenant un tel renseignement ou d’y avoir accès. Toutefois, un tel renseignement confidentiel peut, à la demande écrite de la personne qui a fourni le renseignement ou de son représentant autorisé, être communiqué à une personne désignée dans la demande. De plus, un fonctionnaire peut communiquer à un contribuable tout renseignement confidentiel qui le concerne. Il ne peut cependant divulguer au contribuable l’existence d’un renseignement qui a été fourni à son sujet par un tiers ni communiquer au contribuable ce renseignement si, ce faisant, il permet
99 19 94 8 d’identifier le tiers, sauf si ce dernier a consenti par écrit à ce que ce renseignement et sa provenance soient divulgués au contribuable. … N’est pas confidentiel le renseignement qui ne révèle pas, même indirectement, l’identité de la personne concernée ou qui ne peut y être associé. Les renseignements extraits des 35 pages qui ont été communiquées sont des noms de tiers, personnes physiques et morales, ainsi que des renseignements fournis par ces tiers et les concernant; ces renseignements identifient d’eux-mêmes les tiers qui les ont fournis et ils concernent ces tiers; ils ne concernent pas, de toute évidence, les activités de la demanderesse mais ils sont obtenus, analysés et comparés dans le but de permettre à l’organisme de conclure dans le cadre de la vérification effectuée concernant la demanderesse. Ces renseignements sont obtenus dans l’application d’une loi fiscale; ils sont, en principe, confidentiels. Ils ne concernent pas la demanderesse; ils sont fournis par les tiers à leur propre sujet. L’ensemble des documents qui m’a été remis me convainc par ailleurs que le dernier alinéa de l’article 69 ne s’applique pas. La décision du responsable concernant ces renseignements n’a pas à être révisée. Les 158 pages entièrement soustraites à l’accès sont essentiellement constituées de renseignements qui identifient et qui concernent de nombreux tiers, personnes physiques et morales, et qui ont été obtenus, comme l’a affirmé le témoin, par l’organisme, auprès de la Société d’assurance automobile du Québec, aux fins d’une vérification relative aux activités de la demanderesse. Ces 158 pages ne comprennent que quelques renseignements concernant la demanderesse, renseignements que le responsable a clairement identifiés.
99 19 94 9 Ces nombreux renseignements sont obtenus dans l’application d’une loi fiscale; ils sont, en principe, confidentiels. Sauf quelques exceptions, ils ne concernent pas la demanderesse et ils sont fournis par des tiers à leur propre sujet. La demanderesse n’y a pas droit, exception faite des renseignements qui la concernent et qui peuvent lui être communiqués en vertu de l’article 69 précité. La décision du responsable n’a pas à être révisée sauf en ce qui a trait aux renseignements qui concernent la demanderesse et que le responsable a identifiés. Les 37 pages restantes sont constituées de renseignements fournis par des tiers et concernant des tiers identifiés et identifiables, personnes morales et physiques; ces renseignements ne concernent pas, de toute évidence, les activités de la demanderesse mais ils sont obtenus, analysés et comparés dans le but de permettre à l’organisme de conclure dans le cadre de la vérification effectuée concernant la demanderesse. Ces renseignements sont obtenus dans l’application d’une loi fiscale; ils sont, en principe, confidentiels. Ils sont fournis par les tiers à leur propre sujet. L’ensemble des documents qui m’a été remis me convainc que le dernier alinéa de l’article 69 ne s’applique pas. La décision du responsable concernant ces renseignements n’a pas à être révisée. Je suis enfin d’avis que la détention, dans le dossier de la demanderesse, de renseignements non visés par le paragraphe c) de l’article 69.0.1 précité ne confère pas de droit d’accès à la demanderesse. La preuve démontrant que l’article 69 de la Loi sur le ministère du Revenu s’applique, il n’est pas nécessaire de décider relativement à l’application des articles 53, 54 et 88 de la Loi sur l’accès.
99 19 94 10 PAR CES MOTIFS, la Commission CONSTATE que les parties se sont entendues en ce qui a trait aux renseignements relatifs à la TPS; ORDONNE à l’organisme de communiquer à la demanderesse les renseignements qui la concernent et qui ont été fournis par la Société d’assurance automobile du Québec à son sujet; REJETTE la demande quant au reste. HÉLÈNE GRENIER Commissaire Québec, le 4 octobre 2001.
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