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PP 97 17 62 BANVILLE, Pierre PP 98 08 70 Plaignant c. HYDRO-QUÉBEC Organisme-intimé -et-SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE, section locale 1500 Intervenant LA PLAINTE Dossier 97 17 62 Le 24 septembre 1994, le procureur du plaignant dépose à la Commission une plainte au nom de son client au motif que l'organisme-intimé: a) détient des lettres de mesures disciplinaires concernant le plaignant qui sont périmées et qui, de ce fait, ne devaient pas être consignées à son dossier d'employé; et b) que l'organisme-intimé a conséquemment communiqué illégalement les lettres au procureur de deux de ses collègues de travail dans le cadre d'une poursuite devant les tribunaux civils que le plaignant a intenté contre ces derniers. Dossier 98 08 70 Le 22 mai 1998, le plaignant allègue que l'organisme-intimé a communiqué sans son consentement des renseignements contenus à son dossier d'employé au docteur Jean-Pierre Berthiaume. L'enquête débute le 12 juin 2000 et se poursuit le lendemain 13 juin. Situation relative à la plainte Les parties conviennent de réunir les dossiers 97 17 62 et 98 08 70. Me Louis Legault, avocat au Service juridique de l'organisme-intimé, fait part que le plaignant a intenté un recours en diffamation en 1994 contre 2 employés de l'organisme-intimé. Il affirme que son intervention débute au moment le chef de l'équipe des litiges, Me Richard Paquette, lui a transmis pour étude 2 mises en demeure, datées du 9 novembre 1993, que le plaignant a adressées chez l'organisme-intimé à l'attention de M. Michel Charrette, contremaître, et M. Gilles Boucher, employé syndiqué qui agit à l'occasion comme contremaître (pièce O-1, en liasse). Il signale qu'un contremaître est un cadre de l'organisme-intimé et qu'il s'agit d'une fonction de même niveau que celui de chef de section. Il identifie le document intitulé "Politique concernant l'indemnisation des employés d'Hydro-Québec" en vigueur au 1 er avril 1992 (pièce O-2, en liasse). Il certifie que l'organisme doit, en vertu du point c) de cette politique, prendre fait et cause pour un employé lorsque celui-ci est poursuivi pour des actes posés dans le cadre de ses fonctions.
"C) Les cadres de direction, les cadres intermédiaires, les cadres de maîtrise et le personnel d'Hydro-Québec. Sous réserve des dispositions du paragraphe B) ci-dessus, dans le cas la responsabilité civile d'un employé d'Hydro-Québec est engagée ou dans le cas un employé fait l'objet de poursuite civile ou pénale à la suite d'acte posé dans l'exercice et les limites de ses fonctions, Hydro-Québec prend fait et cause pour cet employé sauf en cas de faute volontaire ou intentionnelle de sa part ou d'infraction au Code de sécurité routière ou aux règlements municipaux de la circulation. Lorsqu'une telle poursuite entraîne pour l'employé une condamnation de nature pécuniaire, celle-ci est défrayée par Hydro-Québec sauf en cas de faute volontaire ou intentionnelle dudit employé ou d'infraction au Code de sécurité routière ou aux règlements municipaux de la circulation. Hydro-Québec renonce à tout recours en dommages et intérêts contre un employé pour tout dommage causé à Hydro-Québec par un tel employé par suite d'une faute commise dans l'exercice et les limites de ses fonctions, sauf en cas de faute volontaire ou intentionnelle dudit employé. Les dispositions des trois paragraphes ci-dessus s'appliquent aux membres du Comité de retraite d'Hydro-Québec pour les actes posés dans l'exercice et les limites de leurs fonctions comme s'ils étaient du personnel d'Hydro-Québec." Me Legault explique que le Service juridique détermine d'abord si les personnes poursuivies agissaient bien dans le cadre de leurs fonctions et que la décision de prendre fait et cause pour un employé est autorisée par un vice-président de l'organisme-intimé. Dans le présent cas, il a informé le 31 janvier 1994 le procureur du plaignant, Me Alain Régnier, qu'il représentait les 2 membres du personnel de l'organisme-intimé (pièce O-3, en liasse). Il atteste que le procureur du plaignant lui a signifié que le plaignant n'entendait pas poursuivre l'organisme-intimé et, par la même occasion, lui a transmis, le 3 avril suivant, copie du bref et de la déclaration de son client contre messieurs Boucher et Charrette (pièce O-4). Il reconnaît la déclaration du plaignant datée du 3 avril 1994 (pièce O-5) et affirme que celle-ci traite d'événements qui se sont produits dans le milieu du travail. Il affirme également qu'on lui a donné et confirmé le mandat de représenter messieurs Boucher et Charrette (pièces O-6, O-7, O-8 et O-10). Il spécifie avoir fait parvenir sa comparution au procureur du plaignant, le 13 avril 1994, avec la mention suivante (pièce O-9): "(...) nous tenons à vous souligner que nous avons demandé à nos clients de nous faire parvenir leur dossier d'enquête, et sur réception nous verrons à vous faire part de notre position." Me Legault soutient qu'il a fait des démarches auprès de M. André Primeau de la Direction des
ressources humaines de l'organisme-intimé avant le 13 avril 1994. Il a demandé à M. Primeau les renseignements qui avaient un lien avec le recours intenté par le plaignant contre les 2 employés dont, notamment, les mesures disciplinaires ou les absences au travail du plaignant. Plus spécifiquement, il a réclamé tous les documents détenus par l'organisme-intimé en lien avec les événements du 4 mai 1993. Il confirme avoir obtenu les documents suivants: Pièce O-11.1: Lettre du 25 juin 1993. Il s'agit d'une lettre expédiée par M. Primeau, chef de division des ressources humaines, à M. Pierre Burelle, directeur des griefs, section locale 1500, qui traite du dossier de congédiement du plaignant. Me Legault explique que le 4 mai 1993 le plaignant ainsi que messieurs Boucher et Charrette ont eu un entretien dans une roulotte de chantier et que ce dernier événement a entraîné le congédiement du plaignant. Pièce O-11.2: lettre du 29 juillet 1993. Le document confirme la tenue d'une audition pour un grief le 31 août 1993. Pièces O-11.3 et O-11.4: règlement de grief entre l'organisme et le syndicat concernant le plaignant. Ces ententes transforment le congédiement du plaignant en une suspension de 6 mois de travail. Me Legault fait valoir que la contestation du congédiement par le plaignant, le recours en diffamation et les ententes sur le congédiement sont intimement liés entre eux. Il confirme que les ententes ne contiennent pas la signature du plaignant. Pièces O-11.5 à 11.10: Il s'agit de 6 mesures disciplinaires au sujet du demandeur que M. Primeau a transmises au procureur de l'organisme-intimé concernant le comportement au travail du plaignant. La pièce O-11.6 est relative à une absence sans permission, la pièce O-11.7 réfère à des menaces et la pièce O-11.8 à de l'insubordination. Me Legault affirme que tous ces documents étaient pertinents dans le cadre du recours pris par le plaignant aux fins d'assurer la défense de l'organisme-intimé. Il signale que le plaignant reproche à messieurs Boucher et Charrette de l'avoir diffamé et qu'il se devait de valider le comportement du plaignant dans le dossier. Pièce O-11.11 et O-11.12: Le grief de congédiement et la lettre datée du 14 mai 1993 qui signifie au plaignant son congédiement. Pièce O-11.13 à 11.16: Déclarations statutaires de messieurs Boucher, Charrette, Emarden et Poirier. Pièce O-11.17: Notes manuscrites qui rapportent les événements survenus le 3 mai 1993 et qui ont été prises par M. Vigeant lors de la rencontre avec M. Charrette le 11 mai 1993. Pièce O-12, en liasse: Grief du plaignant du 12 mai 1994. Il s'agit d'un grief du plaignant qui conteste la décision de l'organisme-intimé de ne pas prendre fait et cause pour lui lors d'une poursuite au criminel le concernant. Le grief fait le lien entre les récriminations du plaignant et son recours en Cour supérieure. Pièce O-13:
L'organisme a rejeté le 16 mai 1994 la demande du plaignant de prendre fait et cause pour lui. Me Legault poursuit son témoignage et mentionne qu'il a utilisé les documents (les pièces O-11 à O-13) pour préparer la défense de messieurs Boucher et Charrette, particulièrement lors de l'interrogatoire avant défense. Il rapporte que les mesures disciplinaires ont servi à confronter le plaignant (pièce O-14). Il informe la Commission que la Cour supérieure a rejeté le 5 novembre 1998 l'action du plaignant (pièce O-15). Il note que cette dernière décision n'a pas été portée en appel. Me Legault révèle avoir demandé au procureur du plaignant que ce dernier soit expertisé par le docteur Jean-Pierre Berthiaume et ce, en raison de l'impact psychologique et financier qui a été allégué dans déclaration (allégué 20 de la pièce O-5). L'expertise psychiatrique a été réalisée de consentement (pièce O-16 à O-18). Il indique que l'expertise avait pour objectif d'évaluer l'ampleur des dommages du plaignant suite aux événements allégués par ce dernier et, également, d'obtenir une opinion objective. Interrogé par le plaignant, Me Legault lui répond que le juge au procès n'a pas retenu le rapport psychiatrique du docteur Berthiaume parce qu'il aurait préféré recevoir une preuve d'ordre psychologique plutôt qu'une évaluation psychiatrique. Il confirme avoir obtenu de M. Primeau des renseignements concernant le plaignant et se rapportant aux procédures et non pas le dossier d'employé du plaignant. Interrogé par le procureur du tiers, Me Legault relate qu'il travaille à titre d'avocat exclusivement pour le Service juridique de l'organisme-intimé. Il mentionne que l'organisme-intimé n'a pas présenté à la Cour supérieure de requête en intervention. Il affirme que les documents qui font l'objet de la plainte lui ont été donnés par l'organisme-intimé, à titre de procureur de celui-ci, et non par M. Charrette ou M. Boucher. Il fait part qu'il a reçu les notes au sujet des mesures disciplinaires prises contre le plaignant mais qu'il n'a pas eu les griefs ni le résultats de ces derniers, sauf en ce qui concerne le remboursement pour frais. Il atteste que le docteur Guérin n'a pu réaliser l'expertise à la place du docteur Berthiaume parce qu'il avait déjà réalisé une expertise du plaignant (pièce O-17). Il affirme que le docteur Berthiaume n'a pas eu accès aux renseignements détenus par le docteur Guérin. Le plaignant reconnaît avoir été l'objet de 6 mesures disciplinaires (pièces O-11, O-12 et O-18) et qu'elles ont été réglées à 60% en sa faveur. Il certifie qu'il n'a pas poursuivi l'organisme-intimé mais qu'il a fait parvenir chez l'organisme-intimé les mises en demeure à messieurs Boucher et Charrette. Il avance que M. Boucher, au moment des événements de mai 1993, était un employé syndiqué et non un cadre de l'organisme-intimé. Il soumet que Me Legault a reconnu lors de l'interrogatoire avant défense qu'il n'était pas le procureur de l'organisme-intimé mais bien l'avocat de messieurs Boucher et Charrette. Il souligne que Me Legault a même indiqué lors de l'interrogatoire qu'il ne pouvait obtenir copie de son dossier d'employé (pièce P-1, en liasse). Le plaignant soumet que messieurs Boucher et Charrette ont admis qu'ils ne le connaissaient pas avant qu'il soit affecté au secteur de Mont-Laurier, lieu des événements de mai 1993, et que son dossier au secteur de la région de Laval ne leur était pas connu. Il réitère que ses mises en demeure (pièce O-1) ne visaient pas l'organisme-intimé et qu'il ne poursuivait pas ce dernier. Interrogé par le procureur de l'organisme-intimé, le plaignant allègue qu'il a rencontré le comité des relations de travail pour leur signifier que le conflit qu'il l'opposait à M. Charrette et Boucher était personnel. Il souligne qu'il n'a pas été condamné au criminel. Position des parties Le plaignant prétend qu'il n'a pas autorisé l'organisme-intimé à communiquer les renseignements
contenus à son dossier d'employé et que le procureur de messieurs Boucher et Charrette n'agissait pas comme procureur de l'organisme-intimé contrevenant ainsi à l'article 59 de la loi. 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: 1 o au procureur de cet organisme si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi que cet organisme est chargé d'appliquer, ou au Procureur général si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 2 o au procureur de cet organisme, ou au Procureur général lorsqu'il agit comme procureur de cet organisme, si le renseignement est requis aux fins d'une procédure judiciaire autre qu'une procédure visée dans le paragraphe 1 o ; 3 o à une personne qui, en vertu de la loi, est chargée de prévenir, détecter ou réprimer le crime ou les infractions aux lois, si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 4 o à une personne à qui cette communication doit être faite en raison d'une situation d'urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de la personne concernée; 5 o à une personne qui est autorisée par la Commission d'accès à l'information, conformément à l'article 125, à utiliser ce renseignement à des fins d'étude, de recherche ou de statistique; 6 o (paragraphe abrogé); 7 o (paragraphe abrogé); 8 o à une personne ou à un organisme, conformément aux articles 61, 67, 67.1, 67.2, 68 et 68.1. 9 o à une personne impliquée dans un événement ayant fait l'objet d'un rapport par un corps de police, lorsqu'il s'agit d'un renseignement sur l'identité de toute autre personne qui a été impliquée dans cet événement, sauf s'il s'agit d'un témoin, d'un dénonciateur ou d'une personne dont la santé ou la sécurité serait susceptible d'être mise en péril par la communication d'un tel renseignement. Le plaignant argue que le code de conduite de l'organisme-intimé prévoit que soit conservés de façon
confidentielles les renseignements nominatifs et prohibe la communication des documents qui sont en litige. Il réclame de l'organisme-intimé de respecter La loi sur l'accès. Le procureur de l'organisme-intimé soumet que son client avait le droit de communiquer au procureur, responsable de la défense de MM. Charrette et Boucher, les mesures disciplinaires concernant le plaignant, l'expertise du docteur Berthiaume et, de ce fait, de les produire à la Cour supérieure. Au soutien de ses prétentions, il invoque le 2 ième paragraphe de l'article 59, l'article 62 et l'article 67.2 de la loi. 62. Un renseignement nominatif est accessible, sans le consentement de la personne concernée, à toute personne qui a qualité pour le recevoir au sein d'un organisme public lorsque ce renseignement est nécessaire à l'exercice de ses fonctions. En outre, cette personne doit appartenir à l'une des catégories de personnes visées au paragraphe 4 o du deuxième alinéa de l'article 76 ou au paragraphe 5 o du premier alinéa de l'article 81. 67.2 Un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement nominatif à toute personne ou organisme si cette communication est nécessaire à l'exercice d'un mandat confié par l'organisme public à cette personne ou à cet organisme. Dans ce cas, l'organisme public doit: 1 o confier ce mandat par écrit; 2 o indiquer, dans ce mandat, les dispositions de la présente loi qui s'appliquent au renseignement qui lui a été communiqué ainsi que les mesures qu'il doit prendre pour que ce renseignement ne soit utilisé que dans l'exercice de son mandat et pour qu'il ne le conserve pas après son expiration. Le deuxième alinéa ne s'applique pas aux membres des corporations professionnelles visées à l'annexe I du Code des professions (L.R.Q., chapitre C-26) et qui sont tenus au secret professionnel. Il fait valoir que le recours en diffamation du plaignant vise un employé cadre et un cadre intermédiaire de l'organisme-intimé pour des événements survenus sur un chantier dans le cadre du travail. Il note que le plaignant a réclamé de MM. Boucher et Charrette la perte de 6 mois de salaire en compensation des préjudices qu'il a subis (pièce O-5, allégués 21b) et 22 de la déclaration). Le procureur soumet que l'organisme doit respecter son engagement contractuel de prendre fait et cause pour un employé lorsque celui-ci est poursuivi en justice pour des actes accomplis dans le cadre de son travail (pièce O-2) (1) . Prendre fait et cause, selon le procureur, n'est pas seulement de fournir à MM. Charrette et Boucher un avocat mais aussi d'être partie au litige. Il réfère aux dossiers en matière
d'assurance pour justifier ses prétentions. Ainsi, il expose qu'en matière d'assurance, selon l'article 2503 du Code civil du Québec (2) , le procureur a un double mandat (3) . Il soumet aussi que l'organisme-intimé s'expose à des poursuites en dommages et intérêts s'il refuse de s'exécuter (4) . 2503. L'assureur est tenu de prendre fait et cause pour toute personne qui a droit au bénéfice de l'assurance et d'assumer sa défense dans toute action dirigée contre elle. Les frais et dépens qui résultent des actions contre l'assuré, y compris ceux de la défense, ainsi que les intérêts sur le montant de l'assurance, sont à la charge de l'assureur, en plus du montant d'assurance. Le procureur soumet que les allégués 6, 3, 14 et 15 de la poursuite en diffamation du plaignant justifiaient l'avocat de MM. Charrette et Boucher de vérifier auprès de l'organisme-intimé les motifs du congédiement, les griefs relatifs à l'absentéisme et les déclarations faites à la police. "6. Plus spécifiquement, mais non limitativement, le défendeur Boucher, a fait circuler la rumeur voulant que votre demandeur fraudait son employeur en abusant de journées de congés pour maladie; 3. Bien avant le 4 mai 1993, les défendeurs avaient colporté des propos diffamatoires à l'endroit de votre demandeur, et ce auprès de plusieurs autres collègues de travail; 14. En effet, le défendeur Charrette, en position d'autorité vis-à-vis le demandeur, a par la suite inventé un "nouvel incident" à inscrire au dossier disciplinaire de votre demandeur; 15. Le défendeur Charrette a ainsi initié un dossier disciplinaire interne à votre demandeur, et ce sur la foi des faussetés qu'il a relatées;" Le procureur mentionne que la Cour supérieure a abondamment traité de l'absence au travail du plaignant et que tous les documents actuellement en litige ont été admis en preuve par la Cour. Le procureur prétend que l'avocat des 2 employés-défendeurs est aussi un employé de l'organisme-intimé et qu'il a reçu le mandat de les représenter et d'assurer leur défense. Cette situation, soutient-il, habilite le procureur du Service juridique à recevoir les documents d'un autre service de l'organisme-intimé en vertu de l'article 62 de la loi. Il ajoute que les griefs sont d'ailleurs détenus par le Service juridique et lui ont été nécessaires dans l'attribution de ses fonctions d'avocat. Il note que le procureur demeure soumis à la confidentialité des renseignements qu'il reçoit. Selon la directive de la Commission, il soumet que le 4 ième paragraphe de l'article 76 ne s'applique pas dans le présent cas, les avocats jouissent du même droit que les dirigeants de l'organisme-intimé.
76. L'établissement d'un fichier doit faire l'objet d'une déclaration à la Commission. (...) 4 o les catégories de personnes qui auront accès au fichier dans l'exercice de leurs fonctions; (...) Elle doit être faite conformément aux règles établies par la Commission. Le procureur soutient également qu'en vertu de l'article 67.2 de la loi, l'avocat des 2 défendeurs pouvait communiquer à la Cour les documents qui font l'objet du litige. Plus précisément, il avance que le mandat donné au docteur Berthiaume dans le cadre du recours du plaignant autorise le procureur à communiquer à la cour l'expertise selon l'article 67.2 de la loi. Il indique que le médecin n'a obtenu que les renseignements nécessaires pour son expertise (5) . Le procureur de l'intervenant soumet qu'il ne conteste pas les faits qui ont donné lieu à la plainte. Il reproche cependant à l'organisme-intimé d'avoir transmis à l'avocat des deux défendeurs les documents en litige. Il soutient que l'organisme-intimé a choisi de fournir un avocat aux défendeurs mais que cet avocat n'a jamais été le procureur de l'organisme. Il prétend que l'organisme-intimé, tout comme un assureur, doit éviter d'être en conflit d'intérêts. Il fait valoir que l'organisme n'a pas respecté le principe de confidentialité des renseignements nominatifs énoncé à l'article 53 et au 1 er alinéa de l'article 59 de la loi (6) . 53. Les renseignements nominatifs sont confidentiels sauf dans les cas suivants: 1 o leur divulgation est autorisée par la personne qu'ils concernent; si cette personne est mineure, l'autorisation peut également être donnée par le titulaire de l'autorité parentale; 2 o ils portent sur un renseignement obtenu dans l'exercice d'une fonction d'adjudication par un organisme public exerçant des fonctions quasi judiciaires; ils demeurent cependant confidentiels si l'organisme les a obtenus alors qu'il siégeait à huis-clos ou s'ils sont visés par une ordonnance de non-divulgation, de non-publication ou de non-diffusion. Le procureur allègue qu'il ne doute pas de l'utilité que peuvent avoir les renseignements en litige dans le cadre d'un débat devant la Cour mais il est d'avis que l'avocat des défendeurs n'était pas habilité à les rendre public. Il fait part que les articles 62 et 67 de la loi sont des exceptions au principe de la confidentialité des renseignements nominatifs et qu'ils doivent recevoir une interprétation restrictive (7) . Il expose que le 2 ième alinéa de l'article 62 de la loi vise la communication à l'interne chez l'organisme et non, comme dans le présent cas, à les rendre publics en les déposant à la Cour. L'organisme devait, argue-t-il, démontré que Me Legault était l'une des personnes prévues au 4 ième paragraphe de l'article 76 de la
loi. Ce qui, selon lui, n'a pas été fait. 76. L'établissement d'un fichier doit faire l'objet d'une déclaration à la Commission. La déclaration doit contenir les indications suivantes: (...) 4 o les catégories de personnes qui auront accès au fichier dans l'exercice de leurs fonctions; (...) Elle doit être faite conformément aux règles établies par la Commission. Le procureur manifeste qu'il est incohérent d'invoquer à la fois l'article 59 et l'article 62 de la loi. Il souligne que Me Legault agissait comme procureur de MM. Boucher et Charrette et non comme procureur de l'organisme-intimé ou, encore, comme un employé de celui-ci. Il avance que l'article 59 est celui qui concerne directement la présente situation et qui prévoit, à son 2 ième paragraphe, une exception au principe de la confidentialité en ce qui concerne le procureur d'un organisme. La distinction dans le présent dossier, note-t-il, est que l'avocat représente les défendeurs devant un tribunal civil et non l'organisme-intimé. Il insiste, l'organisme-intimé n'a jamais été partie au litige et il n'a rien à voir avec un conflit personnel. Il prétend que même si l'organisme-intimé devait assumer la défense de MM. Boucher et Charrette, il n'était pas pour autant partie au litige, notamment parce que l'organisme-intimé a choisi de ne pas présenter de requête en intervention au tribunal. Le procureur ne partage pas les prétentions à l'effet que l'organisme-intimé avait une obligation contractuelle envers MM. Boucher et Charrette: Est-ce que MM. Boucher et Charrette étaient dans l'exercice de leurs fonctions lorsqu'ils traitaient le plaignant de toute sorte de noms? Est-ce que des propos diffamatoires sont des activités couvertes dans le cadre des fonctions d'un employé ? Le procureur énonce que l'intérêt économique ou financier de l'organisme-intimé ne constitue pas un motif justifiant d'être reconnu comme intervenant par la Cour (8) . Il relève de l'affaire Soterm (9) que la Cour a statué que l'assureur n'était pas partie au litige parce qu"il n'avait pas un intérêt au litige principal, par opposition à un intérêt de nature différente et personnel à l'intervenant. Il fait remarquer que s'il respecte la théorie soumise par l'organisme-intimé il devra, comme procureur du syndicat, envoyer ses honoraires à l'organisme-initimé parce qu'il agit dans le cadre d'un conflit de travail. Le procureur indique que l'article 67.2 de la loi s'applique aux médecins (10) et non aux avocats et que, de toute façon, l'organisme-intimé n'a pas l'intérêt requis. De plus, il soumet qu'il est difficile de soulever l'article 59 et l'article 67.2 de la loi parce que ce dernier article est une exception plus large que celle prévue à l'article 59. Il ajoute que le code de procédure civile, d'application générale, n'écarte pas la Loi sur l'accès aux termes de l'article 168 de la loi. Il signale que l'organisme-intimé doit respecter la Loi sur l'accès tout comme l'envoi d'un subpeona ne libère pas l'expéditeur du respect de l'article 53 de la loi.
168. Les dispositions de la présente loi prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la présente loi. Le procureur de l'organisme-intimé réplique que son client avait l'obligation d'assurer la défense de M. Boucher ou de M. Charrette en raison des allégués de la déclaration (11) . Il spécifie que la poursuite du demandeur contre MM. Boucher et Charrette pour diffamation est reliée à des événements qui se sont produits lorsque ces personnes étaient dans l'exercice de leurs fonctions (12) . Il avance que Me Legault a un double mandat: agir pour l'organisme-intimé et pour les employés comme le mentionne la Cour dans l'affaire Zurich (13) . Il spécifie que la décision rendue par la Cour d'appel dans l'affaire Soterm (14) a été renversée par celle rendue par cette dernière Cour dans l'affaire Michaud (15) . Dans cette dernière décision, la Cour d'appel permet dorénavant à ce qu'une partie intervienne de façon conservatrice lorsqu'il y a un intérêt vraisemblable au litige. Le procureur prétend qu'il peut y avoir chevauchement entre les articles 59, 62 ou 67 de la loi comme le rapportent les auteurs (16) . Il soumet que Me Legault devait produire à la Cour tous les documents pertinents en vertu des prescriptions énoncées aux articles 331.1 et 331.8 du code de procédure civil. Il indique que ces dispositions enclenchent l'article 67 de la loi parce que l'organisme-intimé est une partie au litige. 331.1. La partie qui entend invoquer lors de l'audience une pièce en sa possession, qu'il s'agisse d'un élément matériel de preuve ou d'un document, y compris l'ensemble ou un extrait d'un témoignage, un rapport d'expertise ou un autre document visé aux articles 294.1, 398.1, 398.2 et 402.1, doit le communiquer à toute autre partie à l'instance, suivant les dispositions de la présente section. 371.8. Dans les instances introduites par une déclaration, les pièces doivent avoir été communiquées au plus tard 60 jours après la signification de l'avis d'inscription par l'une des parties ou, lorsque les règles de pratique prévoient la délivrance d'un certificat d,état de cause, au plus tard 60 jours après la signification de la déclaration de mise au rôle d'audience par la partie qui y procède en premier lieu, à défaut de quoi elles ne peuvent être produites qu'avec l'autorisation du tribunal. Dans les instances introduites par une requête ainsi que les demandes présentées en cours d'instances, les pièces doivent avoir été communiquées suivant les dispositions de l'article 331.6, à défaut de quoi elles ne peuvent être produites qu'avec l'autorisation du tribunal. Comme les notes sténographiques déposées par le plaignant (pièce D-12, pp. 24 et 25) le révèlent, note le procureur, le juge a considéré que les documents en litige étaient pertinents et la Commission, dans les circonstances, ne peut réviser cette décision du tribunal (17) . Il spécifie que le régime de la loi sur l'accès ne s'applique pas aux tribunaux et que la Loi sur l'accès ne peut empêcher un tribunal de se prononcer sur les documents. Le procureur soutient que les directives de la Commission dispensent à certains membres du personnel d'un organisme, comme un avocat, et ce de façon ponctuelle, d'être inscrit comme le prévoit
le 2 ième alinéa de l'article 62. Est-ce que l'article 67.2 peut élargir la portée de l'article 62 ou 59 de la loi ? Le procureur soumet que la loi n'est pas limitative et qu'il suffit que les conditions d'application de l'un ou l'autre des articles soient présentes pour que la restriction puisse s'appliquer (18) . Le procureur réitère que Me Legault avait deux chapeaux: il représentait les intérêts des défendeurs et de l'organisme-intimé. Il termine en soulignant que le rapport du docteur Berthiaume a été fait à la demande de Me Legault et que ce dernier a respecté les règles de déontologie (19) . Le procureur de l'intervenant intercède de nouveau pour soutenir que dans l'affaire Zurich, la Cour d'appel n'avait pas le choix d'autoriser l'assureur à prendre fait et cause pour l'assuré en raison du texte rigoureux du contrat d'assurance (20) . Au sujet de l'article 62, le procureur maintient que Me Legault doit être considéré comme un avocat de l'extérieur de l'organisme-intimé qui a eu le mandat de représenter M. Boucher et M. Charrette et non l'organisme-initmé. Il argue que l'organisme-intimé n'a aucun lien de droit avec le litige opposant le plaignant et les défendeurs. Comme il y a absence de comparution et d'intervention de la part de l'organisme-intimé en Cour supérieure, le 2 ième paragraphe de l'article 59 de la loi ne s'applique pas. Il soulève que l'organisme-intimé a confondu son rôle d'organisme public et celui de la défense de 2 de ses employés. Il conclut que la Commission peut relever du défaut l'organisme-initmé de ne pas avoir respecté l'article 62 de la loi mais qu'elle ne peut le faire rétroactivement. APPRÉCIATION Opinion de M es Michel Laporte et E. Roberto Iuticone : Il importe de rappeler que la Commission a, de façon constante et non équivoque, toujours spécifié qu'elle n'est pas habilitée à trancher un litige en matière civile, criminelle ou de relations de travail. La Commission n'a d'ailleurs pas à se substituer au décideur relevant d'un tribunal judiciaire ou quasi-judiciaire pour déterminer de l'admissibilité en preuve d'un document soumis à son attention. Il va de soi qu'il n'est pas de l'intention de la Commission d'aller plus avant sur ce sujet: la Cour supérieure a toute latitude pour décider de la recevabilité et de l'admissibilité en preuve de documents qui lui sont soumis conformément au code de procédure civile et, s'il y a lieu, de décider de leur caractère confidentiel ou non. La Commission signale également qu'elle ne se prononcera pas sur le caractère périmé ou non des lettres en litige car il y a absence de preuve sur ce sujet. La question pour la Commission est de décider si en vertu des articles 59, 62 et 67.2 de la Loi sur l'accès, l'organisme-intimé pouvait ou non communiquer les lettres disciplinaires qu'il détenait au dossier de son employé dans le cadre d'un recours en matière civile ? Il ne fait pas de doute que l'intention manifeste du plaignant depuis le début de son recours en diffamation contre MM. Boucher et Charrette était de ne pas poursuivre l'organisme-intimé. La lettre adressée par le procureur du plaignant le 3 avril 1994 (pièce O-4) au procureur des défendeurs et le témoignage livré lors de l'enquête par M. Banville nous en convainc facilement. La preuve révèle également que l'organisme-intimé n'a pas réclamé à la Cour supérieure d'être reconnu comme une partie intervenante devant cette Cour. Force est de constater que l'organisme-intimé n'est pas nommément désigné comme partie devant la Cour supérieure. Est-ce que l'organisme-intimé est tout de même partie au litige parce qu'il doit assurer la défense de 2 de ses employés ?
Nous notons de la poursuite du plaignant qu'elle ne vise pas l'organisme-intimé ni l'interprétation d'une disposition de la convention collective et qu'il ne s'agit pas d'un appel d'une décision rendue par un tribunal d'arbitrage en matière de relation de travail. Le plaignant poursuit MM. Boucher et Charrette en diffamation. De cette poursuite, la Commission reconnaît que l'organisme-intimé a exercé sa discrétion de respecter sa politique concernant l'indemnisation des employés (pièce O-2) et de prendre fait et cause pour les 2 employés poursuivis par le plaignant. D'ailleurs, selon les décisions soumises par l'organisme-intimé (21) , les tribunaux ont distingué entre l'obligation de défendre et l'obligation d'indemnisation. Appliqué à notre cas, le recours du plaignant contient des allégations qui, à sa face même, donne ouverture à l'obligation prévue à la politique de l'organisme-intimé et à l'indemnisation. L'organisme-intimé, selon sa politique, avait donc le devoir de défendre ses employés, à ses frais, dès le début de la poursuite. Toutefois, de l'ensemble des décisions soumises par les parties, aucune de celles-ci ne se rapporte, de fait, à la présente situation. Les décisions concernent un assuré couvert par une police d'assurance qui est poursuivi par une tierce partie et dont l'assureur doit assumer sa défense en raison de cette couverture d'assurance. L'intérêt de l'assureur est de respecter sa couverture d'assurance dans l'éventualité il serait appelé à verser une indemnité due en raison de cette couverture. La Commission comprend dans la présente enquête que l'organisme-intimé a mis en place une politique pour protéger ses employés poursuivis pour des actes accomplis dans le cadre de leur travail. L'intérêt de l'organisme-intimé est comme celle de l'assureur avec son assuré: il doit respecter son engagement de payer l'indemnité (sa couverture), de prendre fait et cause pour l'employé, de le défendre et voir à ses propres intérêts relatifs au paiement potentiel d'une indemnité. L'intérêt pour l'organisme-intimé est de respecter sa politique (le contrat d'assurance pour un assureur) qui ne doit pas être confondue avec les autres obligations ou fonctions de l'organisme-intimé, comme celles découlant d'être aussi l'employeur du plaignant. Dans notre dossier, nous avons une personne qui a le même employeur que les deux employés qu'il poursuit. L'organisme-intimé a prévu par sa politique concernant l'indemnisation de prendre fait et cause d'un employé poursuivi et condamnable potentiellement au paiement d'une indemnité. Nous sommes d'avis que l'organisme-intimé dans ce type de situation à comme finalité de couvrir le paiement de l'indemnité. L'intérêt de l'organisme-intimé est le respect de sa politique. Ce dernier n'agit pas en Cour supérieure comme l'employeur du plaignant ni comme l'employeur poursuivi par son employé mais comme l'entité qui a donné à ses employés une protection, une assurance, en cas de poursuite. Distinction importante qui amène la Commission à conclure que l'organisme-intimé comme le procureur des défendeurs doit veiller aux intérêts de l'un et l'autre au regard du recours spécifique dont ils font l'objet par le plaignant. Le recours civil du plaignant en diffamation prend sa source certes dans le milieu du travail mais n'est pas un recours en matière de relation de travail. Comme nous l'avons déjà mentionné, le procureur de l'organisme-intimé peut soumettre au tribunal toute preuve qui sera susceptible de défendre les intérêts de ses clients, sous réserve bien entendu de sa pertinence. Le code de procédure civile prévoit un amalgame de dispositions qui permet notamment des interrogatoires au préalable ou des assignations de témoins avec documents. Nous sommes d'avis que si le procureur de l'organisme-intimé voulait faire déposer par ce dernier des documents qu'il détenait comme employeur au sujet du plaignant, il n'avait qu'à assigner une personne responsable des ressources humaines pour les faire produire et ce, en présence de toutes les parties impliquées. Tel est selon nous la façon de ne pas faire entorse à la loi sur l'accès tout en respectant l'ensemble des autorités impliquées dans ce type de dossier.
La présente enquête nous a révélé l'existence d'un contentieux important entre les parties depuis de nombreuses années, dont le recours en diffamation. Nous avons constaté que les renseignements qui font l'objet de la plainte ont circulé au gré de plusieurs procédures de griefs. À notre connaissance, il s'agit d'un cas d'espèce. Situation qui ne doit pas nous faire oublier que la constitution d'un dossier pour une fin particulière ne peut pas servir à d'autres fins que celles pour lequel il est constitué. Ainsi, même si des renseignements peuvent être utiles, l'absence de relation employeur-employé, dans le présent dossier, n'autorisait pas l'organisme-intimé ou son procureur à utiliser le dossier d'employé du plaignant. Les articles 59 de la loi comme les articles 62 ou 67.2 ne peuvent donc justifier la communication par l'organisme-intimé au procureur des défendeurs de renseignements qui concernent le plaignant. Il a été reconnu par le procureur qui a assumé la défense de MM. Boucher et Charrette qu'il a obtenu de l'organisme-intimé copie des lettres disciplinaires concernant le plaignant et que celles-ci ont été déposées en preuve devant la Cour supérieure. Il n'a pas été contesté que l'expertise du docteur Berthiaume a été requise par le procureur des défendeurs le 23 juillet 1996 (pièce O-16) avec l'acquiescement du procureur du plaignant. Le procureur des défendeurs confirme par écrit le 19 février 1997 au docteur Berthiaume le mandat et lui remet une série de documents: les procédures, les interrogatoires au préalable, des documents provenant de l'organisme-intimé au sujet du grief du plaignant contestant son congédiement, les notes manuscrites de MM. Boucher et Charrette, des feuilles de temps du plaignant, les déclarations et documents issus des plaintes criminelles portées contre le plaignant. Dans l'un ou l'autre des cas, il n'y a aucun consentement du plaignant qui autorise l'organisme-intimé à communiquer au procureur des défendeurs ou au docteur Berthiaume les renseignements au sujet du défendeur contenus à son dossier d'employé. Opinion de M e Hélène Grenier : Je suis convaincue, à l'instar de mes collègues M e E. Roberto Iuticone et M e Michel Laporte, que la plainte est fondée. J'ajouterai, à l'appréciation de la preuve et des arguments qu'ils ont effectuée, les considérations suivantes : La preuve établit que le plaignant a intenté des procédures civiles devant la Cour supérieure contre deux employés de l'organisme-intimé, MM. Gilles Boucher et Michel Charette. La preuve établit que l'organisme-intimé a décidé d'appliquer, en faveur des défendeurs Boucher et Charrette et aux fins de ces procédures, sa politique concernant l'indemnisation de ses employés, ce qui impliquait que l'organisme-intimé : prenne fait et cause pour les défendeurs; paye le montant que les défendeurs pouvaient, le cas échéant, être personnellement condamnés à verser au plaignant; renonce à tout recours en dommages et intérêts contre les défendeurs en rapport avec les événements ayant donné lieu aux procédures intentées par le plaignant. La preuve établit qu'en raison des procédures intentées par le plaignant contre les défendeurs Boucher et Charrette et aux fins de l'application de cette politique en faveur des défendeurs, l'organisme-intimé a désigné un employé de son contentieux, M e Louis Legault, pour représenter les défendeurs en justice, pour s'occuper de leur affaire, pour les défendre, étant entendu que si le plaignant devait avoir gain de cause contre les défendeurs, l'organisme-intimé acquittait la somme devant lui être versée et renonçait à tout recours en dommages et intérêts contre les défendeurs.
La preuve établit que l'organisme-intimé a communiqué à M e Louis Legault, afin qu'il les utilise en vue de la préparation de la défense de MM. Boucher et Charrette et plus spécifiquement en vue de l'interrogatoire préalable, des renseignements nominatifs concernant le plaignant, renseignements que l'organisme-intimé détenait déjà, à d'autres fins, en sa qualité d'employeur du plaignant. La preuve établit que le plaignant n'a pas consenti à cette communication. La preuve établit que les défendeurs Boucher et Charrette, représentés par le procureur désigné par l'organisme-intimé, se sont, en cette qualité, portés demandeurs reconventionnels contre le plaignant et qu'ils ont, en cette même qualité, eu partiellement gain de cause. La preuve établit que l'organisme-intimé n'était nullement partie au litige opposant le plaignant et les défendeurs demandeurs reconventionnels en Cour supérieure. En exécutant, en faveur des défendeurs, son obligation de prendre fait et cause pour eux, l'organisme-intimé n'acquérait pas, pour autant, la qualité de partie au litige opposant personnellement les défendeurs au plaignant. Il en aurait été de même si l'organisme-intimé avait , en plus, en vertu de la même politique d'indemnisation, exécuter son obligation de défrayer le montant que les défendeurs auraient pu être condamnés à verser au plaignant au terme des procédures. L'exécution de ces obligations en faveur des défendeurs, complétée par la renonciation de l'organisme-intimé à intenter tout recours contre eux en rapport avec les procédures, n'a pas conféré à l'organisme-intimé la qualité ou le statut de partie au litige. M e Legault a agi comme procureur des défendeurs demandeurs reconventionnels, comme le démontre la preuve, non pas comme procureur de l'organisme-intimé. Le plaignant n'a pas, pour sa part, consenti à la communication des renseignements personnels le concernant, renseignements permettant aux défendeurs, ou à leur procureur, de préparer leur propre défense. Le 2 ième paragraphe du 2 ième alinéa de l'article 59 de la Loi sur l'accès, qui se lit comme suit, ne reçoit conséquemment pas application : 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement nominatif sans le consentement de la personne concernée. Toutefois, il peut communiquer un tel renseignement sans le consentement de cette personne, dans les cas et aux strictes conditions qui suivent: 1 o au procureur de cet organisme si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi que cet organisme est chargé d'appliquer, ou au Procureur général si le renseignement est requis aux fins d'une poursuite pour infraction à une loi applicable au Québec; 2 o au procureur de cet organisme, ou au Procureur général lorsqu'il agit comme procureur de cet organisme, si le renseignement est requis aux fins d'une procédure judiciaire autre qu'une procédure visée dans le paragraphe 1 o ; Le premier alinéa de l'article précité s'applique, cependant. Le procureur des défendeurs n'avait pas qualité pour recevoir les renseignements nominatifs qu'il a
demandés et auxquels accès lui a été donné par l'organisme-intimé pour être utilisés en vue de la préparation de la défense de MM. Boucher et Charrette, la défense de ces derniers n'étant pas la défense de l'organisme-intimé; l'article 62 de la Loi sur l'accès, qui se lit comme suit, ne reçoit conséquemment pas application puisque le procureur des défendeurs ne représentait pas l'organisme-intimé: 62. Un renseignement nominatif est accessible, sans le consentement de la personne concernée, à toute personne qui a qualité pour le recevoir au sein d'un organisme public lorsque ce renseignement est nécessaire à l'exercice de ses fonctions. En outre, cette personne doit appartenir à l'une des catégories de personnes visées au paragraphe 4 o du deuxième alinéa de l'article 76 ou au paragraphe 5 o du premier alinéa de l'article 81. L'organisme-intimé, qui n'était pas partie au litige opposant le plaignant à MM. Boucher et Charette, ne pouvait utiliser les renseignements qu'il détenait en propre aux fins de la préparation de la défense de MM. Boucher et Charrette; il ne pouvait conséquemment pas les communiquer à l'un de ses mandataires pour que celui-ci les utilise aux fins de la préparation de la défense de MM. Boucher et Charrette. L'article 67.2 ne reçoit pas application ici : 67.2 Un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement nominatif à toute personne ou organisme si cette communication est nécessaire à l'exercice d'un mandat confié par l'organisme public à cette personne ou à cet organisme. Dans ce cas, l'organisme public doit: 1 o confier ce mandat par écrit; 2 o indiquer, dans ce mandat, les dispositions de la présente loi qui s'appliquent au renseignement qui lui a été communiqué ainsi que les mesures qu'il doit prendre pour que ce renseignement ne soit utilisé que dans l'exercice de son mandat et pour qu'il ne le conserve pas après son expiration. Le deuxième alinéa ne s'applique pas aux membres des corporations professionnelles visées à l'annexe I du Code des professions (L.R.Q., chapitre C-26) et qui sont tenus au secret professionnel. La communication des documents ou renseignements rendus accessibles au représentant des défendeurs n'était possible que sur ordonnance du juge de la Cour supérieure qui était au dossier, en conformité avec le 3 ième paragraphe de l'article 171 de la Loi sur l'accès qui se lit comme suit :
171. Malgré les articles 168 et 169, la présente loi n'a pas pour effet de restreindre: 1 o l'exercice du droit d'accès d'une personne à un document résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le l er octobre 1982, à moins que l'exercice de ce droit ne porte atteinte à la protection des renseignements personnels; 2 o la protection des renseignements personnels ni l'exercice du droit d'accès d'une personne à un renseignement nominatif la concernant, résultant de l'application d'une autre loi ou d'une pratique établie avant le ler octobre 1982; 3 o la communication de documents ou de renseignements exigés par le Protecteur du citoyen ou par assignation, mandat ou ordonnance d'une personne ou d'un organisme ayant le pouvoir de contraindre à leur communication. Je terminerai en soulignant, également, que l'analogie qui a été établie entre l'organisme-intimé qui a pris fait et cause pour les défendeurs et un assureur qui prend fait et cause pour son assuré ne peut être soutenue en ce qui concerne la communication non autorisée de renseignements nominatifs : l'assureur ne prépare pas la cause de son assuré avec des renseignements nominatifs que l'assureur détient à d'autres fins concernant la partie qui s'oppose à son assuré; l'organisme-intimé a, pour sa part et sans autorisation du plaignant, donné aux défendeurs demandeurs reconventionnels, communication de renseignements nominatifs qu'il détenait déjà pour ses fins propres concernant le plaignant. DÉCISION POUR CES MOTIFS, la Commission CONSTATE que l'organisme-intimé a communiqué des renseignements nominatifs contenus au dossier d'employé du plaignant sans son autorisation pour des fins autres que celles en matière de relation de travail; RECOMMANDE à la direction des ressources humaines de l'organisme-intimé de respecter la directive de la Commission qui a été émise au sujet de la communication de renseignements nominatifs relative aux subpoenae duces-tecum; MICHEL LAPORTE Commissaire ROBERTO IUTICONE Commissaire Montréal, le 23 octobre 2000 HÉLÈNE GRENIER Commissaire Québec, le 30 octobre 2000 Procureur de l'organisme: Me Raymond Doray
1. Parizeau c Fonds d'assurance responsabilité du Barreau du Québec [1997] R.J.Q. 2184. L'alliance des professionnels et des professionnelles de la Ville de Québec c Fortin, décision arbitrale rendue le 30 juin 1998 par Me Denis Tremblay dans le dossier 98-08029; Ville de 2. Québec c Alliance des professionnels et des professionnelles de la Ville de Québec, décision rendue par la Cour supérieure le 8 octobre 1998 par l'honorable Jacques J. Lévesque dans le dossier 200-05-009908-984. 3. Zurich du Canada c Renaud [1996] R.J.Q. 2160; Ville de Fermont c Pelletier [1998] R.J.Q. 736. 4. Le groupe commerce c Gagné [1998] R.R.A. 701. Le médecin en tant qu'expert, aspects déontologique et réglementaire, janvier 1997, publication 5. du Collège des médecins du Québec. Noèl c CUM [1986] CAI 401; Winters c CUM [1987] CAI 390; Galipeau c MMSR [1989] CAI 6. 1;Le Soleil c Ministère de la justice [1993] CAI 228; Fédération des associations étudiantes du campus de l'université de Montréal c L'université de Montréal [1994] CAI 68. Noèl c CUM [1986] CAI 401; Winters c CUM [1987] CAI 390; Galipeau c MMSR [1989] CAI 1; LeSoleil c Ministère de la justice [1993] CAI 228;Bousseta c Commissaire à la déontologie 7. policière [1993] CAI 280; Fédération des associations étudiantes du campus de l'Université de Montréal c Université de Montréal [1994] CAI 68. Société Canada Trust c 145071 inc. [1992] R.D.J. 284; Parent c Garneau [1932] R.J.Q. 335; Dion c Laverdure [1978] R.P. 7; Lord c Centre communautaire juridique 8. Laurentides-Lanaudière [1988] R.J.Q. 575;Kowarsky c Procureur général du Québec [1988] R.D.J. 147. 9. Soterm inc c terminaux portuaires du Québec inc [1993] R.D.J. 549. Collège des médecins, le médecin en tant qu'expert, aspects déontologique et réglementaires, 10. janvier 1997. 11. Zurich du Canada, op. cit. note 3. St-Cyr c Syndicat des ouvriers du fer et du titane (CSN), décision rendue par la Cour du Québec 12. le 16 octobre 1998 par l'honorable Claude H. Chicoine dans le dossier 765-02-000039-952. 13. Zurich du Canada, p. 2166, op. cit. note 3. 14. Op. cit. note 9. Union des écrivaines et écrivains c Michaud, décision rendue au nom de la cour d'appel par 15. l'honorable juge Morris J. Fish le 18 avril 1997 dans le dossier 500-09-003588-969. Dussault et Borgeat, traité de droit administratif, deuxième édition, tome II, Les presses de 16. l'Université Laval, p. 1137. CUM c Chubb du Canada [1998] R.J.Q. 759; Société nationale de l'amiante c Lab Chrysolle inc 17. [1995] R.J.Q. 757. 18. La personnelle vie c X [1997] R.J.Q. 2296. 19. Op. cit. note 10. 20. Op. cit. note 3, p. 2165. 21. Op. cité note 3.
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