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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 1008224-S Nom de lentreprise : Municipalité régionale de comté de Matawinie Date : 10 mai 2018 Membre : M e Cynthia Chassigneux DÉCISION PLAINTE en vertu de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . OBJET [1] La Commission daccès à linformation (la Commission) est saisie dune plainte à lencontre de la Municipalité régionale de comté de Matawinie (la MRC). [2] La plainte porte sur la collecte de renseignements personnels auprès dun tiers sans le consentement de la personne concernée. Plus particulièrement, le plaignant soutient que la MRC a recueilli auprès de la Sûreté du Québec (poste principal de la MRC) (SQ de la MRC) des renseignements personnels le concernant contenus dans différents documents remplis à la suite dun évènement survenu alors quil était à lemploi de la MRC, et ce, sans son consentement. Il précise que les documents transmis par la SQ de la MRC à la MRC sont : le rapport dintervention, le registre des opérations, lévaluation du risque (fugue, disparition, enlèvement) et un document sur les étapes progressives denquête du tiers. Il soutient également que ces documents ont été collectés par la MRC auprès de la SQ de la MRC alors quil nétait plus à lemploi de la MRC. [3] Il mentionne également avoir porté plainte auprès de la Sûreté du Québec (Grand Quartier Général) de Montréal (SQ-Montréal) qui, après une enquête interne, lui a indiqué quil y aurait eu un bris de confidentialité à une divulgation inappropriée de renseignements personnels et que des mesures ont été prises 1 RLRQ, c. A-2.1, Loi sur laccès.
1008224-S Page : 2 afin soit de récupérer les documents transmis, soit dobtenir un avis confirmant leur destruction par la MRC. ENQUÊTE [4] À la suite de cette plainte, la Direction de la surveillance de la Commission procède à une enquête conformément à larticle 123 de la Loi sur laccès. [5] À ce titre, même si la plainte ne vise que la MRC, la Direction de la surveillance de la Commission écrit à la MRC et à la SQ-Montréal afin dobtenir leurs versions des faits ainsi que des précisions quant aux circonstances et aux fondements juridiques entourant la collecte et la communication des documents décrits précédemment. [6] La directrice générale adjointe de la MRC répond aux demandes de précisions de la Direction de la surveillance de la Commission et transmet les documents suivants : Code déthique et de déontologie des employé(es) de la MRC de Matawinie (octobre 2012) et Politique de discipline de la MRC de Matawinie (septembre 2008). [7] Elle précise alors que « […] le document demandé était la déclaration faite aux policiers par [le plaignant], à la suite de lévènement et quaucune demande na été effectuée dans le but de recevoir un « rapport dintervention » et un « registre des opérations » […]. Ces documents nont pas été demandés dautant plus que nous ne sommes pas au fait des procédures policières à ce point pour en connaître lexistence. Ils nous ont été transmis avec la déclaration demandée. But recherché par notre demande : Nous souhaitions simplement savoir ce que [le plaignant] avait déclaré aux policiers suite à lévènement puisquà son retour au travail le 11 mai, deux (2) versions différentes ont été livrées par [le plaignant] à ses collègues de travail et ensuite à la direction générale. […] Les évènements du 7 et 8 mai sont arrivés et la façon dont sest comporté [le plaignant] est venue confirmer la décision de congédiement qui avait été prise bien avant ces évènements. Suite à la rencontre du 11 mai effectivement, nous avons procédé au congédiement, la directrice générale adjointe, qui est aussi la conseillère juridique de la MRC, a jugé prudent en cas
1008224-S Page : 3 de litige ultérieur, de demander la déclaration [du plaignant] aux policier pour confirmer que [le plaignant] avait lhabitude dajuster quelque peu la vérité pour servir ses intérêts, lune des attitudes qui a mené à son congédiement. Comme nous avions 2 versions des faits de lévènement dépendamment que le message sadressait aux collègues de travail ou à la direction générale, nous voulions vérifier sil y avait une 3 e version auprès des policiers, ce qui sest avéré être le cas en prenant connaissance dudit document attendu, […] Nous sommes convaincu quil était dans notre droit, en tant quemployeur, de recevoir la déposition de notre employé, pour un incident qui sest produit durant quil était en fonction et durant les heures de travail. Ne serait-ce pour nos assurances invalidité sil en avait fait la demande et de toute évidence pour consigner toutes les informations pertinentes au dossier de lemployé. Lattitude [du plaignant] faisait montre dun manque déthique et de loyauté envers lemployeur ainsi que dun bris de confiance et cest ce que la déclaration aux policiers est venue nous confirmer en plus de nos apporter un moyen de preuve en lien avec le congédiement. » 2 [8] Le Chef de service de laccès et de la protection des renseignements personnels et Responsable de laccès et de la protection (le responsable de laccès) de la SQ-Montréal répond aux demandes de précisions de la Direction de la surveillance de la Commission. Il transmet les documents suivants : Formulaire (vierge) de demande de renseignements en provenance dun organisme public, le Registre des incidents en relation avec la présente plainte, les échanges avec le plaignant et la directrice générale adjointe de la MRC, ainsi que les deux documents transmis par la MRC. [9] Il précise notamment que : « dans le présent cas, cest larticle 67.1 de la Loi sur laccès qui trouve application. Celui-ci autorise la communication des renseignements personnels nécessaire à lapplication dune directive ou dun règlement qui établissent des conditions de travail. Après vérification avec nos conseillers juridiques, le Code déthique et de déontologie des employés et la Politique de discipline de la MRC peuvent se qualifier respectivement de « règlement » et de « directive » au sens de larticle 67.1. 2 Tel quil appert de la réponse de la directrice générale adjointe du 3 mars 2014.
1008224-S Page : 4 Comme mentionné dans sa demande de communication, la MRC de Matawinie désirait avoir copie du dossier afin de valider les renseignements déclarés par leur employé porté disparu en forêts dans le cadre dune mission en lien avec son travail. La MRC souhaitait comparer les renseignements déclarés à la Sûreté du Québec avec les données GPS relevées sur leur appareil. Nous avons établi que lorganisme appliquait [le Code déthique et de déontologie des employés et la Politique de discipline de la MRC]. Dans ce cas-ci, lemployé était considéré avoir commis des actes fautifs dans lexercice de ses fonctions ou qui déroge aux règles internes de lorganisation. » 3 AVIS DINTENTION ET OBSERVATIONS [10] Le 12 octobre 2016, la Commission émet un avis dintention et le transmet à la MRC linformant quà la lumière des informations dont elle dispose, elle pourrait conclure que la plainte est fondée, à moins que lorganisme ne démontre que les documents contenant les renseignements personnels concernant le plaignant quil a collectés auprès de la SQ de la MRC étaient nécessaires à lexercice de ses attributions ou à la mise en œuvre dun programme dont il a la gestion. [11] La Commission indique alors quelle pourrait ordonner à lorganisme de cesser de recueillir des renseignements personnels de ses anciens employés, sils savèrent que de tels renseignements ne sont pas nécessaires à lexercice de ses attributions ou à la mise en œuvre dun programme dont il a la gestion. [12] Le 15 novembre 2016, le procureur de la MRC répond à la Commission. Il soutient que « lensemble des évènements relatés dans lavis dintention du 12 octobre 2016 sont extrinsèques aux fonctions et obligations de lorganisme en regard de la [Loi sur laccès] En effet, la demande daccès formulée auprès de la Sûreté du Québec suite aux évènements survenus les 7 et 8 mai 2012 impliquant le plaignant, sinscrivait dans le cadre dune procédure de congédiement. La demande a été formulée auprès de la SQ non pas à titre dorganisme mais à titre de personne au sens de larticle 9 de la [Loi sur laccès]. Cest la Sûreté du Québec qui a transmis à lorganisme un rapport contenant les renseignements personnels du plaignant. 3 Tel quil appert de la réponse du responsable de laccès en date du 16 avril 2014.
1008224-S Page : 5 La responsable de laccès à linformation de lorganisme, dès quelle en a eu la demande, a procédé à la destruction du document communiqué de façon inappropriée par la Sûreté du Québec. La demande daccès aux documents formulée par lorganisme auprès de la Sûreté du Québec la été dans un contexte exceptionnel et spécifique, lorganisme na aucune politique afin de recueillir des renseignements personnels qui ne sont pas accessibles et publics concernant tant ses employés actuels que ses anciens employés. En aucun temps lorganisme na utilisé son statut dans le but de recueillir des informations auprès dun autre organisme soumis à [la Loi sur laccès], le cas sous étude est un cas despèce et nous vous soumettons respectueusement quune ordonnance de la Commission serait inutile ». [13] Le 28 septembre 2017, après avoir été assignée au présent dossier, la soussignée a fait parvenir une lettre à la MRC et à la SQ-Montréal afin dobtenir des précisions. En effet, même si la Commission constate que les documents ont été détruits par la MRC, elle sinterroge néanmoins sur les fondements juridiques de la demande daccès et de la transmission des documents entre les parties compte tenu du fait que le plaignant nétait plus à lemploi de la MRC au moment celle-ci a fait sa demande à la SQ de la MRC. [14] Le 30 octobre 2017, le procureur de la MRC répond à la Commission en alléguant que « la demande a été formulée à titre demployeur en application de la Politique de discipline de la MRC de Matawinie et du Code déthique et de déontologie des employé(es) en vigueur au moment des évènements. La demande visait à valider les heures de travail et le Kilométrage de lemployé, lequel avait, contrairement à la directive de la MRC, éteint le GPS qui lui avait été fourni par son travail. Larticle 67.1 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, dans les circonstances, aurait justifié lobtention de certaines informations. La demande étant également justifiée compte tenu des versions contradictoires de lemployé. La MRC réitère que la demande faite à la Sûreté du Québec ne visait que ces informations et quelle nest aucunement
1008224-S Page : 6 responsable de la décision de la Sûreté du Québec en regard dune divulgation inappropriée de renseignements. Dès quelle a reçu la demande, les documents ont été détruits ». [15] Le 2 novembre 2017, la directrice et responsable de laccès aux documents et de la protection des renseignements personnels de la SQ-Montréal répond à la Commission en soutenant, en ce qui concerne le fondement juridique de la transmission par la SQ de la déclaration faite aux policiers par le plaignant à la MRC, que : « dans un premier temps, nous aimerions rectifier certains faits quant aux affirmations contenues dans ce point : - La Sûreté du Québec na jamais qualifié la déclaration transmise de « document à caractère public » : […]. - Au moment du traitement de la demande initiale, reçue le 5 juin 2012, selon les informations transmises par la MRC de Matawinie, le plaignant […] était à lemploi de la MRC. Par conséquent, tout le traitement associé à cette demande a été fait en fonction de cette situation. Suite à des vérifications internes demandées par le responsable du Service de laccès et de la protection de linformation (SAPI) de la Sûreté du Québec le 21 février 2013, nous avons constaté un bris de confidentialité à une divulgation inappropriée de renseignements personnels. Dès lors, nous avons mis en place les mesures correctives prévues dans de telles situations afin de limiter le préjudice, notamment en demandant immédiatement à la MRC de procéder à la destruction des documents communiqués de façon inappropriée. À la suite de cette confirmation de destruction, nous avons réévalué la demande, toujours dans le contexte applicable à la demande datée du 5 juin 2012 larticle 67.1 de la Loi sur laccès trouvait alors son application, et ce, même si [le plaignant] nous avait informé que depuis la divulgation inappropriée des documents (bris de confidentialité), la MRC lavait congédié. Finalement, voici certaines précisions propres à lanalyse juridique qui a été faite et il a alors été déterminé que larticle 67.1 de la Loi sur laccès trouvait son application pour la communication de certains renseignements. En effet, larticle 6 du Code déthique et de déontologie des employés de la MRC de Matawinie, lequel avait été adopté le 28 novembre 2012 à titre de règlement de la MRC conformément aux articles 2 et 16 à 19 de la Loi sur léthique et la déontologie des employés municipaux
1008224-S Page : 7 (RLRQ c. E-15.1.0.1), établissait effectivement des conditions de travail. » [16] Le 27 novembre 2017, la Commission fait à nouveau parvenir une demande de complément dinformation à la MRC. En effet, à la lumière des documents transmis par la MRC mais aussi des différentes observations de celle-ci, même si la Commission comprend que la demande faite à la SQ de la MRC concerne des évènements qui se sont produits alors que le plaignant était à lemploi de la MRC et donc soumis à sa Politique de discipline, elle constate néanmoins, selon la chronologie des faits, que cette demande est intervenue alors que le plaignant nétait plus à lemploi de la MRC. [17] Elle constate également que le Code déthique et de déontologie des employé(es) de la MRC a été adopté après le congédiement du plaignant et que, par conséquent, il ne semble pas applicable en lespèce. [18] Elle réitère donc sa demande quant aux fondements juridiques de la demande faite par la MRC à la SQ de la MRC alors quil nexistait plus de lien demploi entre elle et le plaignant. [19] Elle informe alors la MRC quelle pourrait rendre lordonnance énoncée dans lavis dintention du 12 octobre 2016 en plus de lui ordonner de détruire les renseignements concernant le plaignant, sil savère que ceux-ci ont été collectés en contravention de la Loi sur laccès. [20] Le 15 février 2018, le procureur de la MRC répond à la Commission en réitérant les commentaires faits le « 30 octobre 2017 eu égard aux fondements juridiques de la demande faite par la MRC auprès de la Sûreté du Québec en 2012. » Il ajoute « au surplus, bien que le Code déthique et de déontologie des employés ait effectivement été adopté en octobre 2012, il nen demeure pas moins que les obligations de lemployé en matière de loyauté sinféraient des lois applicables, tels le Code civil du Québec et la Loi sur les normes du travail. […] Finalement, nous réitérons que la demande daccès aux documents formulée dans le dossier [du plaignant] est un cas unique et que notre cliente ne recueille aucun renseignement personnel dancien employés qui ne sont pas nécessaires à lexercice de ses attributions ».
1008224-S Page : 8 ANALYSE [21] La MRC est un organisme public assujetti à la Loi sur laccès 4 qui prévoit quun organisme public ne peut recueillir un renseignement personnel que sil est nécessaire à lexercice de ses attributions ou à la mise en œuvre dun programme dont elle a la gestion. 64. Nul ne peut, au nom dun organisme public, recueillir un renseignement personnel si cela nest pas nécessaire à lexercice des attributions de cet organisme ou à la mise en œuvre dun programme dont il a la gestion. […] [22] En lespèce, la Commission doit se prononcer quant à savoir si la MRC pouvait demander à la SQ de la MRC de lui transmettre des documents contenant des renseignements personnels concernant le plaignant. La Commission tient à rappeler que même si la SQ-Montréal a été interpellée, la plainte ne visait pas cet organisme qui, de plus, comme mentionné au paragraphe 15 de la présente décision, a pris des mesures correctives après avoir constaté que des documents avaient été communiqués de façon inappropriée. [23] Partant, la Commission comprend que la demande faite à la SQ de la MRC concerne des évènements qui se sont produits alors que le plaignant était à lemploi de la MRC. Elle comprend aussi que, dans le cadre de son emploi, celui-ci devait agir avec prudence, diligence et loyauté 5 envers la MRC et était soumis à la Politique de discipline de la MRC. [24] Elle constate cependant que la demande faite à la SQ de la MRC la été alors quil ny avait plus de lien demploi entre le plaignant et la MRC. Cette dernière ne pouvait donc plus exercer ses attributions à légard du plaignant, et ce, même si la demande visait à comprendre et confronter les différentes versions données par le plaignant durant des évènements survenus alors quil était à son emploi. [25] Ainsi, à la différence de ce qui est mis de lavant par la MRC, la Commission est davis que la MRC aurait pu envisager dautres mécanismes advenant un éventuel recours de la part du plaignant. [26] Par conséquent, en lespèce, la Commission considère que la MRC na pas respecté larticle 64 de la Loi sur laccès en demandant à la SQ de la MRC 4 Loi sur laccès, articles 3 et 5. 5 Code civil du Québec, article 2088.
1008224-S Page : 9 de lui communiquer des documents contenant des renseignements personnels concernant le plaignant. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [27] DÉCLARE la plainte fondée, [28] ORDONNE à la MRC de détruire les renseignements concernant le plaignant, plus particulièrement ceux recueillis auprès de la SQ de la MRC après son congédiement. Original signé Cynthia Chassigneux Juge administrative
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