RECOMMANDÉ Montréal, le 29 août 2017 Madame … Banque Canadian Tire 3475, Superior Court Oakville (Ontario) L6L 0C6 Objet : Plainte à l’endroit de la Banque Canadian Tire N/Réf. : 1005947-S ______________________________________________________________ La présente donne suite à une plainte dont la Commission d’accès à l’information (la Commission) a été saisie à l’encontre de la Banque Canadian Tire (l’entreprise). Objet de la plainte La plainte porte sur la collecte de renseignements personnels. Plus particulièrement, le plaignant allègue qu’en répondant à une offre faite en magasin visant à se procurer une carte de crédit de l’entreprise, le préposé lui a demandé de fournir son permis de conduire et sa carte d’assurance maladie. Il allègue aussi que comme il a refusé de fournir les documents en question, le préposé n’a pas donné suite à sa demande. Enquête À la suite de cette plainte, la Direction de la surveillance de la Commission procède à une enquête, conformément à l’article 81 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . Elle interpelle l’entreprise afin d’obtenir sa version des faits et des précisions sur la nécessité de recueillir les numéros de permis de conduire et d’assurance maladie pour profiter de l’offre de carte de crédit proposée. Elle demande également à l’entreprise de préciser ce qui justifie que le fait de ne pas fournir ces numéros entraîne le rejet de la demande de carte de crédit. 1 RLRQ, c. P-39.1, la Loi sur le privé.
N/Réf. : 1005947-S 2 Le conseiller à la protection des renseignements personnels de l’entreprise répond aux demandes de précision de la Direction de la surveillance de la Commission et ce, même s’il soutient que l’entreprise, en tant que banque réglementée par les lois fédérales, est régie non pas par la Loi sur le privé mais par la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques 2 . Analyse La Loi sur le privé établit des règles relatives à la collecte, à l’utilisation, à la détention et à la communication de renseignements personnels à l’occasion de l’exploitation d’une entreprise 3 . La Loi sur le privé prévoit qu’une personne qui exploite une entreprise ne doit recueillir que les renseignements personnels nécessaires à l’objet du dossier qu’elle constitue sur autrui et qu’elle doit le faire par des moyens licites. Elle prévoit également qu’une entreprise peut refuser de fournir un service si elle n’est pas en mesure de collecter les renseignements nécessaires à l’exécution du contrat. 5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d’y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l’objet du dossier. Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites. 9. Nul ne peut refuser d’acquiescer à une demande de bien ou de service ni à une demande relative à un emploi à cause du refus de la personne qui formule la demande de lui fournir un renseignement personnel sauf dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes : 1° la collecte est nécessaire à la conclusion ou à l’exécution du contrat; 2° la collecte est autorisée par la loi; 3° il y a des motifs raisonnables de croire qu’une telle demande n’est pas licite. En cas de doute, un renseignement personnel est réputé non nécessaire. 2 L.C. 2000, c. 5. 3 Loi sur le privé, article 1; Code civil du Québec, RLRQ, c. C-1991, article 1525.
N/Réf. : 1005947-S 3 Par ailleurs, la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes 4 oblige un certain nombre d’entités, comme les entités financières que sont, entre autres, les banques 5 régies par la Loi sur les banques 6 , à vérifier l’identité de toute personne faisant affaire avec elles 7 . Selon le Règlement sur le recyclage pris en application de cette loi, les entités financières doivent vérifier l’identité de toute personne pour qui elle ouvre un compte de carte de crédit. L’identité de la personne est alors vérifiée au moyen de son certificat de naissance, son permis de conduire, sa carte d’assurance-maladie provinciale (si un tel usage n’est pas interdit aux termes de la loi provinciale applicable), son passeport ou tout document semblable. La vérification doit se faire avant l’activation de toute carte de crédit. 54.1 Sous réserve des paragraphes 62(1) et (2) et de l’article 63, toute entité financière doit prendre les mesures nécessaires : a) lorsqu’elle ouvre un compte de carte de crédit au nom d’une personne, vérifier l’identité de celle-ci conformément au paragraphe 64(1.1); […] 64. […] (1.1) Dans le cas prévu à l’alinéa 54.1a), l’identité de la personne est vérifiée par une personne ou entité, au moment prévu au paragraphe (2) et conformément au paragraphe (3) : a) au moyen de son certificat de naissance, son permis de conduire, sa carte d’assurance-maladie provinciale (si un tel usage n’est pas interdit aux termes de la loi provinciale applicable), son passeport ou tout document semblable; b) si la personne est absente lors de la présentation de la demande de carte de crédit, […] (2) Les vérifications sont effectuées : […] 4 LC 2000, c. 17, la Loi sur le recyclage. 5 Règlement sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, DORS/2002-184, article 1, le Règlement sur le recyclage. 6 LC 1991, c. 46 7 Loi sur le recyclage, articles 5 et 6.1.
N/Réf. : 1005947-S 4 b.2) dans le cas prévu à l’alinéa 54.1a), avant l’activation de toute carte de crédit; […] (3) Sauf indication contraire du présent règlement, seuls les documents originaux valides et non échus peuvent servir à vérifier l’identité d’une personne conformément aux alinéas (1)a) ou (1.1)a). En l’espèce, l’entreprise ne nie pas le fait qu’elle demande à ce que des pièces délivrées par un gouvernement soient fournies lors d’une demande de carte de crédit. Le conseiller à la protection des renseignements personnels indique, en effet, que : « Conformément à la législation fédérale anti-blanchiment d’argent au Canada, notamment le règlement sur le recyclage des produits de la criminalité (blanchiment d’argent) et le financement des activités terroristes, les institutions financières sont tenues de documenter le type de pièce d’identité, le numéro de référence, et le lieu de délivrance. Un compte de carte de crédit ne peut pas être ouvert si la pièce d’identité issue par le gouvernement n’a pas été vérifiée. » 8 Partant, eu égard au Règlement sur le recyclage, l’entreprise était justifiée de recueillir le numéro de permis de conduire du plaignant et de le conserver, puisque ce renseignement était nécessaire à son identification, tel que requis par la réglementation précitée. La collecte et la conservation de ce renseignement sont donc conformes aux dispositions de la Loi sur le privé. En ce qui concerne le numéro de la carte d’assurance maladie, au Québec, la Loi sur l’assurance maladie 9 prévoit que « la production de la carte d’assurance maladie […] ne peut être exigée qu’à des fins liées à la prestation de services ou à la fourniture de biens ou de ressources en matière de santé ou de services sociaux dont le coût est assumé par le gouvernement, en tout ou en partie, directement ou indirectement, en vertu d’une loi dont l’application relève du ministre de la Santé et des Services sociaux » 10 . Cependant, comme l’a déjà reconnu la Commission à l’égard d’une entreprise de même nature qu’en l’espèce, la vérification de l’identité d’une personne au moyen de sa carte d’assurance maladie est autorisée et, dans la mesure où 8 Réponse de l’entreprise du 26 avril 2013. 9 RLRQ, c. A-29. 10 Précité, article 9.0.0.1.
N/Réf. : 1005947-S 5 cette entreprise laisse au client la possibilité de présenter une des différentes pièces d’identité énumérées Règlement sur le recyclage, elle peut recueillir et conserver le numéro inscrit sur la carte d’assurance maladie 11 . Dans ces circonstances, l’entreprise était justifiée de recueillir le numéro d’assurance maladie du plaignant et de le conserver, puisque ce renseignement était nécessaire à son identification, tel que requis par le Règlement sur le recyclage. La collecte et la conservation de ce renseignement sont donc conformes aux dispositions de la Loi sur le privé. Conclusion À la lumière de ce qui précède, la Commission conclut que l’entreprise n’a pas contrevenu aux articles 5 et 9 de la Loi sur le privé. Par conséquent, la Commission ferme le présent dossier. « Original signé » Cynthia Chassigneux Juge administratif c. c. M. … 11 X. c. Caisse Desjardins du Parc Sir-G.-É.-Cartier de Montréal, CAI 09 23 03, 3 août 2011.
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