COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION DU QUÉBEC Dossier : 1007497 Nom de l’organisme : Commission de la santé et de la sécurité du travail Date : 21 décembre 2015 Membre : M e Jean Chartier DÉCISION ENQUÊTE en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 (Loi sur l’accès). OBJET [1] Le 16 juillet 2013, la Commission d’accès à l’information (la Commission) est saisie d’une plainte de la part de madame … (la plaignante) à l’endroit de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (l’organisme). [2] Cette plainte porte sur la collecte de renseignements personnels auprès de tiers, et ce, sans le consentement de la personne concernée. Plus particulièrement, la plaignante mentionne que l’organisme, par le biais de madame …, enquêteur au Service des enquêtes spéciales (l’enquêteur) de ce dernier, a obtenu des renseignements personnels la concernant auprès de l’entreprise Équifax (le tiers). [3] À la suite de cette plainte, la Commission a procédé à une enquête auprès de l’organisme conformément à l’article 123 de la Loi sur l’accès. LES FAITS [4] L’enquête a permis de démontrer qu’en 2012, l’organisme a mandaté son service des enquêtes spéciales afin d’investiguer davantage quant à la capacité résiduelle physique et psychologique de la plaignante. [5] Les 28 novembre 2013 et 3 avril 2014, Me …, procureur de l’organisme, en réponse à des demandes de la Direction de la surveillance de la 1 RLRQ, c. A-2.1.
1007497 Page : 2 Commission, explique que dans le cadre de son enquête, l’enquêteur a recueilli des informations concernant la plaignante auprès de plusieurs entreprises 2 par voie d’assignations à comparaître et à produire des documents, émises par une personne investie des pouvoirs conférés par la Loi sur les commissions d’enquêtes 3 en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail 4 . [6] Il précise également que l’enquêteur a demandé, le 28 août 2012, à l’entreprise Keyfacts Canada / Garda (l’entreprise) d’obtenir des informations sur le dossier de crédit de la plaignante. Il indique que cette demande a été faite en vertu d’un contrat de services conclu entre l’organisme et l’entreprise « permettant à la CSST d’avoir accès au dossier de crédit d’un usager ». Selon Me …, l’organisme utilise les services de cette entreprise depuis 1995. [7] Il mentionne enfin que l’entreprise se serait adressée au tiers pour obtenir les informations demandées par l’enquêteur et que ces informations apparaissent dans le document intitulé « Rapport du consommateur » remis le 28 août 2012 par l’entreprise à l’organisme. OBSERVATIONS AU TERME DE L’ENQUÊTE [8] Conformément à la Loi sur l’accès, lorsqu’un organisme public entend recueillir des renseignements personnels auprès d’un tiers, sans le consentement de la personne concernée, il peut révéler au tiers l’identité de la personne au sujet de laquelle il souhaite avoir des informations. Dans une telle situation, la Commission doit être informée préalablement de cette communication et cette dernière doit être inscrite dans un registre. [9] Le 16 juin 2015, la Commission a transmis un avis d’intention à l’organisme. [10] Constatant que l’organisme ne semblait pas avoir informé préalablement la Commission de la communication entre lui et l’entreprise, la Commission a indiqué à l’organisme qu’elle pourrait lui ordonner de cesser de recueillir des renseignements personnels déjà colligés par l’entreprise et de détruire tous les renseignements personnels recueillis par cette dernière. En réponse à l’avis d’intention, l’organisme a fait parvenir à la Commission, les 23 juillet et 23 octobre 2015, les documents suivants : 2 Voir notamment les décisions dans les dossiers 1007600, 1007599, 1007561, 1007392, 1007348, 1007349 rendues le 27 mars 2015 par la Commission. 3 RLRQ, c. C-37, article 9. 4 RLRQ, c. S-2.1, article 160 et 173.
1007497 Page : 3 Copie du registre des communications de renseignements personnels établi en vertu de l’article 67.3 de la Loi sur l’accès en date du mois de mars 2013; Copie du contrat de services de nature technique entre l’organisme et l’entreprise pour les périodes suivantes : 25 juin 2013 – 23 juin 2014 et 1 er avril 2015 – 31 mars 2016. [11] Le 18 novembre 2015, l’organisme a demandé un délai supplémentaire pour produire la copie du contrat de services de nature technique 2012-2013, soit celui en vigueur au moment des faits. La Commission a accordé jusqu’au 4 décembre 2015 à l’organisme pour produire une copie dudit contrat. [12] À ce jour, la Commission n’a pas reçu de copie dudit contrat. ANALYSE [13] La Loi sur l’accès prévoit que lorsqu’un organisme public entend recueillir des renseignements personnels déjà colligés par un tiers, sans le consentement de la personne concernée, il peut révéler au tiers l’identité de la personne au sujet de laquelle il souhaite avoir des informations. [14] Elle prévoit également que la Commission doit être informée préalable-ment de cette communication et que cette dernière doit être inscrite dans un registre. 66. Un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement sur l’identité d’une personne afin de recueillir des renseignements personnels déjà colligés par une personne ou un organisme privé. L’organisme public en informe la Commission au préalable. […] 67.3. Un organisme public doit inscrire dans un registre toute communication de renseignements personnels visée aux articles 66, 67, 67.1, 67.2, 68 et 68.1, à l’exception de […]. Dans le cas d’une communication d’un renseignement personnel visée au premier alinéa, le registre comprend : 1° la nature ou le type de renseignement communiqué; 2° la personne ou l’organisme qui reçoit cette communication;
1007497 Page : 4 3° la fin pour laquelle ce renseignement est communiqué et l’indication, le cas échéant, qu’il s’agit d’une communication visée à l’article 70.1; 4° la raison justifiant cette communication. […] [15] La Commission a pris connaissance du registre des communications et des différents contrats de service transmis par l’organisme. Ces contrats précisent l’objet du contrat de services, soit le fait pour l’entreprise de réaliser différents types d’enquêtes (ex. : solvabilité de l’employeur ou du travailleur, localisation de l’employeur ou du travailleur, cautionnement) pour le compte de l’organisme. [16] Toutefois, ces documents étant postérieurs aux faits à l’origine de la présente plainte, la Commission ne peut en tenir compte en l’espèce. CONCLUSION [17] Ainsi, à la lumière de l’enquête et des observations de l’organisme, et en l’absence du contrat de services en vigueur au moment des faits entre l’organisme et l’entreprise, la Commission conclut que l’organisme a contrevenu aux articles 66 et 67.3 de la Loi sur l’accès. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [18] DÉCLARE la plainte fondée; [19] ORDONNE à l’organisme de cesser de recueillir des renseignements personnels colligés par l’entreprise en 2012-2013; [20] ORDONNE à l’organisme de détruire tous les renseignements personnels recueillis auprès de l’entreprise en 2012-2013; [21] ORDONNE à l’organisme d’informer la Direction de la surveillance de la Commission des mesures prises afin de respecter la présente décision dans un délai de 60 jours de sa réception. Jean Chartier Juge administratif
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