COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION DU QUÉBEC Dossier : 1006662 Nom de l’entreprise : Municipalité de la Paroisse de Sainte-Anne-des-Lacs Date : 6 juillet 2015 Membre : M e Cynthia Chassigneux DÉCISION OBJET ENQUÊTE menée par la Commission d’accès à l’information (la Commission) de sa propre initiative en vertu des articles 122.1 et 123 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 1 . [1] Après avoir été informée que des renseignements personnels ont été divulgués lors d’une séance ordinaire du Conseil municipal de la Paroisse de Sainte-Anne-des-Lacs (la Municipalité), la Commission a ouvert une enquête visant à établir la conformité à la Loi sur l’accès des pratiques de la Municipalité en matière de protection des renseignements personnels. [2] Cette enquête s’est déroulée du 26 avril au 15 août 2013 et portait plus particulièrement sur la communication, le 10 décembre 2012, du salaire des employés de la Municipalité lors d’une séance ordinaire du Conseil de celle-ci. LES FAITS [3] Informée par la Commission qu’une enquête était ouverte, la Municipalité a précisé, en date du 2 mai 2013, le contexte entourant la communication des renseignements personnels, et ce, dans les termes suivants : « 1. Lors de la période de question à la fin de la séance régulière de novembre 2012 un citoyen, […], a adressé une question à monsieur … [conseiller municipal] concernant les 1 RLRQ, c. A-2.1, Loi sur l’accès.
1006662 Page : 2 augmentations de rémunération consenties aux élus depuis janvier 2010. 2. [Le conseiller municipal] n’avait pas la réponse mais il s’est engagé à fournir la dite réponse à la séance de décembre 2012. 3. Lors de la séance de décembre 2012 le citoyen […] a de nouveau posé la même question et [le conseiller municipal] s’est levé est allé dans la salle et lui a répondu en distribuant un tableau […] faisant état de l’évolution de la rémunération des élus depuis janvier 2010. 4. Qui plus est, [le conseiller municipal] a aussi distribué aux personnes présentes dans la salle (près de 40 personnes) un autre tableau […] faisant état de l’évolution de la rémunération des employés municipaux depuis janvier 2010. [La Municipalité n’a] pu empêcher [le conseiller municipal] de distribuer ces tableaux d’autant plus que [la Municipalité ne savait] pas qu’il ferait un tel geste. 5. Ces deux tableaux ont par la suite circulé notamment auprès des clients des deux restaurants dans le centre du village. » [Sic] [4] La Municipalité soutient que le conseiller municipal, en agissant de la sorte, a manqué aux obligations découlant de la Loi sur l’accès et du Code d’éthique et de déontologie de la municipalité, plus particulièrement de l’article 17 de la Section V intitulée « Utilisation ou communication de renseignements confidentiels ». [5] La Municipalité précise également qu’à la suite de cet évènement, elle a porté plainte contre le conseiller municipal au Bureau du commissaire aux plaintes du Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire, laquelle a été transmise à la Commission municipale du Québec pour enquête. Elle mentionne également dans sa réponse que les employés ont, quant à eux, déposé un grief à l’encontre de la Municipalité. OBSERVATIONS AU TERME DE L’ENQUÊTE [6] Le 15 mai 2015, la Commission transmet à la Municipalité un avis d’intention l’informant qu’elle envisage de lui ordonner : - d’adopter une politique concernant la gestion et la protection des renseignements personnels qu’elle détient conformément aux obligations imposées par la Loi sur l’accès; - de former l’ensemble de ses membres, qu’ils soient cadres ou non-cadres, afin qu’ils appliquent cette politique au sein de la Municipalité.
1006662 Page : 3 [7] Tel qu’indiqué dans cet avis, reçu le 25 mai 2015, la Municipalité pouvait faire parvenir à la Commission ses observations écrites dans les trente jours de sa réception. [8] À ce jour, la Municipalité n’a soumis aucune observation à la Commission. ANALYSE [9] La Municipalité est un organisme public assujetti à la Loi sur l’accès 2 , et les documents qu’elle détient dans l’exercice de ses fonctions sont soumis à l’application de cette loi. 1. La présente loi s’applique aux documents détenus par un organisme public dans l’exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l’organisme public ou par un tiers. Elle s’applique quelle que soit la forme de ces documents : écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. [10] La Loi sur l’accès définit ce qu’il convient d’entendre par « renseignement personnel » dans un document et prévoit que ceux qui ont un caractère public n’y sont pas soumis. 54. Dans un document, sont personnels les renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l’identifier. 55. Un renseignement personnel qui a un caractère public en vertu de la loi n’est pas soumis aux règles de protection des renseignements personnels prévues par le présent chapitre [i.e. Chapitre III – Protection des renseignements personnels]. 57. Les renseignements personnels suivants ont un caractère public : […] 1° le nom, le titre, la fonction, la classification, le traitement, l’adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail d’un membre d’un organisme public, de son conseil d’administration ou de son personnel de direction et, dans le cas d’un ministère, d’un sous-ministre, de ses adjoints et de son personnel d’encadrement; 2° le nom, le titre, la fonction, l’adresse et le numéro de téléphone du lieu de travail et la classification, y compris l’échelle de traitement rattachée à cette classification, d’un membre du personnel d’un organisme public; […] 2 Article 5 de la Loi sur l’accès.
1006662 Page : 4 En outre, les renseignements personnels prévus au paragraphe 2° ne peuvent avoir pour effet de révéler le traitement d’un membre du personnel d’un organisme public. [11] La Loi sur l’accès prévoit aussi que, sauf exception, les renseignements personnels détenus par un organisme public sont confidentiels et ne peuvent être communiqués sans le consentement des personnes concernées. 53. Les renseignements personnels sont confidentiels sauf dans les cas suivants : […] 59. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement personnel sans le consentement de la personne concernée. […] [12] La Loi sur l’accès prévoit également qu’un organisme public doit prendre les mesures de sécurité propres à assurer la protection des renseignements personnels tout au long de leur cycle de vie. 63.1. Un organisme public doit prendre les mesures de sécurité propres à assurer la protection des renseignements personnels collectés, utilisés, communiqués, conservés ou détruits et qui sont raisonnables compte tenu, notamment, de leur sensibilité, de la finalité de leur utilisation, de leur quantité, de leur répartition et de leur support. [13] L’enquête n’a pas porté sur la communication des renseignements personnels concernant les élus municipaux et les cadres qui ont un caractère public en vertu de la Loi sur l’accès, mais sur celle relative aux renseignements personnels des membres du personnel de la Municipalité. [14] La Commission a pris connaissance du tableau intitulé « Analyse de la rémunération et autres allocations des cadres et des employés » transmis par la Municipalité le 2 mai 2013. Il ressort de ce tableau qu’à côté de certains postes non cadres, sont inscrits soit un prénom et la première lettre d’un nom de famille, soit des initiales et un montant correspondant à la rémunération et autres allocations. [15] Comme mentionné dans son avis d’intention, eu égard à la taille de la population de la Municipalité, la Commission considère que l’indication du prénom et de la première lettre du nom de famille ou encore des initiales est susceptible de permettre l’identification de certains membres du personnel de la Municipalité. [16] La Commission considère que certains des renseignements personnels contenus dans ce tableau n’ont pas un caractère public, car ils permettent de
1006662 Page : 5 révéler le traitement d’un membre du personnel de la Municipalité. La Commission constate également que ce tableau contient des renseignements personnels au sens de la Loi sur l’accès. [17] Partant, même si ce tableau a été confectionné et distribué par le conseiller municipal, la Commission considère que la Municipalité le détenait dans l’exercice de ses fonctions et que, par conséquent, il lui revenait d’assurer la confidentialité des renseignements personnels des employés qu’il contenait. CONCLUSION [18] Ainsi, à la lumière de l’enquête et des observations de la Municipalité et en l’absence d’observations supplémentaires transmises à la suite de son avis d’intention du 15 mai 2015, la Commission conclut que la Municipalité a contrevenu à l’article 63.1 de la Loi sur l’accès en ne prenant pas de mesures de sécurité propres à assurer la confidentialité des renseignements personnels qu’elle détient. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [19] ORDONNE à la Municipalité d’adopter une politique concernant la gestion et la protection des renseignements personnels qu’elle détient conforme aux obligations imposées par la Loi sur l’accès; [20] ORDONNE à la Municipalité de former l’ensemble de ses membres, qu’ils soient cadres ou non-cadres, afin qu’ils appliquent cette politique au sein de la Municipalité; [21] ORDONNE à la Municipalité d’informer la Direction de la surveillance de la Commission des mesures prises afin de respecter la présente décision, dans un délai de 90 jours de sa réception. Cynthia Chassigneux Juge administratif
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