Section surveillance

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 101289 Date : Le 12 novembre 2014 Membre: M e Christiane Constant X. Plaignant et LES MARCHÉS LOUISE MÉNARD INC. (IGA) Entreprise DÉCISION OBJET PLAINTE en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] La Commission daccès à linformation (la Commission) est saisie dune plainte de M. (le plaignant) à lendroit de Les marchés Louise Ménard inc. (lentreprise). [2] Le plaignant reproche à lentreprise davoir recueilli des renseignements personnels le concernant qui nétaient pas nécessaires dans le cadre dune demande demploi. Cette plainte porte particulièrement sur la collecte et la conservation de ses renseignements personnels, alors quils nétaient pas nécessaires à lévaluation de sa candidature pour un poste dassistant-1 RLRQ, c. P-39.1, la Loi sur le privé.
101289 Page : 2 boulanger, à savoir son numéro dassurance sociale (NAS), à laide dun formulaire intitulé « Demande denquête préemploi ». Le plaignant prétend que cette cueillette est effectuée par lentreprise à des fins de vérification de son dossier de crédit et de ses antécédents judiciaires. [3] À la suite du dépôt de cette plainte, la Commission a procédé à une enquête, conformément à larticle 81 de la Loi sur le privé qui fut complétée après avoir obtenu les observations du plaignant et de lentreprise. Par la suite, la validation des faits auprès de lentreprise a été effectuée les 8 septembre 2010, 20 et 28 mars 2012 et complétée le 18 mai suivant. [4] Cette enquête avait pour objectif de recueillir les faits afin de déterminer si lentreprise sest conformée aux exigences de la Loi sur le privé en matière de collecte de renseignements personnels. LES FAITS [5] Le 18 juin 2010, le plaignant allègue que, dans le cadre dune entrevue pré-emploi pour un poste dassistant-boulanger, le représentant de lentreprise a exigé quil lui fournisse son NAS au moyen dun formulaire de consentement, ce quil a fait, malgré ses réticences. Au cours de lenquête, lentreprise reconnaît demblée quelle a procédé à la collecte du NAS du demandeur à létape de la préembauche. [6] Le 8 septembre 2010, lentreprise fait valoir que la cueillette du NAS à cette étape permet daccélérer le processus dembauche, mais que certains candidats préfèrent fournir ce renseignement uniquement lors de lembauche. Lorsque la candidature dune personne est retenue, le dossier de celle-ci est acheminé de façon confidentielle à ladjointe administrative de lentreprise qui fait les démarches nécessaires en lien avec lembauche. [7] Les dossiers des candidats dont la candidature nest pas retenue sont détruits dans un délai de trois mois. OBSERVATIONS AU TERME DE LENQUÊTE [8] Le 27 janvier 2011, la Commission transmet un avis dintention à lentreprise, dans lequel elle précise que, sous réserve des observations quelle pourrait lui faire parvenir, elle envisage de lui ordonner de cesser de procéder à la collecte du NAS à létape de la préembauche. De plus, la Commission
101289 Page : 3 mentionne quelle a constaté que le formulaire de consentement soulève des interrogations quant à la nécessité de recueillir dautres renseignements auprès dun candidat, dont le numéro de permis de conduire et le numéro dassurance-maladie (NAM) de celui-ci. La Commission fait remarquer que, bien que ces éléments ne soient pas visés par la plainte, il y a lieu que lentreprise fasse part de ses commentaires quant à la nécessité de les recueillir. [9] Le 20 mars 2012, lentreprise transmet à la Commission un formulaire de consentement modifié, lui permettant de constater quelle ne procède plus à la collecte du NAS à létape de la préembauche, et ce, depuis le 3 février 2011. [10] De plus, lors de lenquête, lentreprise informe lenquêteur des modifications apportées à sa pratique voulant quà létape de la préembauche, elle nexige plus le NAS, puisque la demande de fournir ce renseignement personnel napparaît plus sur le formulaire « Demande denquête préemploi ». Quant au NAM et au numéro de permis de conduire dun candidat, lentreprise spécifie que ces renseignements nont jamais été demandés dans le cadre du processus dembauche et que la demande de fournir de tels renseignements napparaît plus sur ce formulaire. [11] Par ailleurs, le 18 mai 2012, lentreprise informe la Commission de ce qui suit : […] Dans tous les cas de postes au rayon du service, les postes de cadres ainsi que les postes de commis à la réception des marchandises nous procédons à la vérification complète des candidats compte tenu des fonctions quils occuperont éventuellement au sein de notre entreprise. Pour les autres postes, nous faisons une vérification auprès des anciens employeurs ainsi que le dossier criminel dans les cas le candidat postulant a plus de dix-huit ans. Nous évoluons dans un domaine le vol interne est un fléau important et pour ce faire, nous tentons dobtenir le plus de renseignements sur les éventuels candidats afin de protéger nos employés, nos clients ainsi que nos biens. De plus, nous avons une obligation et un devoir en tant quemployeur de voir à la santé, à la sécurité au travail de nos employés ainsi quà leur intégrité physique. Noublions pas également que nous avons plusieurs employés qui sont mineurs.
101289 Page : 4 Lorsque nous demandons au candidat de compléter le « Formulaire de consentement » nous lui expliquons que nous allons procéder à une enquête pré emploi relativement à ses employeurs précédents, son dossier de crédit et le dossier judiciaire, sil y a lieu, et tout cela dans le but de faire une évaluation adéquate de son dossier et de manière confidentielle. (sic) Advenant une situation un candidat ne serait pas consentant à nous fournir son consentement nous naurons dautres choix que de mettre fin à lentrevue. La transmission des renseignements personnels se fait par courriel entre la personne désignée chez notre fournisseur de service Accès Crédit et le bureau des ressources humaines des Marchés Louise Ménard. Il existe une entente écrite entre le fournisseur Accès Crédit et nous relativement à la cueillette des informations et la tarification dont copie est jointe aux présentes. […] [12] Malgré les modifications à la pratique de lentreprise, la Commission sinterroge sur la nécessité, en vertu de larticle 5 de la Loi sur le privé, de vérifier le dossier de crédit de tous ses candidats. [13] À cet égard, la Commission a fait part de ses préoccupations à lentreprise le 14 juin 2013 dans le cadre dun avis écrit et a demandé à celle-ci de lui soumettre ses observations et de linformer de lexistence potentielle : Du lien entre le fait davoir un bon dossier de crédit et la prédisposition dune personne à voler son employeur; De la nécessité de procéder à la vérification du dossier de crédit dun candidat, dont la fonction nimplique pas la manipulation dargent; De la possibilité de recours à dautres alternatives moins intrusives dans la vie de ses futurs employés afin de contrer le vol; et Si le fait davoir un bon dossier de crédit représente une garantie demploi. [14] Le 29 août 2013, lentreprise a répondu aux questionnements de la Commission mentionnés au paragraphe précédent, spécifiant quelle compte 500 employés à temps plein, à temps partiel et saisonnier et possède cinq
101289 Page : 5 marchés dalimentation répartis à Montréal et à Saint-Lambert. Afin de mieux évaluer ses candidats, elle procède à lanalyse de lensemble des renseignements relatifs à la demande demploi et notamment à la vérification de leur dossier de crédit. Elle fait remarquer en outre que : […] Ainsi, vu le haut taux de roulement de nos employés, nous nous devons dévaluer le mieux possible nos candidats et nos employés afin de pouvoir leur offrir le meilleur emploi disponible selon leurs compétences, à la meilleure plage horaire et au meilleur endroit, le tout pour tenter de les garder heureux et à notre emploi le plus longtemps possible. Ainsi, il arrive très régulièrement quun candidat qui applique pour un poste dans un magasin se voie offrir un autre poste avec plus de responsabilités et à un meilleur salaire. Ceci est également vrai pour les employés qui bénéficient de promotions au sein de lentreprise. […] La vérification du dossier de crédit sajoute aux autres informations obtenues afin dévaluer le candidat et daucune façon la vérification du dossier de crédit du candidat à lui seul garantirait ou non lembauche de celui-ci. Cest plutôt lensemble du dossier qui nous le dira. Nous comprenons que le mandat de la Commission est de vérifier à ce que les renseignements que nous recueillons sons nécessaires à lobjet de notre dossier et à cet égard, nous vous confirmons que toutes les informations que nous obtenons sont nécessaires et utiles à la gestion de notre entreprise et à la gestion de nos employés. […] En effet, si nous avions fait de la discrimination basée sur le dossier de crédit, nous vous confirmons quun bon nombre de nos employés ne seraient pas à notre emploi. Toutefois, ces informations qui complètent lévaluation du candidat nous ont permis à de nombreuses reprises doffrir un poste plus approprié à nos candidats et/ou employés. (sic)
101289 Page : 6 ANALYSE [15] Les entreprises, comme Les Marchés Louise Ménard inc. (IGA), doivent respecter les règles établies par la Loi sur le privé eu égard à la protection des renseignements personnels. Ces règles visent à établir un équilibre entre le droit dun individu au respect de sa vie privée et les besoins dune entreprise en matière de collecte, dutilisation et de communication de renseignements personnels dans le cadre de lexercice de ses activités 2 . [16] Larticle 1 de la Loi sur le privé prévoit : 1. La présente loi a pour objet détablir, pour lexercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil. Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. […] La collecte du NAS, du NAM et du permis de conduire [17] Dans le cadre de lenquête, lentreprise reconnaît quelle recueillait le NAS des candidats, y compris celui du plaignant, à létape de la préembauche. Il sagit dun renseignement personnel qui les concerne et qui permet de les identifier selon les termes de larticle 2 de la Loi sur le privé : 2. Est un renseignement personnel, tout renseignement qui concerne une personne physique et permet de l'identifier. [18] Toutefois, lentreprise a informé la Commission quelle a cessé cette pratique, de sorte quelle ne leur demande plus de fournir ce renseignement personnel. 2 X et Lépine Cloutier Ltée, C.A.I. 080943, 14 mars 2014, c. Poitras et X et Pharmaprix, C.A.I. 1003352, 13 août 2014, c. Desbiens.
101289 Page : 7 [19] La Commission prend acte que ce renseignement personnel nest désormais recueilli que lors de lembauche. [20] Par ailleurs, en ce qui a trait au NAM et au numéro de permis de conduire des candidats, des modifications apportées au formulaire de consentement « Demande denquête préemploi » démontrent que la mention liée à la collecte de tels renseignements ny apparaît plus. De plus, lentreprise affirme ne jamais avoir recueilli ces renseignements. La vérification systémique du dossier de crédit à létape de la préembauche [21] Toutefois, lentreprise reconnaît quelle procède à la vérification du dossier de crédit de chaque candidat, peu importe le poste convoité, quil sagisse dun poste de cadre ou d’« assistant-boulanger », comme en lespèce. Cette vérification implique une collecte de renseignements personnels au sujet de chacun des candidats. Lentreprise doit démontrer que cette vérification est nécessaire pour tous les postes, puisque cette pratique est systématique à létape de la préembauche et quelle est nécessaire à lobjet du dossier quelle constitue à leur sujet. [22] Larticle 5 de la Loi sur le privé indique : 5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d'y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier. Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites. [23] Cet article oblige donc une entreprise à démontrer quelle ne recueille que des renseignements personnels qui sont nécessaires à lobjet du dossier quelle constitue au sujet dune personne. Soulignons que la règle relative à la nécessité eu égard à la collecte de renseignements personnels est impérative. Une entreprise ne peut y déroger, même avec le consentement de la personne concernée 3 . Ainsi, dans le présent cas, lentreprise doit démontrer que la vérification du dossier de crédit de chacun des candidats sans égard au poste convoité lui est nécessaire afin de procéder à lévaluation de leur candidature à un emploi. 3 Laval (Société de transport de la Ville de) c. X., [2003] C.A.I. 667 (C.Q.), laffaire Laval.
101289 Page : 8 [24] Dans laffaire Pharmaprix 4 citant Lépine Cloutier Ltée 5 , la Commission sest prononcée sur linterprétation à donner au critère de nécessité que lon retrouve à larticle 5 de la Loi sur le privé dans le contexte dune enquête concernant la collecte de renseignements personnels durant un processus dembauche. La Commission indique notamment ce qui suit : […] linterprétation du critère de nécessité doit se faire à la lumière du test proposé par la Cour du Québec dans la décision Laval, qui se fonde sur la finalité poursuivie par lentreprise qui recueille des renseignements personnels. [25] Dans laffaire Laval, la Cour du Québec détaille ainsi le test devant être effectué afin de déterminer si la nécessité dune collecte de renseignements personnels est démontrée. Il y est notamment indiqué : [44] […] Un renseignement sera donc nécessaire non pas lorsquil pourra être jugé absolument indispensable ou, au contraire, simplement utile. Il sera nécessaire lorsque chaque fin spécifique poursuivie par lorganisme, pour la réalisation dun objectif lié à ses attributions, sera légitime, importante, urgente et réelle, et lorsque latteinte au droit à la vie privée que pourra constituer la cueillette, la communication ou la conservation de chaque élément de renseignement sera proportionnelle à cette fin. Cette proportionnalité jouera en faveur de lorganisme lorsquil sera établi que lutilisation est rationnellement liée à lobjectif, que latteinte est minimisée et que la divulgation du renseignement requis est nettement plus utile à lorganisme que préjudiciable à la personne. Autrement, le droit à la vie privée et à la confidentialité des renseignements personnels devra prévaloir 6 . [26] Ainsi, en lespèce, lentreprise doit démontrer quen procédant de façon systématique à la vérification du dossier de crédit de tous ses candidats, elle poursuit un objectif réel et important en lien avec lévaluation de leur candidature. Puis, elle doit faire la preuve que les avantages reliés à cette collecte de renseignements personnels sont proportionnels aux inconvénients quelle occasionne aux candidats au regard de leur droit à la vie privée. 4 X et Pharmaprix, précitée, note 2. 5 X et Lépine Cloutier Ltée précitée, note 2. 6 Ib précitée, note 3
101289 Page : 9 [27] Lentreprise décrit ainsi lun des objectifs quelle poursuit en procédant à la vérification du dossier de crédit de ses candidats : « Vu le haut taux de roulement de nos employés, nous nous devons dévaluer le mieux possible nos candidats et nos employés afin de pouvoir leur offrir le meilleur emploi disponible selon leurs compétences, à la meilleure plage horaire et au meilleur endroit, le tout pour tenter de les garder heureux et à notre emploi le plus longtemps possible » 7 . De prime abord, il semble légitime quun employeur veuille offrir le poste le plus approprié à ses employés afin dassurer la rétention de son personnel. [28] Toutefois, de lavis de la Commission, le moyen choisi pour y parvenir, soit la vérification systématique du dossier de crédit des candidats, nest pas proportionnel à cet objectif. En effet, les éléments au dossier ne permettent pas détablir un lien rationnel entre cette collecte de renseignements personnels et cet objectif. [29] Dabord, comme la indiqué lentreprise, le fait davoir un bon dossier de crédit ne constitue pas une garantie quun candidat sera embauché. De la même manière, un résultat négatif néquivaut pas automatiquement à un refus dembauche. Selon lentreprise, cest plutôt lanalyse de lensemble du dossier du candidat qui lui permet de prendre une décision quant à son embauche. Or, lentreprise na pas expliqué en quoi il est pertinent dobtenir le dossier de crédit, en plus de toutes les informations déjà colligées au sujet du candidat, afin dévaluer ses capacités. La nécessité de ce renseignement dans le cadre de lévaluation « du poste le plus approprié » en lien avec une candidature na pas été démontrée par lentreprise. Il nest pas suffisant daffirmer que cette information permet dobtenir « un portrait plus complet du candidat ». [30] Létat du dossier de crédit doit avoir un impact sur les capacités dun candidat à exercer certaines fonctions et doit être en lien avec le poste quil sera appelé à occuper. Force est dadmettre que les attentes de lentreprise ne peuvent pas être les mêmes à lendroit de tous les candidats aux différents postes, chacun requérant des compétences particulières. En lespèce, lentreprise na pas démontré en quoi la collecte de ces renseignements personnels est en lien avec le poste offert. En conséquence, la vérification du dossier de crédit de tous les candidats ne peut se justifier au regard de lobjectif énoncé par lentreprise qui est doffrir le poste le plus approprié à ses candidats. 7 Lettre de lentreprise datée du 29 août 2013.
101289 Page : 10 [31] Le second objectif énoncé par lentreprise pour justifier la vérification du dossier de crédit des candidats est le fait quelle évolue « dans un domaine le vol interne est un fléau important » et que par conséquent, selon ses propos, elle doit obtenir le plus de renseignements possible sur ses éventuels candidats afin de protéger ses employés, ses clients et ses biens 8 . La Commission conçoit quil sagit dun objectif légitime puisque cette problématique peut avoir des conséquences importantes, notamment financières. [32] Toutefois, lentreprise na pas expliqué de quelle façon le dossier de crédit peut influencer sa décision dembaucher ou non les candidats aux différents postes. De laveu même de lentreprise, le fait quun candidat ait un mauvais dossier de crédit ne lempêche pas de lui offrir un emploi. Par ailleurs, est-ce que lentreprise considère que le résultat dune évaluation de crédit permet détablir le niveau dhonnêteté et de probité dun candidat? Si tel est le cas, nexiste-t-il pas dautres moyens pour parvenir à cette fin, notamment la vérification des références auprès danciens employeurs? De plus, cette vérification ne devrait-elle pas être modulée en fonction des exigences particulières aux postes à combler? Ces informations nont pas été fournies par lentreprise. Ainsi, force est de constater que les éléments au dossier sont insuffisants pour établir un lien rationnel entre la vérification du dossier de crédit des candidats et latteinte de ce deuxième objectif. [33] Par ailleurs, la Commission souligne les propos suivants tenus par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse au regard de la vérification du dossier de crédit à létape de la préembauche : [39] On doit noter que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a déjà invité les employeurs à ne pas procéder à des enquêtes de crédit au stade de la préembauche, le lien entre le dossier de crédit dun candidat et un emploi éventuel étant susceptible dentraîner une discrimination fondée sur la condition sociale 9 . [34] Ainsi, dans le cas à l'étude, lentreprise devait démontrer que, par la vérification du dossier de crédit des candidats, elle poursuivait des objectifs importants et que latteinte à la protection des renseignements personnels 8 Lettre de lentreprise datée du 18 mai 2012. 9 Référence : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Lapplication et linterprétation de larticle 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne. 2011 : http:/www.cdpdj.qc.ca/publications/formulaire emploi 2011. pdf
101289 Page : 11 causée par la collecte systématique du dossier de crédit est proportionnelle à ces objectifs, ce qui nest pas le cas. Il appert plutôt quune vérification systématique du dossier de crédit de tous ses candidats, sans égard au poste convoité, nest pas nécessaire dans le cadre de lévaluation de leur demande demploi. Elle doit donc cesser cette pratique, et ce, pour les motifs déjà énoncés. CONCLUSION [35] À la lumière de lenquête et des observations soumises par lentreprise, la Commission conclut que lentreprise a contrevenu à larticle 5 de la Loi sur le privé en recueillant un renseignement personnel non nécessaire à lobjet du dossier, à savoir le NAS du plaignant à létape de la préembauche afin dobtenir un poste dassistant-boulanger. [36] Néanmoins, la Commission prend acte que depuis le 3 février 2011, lentreprise ne recueille plus le NAS des candidats à létape de la préembauche, puisque la demande de fournir ce renseignement personnel napparaît plus sur le formulaire « Demande denquête préemploi ». Ce renseignement nest désormais recueilli que lors de lembauche. [37] Par ailleurs, bien que lentreprise nait jamais demandé à un candidat à létape de la préembauche de lui fournir son NAM et son numéro de permis de conduire, la Commission prend acte que ces renseignements personnels napparaissent plus sur le formulaire de lentreprise mentionné au paragraphe précédent. [38] En ce qui a trait à la vérification systématique du dossier de crédit de tout candidat à létape de la préembauche, lentreprise doit cesser cette pratique, parce que non nécessaire, et ce, pour les motifs déjà énoncés. [39] Elle doit de plus détruire tout renseignement concernant le plaignant et qui nétait pas nécessaire à létude de son dossier pour le poste dassistant-boulanger. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [40] DÉCLARE la plainte fondée;
101289 Page : 12 [41] PREND ACTE du fait que lentreprise a cessé de recueillir le NAS des candidats à létape de la préembauche, puisque la demande de fournir ce renseignement personnel napparaît plus sur le formulaire « Demande denquête préemploi »; [42] ORDONNE à lentreprise de cesser de procéder systématiquement à létape de la préembauche à la vérification du dossier de crédit de tout candidat au poste dassistant-boulanger; [43] ORDONNE à lentreprise de cesser de procéder systématiquement à létape de la préembauche à la vérification du dossier de crédit de tout candidat, et ce, sans distinction à légard du poste convoité, à moins que ce soit nécessaire à lévaluation des compétences particulières du poste à combler. Christiane Constant Juge administratif M e Avocate de lentreprise
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.