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Commission daccès à linformation du Québec Dossier : 081125 Date : Le 8 octobre 2014 Membre: M e Diane Poitras X. Plaignant et VALEURS MOBILIÈRES DESJARDINS (DISNAT) Entreprise DÉCISION OBJET PLAINTE en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] La Commission daccès à linformation (la Commission) est saisie dune plainte à lendroit de Disnat, une division de Valeurs mobilières Desjardins (lentreprise). M. (le plaignant) reproche à lentreprise davoir exigé quil fournisse des renseignements qui nétaient pas nécessaires à sa demande douverture dun compte de régime enregistré dépargne étude (REÉÉ). [2] Plus précisément, le plaignant reproche à lentreprise de lui avoir demandé de fournir des renseignements concernant son occupation, les coordonnées de son employeur ainsi que les coordonnées de sa conjointe et de 1 RLRQ, c. P-39.1, la Loi sur le privé.
081125 Page : 2 lemployeur de cette dernière en vue de louverture de ce compte. Selon le plaignant, lentreprise aurait refusé de lui ouvrir ce compte sil navait pas fourni ces informations. RÉSUMÉ DE LENQUÊTE [3] La Commission a procédé à une enquête, conformément à larticle 81 la Loi sur le privé. Elle a recueilli le point de vue du plaignant ainsi que de lentreprise. [4] Le plaignant est davis que les renseignements visés par sa plainte ne sont pas nécessaires compte tenu de la nature du compte en cause, soit un compte autogéré. Puisque ce compte ne requiert aucune recommandation de la part dun courtier en valeurs mobilières et quil nimplique quun service dexécution, le plaignant considère que les informations visées par sa plainte ne sont pas nécessaires à louverture du compte. [5] Dans le cadre de lenquête, lentreprise a invoqué plusieurs motifs pour justifier la nécessité de recueillir les renseignements faisant lobjet de la plainte. En résumé, elle a soutenu quelle est tenue de le faire selon les règles prescrites par lOrganisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM), la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes 2 et le Règlement sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes 3 . [6] Elle soutient que, selon cette réglementation, elle doit recueillir les renseignements en cause en vertu de la règle « Bien connaître son client » : Ces renseignements nous permettent de déterminer, entre autres, si le client et/ou son conjoint, sont associés, administrateurs ou employés dun courtier ou dune société de courtage, ou encore membres de leur groupe ou ayant des liens avec eux. Ces renseignements peuvent également servir à identifier des personnes considérées comme initiées ou actionnaires dominants dune société cotée en bourse. Le cas échéant, le client qui dit avoir le contrôle exclusif du compte doit, avec son conjoint, convaincre le courtier membre quil ne subit aucune influence de ce dernier quant aux opérations faites sur 2 L.C. 2000, ch.17. 3 DORS/2002-184.
081125 Page : 3 le compte et à lintérêt financier qui en découle en dépit de leur union conjugale. De plus, le client et/ou son conjoint pourraient être soumis à des exigences réglementaires particulières en raison de leur profession et/ou de leur statut dinitié. [7] Lentreprise a également soutenu quà titre de firme de courtage, elle a une obligation de diligence raisonnable en vertu de la réglementation relative au blanchiment dargent. Cette obligation lui impose de recueillir des informations suffisantes, notamment quant au risque que représente un client, la provenance de ses revenus et la valeur des opérations qui seront portées à son compte, de manière à déceler les opérations douteuses. Le cas échéant, lentreprise pourra ainsi déterminer quelles informations complémentaires sont requises dun client et quelles mesures supplémentaires de contrôle et de diligence raisonnable doivent être exigées pour un compte particulier. [8] Enfin, lentreprise a souligné que les renseignements au sujet de lemployeur du client et de son conjoint peuvent servir à identifier des personnes politiquement exposées pour lesquelles des règles particulières sont susceptibles de sappliquer selon la réglementation fédérale pertinente. [9] Pour sa part, le plaignant est davis que lentreprise pourrait atteindre ces objectifs en posant des questions autrement, afin de ne recueillir que les renseignements nécessaires, par exemple, en demandant : êtes-vous employé dune société de courtage ou conjoint dun employé dune société de courtage? Il soutient également que lentreprise ne devrait pas recueillir des renseignements détaillés et sen tenir à demander la nature de la profession du client ou de son conjoint. [10] Il souligne que certaines sociétés de courtage à escompte sont dispensées de lapplication de la règle de convenance lorsquelles noffrent que des services dexécution. OBSERVATIONS AU TERME DE LENQUÊTE [11] Le 13 janvier 2014, la Commission transmet à lentreprise un avis dintention linformant quelle envisage de lui ordonner : de cesser de recueillir les renseignements non nécessaires à louverture dun compte pour un REÉÉ, notamment lidentité et les coordonnées du conjoint de même que des renseignements précis au sujet de lemployeur du client et de son conjoint (profession, nom et coordonnées de
081125 Page : 4 lemployeur) plutôt que des renseignements sur la nature de la profession ou du domaine dactivité; de détruire les renseignements recueillis en contravention de la Loi sur le privé; de modifier ses formulaires afin de ne recueillir que les renseignements nécessaires à lobjet du dossier, dont le formulaire « Demande douverture de compte et conventions compte pour les opérations exécutées sans conseil » et de donner des instructions à ses employés en conséquence. [12] À la suite de cet avis, lentreprise a transmis à la Commission des observations supplémentaires détaillées concernant lobjet de la présente plainte. Lentreprise a envoyé copie de ses observations à lAutorité des marchés financiers (lAMF) et à lOCRCVM. Ces deux entités ont demandé à la Commission lautorisation de présenter leurs observations respectives à légard de la réglementation en vigueur et pertinente au présent dossier, considérant que lordonnance projetée était susceptible davoir un impact sur le fonctionnement du marché des valeurs mobilières. [13] Puisque lentreprise référait notamment, dans ses observations transmises aux termes de lenquête, à des règles adoptées par ces entités et compte tenu de leur rôle de surveillance du marché des valeurs mobilières, la Commission a autorisé lAMF et lOCRCVM à présenter leurs observations respectives, souhaitant disposer de toute linformation pertinente à lanalyse de la conformité de la pratique de lentreprise faisant lobjet de la plainte. [14] Ces deux entités ont présenté des observations détaillées, appuyées par des extraits de la législation et de la réglementation pertinentes, de publications relatives au domaine des valeurs mobilières et de plusieurs autorités. ANALYSE [15] La plainte porte sur la collecte, par lentreprise, de renseignements concernant loccupation du plaignant, les coordonnées de son employeur ainsi que les coordonnées de sa conjointe et de lemployeur de cette dernière en vue de louverture dun compte de REÉÉ autogéré. [16] La Loi sur le privé prévoit quune entreprise qui recueille des renseignements personnels sur autrui ne doit recueillir que les renseignements
081125 Page : 5 nécessaires à lobjet du dossier. De plus, sauf dans les circonstances prévues par la loi, elle ne peut refuser dacquiescer à une demande de bien ou de service à cause du refus de la personne qui formule la demande de lui fournir un renseignement personnel : 5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d'y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier. Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites. 9. Nul ne peut refuser d'acquiescer à une demande de bien ou de service ni à une demande relative à un emploi à cause du refus de la personne qui formule la demande de lui fournir un renseignement personnel sauf dans l'une ou l'autre des circonstances suivantes: 1° la collecte est nécessaire à la conclusion ou à lexécution du contrat; 2° la collecte est autorisée par la loi; 3° il y a des motifs raisonnables de croire qu'une telle demande n'est pas licite. En cas de doute, un renseignement personnel est réputé non nécessaire. [17] Il appartient à lentreprise de démontrer la nécessité de recueillir un renseignement personnel en fonction de lobjet du dossier et de la finalité poursuivie. [18] En effet, tel que lont souligné lAMF et lOCRCVM, le critère de nécessité appliqué par la Commission et la Cour du Québec est celui développé dans laffaire Société de transport de la Ville de Laval c. X. 4 , qui requiert une analyse tenant compte du contexte de chaque situation et de la finalité poursuivie par la collecte des renseignements personnels : 4 [2003] C.A.I. 667 (C.Q.). Voir aussi : Grenier c. Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, [2010] QCCQ 93; X. et EB Games, C.A.I. 08 18 56, 23 octobre 2013, c. Desbiens; X. et Lépine Cloutier Ltée, C.A.I. 08 09 43, 14 mars 2014, c. Poitras; Garderie Cœur dEnfant Inc., C.A.I. 08 02 72, 31 mars 2014, c. Poitras; P.S. c. Centre de santé et de services sociaux du Coeur-de-l'Île, 2012 QCCAI 268; X. et La Compagnie Nationale Money Mart (Insta-Chèques), C.A.I. 08 02 60, 17 mai 2013, c. Chartier; X. et 9038-5055 Québec inc. (Le Palace), C.A.I. 07 05 51, 23 mars 2012, c. Constant.
081125 Page : 6 [44] […] Un renseignement sera donc nécessaire non pas lorsquil pourra être jugé absolument indispensable, ou au contraire simplement utile. Il sera nécessaire lorsque chaque fin spécifique poursuivie par lorganisme, pour la réalisation dun objectif lié à ses attributions, sera légitime, importante, urgente et réelle, et lorsque latteinte au droit à la vie privée que pourra constituer la cueillette, la communication ou la conservation de chaque élément de renseignement sera proportionnelle à cette fin. Cette proportionnalité jouera en faveur de lorganisme lorsquil sera établi que lutilisation est rationnellement liée à lobjectif, que latteinte est minimisée et que la divulgation du renseignement requis est nettement plus utile à lorganisme que préjudiciable à la personne. Autrement, le droit à la vie privée et à la confidentialité des renseignements personnels devra prévaloir. Finalités poursuivies par la collecte et objet du dossier [19] Lentreprise a recueilli les renseignements visés par la plainte lors de louverture dun compte REÉÉ autogéré par le plaignant. Les renseignements ont été colligés à la section 2 du formulaire « Demande douverture de compte et conventions compte pour les opérations exécutées sans conseil ». Selon lentreprise, ce formulaire doit être complété par toute personne qui souhaite ouvrir un tel compte. [20] Il ressort de lensemble des observations présentées par lentreprise, lAMF et lOCRCVM que les renseignements sont recueillis essentiellement pour les fins suivantes : Respecter lobligation faite aux courtiers en valeurs mobilières de « Bien connaître son client », selon les paramètres prescrits par lAMF, lOCRCVM et le Centre danalyse des opérations et des déclarations financières du Canada (le « CANAFE »). Cette obligation vise deux objectifs 5 : 5 Autorité des marchés financiers. Instruction générale relativement au règlement 31-103 sur les obligations et dispenses dinscription et les obligations continues des personnes inscrites. Dernière modification 13 juillet 2013. Ce document indique : « La présente instruction générale indique de quelle façon les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les «ACVM» ou «nous») interprètent ou appliquent les dispositions du Règlement 31-03 sur les obligations et dispenses dinscription et les obligations continues des personnes inscrites (chapitre V-1.1, r. 10) (le «règlement») et de la législation en valeurs mobilières connexe. »
081125 Page : 7 o Protéger le client en adaptant les conseils et les recommandations à sa situation financière et familiale (obligation de convenance); o Assurer lintégrité des marchés financiers en contrôlant laccès à ce dernier et en surveillant lentrée des clients dont les activités sont susceptibles de porter atteinte à son intégrité (obligation de diligence raisonnable). Le courtier joue ainsi un rôle de sentinelle des marchés ou de « Gatekeeper »; Remplir ses obligations de vérification et de déclarations qui lui incombent en vertu de diverses lois visant à préserver lintégrité des marchés financiers, plus particulièrement la réglementation fédérale en matière de lutte contre le blanchiment dargent et le financement des activités terroristes. [21] Lentreprise et lAMF précisent que même si la demande douverture du compte a été effectuée auprès de Disnat, un courtier exécutant dispensé de lobligation de convenance selon les règles applicables, lentreprise nest pas pour autant relevée de son obligation de « Bien connaître son client » afin de jouer son rôle de « Gatekeeper ». Application du critère de nécessité [22] La Commission doit dabord déterminer si les objectifs poursuivis par la collecte des renseignements personnels en cause dans le présent dossier sont légitimes, importants, urgents et réels. Elle doit également apprécier la proportionnalité de cette collecte de renseignements par rapport aux finalités poursuivies (la collecte des renseignements visés par la plainte est-elle rationnellement liée aux objectifs visés, latteinte au droit à la vie privée est-elle minimisée et la divulgation du renseignement requis est-elle nettement plus utile à lentreprise que préjudiciable à la personne concernée). [23] La protection du client qui souhaite investir et lintégrité des marchés financiers constituent très certainement des objectifs légitimes, importants réels et urgents. Certaines situations décrites dans lactualité ces dernières années ont conduit les gouvernements provinciaux et fédéral à encadrer le marché des valeurs mobilières et à mettre en place des programmes de protection et d'indemnisation des investisseurs. [24] Cet encadrement inclut ladoption de lois, de règlements et de directives diverses. Il implique également loctroi de responsabilités à des organismes de
081125 Page : 8 réglementation et de contrôle dont la mission générale consiste à surveiller le respect des normes visant lencadrement des activités des marchés financiers et la protection du public. LAMF et lOCRCVM sont de tels organismes 6 . [25] La Cour suprême a déjà affirmé que la réglementation de ce secteur dactivité vise à protéger les investisseurs et à assurer le rendement du marché et la confiance du public dans le système. Elle a conclu que ces objectifs sont de première importance 7 . [26] Lobligation imposée aux courtiers en valeurs mobilières de bien connaître leurs clients sinscrit dans cet encadrement normatif. Il sagit dune obligation importante faisant partie de la réglementation des marchés financiers : 13.2. Connaissance du client Principes généraux Les personnes inscrites ont comme fonction de préserver lintégrité des marchés financiers. Elles doivent se garder, même par omission, de contribuer à des comportements qui entachent la réputation des marchés. Dans lexercice de cette fonction, elles doivent sacquitter de lobligation de connaissance du client prévue à larticle 13.2, obligation qui est un exercice de diligence raisonnable et qui requiert détablir lidentité du client. Son respect peut aider à ce que les opérations soient effectuées conformément aux lois sur les valeurs mobilières. Linformation servant à connaître le client est à la base de lévaluation de la convenance des opérations. Elle contribue à protéger le client, la personne inscrite et lintégrité des marchés financiers. Pour remplir leur obligation de connaissance du client, les personnes inscrites doivent prendre des mesures raisonnables pour obtenir cette 6 Pour lAMF, voir ses fonctions notamment aux articles 4, 7 et 8 de la Loi sur lautorité des marchés financiers, RLRQ, c. A-33.2. Pour sa part, lOCRCVM est un organisme pancanadien dautoréglementation qui encadre lexercice des courtiers membres et lensemble des opérations effectuées sur les marchés de capitaux propres et titres de créances au Canada. LAMF a reconnu lOCRCVM à titre dorganisme dautoréglementation en vertu des articles 59 et 60 de la Loi sur lautorité des marchés financiers et la Décision 2008-PDG-0216, 2008-05-02, Bulletin 2008-05-30, vol. 5, no. 21. 7 British Columbia Securities Commission c. Branch, [1995] 2 R.C.S. 3.
081125 Page : 9 information et la mettre à jour régulièrement 8 . [Nos soulignements] [27] La Commission conclut donc que les objectifs poursuivis par la collecte des renseignements en cause dans le présent dossier sont légitimes, importants, urgents et réels. [28] La collecte de ces renseignements est également rationnellement liée aux objectifs visés. En effet, les informations demandées au sujet de lemployeur du client et de son conjoint permettent au courtier de sacquitter de son obligation de diligence raisonnable et de son rôle de « Gatekeeper » du marché des valeurs mobilières, notamment en vérifiant si le client et son conjoint sont associés, administrateurs ou employés dun courtier ou dune société de courtage, membres de leur groupe ou sils ont des liens avec eux. Ces renseignements peuvent également servir à identifier des personnes considérées comme initiées ou actionnaires dominants dune société cotée en bourse. [29] Les renseignements visent également à déterminer le niveau de risque que représente un client, la provenance de ses revenus et la valeur des opérations qui seront portées à son compte, de manière à déceler les opérations douteuses. Le cas échéant, ces renseignements lui permettent de déterminer quelles informations complémentaires sont requises dun client et quelles mesures supplémentaires de contrôle et de diligence raisonnable doivent être exigées pour un compte particulier. [30] Au surplus, la « Règle 1300 Contrôle des comptes » de lOCRCVM prévoit spécifiquement quun courtier en valeurs mobilières doit recueillir et conserver pour une certaine période les informations en cause dans la présente plainte : 1. Identité et solvabilité (a) Un courtier membre doit faire preuve de la diligence voulue pour connaître constamment les faits essentiels relatifs à tous ses clients ainsi qu'à tous les ordres ou comptes acceptés. […] 8 Instruction générale relativement au règlement 31-103 sur les obligations et dispenses dinscription et les obligations continues des personnes inscrites, préc. note 5.
081125 Page : 10 (n) Les courtiers membres doivent conserver en dossier tous les renseignements obtenus et toutes les procédures de vérification appliquées en vertu du présent article, sous une forme accessible à la Société pendant un délai de cinq ans à compter de la fermeture du compte visé. 2. (a) Un courtier membre doit désigner un surveillant qui est responsable de l'ouverture de nouveaux comptes et de létablissement et du maintien de procédures de contrôle des comptes acceptables pour la Société pour faire en sorte que le traitement des affaires des clients soit dans les limites d'une conduite professionnelle, corresponde à des principes de commerce justes et équitables et ne soit pas préjudiciable aux intérêts du secteur des valeurs mobilières. Dans le cadre de ce contrôle, chaque nouveau compte doit être ouvert au moyen d'un formulaire d'ouverture de compte qui comprend les renseignements pertinents requis dans le Formulaire no 2 dans le cas des comptes de détail, des comptes institutionnels et dans le cas des comptes dispensés de l'examen de la convenance. [Nos soulignements] [31] Dans le formulaire no 2 - « Ouverture de compte », prescrit par lOCRCVM, la section 3 « Employeur du client » prévoit que le courtier doit indiquer la profession du client, lidentité de son employeur, son adresse et le genre dentreprise. La section 4 de ce formulaire requiert que le courtier recueille notamment le nom du conjoint, sa profession, le nom de son employeur et le genre dentreprise. [32] Ainsi, la collecte, par lentreprise, des renseignements concernant la profession et lemployeur du plaignant et de sa conjointe constitue une exigence qui découle de la réglementation applicable aux courtiers en valeurs mobilières. Il nappartient pas à la Commission de remettre en cause cette réglementation. [33] Dans ce contexte, la Commission considère quil nexiste pas dautres moyens portant moins atteinte à la vie privée des personnes concernées pour atteindre ces objectifs. Le plaignant souligne que lentreprise pourrait atteindre ces objectifs en recueillant moins dinformations, notamment en demandant uniquement la nature de la profession ou en posant des questions générales : êtes-vous employé dune société de courtage ou conjoint dun employé dune société de courtage? Êtes-vous « initié » ou conjoint dinitié?
081125 Page : 11 [34] Certes, selon la documentation transmise par lentreprise, lAMF et lOCRCVM, la quantité et la nature des renseignements qui doivent être recueillis en vertu de lobligation « Bien connaître son client » diffèrent selon certaines circonstances, par exemple, si le courtier est dispensé de lobligation de convenance ou selon la nature des titres transigés. [35] Toutefois, tel quexposé précédemment, la réglementation dans ce domaine prévoit que les informations recueillies au moyen du formulaire douverture de compte prescrit par lOCRCVM constituent le minimum dinformations qui doivent être obtenues par les courtiers en valeurs mobilières inscrits auprès de cet organisme. Lentreprise avait donc lobligation de recueillir ces renseignements. [36] De plus, la complexité des termes utilisés dans la réglementation, tel que le terme « initié » et les sanctions importantes imposées aux courtiers en cas de non-respect de leurs obligations justifient la collecte des informations demandées au sujet des employeurs du client et de son conjoint. Enfin, le niveau de détails des renseignements demandés permet datteindre les objectifs visés sans pour autant constituer une atteinte injustifiée au droit à la vie privée des personnes concernées. [37] Dans laffaire Branch précitée 9 , la Cour suprême a souligné que les participants au marché des valeurs mobilières, secteur fortement réglementé, ont des attentes en matière de vie privée moins élevées en ce qui concerne les éléments permettant de « protéger le public et de décourager les formes préjudiciables de comportement commercial ». [38] Force est de constater également que les renseignements relatifs à la profession et à lemployeur dune personne ne constituent pas, a priori, une information de nature très sensible. Nombreuses sont les situations une personne divulgue ces renseignements, par choix ou par obligation, dans la vie courante. [39] Dans le contexte de la présente plainte, la divulgation de ces renseignements est nettement plus utile à lentreprise quelle nest préjudiciable à la personne concernée. [40] À la lumière des faits du présent dossier, la Commission conclut donc que la collecte des renseignements personnels faisant lobjet de la plainte est proportionnelle aux finalités poursuivies par lentreprise. 9 British Columbia Securities Commission c. Branch, préc. note 7.
081125 Page : 12 [41] Lentreprise a donc démontré la nécessité de recueillir lidentité et les coordonnées du conjoint dun client de même que les renseignements au sujet de son employeur et de celui de son conjoint au moyen du formulaire « Demande douverture de compte et conventions Compte pour les opérations exécutées sans conseil ». [42] Aussi, puisque cette collecte est requise par la réglementation et nécessaire à la conclusion ou à lexécution du contrat de courtage, lentreprise pouvait refuser louverture dun compte au client ayant refusé de lui fournir ces informations. CONCLUSION [43] En conclusion, lentreprise na pas contrevenu aux articles 5 et 9 de la Loi sur le privé. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [44] DÉCLARE la plainte non fondée. DIANE POITRAS Juge administratif
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