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Commission d’accès à l’information du Québec Dossier : 080943 Date : Le 14 mars 2014 Membre: M e Diane Poitras

DÉCISION OBJET PLAINTE en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] La Commission d’accès à l’information (la Commission) est saisie d’une plainte à l’endroit de l’entreprise Lépine Cloutier Ltée (l’entreprise) concernant la collecte de renseignements personnels au sujet de M me (la plaignante) lors de l’évaluation de sa candidature à un poste de secrétaire-réceptionniste.

[2] La plaignante reproche à l’entreprise d’avoir recueilli des renseignements personnels qui n’étaient pas nécessaires à cette évaluation et d’avoir mis fin à sa période de formation pour ce poste au motif qu’elle a refusé d’autoriser l’entreprise à procéder à une enquête à son sujet.

1 L.R.Q., c. P-39.1, la Loi sur le privé.

Plaignante et LÉPINE CLOUTIER LTÉE Entreprise

08 09 43 Page : 2 [3] À la suite de cette plainte, la Commission a procédé à une enquête conformément à l’article 81 de la Loi sur le privé. Le rapport préliminaire d’enquête a été communiqué à la plaignante et à l’entreprise en novembre 2008 afin d’obtenir leurs observations.

LES FAITS [4] La plaignante allègue que le 5 mai 2008, elle a commencé une période de formation de trois semaines pour un poste de secrétaire-réceptionniste au sein de l’entreprise. Il était convenu qu’elle devait rencontrer la responsable des ressources humaines de l’entreprise après une semaine d’essai pour indiquer si elle était toujours intéressée par ce poste.

[5] Lors de cette rencontre, la plaignante fait part de son intérêt à poursuivre la formation et travailler au sein de l’entreprise. La responsable des ressources humaines lui demande alors de compléter certains documents nécessaires pour son embauche. Elle lui mentionne qu’elle sera intégrée à l’horaire de travail de l’été.

[6] La plaignante complète les documents remis par l’entreprise à l’exception du formulaire de consentement visant à autoriser « Rapide Investigation » à faire, au nom de l’entreprise, une enquête à son sujet. Elle explique qu’elle a communiqué à l’entreprise plusieurs renseignements, dont son numéro d’assurance sociale (NAS) et le nom et les coordonnées de trois références, informations suffisantes à son avis pour faire enquête à son sujet en lien avec l’emploi convoité.

[7] Quelques jours plus tard, l’entreprise l’informe qu’elle ne peut retenir ses services si elle maintient son refus de signer ce formulaire.

[8] La plaignante s’adresse donc à la Commission pour dénoncer cette situation.

[9] Dans le cadre de l’enquête, l’entreprise ne conteste pas ces faits. Elle précise qu’elle a demandé à la plaignante, à la suite de son entrevue, de remplir le formulaire de consentement afin de lui permettre de procéder à diverses vérifications, incluant l’obtention d’informations relatives à son dossier de crédit, à ses antécédents judiciaires et auprès de références d’emplois antérieurs. Elle soutient que le numéro d’assurance sociale et la date de naissance d’une personne sont nécessaires pour effectuer ces vérifications.

08 09 43 Page : 3 [10] L’entreprise justifie la nécessité de recueillir ces renseignements ainsi: Ce poste nécessite une conduite exemplaire ainsi qu’un bon crédit puisqu’il y a beaucoup de manipulation d’argent incluant des montants assez importants. De plus, le titulaire du poste de secrétaire réceptionniste a accès aux contrats funéraires des clients nous retrouvons des informations confidentielles concernant nos clients.

[11] L’entreprise insiste sur le fait que la plaignante n’a jamais été embauchée officiellement en tant qu’employée régulière, mais qu’elle a simplement travaillé durant une période d’essai de quelques jours. Elle n’a donc pas été congédiée. De plus, elle allègue que la plaignante a elle-même refusé l’emploi puisqu’elle a été informée des règles et procédures de l’entreprise pour l’octroi du poste; il lui appartenait de se plier à ces exigences ou de refuser le poste.

[12] Le formulaire utilisé s’intitule « Formulaire de consentement autorisation d’obtenir et de transmettre des renseignements personnels (Loi 68) ». Il contient un espace visant à recueillir le nom et les coordonnées de la personne, son NAS, sa date de naissance, son numéro de permis de conduire (pour les postes nécessitant la conduite d’un véhicule). On y retrouve également des clauses de consentement à la communication et à la collecte de renseignements personnels auprès de tiers.

[13] À la suite de la transmission du rapport d’enquête, l’entreprise n’a pas soumis d’observations.

[14] Pour sa part, la demanderesse confirme sa version des faits et demande à la Commission de conclure que l’entreprise a contrevenu à la Loi sur le privé et :

1. à conclure à la contravention par Lépine & Cloutier des dispositions de l’article 9 de la loi;

2. à imposer une amende au sens de l’article 91 pour contravention à l’article 9;

3. à exiger de Lépine & Cloutier qu’elle cesse d’exiger sous la menace de refus d’embauche, la signature d’un tel consentement préembauche;

4. à condamner Lépine & Cloutier à me verser une indemnité équivalente au salaire que j’aurais reçu si j’avais été à leur emploi pendant la durée j’ai me chercher un nouvel

08 09 43 Page : 4 emploi, soit la somme de 1 824$ équivalente à 19 jours de travail à raison de 12$/heure;

5. à imposer à titre exemplaire, une amende pour contravention à une disposition d’une loi d’ordre public, ayant préséance sur toute autre loi;

6. à obliger Lépine & Cloutier à diffuser le jugement de la CAl auprès de ses employés dans toutes leurs succursales au Québec;

7. et enfin, à interroger le procureur de Lépine & Cloutier pour vérifier qu’il a bien tenu les propos que je lui prête et le cas échéant, que celle-ci soit rappelée à l’ordre quant à son devoir de déontologie.

OBSERVATIONS AU TERME DE L’ENQUÊTE [15] Le 27 novembre 2009, la Commission transmet à l’entreprise un avis d’intention l’informant qu’elle envisage de lui recommander de modifier son formulaire de consentement afin qu’il respecte les dispositions de la Loi sur le privé. L’avis prévoit qu’elle envisage également de lui ordonner de :

- cesser de recueillir la date de naissance et le NAS d’une personne à l’étape de l’évaluation de sa candidature pour un emploi;

- cesser de procéder à une enquête de crédit au sujet d’un candidat au poste de secrétaire-réceptionniste;

- refuser un candidat pour le seul motif qu’il refuse de signer le formulaire de consentement visant à permettre à l’entreprise de recueillir ces renseignements.

[16] L’avis prévoit que l’entreprise peut faire parvenir à la Commission ses observations écrites additionnelles avant le 28 décembre 2009. L’entreprise ne formule aucun commentaire à la suite de cet avis.

[17] Le présent dossier est assigné à la soussignée à l’été 2013. Compte tenu des délais écoulés depuis l’envoi de l’avis d’intention à l’entreprise, la Commission lui transmet un nouvel avis, le 25 juillet 2013, afin de vérifier si ses pratiques ont été modifiées et pour lui permettre de mettre à jour les informations contenues au dossier de la Commission, le cas échéant. Dans cet avis, la Commission invite l’entreprise à préciser certains aspects et à formuler des commentaires sur les éléments suivants :

08 09 43 Page : 5 L’entreprise collige-t-elle toujours le numéro d’assurance sociale et la date de naissance à l’étape de l’évaluation des candidats? Si oui, en quoi ce renseignement est-il nécessaire à cette étape du recrutement?

L’entreprise procède-t-elle toujours à une enquête de crédit au sujet d’un candidat au poste de secrétaire-réceptionniste? Si oui, en quoi les informations recueillies sont-elles nécessaires à l’évaluation d’un candidat pour ce poste? Quelle est l’exigence propre à ce poste justifiant la collecte de ces renseignements? L’entreprise dispose-t-elle d’une politique relative à la collecte et à la conservation de ces renseignements?

L’entreprise a-t-elle modifié le libellé des clauses de consentement contenues dans le formulaire « Autorisation d’obtenir et de transmettre des renseignements personnels (Loi 68) »? Si oui, nous transmettre une copie de ce nouveau formulaire. Sinon, l’entreprise est invitée à commenter leur conformité avec l’article 14 de la Loi sur le privé.

À la lumière de l’article 9 de la Loi sur le privé, l’entreprise était-elle autorisée à refuser la demande d’emploi de la plaignante pour le seul motif qu’elle refusait de signer le formulaire d’autorisation permettant à l’entreprise de procéder à une enquête de crédit à son sujet?

[18] Cet avis rappelle enfin à l’entreprise que la Commission envisage de lui ordonner de :

cesser de recueillir la date de naissance et le NAS d’une personne à l’étape de l’évaluation de sa candidature pour un emploi;

cesser de procéder à une enquête de crédit au sujet d’un candidat au poste de secrétaire-réceptionniste;

cesser de refuser un candidat pour le seul motif qu’il refuse que l’entreprise recueille ces renseignements;

modifier son formulaire « Autorisation d’obtenir et de transmettre des renseignements personnels (Loi 68) » afin que les clauses de consentement qui s’y trouvent permettent à son signataire d’exprimer un consentement éclairé donné à des fins spécifiques.

08 09 43 Page : 6 [19] Le 20 août suivant, l’entreprise transmet ses observations à la Commission. Elle mentionne d’abord n’avoir jamais reçu l’avis d’intention de novembre 2009. Le dossier de la Commission indique toutefois que lors d’un appel téléphonique en date du 15 mars 2010, la représentante de l’entreprise a confirmé à l’analyste enquêteur de la Commission avoir reçu l’avis d’intention du 27 novembre 2009.

[20] Quant aux faits reprochés par la plainte, l’entreprise soutient que la date de naissance des candidats est nécessaire pour obtenir leur dossier criminel alors que leur NAS est requis pour l’obtention de leur dossier de crédit (postes de conseillers en arrangement préalable, directeurs de famille, secrétaires-réceptionnistes, commis comptables, cadres intermédiaires et supérieurs).

[21] L’entreprise souligne qu’il est important d’obtenir ces informations confidentielles puisqu’elle œuvre dans le domaine funéraire et que ses employés doivent prendre connaissance de renseignements confidentiels.

[22] De plus, pour les employés qui doivent utiliser leur force physique (porteurs de cercueil, chauffeurs porteurs et employés de cimetière), l’entreprise demande leur consentement afin d’obtenir une copie de leur(s) dossier(s) à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), le cas échéant.

[23] En ce qui concerne le consentement, l’entreprise souligne qu’il est libre et volontaire et qu’elle n’oblige aucun candidat à signer le formulaire. Toutefois, pour les postes mentionnés précédemment, dont le poste de secrétaire-réceptionniste, l’entreprise indique qu’elle ne peut considérer la candidature d’une personne qui refuse de signer le formulaire.

[24] L’entreprise transmet, avec ses commentaires, un nouveau formulaire de consentement ainsi qu’une description de tâches concernant le poste visé par la plainte.

[25] Le 19 novembre suivant, la Commission transmet à l’entreprise une lettre indiquant que ses observations soulèvent de nouvelles questions relatives à la collecte de renseignements personnels :

Votre lettre réfère au « dossier de justice » et au « dossier criminel » alors que le formulaire de consentement mentionne que des « vérifications criminelles » sont effectuées par l’entreprise. La Commission s’interroge sur la nature précise des renseignements ainsi recueillis (ex. : lettre indiquant si oui ou non le plumitif contient des

08 09 43 Page : 7 condamnations, copie du plumitif, enquête auprès des services de police ou autre).

La Commission s’interroge également sur la nécessité d’obtenir tous les « dossiers CSST », peu importe la nature de la lésion professionnelle subie, pour l’évaluation des candidats aux postes de porteurs de cercueil, chauffeurs porteurs et employés de cimetière ou pour leur embauche (préciser également la nature des renseignements recueillis auprès de la CSST et l’étape du processus de recrutement ils sont recueillis).

Enfin, la Commission s’interroge sur la conformité de la pratique de l’entreprise considération la candidature d’une personne qui refuse de signer le formulaire de consentement eu égard à l’article 9 de la Loi sur le privé […].

[26] Dans cette lettre, la Commission rappelle à l’entreprise qu’il lui appartient de démontrer la nécessité de la collecte de renseignements personnels à l’égard de l’objet du dossier qu’elle constitue au sujet d’une personne et qu’en cas de doute, un renseignement est considéré non nécessaire.

[27] La Commission avise l’entreprise que, sous réserve des observations qu’elle soumettra le cas échéant, elle pourrait lui ordonner de cesser de recueillir auprès de la CSST le(s) dossier(s) des candidats aux postes mentionnés précédemment, de modifier son formulaire de consentement en conséquence et de cesser de refuser un emploi à un candidat qui refuse de signer ce formulaire, et ce, en plus des ordonnances déjà énoncées dans ses avis antérieurs.

[28] L’entreprise transmet ses 20 janvier 2014.

[29] En réponse à la première question de la Commission, elle précise que la vérification du dossier criminel inclut l’ensemble du « dossier de justice » : elle mandate une autre entreprise qui obtient les informations contenues aux plumitifs.

[30] En ce qui concerne le dossier de la CSST des candidats à certains postes, l’entreprise affirme qu’elle l’obtient seulement pour les employés qui doivent « forcer de manière importante », dans le but de vérifier si les candidats possèdent les capacités physiques requises et qu’ils n’ont pas de restriction les

de ne pas prendre en

commentaires à la Commission le

08 09 43 Page : 8 empêchant d’occuper le poste. Elle réitère qu’elle doit obtenir ces renseignements « qui ont une relation directe avec la santé et la sécurité du travailleur ou de la travailleuse, mais aussi avec les collègues et notre clientèle », mais invite la Commission à préciser les motifs pour lesquels elle ne devrait pas les recueillir, si telle est sa conclusion.

[31] Enfin, l’entreprise souligne qu’elle explique aux candidats pourquoi il est important de signer le formulaire de consentement, mais qu’ils sont libres de le signer ou non. Elle affirme que la situation vécue par la plaignante est survenue à la suite d’une erreur d’une employée qui travaillait au sein de l’entreprise et que ce n’est pas une pratique courante.

[32] L’entreprise réitère l’importance de recueillir pour l’ensemble de ses candidats les informations confidentielles demandées compte tenu de son domaine d’activité.

ANALYSE [33] La Loi sur le privé établit certaines règles relatives à la protection des renseignements personnels qu’une entreprise doit respecter. Ces règles visent à établir un équilibre entre le droit d’un individu au respect de sa vie privée et les besoins d’une entreprise en matière de collecte, d’utilisation et de communication de renseignements personnels dans le cadre de l’exercice de ses activités.

[34] À titre d’entreprise 2 , Lépine Cloutier Ltée est soumise à ces règles, notamment celles relatives à la collecte de renseignements personnels et au consentement à la communication et à la collecte auprès de tiers.

[35] La plainte soulève des questions au sujet de divers aspects relatifs à la protection des renseignements personnels :

- La nécessité des renseignements personnels colligés au sujet des candidats à un poste au sein de l’entreprise;

- La conformité du formulaire de consentement utilisé par l’entreprise aux dispositions de la Loi sur le privé;

2 Constitue l'exploitation d'une entreprise l'exercice, par une ou plusieurs personnes, d'une activité économique organisée, qu'elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur aliénation, ou dans la prestation de services (art. 1 de la Loi sur le privé et 1525 du C.c.Q.).

08 09 43 Page : 9 - Le refus d’embauche de la plaignante au motif qu’elle a refusé de signer le formulaire de consentement.

[36] Examinons chacune de ces questions. La nécessité des renseignements personnels colligés [37] L’entreprise recueille certains renseignements par le biais d’un formulaire de consentement que doit remplir le candidat qui désire obtenir un poste au sein de l’entreprise. Il s’agit notamment de son nom, ses coordonnées, sa date de naissance et son NAS.

[38] L’entreprise recueille également, avec le consentement du candidat, les renseignements contenus aux plumitifs à son sujet et son dossier de crédit.

[39] L’entreprise a également indiqué qu’elle recueille, avec le consentement du candidat, pour certains postes impliquant des efforts physiques, son ou ses dossier(s) détenu(s) par la CSST.

[40] Les renseignements recueillis renseignements personnels, c’est-à-dire des renseignements qui concernent une personne physique et permettent de l’identifier [41] En vertu de l’article 5 de la Loi sur le privé, l’entreprise doit démontrer que les renseignements personnels qu’elle recueille sont nécessaires à l’objet du dossier constitué au sujet de la plaignante :

5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d'y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l'objet du dossier.

Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites.

[42] Cet article vise à minimiser l’atteinte à la vie privée en limitant la collecte de renseignements personnels par les entreprises aux seuls renseignements nécessaires à l’objet du dossier qu’elles constituent au sujet d’un individu.

[43] En l’espèce, l’entreprise recueille des renseignements personnels au sujet des personnes qui souhaitent obtenir un emploi aux fins de l’évaluation de

3 Art. 2 de la Loi sur le privé.

par l’entreprise constituent des 3 .

08 09 43 Page : 10 leur candidature. Cette dernière recueille différents renseignements selon le poste convoité.

[44] Ainsi, la plaignante qui souhaitait être embauchée au poste de secrétaire-réceptionniste a été invitée à remplir le formulaire de consentement afin de permettre à l’entreprise d’obtenir des renseignements personnels à son sujet auprès de tiers :

6. La personne qui recueille des renseignements personnels sur autrui doit les recueillir auprès de la personne concernée, à moins que celle-ci ne consente à la cueillette auprès de tiers.

[45] Ce consentement vise à autoriser l’entreprise à recueillir des renseignements personnels auprès d’une personne autre que le candidat, la collecte de renseignements personnels par une entreprise devant s’effectuer a priori auprès de la personne concernée. De plus, l’obtention d’un consentement n’autorise pas l’entreprise à recueillir des renseignements qui ne sont pas nécessaires à l’objet du dossier.

[46] En effet, la règle relative à la nécessité de la collecte des renseignements personnels est impérative et une entreprise ne peut y déroger, même avec le consentement de la personne concernée [47] Le fardeau de démontrer renseignements personnels repose sur l’entreprise qui désire les obtenir. Celle-ci doit démontrer que les renseignements personnels qu’elle recueille sont nécessaires à l’objet du dossier. En l’occurrence, ces renseignements ont été recueillis aux fins de l’évaluation d’une candidature à un emploi.

[48] Quant à l’interprétation du critère de nécessité que l’on retrouve à l’article 5 de la Loi sur le privé, dans l’affaire Laval (Société de transport de la Ville de) c. X5, la Cour du Québec écarte les deux courants que l’on retrouvait dans la jurisprudence jusqu’alors, soit l’interprétation stricte et littérale fondée essentiellement sur le sens commun du terme « nécessaire » (requis,

4 Voir notamment : Laval (Société de transport de la Ville de) c. X., [2003] C.A.I. 667 (C.Q.), l’affaire Laval; Grenier c. Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, [2010] QCCQ 93, 97; X. et Skyventure Montréal, C.A.I. 101888, 16 septembre 2013, c. Desbiens. 5 Préc., note 4. Cette décision porte sur l’interprétation de l’article 64 de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., c. A-2.1) qui réfère également au critère de nécessité lors de la collecte de renseignements personnels par un organisme public.

4 . la nécessité de recueillir certains

08 09 43 Page : 11 indispensable) et l’interprétation relative et contextuelle large et libérale se rapportant plutôt à l’utilité du renseignement. Elle conclut qu’une « interprétation isolée, uniforme et figée du critère de nécessité » ou une « application technique » ne convient pas au contexte d’application d’une législation visant la protection des renseignements personnels. Elle propose d’interpréter ce critère à la lumière de la finalité poursuivie par l’organisme qui recueille des renseignements personnels :

[32] Cette exigence de finalité spécifique se retrouve d’ailleurs aux articles mêmes qui traitent du critère de nécessité, dans les renseignements personnels. En effet, la simple lecture de ces dispositions nous permet de constater qu’elles articulent une conception finaliste de la nécessité.

[33] Ce principe d’interprétation, voulant que la nécessité doit être évaluée relativement aux fins pour lesquelles un renseignement est requis, est conforme à la lettre et à l’esprit de la loi. Il ne s’agit pas de déterminer ce qu’est la nécessité en soi, mais plutôt de chercher, dans le contexte de la protection des renseignements personnels, et pour chaque situation, ce qui est nécessaire à l’accomplissement de chaque fin particulière pour laquelle un organisme public plaide la nécessité. […]

[nos soulignements] [49] La Cour rappelle ensuite l’objet des lois sur la protection des renseignements personnels, soit le droit au respect de la vie privée, un droit fondamental protégé par la Charte des droits et libertés de la personne 6 , et le principe voulant que les lois doivent être interprétées d’une manière qui favorise l’exercice des droits fondamentaux. Elle propose donc d’interpréter l’exigence de nécessité en la développant autour des deux volets du test élaboré par la Cour suprême dans l’arrêt Oakes 7 , bien que ce test vise plutôt à déterminer si une atteinte à un droit fondamental est justifiée dans le cadre d’une société libre et démocratique (articles 1 de la Charte canadienne des droits et libertés 8 et 9.1 de la Charte québécoise) :

6 L.R.Q., c. C-12, la Charte québécoise. 7 R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103. 8 Partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, [annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, c. 11 (R.-U.)].

deux lois de protection des

08 09 43 Page : 12 [44] […] Un renseignement sera donc nécessaire non pas lorsqu’il pourra être jugé absolument indispensable, ou au contraire simplement utile. Il sera nécessaire lorsque chaque fin spécifique poursuivie par l’organisme, pour la réalisation d’un objectif lié à ses attributions, sera légitime, importante, urgente et réelle, et lorsque l’atteinte au droit à la vie privée que pourra constituer la cueillette, la communication ou la conservation de chaque élément de renseignement sera proportionnelle à cette fin. Cette proportionnalité jouera en faveur de l’organisme lorsqu’il sera établi que l’utilisation est rationnellement liée à l’objectif, que l’atteinte est minimisée et que la divulgation du renseignement requis est nettement plus utile à l’organisme que préjudiciable à la personne. Autrement, le droit à la vie privée et à la confidentialité des renseignements personnels devra prévaloir.

[50] Dans le contexte du présent dossier, les renseignements personnels sont recueillis au stade de l’évaluation de la candidature d’une personne qui postule à certains emplois. Il est donc pertinent, dans le cadre de l’analyse de la nécessité de ceux-ci, de se référer à la Charte québécoise qui encadre également la collecte de renseignements personnels au moment du recrutement de candidats à un emploi :

18.1 Nul ne peut, dans un formulaire de demande d’emploi ou lors d’une entrevue relative à un emploi, requérir d’une personne des renseignements sur les motifs visés dans l’article 10 sauf si ces renseignements sont utiles à l’application de l’article 20 ou à l’application d’un programme d’accès à l’égalité existant au moment de la demande.

10. Toute personne a droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap. […]

20. Une distinction, exclusion ou préférence fondée sur les aptitudes ou qualités requises par un emploi, ou justifiée par le caractère charitable, philanthropique, religieux, politique ou éducatif d’une institution sans but lucratif ou qui est vouée

08 09 43 Page : 13 exclusivement au bien-être d’un groupe ethnique est réputée non discriminatoire.

[nos soulignements] [51] Ces dispositions imposent à l’entreprise le respect de certains paramètres afin d’éviter de faire de la discrimination lors de l’embauche d’employés :

De prime abord, il est opportun de préciser que la discrétion traditionnellement reconnue à l’employeur de choisir ses employés au stade de l’embauche doit se faire dans le respect des droits fondamentaux de toute personne. Il s’ensuit que lors de l’embauche, les droits de gérance de l’employeur en sont tout autant limités. Comme l’a déjà exposé le Tribunal, un employeur a le droit de sélectionner ses employés, mais ce droit doit être exercé dans le respect des différents paramètres fixés par la société, incluant ceux relatifs à l’égalité et à la non-discrimination 9 . [52] Comme l’a indiqué la Cour suprême 10 , dans le domaine de l’emploi, l’objet de la Charte est « de mettre fin à une exclusion arbitraire basée sur des idées préconçues à l’égard de caractéristiques personnelles qui, tout en tenant compte du devoir d’accommodement, n’affectent aucunement la capacité de faire le travail ».

[53] Ainsi, les tribunaux ont déjà conclu qu’il appartient à l’employeur d’établir, au préalable, la liste des qualités et exigences requises, essentielles à l’accomplissement des tâches d’un emploi, de manière à définir une norme objective qui balisera son processus de sélection et lui évitera d’évaluer les candidats en fonction de perceptions, de préjugés ou de stéréotypes 11 . [54] Dans le contexte la collecte de renseignements personnels vise à évaluer un candidat et à prendre une décision relative à son embauche, l’évaluation de la nécessité de cette collecte doit nécessairement tenir compte des principes établis par la Charte et par les tribunaux qui les ont interprétés.

9 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Stortini) c. De Luxe Produits de papier inc., T.D.P.Q. Montréal, n o 500-53-000150-019, 7 février 2003, par. 10. 10 Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Montréal (Ville), [2000] 1 R.C.S. 665, 686. 11 Notamment : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Gaz Métropolitain, 2008 QCTDP 24, décision confirmée en appel : 2011 QCCA 1201.

08 09 43 Page : 14 [55] Ainsi, lorsque l’information demandée peut être liée à l’un des motifs de discrimination énoncés à l’article 10 de la Charte québécoise, la nécessité de la collecte des renseignements doit être établie en lien avec l’exigence essentielle du poste à combler. Il appartient à l’entreprise de faire cette démonstration.

[56] En l’espèce, l’entreprise a fait parvenir à la Commission une description du poste de secrétaire-réceptionniste, emploi visé par la plainte :

DESCRIPTION SOMMAIRE Répondre aux appels téléphoniques; Recevoir les visiteurs; Encaisser les paiements des clients (argent, chèque, cartes de débit ou crédit), brocher et dater une copie de la preuve de paiement ou du reçu avec le contrat et déposer dans le coffre-fort; Consulter les contrats afin d’obtenir les informations confidentielles nécessaires à la préparation de documents légaux; Préparer et expédier les avis de décès; Recevoir les bijoux et autres objets précieux des clients et les acheminer au laboratoire; Effectuer divers travaux relatifs au secrétariat; Autres tâches connexes.

[…] QUALIFICATIONS MINIMALES RECHERCHÉES D.E.P. en secrétariat ou expérience équivalente; Bonne connaissance de Word et Excel; Anglais fonctionnel sera considéré comme un atout; Expérience de secrétariat et service à la clientèle; Faire preuve de minutie; Faire preuve de motivation et d’efficacité au travail; Faire preuve d’initiative et de débrouillardise; Capacité à travailler sans supervision.

[57] Examinons maintenant la nécessité de la collecte des différents renseignements personnels pour l’entreprise.

Renseignements colligés dans le formulaire de consentement

08 09 43 Page : 15 [58] La légalité de la collecte du nom et des coordonnées du candidat n’est pas contestée. La Commission ne remet pas en question la nécessité pour l’entreprise de recueillir ces renseignements dans le formulaire de consentement, de manière à identifier le signataire.

[59] Quant à la date de naissance, l’entreprise indique qu’elle est nécessaire pour lui permettre d’obtenir les informations contenues aux plumitifs au sujet du candidat. Le NAS, pour sa part, serait nécessaire pour obtenir le dossier de crédit de candidats qui postulent à certains postes.

[60] La conclusion de la Commission quant à la nécessité de recueillir ces renseignements est donc intimement liée à celle sur la nécessité de recueillir le dossier de crédit et les renseignements contenus aux plumitifs.

[61] Rappelons toutefois que dans plusieurs dossiers, la Commission a conclu que le NAS n’est pas nécessaire pour obtenir le dossier de crédit d’une personne. Son nom, son adresse et sa date de naissance suffisent. L’entreprise, qui avait le fardeau de démontrer la nécessité d’obtenir ce renseignement, n’a apporté aucun élément factuel ou argument justifiant la Commission de s’écarter de cette position.

[62] Aussi, bien que le NAS d’un employé est un renseignement qui doit être recueilli par un employeur selon les lois fiscales, il n’est pas nécessaire à l’étape de l’évaluation de la candidature d’une personne 12 . Dossier de crédit [63] L’entreprise n’a pas précisé quelle est l’exigence requise ou la qualité essentielle, propre au poste de secrétaire-réceptionniste, qui justifie la collecte de son dossier de crédit, bien qu’invitée à le faire par la Commission dans son avis du 25 juillet 2013.

[64] L’entreprise a mentionné dans ses correspondances que la personne occupant ce poste est en contact avec de l’argent, des bijoux et d’autres objets précieux. L’entreprise fait aussi allusion au fait qu’elle a accès à des renseignements confidentiels.

12 Notamment : Delaney c. Les associés, services financiers du Canada limitée, C.A.I., 00 03 47, décembre 2001, c. Constant, Laporte et Stoddart; X. c. Résidence L’Oasis Fort-St-Louis, [1995] C.A.I. 367 (rapport d’enquête).

08 09 43 Page : 16 [65] La Commission en déduit que l’entreprise veut s’assurer de la probité, de la discrétion et de l’honnêteté du candidat. Cet objectif est réel et important selon le test proposé par la Cour du Québec dans l’affaire Laval.

[66] Toutefois, pour conclure à la nécessité de la collecte d’un renseignement personnel, l’entreprise doit aussi démontrer un lien rationnel entre la collecte du renseignement et l’objectif qu’elle poursuit, en l’occurrence de s’assurer que le candidat répond à une exigence essentielle du poste.

[67] L’entreprise n’a pas expliqué en quoi le dossier de crédit allait influencer sa décision d’embaucher ou non une personne au poste de secrétaire-réceptionniste.

[68] Le dossier de crédit d’une personne permet à une entreprise de connaître son comportement passé en matière de crédit et constitue un des éléments qui peut être pris en compte dans l’évaluation de sa solvabilité.

[69] La Commission s’interroge sur la nature des conclusions que peut tirer l’entreprise dans l’évaluation de la candidature d’une personne à partir des informations contenues à son dossier de crédit. La plaignante ne désirait pas obtenir du crédit de l’entreprise, mais un emploi. En quoi le dossier de crédit d’une personne est-il en lien avec l’objectif poursuivi par l’entreprise, soit s’assurer de la probité, de l’honnêteté et de la discrétion d’un candidat?

[70] L’entreprise n’a pas fait cette démonstration. [71] Pour sa part, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a déjà soulevé certaines questions relatives à la collecte de ces renseignements au stade de la préembauche et invité les employeurs à ne pas procéder à des enquêtes de crédit 13 . Elle souligne entre autres que le lien entre le dossier de crédit d’un candidat et un emploi éventuel semble discutable, voire contestable et susceptible d’entraîner une discrimination fondée sur la condition sociale.

[72] Enfin, pour s’assurer de la probité d’un futur employé et de sa capacité à effectuer son travail, l’entreprise pourrait s’en remettre à un moyen moins intrusif

13 Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. L’application et l’interprétation de l’article 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne. 2011, p.11, disponible en ligne : http://www.cdpdj.qc.ca/publications/formulaire_emploi_2011.pdf.

08 09 43 Page : 17 de sa vie privée, notamment la vérification de ses références auprès d’employeurs précédents 14 . [73] Ainsi, les éléments soumis par l’entreprise ne permettent pas à la Commission de conclure à la nécessité de la collecte du dossier de crédit pour l’évaluation d’un candidat au poste de secrétaire-réceptionniste. L’entreprise n’a pas démontré l’existence d’un lien rationnel entre la collecte du dossier de crédit d’un candidat à ce poste et les tâches qu’il doit exécuter. Elle doit donc cesser la collecte de ces renseignements et cesser d’exiger le consentement du candidat afin de les recueillir auprès d’un tiers.

[74] La Commission ajoute, à la lumière de ce qui précède, qu’elle s’interroge également sur la nécessité pour l’entreprise de recueillir le dossier de crédit d’un candidat aux autres postes qu’elle a identifiés dans ses observations. Elle invite donc l’entreprise à revoir son processus d’embauche et à s’interroger sur la nécessité de recueillir le dossier de crédit de tout candidat à un emploi.

Renseignements contenus aux plumitifs et date de naissance [75] L’entreprise soutient qu’elle recueille les renseignements contenus aux plumitifs relatifs à un candidat à un emploi pour les mêmes motifs que ceux invoqués pour le dossier de crédit. Elle ajoute que la date de naissance de ce dernier est recueillie afin de lui permettre d’identifier la bonne personne aux plumitifs. Ici encore, la Commission retient que cette collecte vise à s’assurer de la probité, de la discrétion et de l’honnêteté du candidat.

[76] En vertu de l’article 1 de la Loi sur le privé, les renseignements qui ont un caractère public en vertu de la loi ne sont pas soumis aux règles relatives à la collecte, l’utilisation et la communication de renseignements personnels établis par cette loi :

1. La présente loi a pour objet d'établir, pour l'exercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil.

14 X. c. Résidence L’Oasis Fort-St-Louis, préc., note 12. Voir aussi : Delaney c. Les associés, services financiers du Canada limitée, préc., note 12; Praderes c. Les Immeubles de la Montagne Ste-Catherine (1974) inc., C.A.I., 97 17 29, 4 avril 2001, c. Laporte, Luticone et Boissinot.

08 09 43 Page : 18 Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre.

[…] Les sections II et III de la présente loi ne s'appliquent pas à un renseignement personnel qui a un caractère public en vertu de la Loi.

[77] Selon les faits au présent dossier, la Commission comprend que l’entreprise ne recueille que l’information accessible au public contenue aux plumitifs judiciaires, c’est-à-dire les registres informatisés de l'historique des différents dossiers judiciaires de natures civile, criminelle et pénale qui se trouvent aux différents greffes des cours de justice.

[78] Ces renseignements ont un caractère public, notamment en vertu de l’article 23 de la Charte québécoise et du principe de la publicité des débats judiciaires qui inclut l’accessibilité des archives judiciaires 15 : 23. Toute personne a droit, en pleine égalité, à une audition publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé, qu'il s'agisse de la détermination de ses droits et obligations ou du bien-fondé de toute accusation portée contre elle.

Le tribunal peut toutefois ordonner le huis clos dans l'intérêt de la morale ou de l'ordre public.

[79] Ainsi, le principe de nécessité de la collecte prévu à l’article 5 de la Loi sur le privé ne s’applique pas à ces renseignements.

[80] Toutefois, la Commission tient à souligner l’article 18.2 de la Charte québécoise qui prévoit :

18.2. Nul ne peut congédier, refuser d'embaucher ou autrement pénaliser dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu'elle a été déclarée coupable d'une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi ou si cette personne en a obtenu le pardon.

15 Voir aussi l’article 13 du Code de procédure civile, L.R.Q. c. C-25. Voir notamment : E. c. Québec (Office de la protection du consommateur), [1987] C.A.I. 350; C.S. c. Longueuil (Ville de), [2008] C.A.I. 186.

08 09 43 Page : 19 [81] Dans ce contexte, la Commission s’interroge sur l’opportunité pour l’entreprise de recueillir ces renseignements aux fins de l’évaluation de la candidature d’une personne au poste de secrétaire-réceptionniste, dans la mesure elle n’a pas fait valoir que certaines infractions en particulier étaient en lien avec les exigences requises par cet emploi.

[82] Soulignons que cette situation se distingue d’autres organisations qui, en vertu d’obligations légales, effectuent des vérifications d’antécédents criminels pour des infractions considérées en lien avec une exigence d’un emploi.

[83] Bien que ces informations revêtent un caractère public, la Commission s’interroge sur l’opportunité pour l’entreprise de les recueillir et de les intégrer dans ses dossiers avec d’autres renseignements personnels au sujet de candidats à un emploi, dans le but d’évaluer leur candidature, sans précisions quant à une exigence particulière liée à l’emploi ni distinction quant aux antécédents judiciaires recueillis 16 . [84] La Commission invite donc l’entreprise à revoir cette pratique de manière à limiter la collecte des renseignements personnels au sujet des candidats à des emplois.

[85] Par ailleurs, la date de naissance constitue un renseignement personnel soumis aux règles relatives à la collecte de la Loi sur le privé. L’entreprise doit donc démontrer la nécessité de colliger ce renseignement. Tel qu’indiqué précédemment, la nécessité s’évalue à la lumière de la finalité poursuivie par la collecte de ce renseignement en lien avec l’exigence essentielle du poste à combler, puisque l’âge d’un candidat constitue un motif de discrimination prévu à l’article 10 de la Charte.

[86] Or, l’entreprise n’a pas fait cette démonstration, tant pour la date de naissance que pour les antécédents judiciaires civils et criminels qu’elle dit obtenir grâce à cette date de naissance. En conséquence, la Commission ne peut conclure à la nécessité de colliger la date de naissance au stade de l’évaluation d’un candidat à un emploi.

Dossiers détenus par la CSST

16 Voir Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. L’application et l’interprétation de l’article 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne, préc., note 13.

08 09 43 Page : 20 [87] L’entreprise recueille également, pour l’évaluation des candidats à certains postes, les dossiers de la CSST, avec le consentement de la personne concernée.

[88] L’entreprise affirme qu’elle demande ces dossiers uniquement pour les employés qui doivent « forcer de manière importante », dans le but de vérifier si le candidat possède les capacités physiques requises et qu’il n’a pas de restriction l’empêchant d’occuper le poste. Elle écrit qu’elle doit obtenir ces renseignements « qui ont une relation directe avec la santé et la sécurité du travailleur ou de la travailleuse, mais aussi avec les collègues et [sa] clientèle ». Elle invite la Commission à statuer sur cette pratique.

[89] L’entreprise n’a toutefois pas précisé quels renseignements sont recueillis auprès de la CSST, malgré l’invitation de la Commission à se faire. La Commission prendra donc pour acquis, à la lumière du libellé du consentement qu’elle fait signer aux candidats et de ses observations, que l’entreprise recueille ou souhaite avoir la possibilité de recueillir l’ensemble des dossiers détenus par la CSST au sujet d’un candidat.

[90] La collecte de ces renseignements est-elle nécessaire à l’objet du dossier, soit l’évaluation de la candidature d’une personne aux postes de porteurs de cercueil, chauffeurs porteurs et employés de cimetière?

[91] La collecte de renseignements médicaux dans le cadre du processus d’embauche doit être en lien avec une exigence spécifique requise par le poste convoité 17 . Les renseignements demandés doivent satisfaire aux exigences de rationalité et de proportionnalité (lien rationnel entre les renseignements recueillis et l’exigence de l’emploi, atteinte aux droits fondamentaux minimisée, renseignements nettement plus utiles à l’employeur que nuisibles au candidat) :

[65] […] L'article 18.1 de la Charte interdit explicitement la recherche, dans un formulaire de demande d'emploi, de renseignements sur les motifs de discrimination énumérés à

17 Notamment : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Institut Demers inc., [1999] R.J.Q. 3101; Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, 2012 QCCA 1867; La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse recommande qu’un formulaire médical ou un examen médical préembauche, lorsque requis, ne soit administré qu’à la suite d’une offre d’embauche qui peut être conditionnelle aux résultats médicaux : Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. L’application et l’interprétation de l’article 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne, préc., note 13.

08 09 43 Page : 21 l'article 10, sauf lorsqu'un lien peut être établi avec les « aptitudes ou qualités requises par un emploi ». Or, la recherche de renseignements sur les affections liées à l'état de santé des personnes en recherche d'emploi rejoint un motif de discrimination énuméré à l'article 10 de la Charte, soit le handicap, conformément à l'interprétation large que doit recevoir ce terme. […]

[68] M'inspirant de la méthode d'analyse développée par la Cour suprême dans l'arrêt Méiorin, qui est applicable à l'article 20 de la Charte, je retiens que l'employeur doit démontrer que les renseignements sont requis dans un but rationnellement lié à l'exécution du travail en cause et qu'ils sont raisonnablement nécessaires pour réaliser ce but légitime lié au travail.

[69] Ainsi, le droit de l'employeur d'obtenir des informations du postulant doit être modulé en fonction de l'emploi convoité et des tâches à accomplir. De la même façon, les lois assurant la protection des renseignements personnels et le Code civil prévoient que seuls les renseignements nécessaires ou pertinents à la constitution d'un dossier peuvent être collectés. La cueillette de l'information médicale ne doit pas être utilisée pour embaucher seulement le candidat en parfaite santé qui représente le moins de risque d'absentéisme. L'employeur est en droit d'imposer des exigences en regard des aptitudes requises pour l'exercice d'un emploi, mais ces exigences doivent être raisonnables et avoir un lien rationnel avec l'emploi.

[70] Voilà ce que le questionnaire pré-embauche doit permettre à l'employeur de déterminer et ce à quoi le postulant doit répondre. On aura compris que toute règle rigide est à éviter. Il s'agit d'examiner les faits particuliers de chaque cas. 18 [nos soulignements] [92] En l’espèce, l’objectif poursuivi par l’entreprise en recueillant ces renseignements est de s’assurer que le candidat possède les capacités physiques requises pour ces postes. L’entreprise n’a toutefois pas donné de précisions sur les exigences physiques requises pour accomplir les tâches liées

18 Syndicat des infirmières, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires du cœur du Québec (SIIIACQ) c. Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, préc., note 17; Voir aussi : Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Transport en commun La Québécoise Inc, 2002 CanLII 9226.

08 09 43 Page : 22 à ces postes; elle a simplement indiqué que les employés devaient « forcer de manière importante ».

[93] Dans ce contexte, la Commission ne peut conclure qu’il existe un lien rationnel entre ces emplois et la collecte de tous les dossiers détenus par la CSST.

[94] D’abord, un travailleur peut faire une réclamation à la CSST pour un vaste éventail de situations qui n’ont aucun lien avec ses capacités « à forcer de manière importante ».

[95] De plus, le dossier relatif à une réclamation faite à la CSST contient une multitude de renseignements administratifs et médicaux au sujet du travailleur et de son employeur qui n’ont aucun lien avec sa condition physique actuelle (montants versés, informations bancaires, lésions consolidées, pour ne mentionner que ces exemples). Les renseignements médicaux, sociaux et certains renseignements financiers susceptibles de se trouver dans ces dossiers constituent des renseignements sensibles et leur divulgation est susceptible de porter atteinte au droit à la vie privée du candidat, voire de le discriminer.

[96] La Commission conçoit que certaines informations peuvent être en lien avec une exigence de ces postes, par exemple si le candidat a, à la suite d’un accident de travail, des limitations fonctionnelles l’empêchant de porter un cercueil. Toutefois, l’entreprise n’a pas démontré que la collecte de l’ensemble des dossiers de la CSST constitue une atteinte proportionnelle à l’objectif visé, soit l’évaluation de la capacité d’un candidat à ces postes de pouvoir accomplir ses tâches ou, pour reprendre les termes de l’entreprise, « de forcer de manière importante ».

[97] Soulignons également que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse invite les employeurs à faire preuve de prudence en matière de collecte de renseignements médicaux dans le cadre d’un processus d’embauche 19 . Leur collecte doit être limitée aux stricts renseignements nécessaires pour évaluer une aptitude requise ou une qualité essentielle pour accomplir le poste convoité. Elle recommande également que le questionnaire ou l’examen médical soit administré une fois que le candidat a obtenu une promesse d’embauche, celle-ci pouvant être conditionnelle aux résultats obtenus.

19 L’application et l’interprétation de l’article 18.1 de la Charte des droits et libertés de la personne, préc., note 13.

08 09 43 Page : 23 [98] La Commission conclut donc que la collecte de l’ensemble des dossiers détenus par la CSST aux fins d’évaluer les candidats aux postes de porteurs de cercueil, chauffeurs porteurs et employés de cimetière n’a pas été démontrée. L’entreprise devra donc cesser la collecte de ces renseignements et revoir sa politique en la matière de manière à ne recueillir que les renseignements nécessaires, dans le respect des dispositions de la Loi sur le privé et de la Charte québécoise.

Les dispositions du formulaire relatives au consentement [99] La Commission doit également déterminer si le libellé de la clause de consentement contenue au formulaire du même nom est conforme aux dispositions de la Loi sur le privé, plus précisément aux prescriptions de l’article 14 de la Loi sur le privé :

14. Le consentement à la collecte, à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel doit être manifeste, libre, éclairé et être donné à des fins spécifiques. Ce consentement ne vaut que pour la durée nécessaire à la réalisation des fins pour lesquelles il a été demandé.

Un consentement qui n'est pas donné conformément au premier alinéa est sans effet.

[100] Le 20 août 2013, l’entreprise a transmis à la Commission un nouveau formulaire de consentement qu’elle utilise désormais, formulaire sur lequel se penchera la Commission dans la présente décision.

[101] Après les renseignements au sujet du candidat, ce formulaire comprend les mentions suivantes :

Je, soussigné (e), ________________ autorise LÉPINE CLOUTIER LTÉE LA SOUVENANCE et/ou ses agents de renseignements personnels et/ou ses mandataires à effectuer une enquête à mon sujet et à obtenir certains renseignements me concernant jugés nécessaires dans le but d’évaluer ma candidature à un emploi. […]

Due à la nature de notre entreprise (secteur funéraire), j’autorise également les représentants des compagnies mentionnées ci-dessus à divulguer et transmettre des renseignements personnels tel les vérifications criminelles, crédit (pour les postes en vente, cadres, postes avec manipulation d’informations confidentielles, l’argent, chèques et bijoux), ainsi que des anciens employeurs me concernant.

08 09 43 Page : 24 J’autorise également la CSST, de même que toute autre agence ou organisme pertinent, à divulguer de l’information me concernant ou contenus à mon dossier personnel. Je libère les représentants de ces agences/organismes, de même que les compagnies mentionnées ci-dessus et leurs représentants de toute responsabilité découlant de la divulgation ou de la transmission de renseignements personnels à mon sujet. J’accepte qu’une photocopie ou télécopie de ce document ait la même valeur que l’original. Ce consentement est accordé de manière libre, volontaire et éclairé.

[102] Le candidat y indique également le nom et le numéro de téléphone de références.

[103] Les critères de validité du consentement prévus à l’article 14 de la Loi sur le privé ont pour objectif de permettre à la personne concernée de porter un jugement éclairé sur la portée de son consentement. Elle doit pouvoir comprendre quels renseignements seront recueillis ou communiqués auprès de tiers, qui sont ces tiers et à quelles fins spécifiques ces renseignements seront colligés, utilisés ou communiqués 20 . Le libellé de la clause de consentement doit être suffisamment précis pour bien en circonscrire la portée.

[104] Ainsi, des libellés généraux tel que « tout renseignement me concernant », « toute entreprise ou organisme qui détient des renseignements à mon sujet » ou encore « tout renseignement jugé nécessaire » sont à éviter puisqu’ils ne permettent généralement pas de circonscrire de manière suffisante la portée du consentement. La personne concernée ne peut donc donner un consentement « éclairé » et visant « des fins spécifiques ».

[105] En l’espèce, compte tenu des conclusions de la Commission quant à la collecte du dossier de crédit d’un candidat, la partie qui y réfère doit être retirée du formulaire de consentement.

[106] D’autre part, l’extrait autorisant l’entreprise à obtenir « certains renseignements me concernant jugés nécessaires dans le but d’évaluer ma candidature à un emploi » ne respecte pas les critères établis par l’article 14 de la Loi sur le privé en ce qu’il n’est pas spécifique ni suffisamment précis pour

20 Voir notamment : X. c. Gestion P. Laflèche, C.A.I. 09 18 86, 23 juillet 2013, c. Poitras; X. et Y. c. Habitations Populaires du Québec, C.A.I. 10 04 75 & 10 06 09, 23 juillet 2013, c. Poitras; X. c. Les Immeubles Champlain, C.A.I. 11 09 42, 12 septembre 2012, c. Constant; X. et Habitations Desjardins du centre-ville, C.A.I. 94 11 24, septembre 1994 (rapport d’enquête).

08 09 43 Page : 25 permettre à la personne concernée de donner un consentement éclairé. Cette dernière ne connaît pas la portée du consentement qu’elle donne à l’entreprise qui peut déterminer par la suite ce qu’elle juge nécessaire à l’évaluation de sa candidature.

[107] Il en est de même du dernier paragraphe du formulaire de consentement qui est trop général et ne précise pas la nature des renseignements qui seront communiqués (ex. : « à divulguer de l’information me concernant ou contenus à mon dossier personnel ») et, dans certains cas, les organismes ou entreprises autorisés à communiquer ces informations toute autre agence ou organisme pertinent ».

[108] L’entreprise devra donc modifier son formulaire afin qu’il respecte les critères de validité énoncés à l’article 14 de la Loi sur le privé.

Le refus d’embaucher la plaignante [109] La plaignante reproche également à l’entreprise d’avoir rejeté sa candidature en raison de son refus de signer le formulaire de consentement l’autorisant à recueillir auprès de tiers d’autres renseignements personnels à son sujet, notamment de procéder à une enquête de crédit et à une vérification des plumitifs.

[110] L’article 9 de la Loi sur le privé prévoit : 9. Nul ne peut refuser d'acquiescer à une demande de bien ou de service ni à une demande relative à un emploi à cause du refus de la personne qui formule la demande de lui fournir un renseignement personnel sauf dans l'une ou l'autre des circonstances suivantes :

la collecte est nécessaire à la conclusion ou à l'exécution du contrat;

la collecte est autorisée par la loi; il y a des motifs raisonnables de croire qu'une telle demande n'est pas licite.

En cas de doute, un renseignement personnel est réputé non nécessaire.

[111] Ainsi, une entreprise ne peut refuser un emploi à une personne du seul fait qu’elle refuse de fournir des renseignements personnels qui ne sont pas nécessaires à l’évaluation de sa candidature pour le poste convoité.

08 09 43 Page : 26 [112] En l’espèce, l’enquête révèle que l’entreprise a refusé d’embaucher la plaignante à la suite de son refus de signer le formulaire de consentement visant l’obtention et la communication de ses renseignements personnels. Lors de l’enquête, puis dans ses observations transmises à la Commission le 20 août 2013, l’entreprise indique qu’elle ne peut considérer la candidature d’une personne à un des postes indiqués si elle refuse de signer le consentement lui permettant d’obtenir des informations relatives à son dossier de crédit, ses antécédents judiciaires et pour certains emplois, les dossiers détenus par la CSST à son sujet.

[113] Ce n’est que dans ses observations transmises en janvier 2014 que l’entreprise indique qu’il ne s’agit pas d’une pratique courante et que la situation faisant l’objet de la plainte est due à une erreur d’une employée.

[114] Néanmoins, la preuve prépondérante dans ce dossier démontre que l’entreprise a refusé d’embaucher la plaignante en raison de son refus de l’autoriser à recueillir certains renseignements personnels.

[115] Par ailleurs, l’entreprise n’a pas, tel qu’exposé précédemment, démontré en quoi la collecte de certains de ces renseignements est nécessaire à la conclusion du contrat de travail (dossier de crédit, NAS, date de naissance). Elle n’a pas davantage fait valoir que la collecte de ces renseignements est autorisée par la loi ou qu’elle avait des motifs raisonnables de croire que la demande d’emploi n’était pas licite.

[116] Dans ce contexte, et compte tenu du second alinéa de l’article 9 qui prévoit qu’en cas de doute un renseignement est réputé non nécessaire, la Commission conclut que l’entreprise a contrevenu à l’article 9 de la Loi sur le privé.

[117] Malgré une question de la Commission à cet effet, l’entreprise n’a pas indiqué si elle dispose d’une politique ou d’une procédure relative à la collecte et l’utilisation de renseignements personnels dans le cadre du processus de sélection de candidats à un emploi.

[118] Enfin, la Commission tient à préciser qu’elle ne peut, dans le contexte de la présente décision, imposer une amende à l’entreprise ou lui ordonner de payer des dommages-intérêts à la plaignante, comme le souhaite cette dernière. Selon les dispositions de la Loi sur le privé, les pouvoirs d’ordonnance de la Commission doivent viser la protection des renseignements personnels par

08 09 43 Page : 27 l’entreprise et non le dédommagement d’un plaignant à la suite d’un préjudice subi :

83. Au terme d'une enquête relative à la collecte, à la détention, à la communication ou à l'utilisation de renseignements personnels par une personne qui exploite une entreprise, la Commission peut, après lui avoir fourni l'occasion de présenter ses observations, lui recommander ou lui ordonner l'application de toute mesure corrective propre à assurer la protection des renseignements personnels.

Elle peut fixer des délais pour l'exécution des mesures qu'elle ordonne.

[119] En ce qui concerne l’imposition d’une amende, bien que la Loi sur le privé prévoit cette possibilité en certaines circonstances, cette conclusion appartient à la Cour du Québec qui pourrait rendre une décision à cet effet à la suite d’une plainte pénale portée contre l’entreprise.

[120] En l’espèce, la Commission n’a pas choisi cette voie. CONCLUSION [121] À la lumière de l’enquête et des observations de l’entreprise, la Commission conclut que celle-ci a contrevenu à l’article 5 de la Loi sur le privé en recueillant des renseignements personnels non nécessaires à l’objet du dossier, soit l’évaluation de candidats à certains emplois au sein de son entreprise.

[122] Elle a aussi contrevenu à l’article 9 de cette loi en refusant d’accorder un poste de secrétaire-réceptionniste à la plaignante au seul motif que cette dernière a refusé d’autoriser l’entreprise à recueillir des renseignements qui n’étaient pas nécessaires à l’évaluation de sa candidature.

[123] L’entreprise a également contrevenu à l’article 14 de la Loi sur le privé dans la mesure le formulaire ne permet pas l’expression d’un consentement relatif à la communication et à la collecte de renseignements personnels auprès de tiers qui soit éclairé et donné à des fins spécifiques.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [124] DÉCLARE la plainte fondée;

08 09 43 Page : 28 [125] ORDONNE à l’entreprise de cesser de recueillir le dossier de crédit d’un candidat à un poste de secrétaire-réceptionniste dans le cadre de son processus d’embauche;

[126] ORDONNE à l’entreprise de cesser de recueillir les renseignements personnels qui ne sont pas nécessaires à l’évaluation d’un candidat dans le cadre de son processus d’embauche, notamment les renseignements suivants :

- Numéro d’assurance sociale; - Date de naissance; - L‘ensemble des dossiers détenus par la CSST au sujet d’un candidat.

[127] RECOMMANDE à l’entreprise de cesser de recueillir le dossier de crédit de tout candidat à un emploi à moins que cette collecte soit nécessaire à l’évaluation d’une exigence essentielle de cet emploi;

[128] RECOMMANDE à l’entreprise renseignements concernant les candidats contenus aux plumitifs à moins qu’ils ne soient en lien avec une exigence essentielle de l’emploi;

[129] ORDONNE à l’entreprise de cesser de refuser d’embaucher un candidat au motif qu’il refuse de l’autoriser à recueillir des renseignements non nécessaires à l’évaluation de sa candidature, notamment le dossier de crédit, les dossiers détenus par la CSST, sa date de naissance et son NAS;

[130] ORDONNE à l’entreprise de modifier la clause de consentement de manière à permettre au candidat à un emploi de formuler un consentement éclairé et donné à des fins spécifiques;

[131] RECOMMANDE à l’entreprise d’adopter une politique claire relative à la collecte, à l’utilisation et à la communication de renseignements personnels dans le cadre de son processus d’embauche conforme aux dispositions de la Loi sur le privé et d’en informer ses employés pour qui il est pertinent de connaître cette information.

Diane Poitras Juge administratif

de cesser de recueillir les

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