Dossier :
11 02 46
Date :
Le 14 juin 2013
Membre:
M
e
Christiane Constant
…
Plaignant
et
SOCIÉTÉ DES ALCOOLS DU
QUÉBEC
Organisme
DÉCISION
OBJET
PLAINTE en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics
et sur la protection des renseignements personnels
1
.
[1]
La Commission d’accès à l’information (la Commission) dispose de la
plainte formulée par M. … (le plaignant), le 7 février 2011, à l’endroit
de la Société des alcools du Québec (la SAQ).
[2]
Le plaignant reproche à la SAQ d’avoir communiqué à un tiers un
message qu’il a écrit dans la section « Service à la clientèle » de son site
Internet, et ce, sans son consentement. La SAQ estime qu’elle était justifiée
d’agir ainsi en vertu de l’article 59.1 de la Loi sur l’accès.
1
L.R.Q., c. A-2.1, la Loi sur l’accès.
11 02 46
Page : 2
LES FAITS
[3]
Le 22 juin 2010, le plaignant envoie un message à la SAQ par le biais de
son site Internet afin de se plaindre de la présence d’une personne qui mendiait
à l’entrée de l’une de ses succursales (la personne impliquée) lors de son
passage le jour même. La plainte vise également la présence de « quêteux,
squeegee, robineux et délinquants »
2
dans les rues et l’absence de
règlementation à cet égard. Le plaignant évoque finalement des « solutions »
3
visant à faire disparaître ces personnes.
[4]
Inquiétés par les propos tenus par le plaignant, des employés du Service
à la clientèle consultent les Services juridiques internes de la SAQ. Ceux-ci
recommandent que les policiers soient informés de l’existence de ce message
qu’ils considèrent être des menaces à l’endroit de la personne impliquée. Les
policiers répondent que seule la personne visée par les menaces peut porter
plainte auprès d’eux. Le ou vers le 30 juin 2010, un directeur de secteur, cadre
supérieur de qui relèvent plusieurs directeurs de succursales, transmet une
copie du message du plaignant à la personne impliquée, incluant le nom et
l’adresse de courrier électronique de ce dernier.
[5]
Entre-temps, soit le 23 juin 2010, le Service à la clientèle de la SAQ
répond au plaignant que le directeur de la succursale veillera à ce que la
personne impliquée n’obstrue pas l’entrée de l’établissement. Le plaignant n’est
informé que trois mois plus tard du fait que son message a été transmis à cette
personne, en raison de faits non pertinents au présent dossier.
[6]
Au moment des faits ayant mené à cette plainte, la SAQ avait déjà
adopté une Directive relative à la gestion et à la protection des renseignements
personnels des employés
4
contenant une section sur l’application de l’article
59.1 de la Loi sur l’accès. À la suite de la plainte, la SAQ a adopté une Directive
relative aux modalités de communications de renseignements personnels en
vue de prévenir un acte de violence
5
.
Observations du plaignant et de la SAQ en cours d’enquête
[7]
Le plaignant fait valoir que son message n’aurait pas dû être transmis à
la personne impliquée, car la SAQ devait en assurer la confidentialité,
2
Propos tenus par le plaignant dans son message à la SAQ.
3
Terme utilisé par le plaignant dans son message à la SAQ.
4
Directive adoptée le 3 septembre 2009 par la SAQ.
5
Directive adoptée le 15 mars 2011 par la SAQ.
11 02 46
Page : 3
notamment en vertu de sa politique de confidentialité disponible sur son site
Internet. Son message était de l’ordre d’un commentaire humoristique, ses
propos suggérant des « solutions » violentes se voulaient farfelus et exagérés et
ne visaient pas la personne impliquée. Son message, dans lequel il s’identifie,
ne faisait pas craindre un danger de mort ou de blessures graves pour cette
personne. Enfin, il estime avoir le droit à son opinion.
[8]
La SAQ, pour sa part, soutient que le consentement du plaignant à la
communication de son message à la personne impliquée n’était pas requis vu
les circonstances particulières de l’affaire. Les conditions d’application de
l’article 59.1 de la Loi sur l’accès étaient satisfaites, notamment en ce que
« l’établissement objectif de circonstances ou de faits permettant la
dérogation »
6
au principe de la confidentialité des renseignements personnels
découlait des propos tenus dans le message. Selon la SAQ, les menaces
proférées laissaient craindre un danger de mort ou de blessures graves et « leur
gravité inspirait un sentiment d’agir rapidement pour éviter le pire »
7
. Les
policiers ont été consultés et ont répondu que seule la personne visée par les
menaces pouvait porter plainte auprès d’eux. Enfin, la personne visée par ces
menaces était identifiée et identifiable. Pour tous ces motifs, la SAQ estime
qu’elle était justifiée d’exercer la discrétion que lui confère l’article 59.1 de la Loi
sur l’accès et de communiquer l’ensemble du message, incluant l’identité du
plaignant.
[9]
Par ailleurs, le 25 avril 2013, la Commission transmet une lettre à la SAQ
l’avisant essentiellement qu’à la lumière des éléments recueillis au cours d’une
enquête, elle peut ordonner ou recommander à un organisme public de prendre
les mesures qu’elle juge appropriées pour satisfaire les conditions prévues par
la Loi sur l’accès, conformément à l’article 129 de cette Loi.
[10]
La Commission a permis à la SAQ de lui faire parvenir, dans un délai
précis, ses observations écrites additionnelles. C’est ce qui fut fait dans une
lettre transmise à la Commission le 24 mai 2013.
Observations de la SAQ au terme de l’enquête
[11]
Dans sa réponse du 24 mai 2013, la SAQ fait ressortir les éléments
suivants :
6
Réponse de la SAQ du 10 mai 2011.
7
Id.
11 02 46
Page : 4
La personne impliquée, à l’égard de laquelle des propos
désobligeants ont été tenus par le plaignant dans son courriel adressé
à la SAQ, a déposé une plainte contre celui-ci devant la Commission
des droits de la personne « pour atteinte à ses droits fondamentaux »;
La Commission des droits de la personne a mené une enquête au
terme de laquelle elle a retenu la plainte de cette personne impliquée
et un recours en dommages a été intenté au nom de celle-ci contre le
plaignant devant le Tribunal des droits de la personne dans le dossier
portant le numéro 500-53-000363-125;
Ce recours ne vise pas la SAQ, mais le plaignant l’a appelée en
garantie, au motif que celle-ci « aurait commis une faute en divulguant
ses renseignements personnels à un tiers sans son consentement ».
[…].
[12]
La SAQ ajoute ce qui suit :
[...]
Nous tenons à souligner que le ton utilisé par monsieur
… est absolument inhabituel pour ce genre de
plainte. Le Service à la clientèle de la SAQ reçoit plus de
2 500 plaintes par année pour diverses situations.
Aucune plainte de cette nature et contenant des propos
aussi menaçants et violents n’avait été reçue par le
Service à la clientèle avant celle de monsieur … ni
depuis cette date. Cette plainte revêt donc un caractère
tout-à-fait exceptionnel et cet élément doit être pris en
considération dans la décision que vous serez appelée à
rendre.
Par ailleurs, c’est après consultation du directeur de
secteur et des Services juridiques que la décision a été
prise de dénoncer cette plainte aux Services policiers
afin de prévenir un acte de violence. En effet, sur
recommandation de son directeur de secteur, le
directeur de succursale a alerté les policiers. Ces
derniers
ont
cependant
refusé
de
recevoir
la
dénonciation puisqu’elle ne provenait pas de la
personne visée par la plainte. C’est dans ce contexte
qu’il a pris la décision d’alerter [la personne impliquée].
11 02 46
Page : 5
En effet, ce n’est pas tant la crainte que [la personne
impliquée] soit l’objet de l’une des solutions proposées
par monsieur … mais plutôt la crainte plus générale
qu’un incident grave survienne à [la personne impliquée]
ou à d’autres itinérants du secteur qui a motivé la
décision de la SAQ. Le ton utilisé, la recherche dans la
rédaction de la plainte, la violence des propos sont
autant d’éléments qui laissaient croire qu’un risque
imminent existait et que nous n’avions pas simplement
affaire à une réaction émotive mais sans conséquence.
C’est dans ce contexte particulier que le directeur a pu
commettre l’erreur de montrer la plainte à [la personne
impliquée]. Toutefois, même si c’était le cas, nous
croyons qu’il s’agit d’un incident parfaitement isolé qui
n’est aucunement représentatif des pratiques en vigueur
à
la
SAQ
relativement
à
la
protection
des
renseignements personnels.
[...] (sic)
Principes de droit applicables en l’espèce
[13]
La Loi sur l’accès énonce que les renseignements personnels sont
confidentiels et ne peuvent être communiqués qu’avec le consentement de la
personne concernée
8
, hormis quelques exceptions. L’une de ces dérogations au
principe de la confidentialité est prévue à l’article 59.1 de la Loi sur l’accès qui
se lit comme suit :
59.1. Outre les cas prévus à l'article 59, un organisme
public peut également communiquer un renseignement
personnel, sans le consentement des personnes
concernées, en vue de prévenir un acte de violence,
dont un suicide, lorsqu'il existe un motif raisonnable de
croire qu'un danger imminent de mort ou de blessures
graves menace une personne ou un groupe de
personnes identifiable.
Les renseignements peuvent alors être communiqués à
la ou aux personnes exposées à ce danger, à leur
représentant ou à toute personne susceptible de leur
porter secours.
8
Articles 53, 54 et 59 al. 1 de la Loi sur l’accès.
11 02 46
Page : 6
La personne ayant la plus haute autorité au sein de
l'organisme public doit, par directive, établir les
conditions et les modalités suivant lesquelles les
renseignements peuvent être communiqués par le
personnel de l'organisme. Le personnel est tenu de se
conformer à cette directive.
[14]
Cet article a été ajouté à la Loi sur l’accès en 2001 et vise la prévention
des actes de violence, incluant les suicides. Il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire
octroyé aux organismes publics, lesquels doivent, avant de l’exercer, s’assurer
de l’existence de trois conditions préalables.
[15]
Premièrement, l’organisme doit avoir un motif raisonnable de croire qu’il y
a un danger de mort ou de blessures graves pouvant résulter d’un acte de
violence. Ce critère nécessite la détermination objective de faits permettant de
croire à une telle menace et l’appréciation subjective des circonstances par le
détenteur de la discrétion. Ces constats doivent engendrer « une croyance
légitime à une possibilité sérieuse en raison de preuves dignes de foi »
9
. La
menace de danger ou de blessures graves s’évalue en fonction des éléments
propres à chaque situation. De simples soupçons ou craintes ne sont pas
suffisants pour conclure à l’application de l’article 59.1 de la Loi sur l’accès. Une
personne raisonnable ayant à juger de la même situation devrait également en
venir à la conclusion qu’il existe un danger imminent de mort ou de blessures
graves.
[16]
Deuxièmement, ce danger doit être imminent. L’imminence s’évalue en
termes de temps et de causalité
10
. La nature de la menace doit inspirer un
sentiment d’urgence, notamment en raison de sa gravité, de son sérieux et de
sa clarté :
La nature de la menace doit être telle qu’elle inspire un
sentiment d’urgence. Ce sentiment d’urgence peut se
rapporter à un moment quelconque dans l’avenir. Selon
la gravité et la clarté de la menace, il ne sera pas
toujours nécessaire qu’un délai précis soit fixé. Il suffit
qu’il y ait une menace claire et imminente de blessures
graves dirigée contre un groupe identifiable et que cette
9
Yves DUSSAULT, « Divulguer des renseignements confidentiels en vue de protéger des
personnes », (2003) vol.9, n. 2 L’informateur public et privé, p. 10.
10
Id., p. 8.
11 02 46
Page : 7
menace soit faite de manière à inspirer un sentiment
d’urgence.
11
[17]
Troisièmement, ce danger doit menacer une personne ou un groupe de
personnes identifiables. Il peut viser toute personne, quel que soit son statut à
l’égard de l’organisme public (employé, client, tiers). En tenant compte de toutes
les circonstances propres à une affaire, l’organisme public doit être en mesure
d’identifier la personne ou le groupe de personnes visées par la menace.
[18]
Ainsi, lorsqu’une situation de la nature de celles évoquées à l’article 59.1
de la Loi sur l’accès se présente, l’organisme doit évaluer l’ensemble des faits à
la lumière de ces trois critères avant de conclure qu’il est nécessaire de
communiquer des renseignements personnels sans le consentement de la
personne concernée afin d’éviter un danger de mort ou de blessures graves.
L’article 59.1 étant une exception au principe général de la confidentialité des
renseignements personnels, l’analyse menant à la décision de le mettre en
application dans une situation particulière commande une grande rigueur de la
part de l’organisme public.
[19]
Par ailleurs, il importe de souligner que seuls les renseignements
nécessaires à la prévention de l’acte de violence doivent être communiqués.
L’article 59.1 de la Loi sur l’accès n’autorise que la communication de
renseignements « en vue de prévenir un acte de violence ». L’organisme public
doit donc également déterminer quels sont ces renseignements avant de les
communiquer.
[20]
Il s’ensuit que s’il existe des solutions alternatives permettant d’obtenir le
même résultat sans porter atteinte au caractère confidentiel des renseignements
personnels, elles devraient être envisagées par l’organisme public. Enfin, si la
communication des renseignements s’avère requise, elle peut être faite à la ou
aux personnes exposées au danger, à leur représentant ou à toute personne
pouvant leur porter secours.
Application du droit aux faits en l’espèce
[21]
La SAQ est d’avis qu’elle était justifiée de transmettre intégralement le
message du plaignant à la personne impliquée puisque les propos tenus lui
permettaient raisonnablement de croire qu’un danger imminent de mort ou de
blessures graves la menaçait directement ainsi que d’autres itinérants du
11
Smith c. Jones, [1999] 1 R.C.S. 455, paragr. 84.
11 02 46
Page : 8
secteur. La SAQ souligne que les passages suivants du message du plaignant
constituent une menace de danger imminent de mort ou de blessures graves :
Brûler tout ça au lance-flamme ou napalm […]
Ramasser tous ces microbes ambulants au camion-
benne à vidanges et les brûler à l’incinérateur Des
Carrières […]
[…]
Une balle dans la nuque et envoie d’une facture pour la
balle à la famille de BS du défunt […]
Parachuter tous ce beaux-mondes avec leurs canidés
au-dessus de la Baie-James […]
La chance de récidive est plutôt faible […]
12
(sic)
[22]
De plus, avant d’envisager la communication du message à la personne
impliquée, la SAQ a d’abord communiqué avec les policiers, sur
recommandation de ses avocats. Cependant, à la lumière de leur réponse
voulant que la personne elle-même visée par les menaces doive les contacter,
la SAQ a pris la décision de lui transmettre le message, incluant les
renseignements d’identité du plaignant.
[23]
La SAQ souligne que la plainte revêt un caractère exceptionnel,
notamment en raison du ton utilisé et de la violence des propos tenus. Sa
décision de transmettre la plainte constitue un acte isolé qui n’est pas
représentatif de ses pratiques en matière de protection des renseignements
personnels.
[24]
Pour sa part, la Commission est d’avis que la situation n’en est pas une
où « les faits font réellement craindre qu’une personne ou un groupe identifiable
soit exposé à un danger imminent de mort ou de blessures graves »
13
. Les
propos tenus, bien que violents et troublants, ne constituent pas des menaces
graves, claires et sérieuses de causer des blessures ou la mort d’une personne.
Le plaignant, dans son message, ne laisse pas entendre qu’il a l’intention de
commettre les actes qu’il énumère. Il se plaint de la présence de certaines
personnes dans les rues et du fait que, selon lui, les autorités n’agissent pas
pour régler la situation :
12
Propos tenus par le plaignant dans son message à la SAQ.
13
Smith c. Jones, préc., note 11, paragr. 85.
11 02 46
Page : 9
Personne de la Ville ou à la SAQ n’a de volonté pour
régler le problème de la Ville Quêteux, de Squeegee,
de Robineux, Délinquant… Pensez-vous sérieusement
qu’un citoyen comme moi peux faire la différence???
[…] Aucune volonté politique du municipal ou du
provincial ne pointe à l’horizon.
14
(sic)
[25]
Enfin, le plaignant conclut son message en proposant à la SAQ, à la Ville
ou au gouvernement provincial des « solutions » afin de remédier à la situation.
[26]
En tenant compte du message dans son entier, la Commission estime
qu’il s’agit davantage de propos malheureux tenus par une personne dans un
excès de colère que de menaces de poser des gestes violents.
[27]
De plus, il est vrai que le début du message concerne la personne
impliquée et qu’il est possible de l’identifier avec les détails qui y sont fournis.
Toutefois, la deuxième partie du texte contenant les scénarios violents vise les
« quêteux, squeegee, robineux et délinquants »
15
en général et non seulement
cette personne. Ainsi, si danger imminent il y avait, toutes ces personnes
auraient dû en être prévenues et non seulement la personne impliquée.
[28]
D’autre part, la Commission n’est pas convaincue de l’existence de motifs
raisonnables de croire en l’imminence d’un danger alors que la SAQ a attendu
environ une semaine avant de transmettre le message à la personne impliquée.
Si le message avait suscité le sentiment d’urgence requis par l’article 59.1, il
aurait été communiqué dans un délai beaucoup plus court, soit dès que la SAQ
a déterminé que les conditions d’ouverture de son pouvoir discrétionnaire
étaient satisfaites.
[29]
Enfin, même si les trois critères avaient été démontrés, la Commission
doute que la communication de l’ensemble du message à la personne impliquée
était nécessaire pour prévenir un acte de violence. Par exemple, informer la
personne de l’existence d’un tel message ou sa communication sans l’identité
du plaignant aurait permis à la personne impliquée d’être prévenue de cette
menace.
[30]
À cet égard, la Commission tient à souligner la réaction adéquate de la
SAQ de s’informer d’abord auprès des services de police dans une telle
situation. Elle comprend que les informations ainsi obtenues l’ont influencée
14
Propos tenus par le plaignant dans son message à la SAQ.
15
Propos tenus par le plaignant dans son message à la SAQ.
11 02 46
Page : 10
dans sa décision de remettre le message à la personne impliquée. Néanmoins,
vu les conclusions qui précèdent, il ne s’agit pas d’un motif justifiant la
communication du message au sens de la Loi sur l’accès.
[31]
Même si la Commission constate que la décision de la SAQ de
communiquer le message du plaignant a été prise de bonne foi et qu’elle n’est
pas représentative de la pratique de l’organisme en matière de protection des
renseignements personnels, elle considère que la lecture de ce texte n’aurait
pas dû mener une personne raisonnable, ayant à juger de la même situation, à
craindre sérieusement pour la vie de la personne impliquée ou d’autres
personnes. Par conséquent, la communication du message n’était pas justifiée
par l’article 59.1 de la Loi sur l’accès. La Commission en vient donc à la
conclusion que la plainte est fondée.
[32]
En terminant, la Commission constate qu’au moment où la SAQ a pris la
décision de communiquer le message du plaignant à la personne impliquée, elle
ne disposait pas d’une directive claire en la matière, tel que l’y oblige l’article
59.1 de la Loi sur l’accès. En effet, elle n’avait qu’une Directive relative à la
gestion et à la protection des renseignements personnels des employés,
contenant une courte section sur l’application de l’article 59.1.
[33]
Toutefois, depuis les faits ayant mené à la plainte à l’étude, la SAQ a
adopté une directive sur l’application de l’article 59.1 de la Loi sur l’accès, en
conformité avec le troisième alinéa de cet article. Cette directive, dont une copie
a été transmise à la Commission, vient encadrer la communication de
renseignements personnels dans les cas prévus à cet article. On y prévoit entre
autres que « seuls les renseignements nécessaires pour prévenir un acte de
violence peuvent être communiqués ».
[34]
La Commission est d’avis que cette directive pourrait être davantage
détaillée, tel que prévu à l’article 59.1 al. 3 de la Loi sur l’accès, afin de clarifier
les conditions et les modalités de communication de renseignements personnels
en vue de prévenir un acte de violence. Ainsi, la SAQ et son personnel seraient
mieux outillés pour évaluer les situations pouvant donner ouverture à l’utilisation
du pouvoir discrétionnaire prévu à l’article 59.1.
[35]
À cet égard, la SAQ a informé la Commission dans sa lettre du
24 mai 2013 qu’elle prend bonne note du manque de précision de sa directive et
qu’elle est ouverte aux suggestions de la Commission.
11 02 46
Page : 11
[36]
La Commission apprécie l’ouverture de la SAQ et toute la collaboration
dont elle a fait preuve tout au long de l’enquête dans le présent dossier.
POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION :
[37]
DÉCLARE la plainte fondée;
[38]
DÉCLARE que la SAQ n’était pas justifiée en vertu de l’article 59.1 de la
Loi sur l’accès de transmettre le message du plaignant à la personne impliquée
sans son consentement;
[39]
RECOMMANDE à la SAQ de préciser, dans sa Directive relative aux
modalités de communications de renseignements personnels en vue de
prévenir un acte de violence, les conditions et les modalités suivant lesquelles
les renseignements peuvent être communiqués par son personnel;
[40]
RECOMMANDE à la SAQ de diffuser auprès de ses employés et de ses
cadres, dès leur embauche, sa Directive relative aux modalités de
communications de renseignements personnels en vue de prévenir un acte de
violence;
[41]
RECOMMANDE à la SAQ de prendre les mesures nécessaires pour
informer et former ses employés et ses cadres, surtout ceux en contact direct
avec la clientèle, quant à la façon de faire face aux situations visées par l’article
59.1 de la Loi sur l’accès.
CHRISTIANE CONSTANT
Juge administratif
M
e
…
Procureur de l’organisme
Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.