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MÉMOIRE SUR LE PROJET DE LOI NO 61, LOI SUR L’AGENCE DES PARTENARIATS PUBLIC-PRIVÉ DU QUÉBEC

Commission parlementaire des finances publiques

Septembre 2004

Table des matières MÉMOIRE DE LA COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION CONCERNANT LE PROJET DE LOI 61

Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec ___________________________ 2 PARTIE 1 - Accès à l’information, transparence et démocratie __________________________ 3 1.1 Concilier accès à l’information et partenariats public-privé _______________________ 4 Favoriser la démocratie grâce à l’accès à l’information ___________________________ 4 Les principes directeurs du partenariat public-privé ______________________________ 6 La Loi sur l’accès permet-elle d’assurer la transparence des partenariats public-privé ?__ 7 1.2 L’assujettissement à la Loi sur l’accès et les partenariats public-privé_______________ 8 L’Agence des partenariats public-privé_________________________________________ 9 Les filiales de l’Agence _____________________________________________________ 9 Les entreprises privées ____________________________________________________ 11 1.3 L’accès aux documents concernant les partenariats ____________________________ 12 Les restrictions à l’accès énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès __________ 13 Des documents qui devraient avoir un caractère public ___________________________ 14 Les contrats de partenariat _________________________________________________ 15 Le plan d’affaires_________________________________________________________ 16 PARTIE 2 - Protection des renseignements personnels et partenariats public-privé _________ 17 2.1 Les communications de renseignements personnels entre partenaires ______________ 18 2.2 Nature du contrat de partenariat et impact sur la protection des renseignements personnels ____________________________________________________________ 20 2.3 Questions éthiques liées à la protection des renseignements personnels ____________ 21 CONCLUSION _________________________________________________________________ 23

A N N E X E __________________________________________________________ 25

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec MÉMOIRE DE LA COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION CONCERNANT LE PROJET DE LOI N° 61

Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Déposé à l’Assemblée nationale le 17 juin dernier, le Projet de loi 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec, s’inscrit dans le vaste programme de révision du rôle de l’État. Il a pour objet de définir les règles qui encadreront les partenariats entre organismes publics 1 et entreprises du secteur privé. Ce projet de loi traduit par ailleurs une orientation bien décrite dans le document rendu public en mai 2004 par la présidente du Conseil du trésor et ministre responsable de l’Administration gouvernementale et intitulé Moderniser l’État Pour des services de qualité aux citoyens, Plan de modernisation 2004-2007 2 . « Obtenir des services de meilleure qualité au meilleur coût, faire appel à l’innovation et à l’expertise du secteur privé lorsque cela s’avère avantageux, réduire les coûts, les délais et les risques inhérents aux projets d’infrastructures ou de prestation de services et tirer pleinement avantage de la concurrence, voilà les véritables objectifs poursuivis » écrit la Ministre dans la Politique-cadre sur les partenariats public-privé 3 , document déposé à l’Assemblée nationale au même moment que le Projet de loi.

Afin d’encadrer les activités de partenariats, le Projet de loi 61 propose donc la création de l’Agence des partenariats public-privé du Québec. Conformément à l’article 4 de ce Projet de loi, l’Agence aura pour mission de contribuer au renouvellement des infrastructures publiques et à l’amélioration de la qualité des services aux citoyens par la mise en œuvre de projets de partenariats public-privé.

Bien sûr, le phénomène de partenariat public-privé n’est pas nouveau. Depuis une dizaine d’années, que ce soit au Québec ou ailleurs dans le monde, les administrations publiques expérimentent et mettent en place de nouvelles façons de faire, de nouveaux modes de gestion. Le partenariat public-privé s’ajoute donc aux traditionnels contrats de service ou contrats d’entreprise ou encore à la sous-traitance, l’impartition ou la privatisation.

Adoptée il y a plus de vingt ans, la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels 4 consacre la reconnaissance de deux droits fondamentaux également protégés par la Charte des droits et libertés de la personne 5 : le droit à l’information et le droit à la vie privée. Ainsi, sous réserve des exceptions énoncées à la loi, toute personne qui en fait la demande a droit d’obtenir les

1 L’article 7 du Projet de loi 61 définit les termes «organismes publics ». Sont entre autres des organismes publics les ministères, bon nombre d’organismes ou d’entreprises du gouvernement, les organismes scolaires, les organismes municipaux et les établissements de santé et de services sociaux. 2 www.tresor.gouv.qc.ca , mai 2004. 3 Idem, juin 2004. 4 L.R.Q., c. A-2.1, ci-après « Loi sur l’accès ». 5 L.R.Q., c. C-12. 2/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec documents détenus par un organisme public. Ces mêmes organismes doivent toutefois assurer la confidentialité des renseignements personnels que leur confient les citoyens.

Ayant subi peu de modifications fondamentales depuis son entrée en vigueur, la Loi sur l’accès énonce des règles de transparence et de confidentialité qui tiennent compte du mode traditionnel d’organisation de l’administration publique. Or, il y a vingt ans, peu de place était faite aux partenariats public-privé. Est-il possible de concilier ces partenariats avec les droits d’accès aux documents des organismes publics et de protection des renseignements personnels ?, droits qui traduisent d’importantes valeurs de la société québécoise ? Quelles seront les obligations de transparence applicables aux partenaires engagés dans ces nouveaux modes de gestion des affaires de l’État ? Dans quelles mesures les documents relatifs aux partenariats seront-ils accessibles ? Quel sera l’impact des partenariats sur la protection des renseignements personnels ?

Telles sont les questions que les membres de la Commission d’accès à l’information voudraient porter à l’attention des membres de la Commission parlementaire des finances publiques. La première partie de ce mémoire aborde les questions relatives à l’accès aux documents alors que la seconde partie traitera de l’impact du Projet de loi 61 sur la protection des renseignements personnels.

PARTIE 1 - Accès à l’information, transparence et démocratie Adoptée en 1982, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels reconnaît le droit, pour toute personne, d'obtenir l'information détenue par l'administration publique, c’est-à-dire plus de 2 700 organismes publics. Ministères et organismes gouvernementaux, municipalités et organismes qui en relèvent, institutions d'enseignement et établissements du réseau de la santé et des services sociaux sont assujettis à l’application de la Loi sur l’accès 6 . L'article 9 de la Loi sur l'accès énonce la règle générale : toute personne qui en fait la demande a droit d'accès aux documents d'un organisme public. Seule une exception énoncée expressément dans la Loi sur l'accès permet de passer outre à ce droit. S'inspirant du Rapport Paré 7 et des nombreuses consultations menées auprès des intéressés au début des années 80, le législateur a inscrit à la loi des restrictions qui permettent de protéger certains renseignements ayant des incidences sur les relations intergouvernementales, les négociations entre organismes publics, l'économie, l'administration de la justice et la sécurité publique, les décisions administratives ou politiques et la vérification 8 . 6 Les articles 3 à 7 de la Loi sur l'accès définissent la notion d'organismes publics. 7 QUÉBEC, Commission d’étude sur l’accès du citoyen à l’information gouvernementale et sur la protection des renseignements personnels, Information et liberté : rapport, Québec, ministère des Communications, 1981, 225 p. 8 Loi sur l'accès, art. 18 à 41. 3/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Tout comme plusieurs autres dispositions de la Loi sur l'accès, l'article 9 a un caractère prépondérant sur toutes les autres lois, ce qui lui confère un caractère quasi-constitutionnel 9 . Pour restreindre l'accès à un document autrement que de la manière qui est autorisée par la Loi sur l'accès, une loi particulière devra donc introduire une disposition qui mentionnera expressément que la restriction à l'accès à un document s'applique malgré la Loi sur l'accès 10 . Même si le Projet de loi 61 n’introduit aucune disposition dérogatoire à la Loi sur l’accès, il est difficile de conclure qu’il y aura statu quo au chapitre de l’accès à l’information. En effet, un transfert de responsabilités d’un organisme public clairement assujetti à la Loi sur l’accès vers une entreprise privée sur qui repose des obligations de transparence aux contours incertains risque de soulever de nombreuses interrogations reliées à l’application ou à l’interprétation des règles d’accès à l’information.

L’accès à l’information est indissociable des notions de transparence et de démocratie. Aussi doit-on espérer que les orientations privilégiées en matière de partenariat public-privé tiendront compte de ces liens étroits et qu’elles feront clairement apparaître l’intention de respecter ces valeurs importantes.

Dans la présente partie de son mémoire, la Commission d’accès à l’information rappelle pourquoi l’accès à l’information est un des maillons importants de notre régime politique. Elle s’interroge ensuite sur les règles de transparence et d’accès à l’information qui devraient être applicables aux organismes et entreprises engagés dans un partenariat. Finalement, sont abordées quelques questions reliées à l’accès à certains documents générés par les activités de partenariat.

1.1 Concilier accès à l’information et partenariats public-privé Favoriser la démocratie grâce à l’accès à l’information L’émergence de la société d’information fondée sur le savoir confère à l'information un rôle de premier plan dans tous les aspects de notre vie. Or, l'État et ses composantes comptent parmi les plus importants dépositaires d'informations. L'accès à ces informations est indispensable pour nous assurer une pleine participation aux activités de la société et pour maintenir le caractère démocratique de nos institutions 11 . 9 Conseil de la magistrature c. Commission d’accès à l’information, [2000] R.J.Q. 638 ; Macdonnell c. Québec (Commission d’accès à l’information), [2002] 3 R.C.S. 661. 10 L'article 168 de la Loi sur l'accès prévoit que les dispositions de cette dernière prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la Loi sur l'accès. 11 Commission d'accès à l'information, Une réforme de l’accès à l’information : le choix de la transparence, Rapport sur la mise en œuvre de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, novembre 2002. Une large partie de ce rapport est

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Plusieurs manifestations de la démocratie sont largement tributaires de l'accès à l'information détenue par l'État. Exercice du droit de vote pour le choix de nos dirigeants, reddition de compte de l'administration publique, voire même liberté d'expression, liberté d’opinion ou liberté de presse ne seraient que des coquilles vides s'ils ne pouvaient s'appuyer sur une information de qualité. Transparence et démocratie vont donc de pair.

La transparence a souvent été décrite comme comprenant des élections libres, des tribunaux publics, des lois claires et une presse libre. Le droit à l’information, indissociable de la transparence, garantit une participation des citoyens aux grands débats de la société. Il leur assure la possibilité d’évaluer les actions des personnes qui les gouvernent.

Maintes fois cité, cet extrait d’un jugement de la Cour suprême du Canada rappelle comment les lois en matière d’accès à l’information assurent le maintien de la démocratie :

61. La loi en matière d'accès à l'information a donc pour objet général de favoriser la démocratie, ce qu'elle fait de deux manières connexes. Elle aide à garantir, en premier lieu, que les citoyens possèdent l'information nécessaire pour participer utilement au processus démocratique, et, en second lieu, que les politiciens et bureaucrates demeurent comptables envers l'ensemble de la population. Comme l'explique le professeur Donald C. Rowat dans son article classique, intitulé «How Much Administrative Secrecy?» (1965), 31 Can. J. of Econ. and Pol. Sci. 479, à la p. 480:

[TRADUCTION] Ni le Parlement ni le public ne sauraient espérer demander au gouvernement de rendre compte s'ils n'ont pas une connaissance suffisante de ce qui se passe; ils ne peuvent pas non plus espérer prendre part au processus décisionnel ni contribuer à l'établissement des politiques générales et des lois si ce processus est tenu secret 12 . La santé de la démocratie est donc largement tributaire du droit d'accès à l’information. Mais au-delà de la sauvegarde de la démocratie et de la transparence de l'appareil gouvernemental et administratif, l'exercice du droit d'accès à l'information peut être un préalable essentiel à l'exercice ou au respect des autres droits et libertés dont nous sommes investis.

Ainsi, la Charte des droits et libertés de la personne reconnaît que toute personne est titulaire du droit à la vie ainsi qu'à la sûreté, à l'intégrité et à la liberté de sa personne. Cependant, pour protéger et faire valoir ces droits, il nous faut de l’information, par

consacrée à l’importance du droit d’accès à l’information dans notre société et aux réformes qui devraient être apportées afin d’en élargir la portée. 12 Dagg c. Canada (ministre des Finances), [1997] 2 R.C.S. 403, 433. 5/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec exemple, sur les dangers que peuvent représenter les conditions de notre environnement. Si nous sommes sis à côté d’un danger qui menace notre santé et que nous ne sommes pas conscients de ce danger, nous ne serons pas en mesure de faire valoir nos droits. Il en va de même pour la liberté d’opinion ou la liberté d’expression : l’absence d’une information complète, fiable et de qualité limiterait considérablement l’exercice de ces libertés.

Les principes directeurs du partenariat public-privé Le Projet de loi 61, dont l’objet premier est la création d’une nouvelle Agence, est muet quant aux principes qui devraient sous-tendre les activités de partenariat public-privé. Toutefois, la Politique-cadre sur les partenariats public-privé énonce une dizaine de principes directeurs qui doivent guider les activités de partenariat 13 . Deux de ces principes retiennent plus particulièrement notre attention. Il s’agit du principe du processus transparent et équitable et du principe de la reddition de compte qui sont décrits comme suit :

« Processus transparent et équitable Ce principe vise à : démontrer aux citoyens la crédibilité du processus et leur garantir que, lorsque retenue, la solution du PPP offre la meilleure valeur ajoutée pour les fonds publics investis ; favoriser une saine concurrence en assurant aux entreprises soumissionnaires un traitement équitable lors de la sélection des partenaires.

Reddition de comptes La réalisation de projets d’infrastructures ou de prestation de services en mode PPP ne change en rien l’obligation des organismes publics de rendre des comptes puisqu’ils conservent en tout temps la maîtrise des projets d’infrastructure et de prestation de services. À cet égard : ils doivent s’assurer d’obtenir du partenaire privé toute l’information pertinente pour permettre à l’organisme public de faire état de la disponibilité et de la qualité de la prestation de services. ils doivent tenir compte des droits des partenaires privés en matière de protection de l’information préjudiciable à leur situation concurrentielle. » 14 13 Op.cit., note 3, p. 2-3. 14 Idem, p. 3. 6/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Certes, ces deux principes traduisent d’importantes valeurs et indiquent l’orientation que privilégie le gouvernement. Mais la simple reconnaissance de ces principes suffira-elle pour assurer le respect du droit à l’information ? Peut-on croire que les principes d’un processus transparent et équitable et de la reddition de compte suffiront pour rendre accessible aux citoyens toute l’information pertinente relative aux partenariats public-privé ? En d’autres termes, la Loi sur l’accès répondra-t-elle aux attentes des citoyens à ce sujet ?

La Loi sur l’accès permet-elle d’assurer la transparence des partenariats public-privé ? La Loi sur l’accès trace les contours du droit à l’information en ayant comme point de repère le fait que les obligations de transparence reposent sur des organismes publics. Mais si la prestation d’un service public ou le renouvellement des infrastructures publiques impliquent une étroite collaboration entre le secteur public et le secteur privé, ne serait-il pas approprié de réfléchir aux règles de transparence et d’accès à l’information qui devraient prévaloir ? À ce sujet, la Commission partage l’opinion émise par les auteurs Marchildon, Boisvert et Lafontaine :

« Les contrôles de la transparence dans l’élaboration de la norme, comme la consultation et la supervision politique et administrative, ou ceux visant l’imputabilité, ont été conçus pour un processus décisionnel principalement interne à l’organisation étatique. […]

Lorsque l’élaboration de la norme et son application sont contractées ou déléguées, en tout ou en partie, à des personnes ou des organisations privées, les formes traditionnelles des contrôles parlementaire, administratif ou même judiciaire doivent être réévaluées.» 15 Le Projet de loi 61 crée peu de limites en ce qui concerne les responsabilités ou pouvoirs qui pourront faire l’objet d’un partenariat. En effet, l’article 13 de ce projet de loi précise qu’un organisme public partie à un contrat de partenariat peut déléguer à un partenaire l’exercice de toute fonction ou de tout pouvoir autre que réglementaire requis pour l’exécution du contrat. Cet organisme public peut même, conformément à l’article 15 de ce projet de loi, autoriser le partenaire à déléguer lui aussi toute fonction ou tout pouvoir.

Pour la Commission, ces vastes possibilités de délégation et de subdélégation de fonctions et de pouvoirs aux entreprises privées justifient encore plus l’assurance qui

15 Allison MARCHILDON, Yves BOISVERT, Serge LAFONTAINE, Les défis éthiques et juridiques des partenariats public-privé, Vigie, L’observatoire de l’administration publique, Énap, vol. 7, 2, avril 2004, p. 7.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec devrait être donnée aux citoyens que partenariat public-privé et transparence iront de pair et que la Loi sur l’accès répondra à leurs besoins d’information.

Les contrats de partenariat public-privé sont présentés comme l’un des volets de la modernisation de l’État. Cette modernisation, croit la Commission, doit se concrétiser en assurant le maintien des règles que la société québécoise s’est données en matière d’accès à l’information au cours des deux dernières décennies. Si l’entreprise privée doit contribuer davantage à la mission publique, elle doit s’attendre à de nouvelles obligations de transparence :

« En acceptant de jouer le jeu du partenariat, l’entreprise privée doit cependant accepter d’opérer dans un contexte particulier : elle acceptera ainsi de se plier à de nouvelles exigences de transparence, de reddition de compte et d’écoute des citoyens-consommateurs. Les opérations faites par l’entreprise privée et utilisant les deniers publics sont sujettes à des contraintes particulières qu’on ne retrouve pas dans le cadre de transactions entre deux entreprises privées. » 16 Selon la Commission, éviter de débattre maintenant des règles de transparence et d’accès à l’information applicables aux partenariats public-privé risque de susciter la méfiance des citoyens. De plus, en l’absence de règles claires, il ne fait aucun doute que le débat se transportera alors devant les tribunaux. Alors ne serait-il pas plutôt opportun d’indiquer clairement quelle direction devrait être prise ?

Sans prétende au caractère exhaustif de sa démarche, la Commission propose, dans les pages qui suivent, certaines avenues qui pourraient favoriser la transparence des activités de partenariats public-privé.

1.2 L’assujettissement à la Loi sur l’accès et les partenariats public-privé Dans quelle mesure la Loi sur l’accès s’appliquera-t-elle aux partenariats public-privé ? À la lumière du Projet de loi 61, le texte qui suit analyse les règles qui seraient applicables à la nouvelle Agence des partenariats public-privé, aux filiales que cette dernière pourra créer ou acquérir et aux entreprises privées qui concluront un contrat avec un organisme public.

16 Benoit A. AUBERT, Michel PATRY, Les partenariats public-privé : une option à découvrir, Rapport bourgogne, Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO), mars 2004, p. 9.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec L’Agence des partenariats public-privé Créé par le Projet de loi 61, l’Agence des partenariats public-privé se voit confier un mandat qui l’amènera à jouer un rôle majeur afin d’atteindre les objectifs que le gouvernement s’est fixés au chapitre de la modernisation de l’État.

Conformément à l’article 20 du Projet de loi 61, l’Agence sera une personne morale, mandataire de l’État. Elle sera administrée par un conseil d’administration composé du directeur général et d’au plus huit autres membres tous nommés par le gouvernement. Pour être assujetti à l’application de la Loi sur l’accès, un organisme doit être inclus dans la liste des organismes publics définis aux articles 3 à 7 de cette loi. Plus particulièrement, l’article 4 confère un statut d’organisme public à tout organisme dont le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres. Puisque le gouvernement nommera la totalité des membres du conseil d’administration de l’Agence, cette dernière sera clairement assujettie au respect des obligations imposées par la Loi sur l’accès.

Les filiales de l’Agence S’il ne fait aucun doute que l’Agence sera un organisme public assujetti au respect de la Loi sur l’accès, il en va tout autrement pour les filiales que cette Agence pourra créer ou acquérir. L’article 14 du Projet de loi 61 prévoit comme suit le pouvoir de constituer des filiales :

14. L’Agence peut, avec l’autorisation du gouvernement, acquérir ou constituer toute filiale utile aux fins de la réalisation de sa mission. Est une filiale de l’Agence la personne morale dont elle détient plus de 50% des droits de vote afférents à toutes les actions émises et en circulation ou la société dont elle détient plus de 50% des parts. Est également une filiale de l’Agence toute personne morale ou société dont elle peut élire la majorité des administrateurs.

Or, l’article 4 de la Loi sur l’accès stipule que les organismes gouvernementaux sont ceux qui rencontrent l’une ou l’autre des conditions suivantes : La majorité des membres de l’organisme est nommée par le gouvernement ou un ministre ; La loi ordonne que le personnel de cet organisme soit nommé suivant la Loi sur la fonction publique ; Le fonds social de l’organisme fait partie du domaine de l’État. Ainsi, les filiales dont la majorité des administrateurs sera nommée par l’Agence, et non par le gouvernement ou un ministre, ne seraient pas des organismes publics au sens de la Loi sur l’accès.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Les filiales de l’Agence dont le fonds social fera partie du domaine de l’État, au sens de l’article 4 de la Loi sur l’accès, seront assujetties aux obligations imposées par la Loi sur l’accès. Mais déterminer si le fonds social d’un organisme fait partie du domaine de l’État n’est pas toujours une question aisée. Ainsi, dans l’état actuel de la jurisprudence, on peut croire que seules les filiales, dont l’Agence détiendrait 100 % des actions ou des parts, seraient soumises à l’application de la Loi sur l’accès. Tel est du moins ce que laisse croire un jugement rendu en 2002 par la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Pouliot c. Cour du Québec.

Ce jugement de la Cour d’appel interprète l’article 4 de la Loi sur l’accès et plus particulièrement les termes de cet article qui énoncent qu’un organisme dont le fonds social fait partie du domaine public est un organisme public assujetti à la Loi sur l’accès. Ainsi, selon ce jugement unanime de la Cour, dont les motifs ont été rédigés par le juge Beauregard :

[6] […] quelle que soit la définition qu’on peut, à l’occasion et suivant les circonstances, donner aux mots « fonds social », je suis d’avis que, pour les fins de la Loi [ sur l’accès ], une société à fonds social dont toutes les actions sont détenues par l’État est un organisme dont le fonds social fait partie du domaine public. Et, en l’espèce, toutes les actions de Hydro-Québec International sont détenues par Hydro-Québec, et tous les biens de Hydro-Québec, y compris les actions de celle-ci dans Hydro-Québec International, sont la propriété de la province.

[7] Bref, pour les fins qui nous intéressent, les mots « fonds social qui fait partie du domaine public » ne renvoient pas aux sommes versées à la société pour obtenir ses actions, ni aux autres biens de la société. Ils renvoient plutôt aux actions détenues par l’État. La Loi trouve application à l’égard des sociétés dont l’État détient les actions. 17 Ce jugement de la Cour d’appel a mis fin à une longue saga judiciaire entreprise en 1994 et au cours de laquelle les tribunaux avaient conclu que Nouveler, également filiale d’Hydro-Québec, la Société des casinos et la Société des loteries-vidéo, toutes deux filiales de Loto-Québec, n’étaient pas des organismes soumis au respect des obligations imposées par la Loi sur l’accès.

Dans tous les cas, ces jugements étaient fondés sur le fait que le fonds social appartenait à la filiale visée, filiale qui était une compagnie privée. Le fait qu’un organisme public ait été détenteur de la totalité des actions de cette compagnie privée ne devant rien changer : il ne fallait pas confondre le fonds social de la compagnie privée et celui de l’organisme public.

17 Pouliot c. Cour du Québec (Hydro-Québec International), [2002] C.A.I. 463. 10/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Le jugement de la Cour d’appel clarifie donc la situation pour les filiales dont toutes les actions sont détenues par un organisme public. Il ne règle pas pour autant le sort des filiales dont le fonds social n’est détenu qu’en partie par un organisme public.

Une filiale dont l’Agence détient plus de 50 % des droits de vote afférents à toutes les actions émises ou plus de 50 % des parts devrait-elle être soumise à des obligations de transparence comme celles qu’impose la Loi sur l’accès ? Selon la Commission, une telle filiale, qui serait appelée à dispenser un service public ou à collaborer au renouvellement des infrastructures publiques, devrait être tenue au respect d’obligation de transparence comme tout autre organisme public.

C’est d’ailleurs le sens d’une recommandation formulée à deux reprises par la Commission d'accès à l'information dans ses rapports quinquennaux de 1997 Dans ces deux rapports, la Commission proposait au législateur de revoir la définition d’organisme gouvernemental et d’assujettir à l’application de la Loi sur l’accès tous les organismes dont le financement est largement assuré par l’État.

Les entreprises privées À moins d’exigences particulières inscrites dans des lois sectorielles, les entreprises privées n’ont évidemment pas les obligations de transparence qu’impose la Loi sur l’accès aux organismes publics.

Toutefois, tel que la Commission l’a mentionné ci-dessus, l’approche des partenariats public-privé offre une opportunité au législateur de repenser les obligations de transparence que devraient assumer les entreprises privées associées à la réalisation d’un projet d’infrastructure ou à la prestation de services publics.

Quoique les précédents soient peu nombreux, on doit tout de même souligner que la législation québécoise prévoit déjà que certaines entreprises du secteur privé peuvent être assimilées, pour des fins précises, à des organismes publics au sens de la Loi sur l’accès.

Ainsi, l’article 13.6 de la Loi sur les terres du domaine de l’État 20 énonce que la personne morale à qui le ministre des Ressources naturelles, de la Faune et des Parcs a confié l’exercice de pouvoirs aux fins de la gestion de terres du domaine de l’État est réputée être un organisme public dans le cadre de cette gestion et est assujettie aux dispositions de la Loi sur l’accès.

18 Vie privée et transparence administrative au tournant du siècle, Rapport sur la mise en œuvre de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, juin 1997, p. 77. 19 Op.cit., note 11, p. 53. 20 L.R.Q., c. T-8.1. 11/

18 et 2002 19 .

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec De plus, l’article 129.4 de la Loi sur le bâtiment 21 prévoit que le gouvernement peut confier à la Corporation des maîtres électriciens du Québec et à la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec le mandat de surveiller l'administration de cette loi ou de voir à son application relativement à la qualification professionnelle de leurs membres ainsi qu'aux garanties financières exigibles de ceux-ci. À ces fins, la Corporation mandataire est considérée comme un organisme public assujetti aux dispositions de la Loi sur l’accès.

Par ailleurs, le principe de la reddition de compte, énoncé dans la Politique cadre sur les partenariats public-privé, prévoit qu’un organisme public devra s’assurer d’obtenir auprès du partenaire privé toute l’information pertinente pour permettre à cet organisme public de faire état de la disponibilité et de la qualité de la prestation de services. Mais comment s’assurer que le partenaire privé communiquera l’information pertinente ? La garantie de l’exécution de cette obligation devrait-elle obligatoirement être énoncée au contrat de partenariat ou dans la loi ?

Est-ce que tous les documents du partenaire privé qui auront un lien avec le partenariat seront accessibles par l’organisme public ? Si un litige surgit à ce sujet, comment sera-t-il réglé ? Peut-on penser que le citoyen pourrait avoir un droit d’accès aux documents directement auprès du partenaire privé si ce dernier est appelé à dispenser un service public ? Et si le citoyen formule une demande d’accès auprès de l’organisme public, pourra-t-il se faire répondre que le document n’est pas détenu par l’organisme public mais par une entreprise privée qui n’a pas d’obligation de communiquer l’information ?

La Commission estime que toutes ces questions devraient être analysées et que les entreprises privées engagées dans un partenariat public-privé devraient être clairement assujetties à des obligations de transparence dont la portée pourrait être déterminée par le législateur.

1.3 L’accès aux documents concernant les partenariats Le droit d’accès aux documents détenus par les organismes publics n’est pas absolu. La Loi sur l’accès énonce toute une série d’exceptions à ce principe. Toutefois, les tribunaux ont toujours reconnu que ces exceptions, qui pointent en quelque sorte les situations la communication d’un document ne relève pas de l’intérêt public, devaient recevoir une interprétation restrictive afin de favoriser une application généreuse du droit d’accès.

Par exemple, un organisme public pourra refuser l’accès à une analyse produite à l’occasion d’une recommandation faite dans le cadre d’un processus décisionnel qui a toujours cours. Il pourra également refuser de communiquer un avis ou une recommandation faits depuis moins de dix ans par un de ses membres, un membre de son personnel, un membre ou un membre du personnel d’un autre organisme public ou par un consultant ou un conseiller.

21 L.R.Q., c. B-1.1. 12/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Les restrictions à l’accès énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès Toutefois, dans un contexte les activités de partenariat public-privé prendront de l’ampleur, nul doute que les restrictions à l’accès qui seront le plus souvent invoquées seront celles énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès 22 . Le législateur a regroupé ces restrictions dans une section de la loi dont l’objet est de protéger, dans des circonstances bien précises, les renseignements ayant des incidences sur l’économie. L’article 22 énonce les règles applicables aux renseignements qui appartiennent aux organismes publics alors que les articles 23 et 24 prévoient le traitement qui doit être réservé aux renseignements détenus par des organismes publics mais qui ont été fournis par des tiers.

Ainsi, conformément à l'article 22, un organisme public peut, à sa discrétion, refuser de communiquer un secret industriel qui lui appartient. Ce même article permet également de garder confidentiel un renseignement industriel ou un renseignement financier, commercial, scientifique ou technique lui appartenant. Mais pour soulever avec succès cette restriction, l’organisme public devra démontrer que la divulgation de ce renseignement risque vraisemblablement d’avoir l’un ou l’autre des quatre effets suivants : entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat ; causer une perte à l'organisme ; procurer un avantage appréciable à une autre personne ; nuire à la compétitivité de l'organisme (dans ce dernier cas, l’organisme qui refuse l’accès doit être constitué à des fins industrielles, commerciales ou de gestion financière).

À titre d’exemple, un organisme public pourrait décider qu’il refuse de donner accès à un renseignement financier relatif à ses activités de partenariats s’il estime que cette communication pourrait lui causer une perte.

La Loi sur l'accès protège également de façon particulière les renseignements détenus par des organismes publics mais fournis par des tiers. Dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions ou parce que la loi ou un règlement les y obligent, les organismes publics sont souvent appelés à colliger des renseignements que des tiers leurs fournissent à toutes sortes de fins : obtention d’un permis, d’une autorisation, d’une subvention, obligation de déclaration de revenus ou de produire des états financiers… Et il est évident que les activités de partenariats public-privé amèneront les organismes publics à détenir des renseignements qui seront transmis par leur partenaire privé. Quelles seront les règles d’accès à ces renseignements ?

L'article 23 de la Loi sur l’accès prévoit qu'un organisme public doit refuser de communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle à moins que ce tiers n'y consente. Pour soulever cette restriction avec succès, il suffit de prouver la

22 Les articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès sont reproduits en annexe. 13/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec nature confidentielle du renseignement. Contrairement à ce qu’exige l’article 22, il n’est pas nécessaire de démontrer que la communication de l’un de ces renseignements aurait vraisemblablement pour effet d’entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à ce tiers, de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers.

Une interdiction de communication de même nature existe également pour les catégories de renseignements autres que celles visées à l’article 23 et fournis par des tiers. Toutefois, précise l'article 24, pour ces autres catégories de renseignements, il faudra démontrer que leur divulgation risque vraisemblablement d’avoir les mêmes effets que ceux prévus à l’article 22 soit, répétons-le, entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, causer une perte à ce tiers, procurer un avantage appréciable à une autre personne ou nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers.

La Commission s’interroge sur l’impact que pourraient avoir sur la transparence des activités de partenariat public-privé les restrictions à l’accès énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès. Il ne s’agit pas ici de révéler le secret industriel d’un organisme public ou d’une entreprise privée ou leur savoir-faire. Pas plus qu’il ne s’agit de divulguer tous les éléments des états financiers d’une entreprise privée. Il s’agit plutôt de s’assurer que ces dispositions ne permettent pas aux organismes publics et aux partenaires privés de l’État de masquer leurs activités dans le cadre d’un partenariat public-privé.

Par exemple, on peut comprendre qu’un renseignement financier fourni par une entreprise privée pour l’obtention d’un permis puisse faire l’objet d’une restriction à l’accès. Mais un renseignement financier fourni par cette entreprise et essentiel à la reddition de compte d’un partenariat public-privé pourra-t-il également faire l’objet d’une interdiction de communication ? Devra-t-on obtenir le consentement du partenaire privé pour avoir accès à ce type de renseignements ? Ne devrait-on pas plutôt prévoir dans la loi que les renseignements visés à l’article 23, lorsqu’ils concernent un partenariat public-privé, ne peuvent être communiqués que si démonstration est faite que leur communication risque vraisemblablement d’avoir l’un ou l’autre des effets prévus aux articles 22 et 24 ?

La Commission ne prétend pas avoir de réponses à toutes ces questions. Toutefois, elle croit qu’elles sont suffisamment importantes pour que le législateur s’y attarde et y apporte les réponses qui permettront de garantir la transparence des activités de partenariat public-privé.

Des documents qui devraient avoir un caractère public La Loi sur l’accès encadre les restrictions à l’accès que peuvent soulever les organismes publics pour refuser de communiquer un renseignement ou un document. Toutefois, une autre loi peut prévoir un droit d’accès plus généreux que celui prévu par la Loi sur

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec l’accès. Ainsi, lorsqu’une loi prévoit qu’un document a un caractère public, aucune restriction à l’accès ne peut être invoquée pour en refuser la communication.

La Commission estime que le législateur devrait étudier la possibilité de conférer un caractère public à certains documents qui seront au cœur même des partenariats public-privé. Pour ces documents, aucune restriction à l’accès ne pourrait être soulevée pour en refuser l’accès. Par exemple, les contrats de partenariat et les plans d’affaires pourraient avoir un caractère public.

Les contrats de partenariat Règle générale, la jurisprudence de la Commission d'accès à l'information et des tribunaux supérieurs reconnaît le caractère accessible des clauses d’un contrat qui ont été négociées entre un organisme public et une entreprise privée. Puisque ces clauses sont négociées, il ne s’agit donc pas de renseignements qui « appartiennent » à l’organisme public au sens de l’article 22 de la Loi sur l’accès ou de renseignements « fournis par des tiers » au sens de l’article 23 de cette même loi.

Toutefois, les tribunaux ont reconnu que les renseignements intégrés dans un contrat qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation entre l’organisme public et l’entreprise privée peuvent être soustraits à l’accès si les conditions des articles 23 ou 24 sont présentes. 23 Le contrat de partenariat constituera un document de référence important qui déterminera les obligations respectives des organismes publics et des entreprises privées. Sa description et son contenu sont établis par l’article 6 du Projet de loi n° 61 :

6. Un contrat de partenariat public-privé est un contrat à long terme par lequel un organisme public associe une entreprise du secteur privé, avec ou sans financement de la part de celle-ci, à la conception, à la réalisation et à l’exploitation d’un ouvrage public. Un tel contrat peut avoir pour objet la prestation d’un service public.

Le contrat stipule les résultats à atteindre et établit un partage des responsabilités, des investissements, des risques et des bénéfices dans un objectif d’amélioration de la qualité des services offerts aux citoyens.

23 Un jugement récent de la Cour du Québec remet toutefois en cause cette interprétation. Il conclut que le contrat et son contenu négocié ne sont pas des renseignements « fournis par un tiers » et que les restrictions à l’accès des articles 23 et 24 sont inapplicables. Voir Tremblay c. Société générale de financement du Québec, C.Q. n o 500-02-102368-029, 26 mai 2004, j. Gouin. Ce jugement fait présentement l’objet d’une requête en révision judiciaire devant la Cour supérieure, 500-17-021318-046.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Pour assurer la transparence des activités de partenariats et pour être en mesure d’évaluer correctement la reddition de compte qui en sera faite, la Commission croit qu’il pourrait être approprié de prévoir, à l’article 6 du Projet de loi 61, que le contrat de partenariat a un caractère public.

Conférer un caractère public aux contrats de partenariat éviterait donc tout litige lié à l’accessibilité ou non de ce document. De plus, une telle reconnaissance donnerait suite à la proposition formulée par des auteurs en droit administratif, dont le professeur Denis Lemieux :

« Aussi, les termes des ententes devraient être rendus publics, dans une optique de transparence, pour que les citoyens soient à même de constater que le gouvernement n’abdique pas ses responsabilités et conserve le contrôle financier et politique de ces opérations. » 24 Consacrer le caractère public des ententes de partenariat ne serait pas un précédent. En effet, l’article 10 de la Loi concernant les partenariats en matière d’infrastructures de transport 25 stipule que toute entente de partenariat conclue par le ministre des Transports avec une entreprise privée pour réaliser la construction, la réfection ou l’exploitation d’une infrastructure de transport doit être déposée à la commission parlementaire compétente de l’Assemblée nationale dans les 30 jours de sa signature.

Le plan d’affaires L’article 54 du Projet de loi 61 prévoit l’obligation, pour l’Agence des partenariats public-privé, d’établir un plan d’affaires :

54. L’Agence établit, selon la forme, la teneur et la périodicité fixées par le président du Conseil du trésor, un plan d’affaires qui doit inclure les activités de ses filiales. Ce plan est soumis à l’approbation du gouvernement.

Au terme de la période de validité d’un plan d’affaires, celui-ci continue de s’appliquer jusqu’à ce qu’un nouveau plan soit approuvé.

24 Denis LEMIEUX, Pierre-Hugues VALLÉE, Partenariats d’affaires public-privé : la démarche, les formes, les conséquences, Collection municipale et de droit public, mai 2004, CCH, p. 5. Voir également Françoise SAINT-MARTIN, L’utilisation des contrats comme mode de participation des parties privées à la détermination des normes, Actes de la XV e Conférence des juristes de l’État, Éditions Yvon Blais, 2002, p. 61 25 L.R.Q., c. P-9.001. 16/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Tout comme pour le contrat de partenariat, la Commission croit qu’il serait approprié d’évaluer la possibilité de reconnaître un caractère public à ce document qui indiquera clairement les orientations gouvernementales relatives aux partenariats public-privé

PARTIE 2 - Protection des renseignements personnels et partenariats public-privé

Afin de réaliser ses nombreuses missions, l’État est appelé à détenir de nombreux renseignements personnels que lui confient les citoyens. Depuis 1982, la Loi sur l’accès impose aux organismes publics plusieurs obligations relatives à la collecte, l’utilisation, la conservation et la communication de ces renseignements personnels.

À ses articles 53 et 59, la Loi sur l’accès reconnaît explicitement que les renseignements personnels sont confidentiels et qu’ils ne peuvent être communiqués que dans la mesure prévue par cette loi.

Depuis 1994, l’entreprise privée est également soumise au respect de diverses obligations qui visent à assurer la confidentialité des renseignements personnels qu’elle est appelée à détenir. Tout comme pour la Loi sur l’accès, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 26 n’autorise la communication de renseignements personnels sans le consentement de la personne concernée que dans des situations bien définies. De plus, conformément à l’article 37 du Code civil du Québec, toute personne qui constitue un dossier sur une autre personne ne peut communiquer les renseignements concernant cette personne à des tiers sans son consentement ou sans l’autorisation de la loi.

La Loi sur l’accès n’interdit pas la communication de renseignements personnels entre un organisme public et une entreprise privée. Toutefois, puisqu’il s’agit d’une exception au principe de la confidentialité des renseignements personnels détenus par l’État, ces échanges de renseignements personnels doivent respecter certaines conditions. Ces conditions, regroupées à l’article 67.2 de la Loi sur l’accès, seront commentées ci-après.

Quels impacts pourraient donc avoir les partenariats public-privé sur la gestion et la protection des renseignements personnels ? Les garanties de confidentialité qu’offre la législation québécoise, tant dans les secteurs public que privé, suffisent-elles pour assurer la protection des renseignements personnels que les partenaires pourraient être appelés à s’échanger ?

Cette deuxième partie du mémoire de la Commission d’accès à l’information décrit d’abord les règles qui autorisent la communication de renseignements personnels entre un organisme public et une entreprise privée. Elle rappelle ensuite que l’impact des partenariats public-privé dépendra largement de la nature des contrats conclus. Finalement, la Commission soulignera certaines questions éthiques liées à la protection

26 L.R.Q., c. P-39.1, ci-après « Loi sur le secteur privé ». 17/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec des renseignements personnels qui pourraient être soulevées dans le cadre de partenariats particuliers.

2.1 Les communications de renseignements personnels entre partenaires L’article 67.2 de la Loi sur l’accès autorise un organisme public à communiquer des renseignements personnels à toute personne ou organisme lorsque cette communication est nécessaire à l’exercice d’un mandat. Le mandat, qui devra être écrit, devra également inclure certaines garanties de confidentialité :

67.2. Un organisme public peut, sans le consentement de la personne concernée, communiquer un renseignement nominatif à toute personne ou organisme si cette communication est nécessaire à l'exercice d'un mandat confié par l'organisme public à cette personne ou à cet organisme. Dans ce cas, l'organisme public doit: confier ce mandat par écrit; indiquer, dans ce mandat, les dispositions de la présente loi qui s'appliquent au renseignement qui lui a été communiqué ainsi que les mesures qu'il doit prendre pour que ce renseignement ne soit utilisé que dans l'exercice de son mandat et pour qu'il ne le conserve pas après son expiration. Le deuxième alinéa ne s'applique pas aux membres des ordres professionnels visés à l'annexe I du Code des professions (chapitre C-26) et qui sont tenus au secret professionnel.

Est-ce qu’un contrat de partenariat public-privé est de la nature d’un mandat au sens de l’article 67.2 de la Loi sur l’accès ? La Commission considère que l’interprétation juridique du terme « mandat » est incertaine quant aux contrats de partenariat.

Traditionnellement, la Commission a inclus dans la notion de « mandat » un contrat de service ou d’entreprise conclu entre un organisme public et une entreprise du secteur privé. Cette interprétation était par ailleurs conforme à la définition que donnait alors l’ancien Code civil à ce terme. Mais depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code civil du Québec, en 1994, la notion de mandat est restreinte aux seuls actes juridiques ou à ceux qui peuvent être posés en cas d’inaptitude du mandant. Les articles pertinents du Code civil se lisent comme suit :

2130. Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le pouvoir de la représenter dans l'accomplissement d'un acte juridique avec un tiers, à une autre personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s'oblige à l'exercer.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Ce pouvoir et, le cas échéant, l'écrit qui le constate, s'appellent aussi procuration.

2131. Le mandat peut aussi avoir pour objet les actes destinés à assurer, en prévision de l'inaptitude du mandant à prendre soin de lui-même ou à administrer ses biens, la protection de sa personne, l'administration, en tout ou en partie, de son patrimoine et, en général, son bien-être moral et matériel.

Parallèlement, le Code civil du Québec définit le contrat d’entreprise ou de service comme suit :

2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.

Si l’on doit interpréter le terme « mandat » selon la définition qu’en donne le nouveau Code civil, il faut alors conclure que la communication de renseignements personnels, dans le cadre d’un contrat de partenariat, ne serait pas visée par l’article 67.2 de la Loi sur l’accès puisque ce contrat correspondrait davantage à la notion de « contrat de service » ou de « contrat d’entreprise » et non à celle de « mandat ».

Dans son Rapport quinquennal de 1997 27 , la Commission d'accès à l'information a signalé que la notion de mandat, au sens du nouveau Code civil, limitait la portée de l’article 67.2. Ce constat de la Commission amenait d’ailleurs le ministre des Relations avec les citoyens et de l’Immigration à proposer, en 2000, un amendement à l’article 67.2 de la Loi sur l’accès afin d’autoriser la communication de renseignements personnels à une personne ou organisme lorsque cette communication est nécessaire à l’exercice d’un contrat de service ou d’entreprise. 28 Cette modification législative ne fut toutefois jamais adoptée, le projet de loi la proposant étant mort au feuilleton.

Afin d’assurer la légalité de la communication de renseignements personnels entre un organisme public et son partenaire privé, la Commission invite à nouveau le législateur à modifier l’article 67.2 de la Loi sur l’accès afin d’y ajouter la possibilité de communiquer des renseignements personnels dans le cadre d’un contrat de service ou d’entreprise.

27 Op.cit., note 18, p. 121. 28 Projet de loi 122, Loi modifiant la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d’autres dispositions législatives. Déposé à l’Assemblée nationale le 11 mai 2000.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec 2.2 Nature du contrat de partenariat et impact sur la protection des renseignements personnels

Le Projet de loi 61 ne fixe pas de contraintes ou de limites quant à ce qui peut faire l’objet d’un partenariat. L’article 6 de ce projet de loi précise simplement qu’un contrat de partenariat public-privé est un contrat à long terme par lequel un organisme public associe une entreprise du secteur privé à la conception, la réalisation et à l’exploitation d’un ouvrage public. Toujours en vertu de cette même disposition, un tel contrat peut également avoir pour objet la prestation d’un service public. Seule contrainte qu’établit le projet de loi : le contrat ne peut prévoir une délégation du pouvoir de réglementation.

Quant aux critères de sélection des projets énumérés dans la Politique cadre sur les partenariats public-privé, ils prévoient les conditions d’ouverture d’un partenariat ou encore les objectifs à atteindre mais n’imposent aucune limite quant à la nature du contrat. Ces critères sont les suivants :

une amélioration de la prestation des services publics ; des engagements financiers importants de la part de l’État ; une complexité technique et un degré de risques élevés ; un potentiel de créativité et d’innovation susceptible de mettre à profit le savoir-faire de l’entreprise privée ; un marché concurrentiel existant. 29 Les exemples de partenariats que cite la ministre responsable de l’Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor dans son Plan de modernisation 2004-2007 30 se limitent aux infrastructures routières, à la construction d’écoles ou d’une résidence pour étudiant, à l’exploitation de parcs routiers et à la mise en place d’un système électronique d’appels d’offres du gouvernement du Québec.

À ces exemples, nous pouvons ajouter des projets de partenariat dans le secteur de l’énergie, pour la construction de petites centrales hydroélectriques, ou dans le secteur des ressources informationnelles. Dans ce secteur particulier, certains contrats de partenariats qui impliquent une vaste circulation de renseignements personnels existent déjà. Tel est le cas pour les projets Bonjour Québec.com et le projet Placements Québec.

Le Projet de loi 61 pourrait éventuellement ouvrir la voie à un partenariat public-privé dans des domaines pour l’instant inexplorés. Le Projet de loi pourrait permettre, par exemple, un partenariat public-privé pour la gestion d’un programme d’aide financière aux études ou la gestion du régime d’assurance médicaments. Rien n’interdirait non plus que la gestion de mesures d’aide financière dans le cadre des politiques de sécurité du revenu puisse faire l’objet d’un partenariat. Le traitement des données fiscales pourrait lui aussi donner lieu à un contrat de partenariat.

29 Op.cit., note 3, p. 1. 30 Op.cit., note 2. 20/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Il tombe sous le sens qu’un partenariat, dont l’objet est la construction d’une autoroute, n’aura pas le même impact sur la protection des renseignements personnels qu’un partenariat serait confiée à l’entreprise privée la gestion du régime d’assurance médicaments, d’un autre programme d’aide financière ou le traitement des données fiscales des citoyens.

Si un contrat de partenariat implique une vaste circulation de renseignements personnels entre les partenaires, les garanties de confidentialité inscrites dans la législation québécoise seront certes applicables. Mais ces garanties de confidentialité seront-elles suffisantes pour assurer une réelle protection des renseignements personnels ?

Selon la Commission, les autorités gouvernementales pourraient ajouter à leurs principes directeurs certaines balises qui assureraient une complète protection des renseignements personnels. Par exemple, ces principes directeurs pourraient explicitement prévoir, qu’en tout temps, l’organisme public demeurera imputable de la gestion des renseignements personnels qui seront communiqués à l’entreprise privée ou qui seront colligés directement par cette entreprise auprès des citoyens. L’État ne doit pas se délester de sa responsabilité envers la protection des renseignements personnels que les citoyens lui confient.

Par ailleurs, chaque fois que des renseignements personnels seront impliqués, il serait souhaitable que les contrats de partenariats soient explicites sur les obligations respectives des partenaires au chapitre de la protection des renseignements personnels : quelles seront les mesures de sécurité prises pour assurer leur protection, qui aura accès à ces données, à quelles fins les renseignements pourront-ils être utilisés, quelle sera la durée de conservation de ces renseignements…

En fait, l’objectif est simple : le citoyen devrait avoir l’assurance qu’il n’y aura pas de zones d’ombres au niveau des responsabilités respectives que devront assumer les partenaires public et privé pour garantir la protection des renseignements personnels.

2.3 Questions éthiques liées à la protection des renseignements personnels Même si la législation québécoise offre de sérieuses garanties au niveau de la protection des renseignements personnels, les contrats de partenariats, une vaste communication de renseignements personnels à l’entreprise privée serait prévue, pourraient soulever certaines questions éthiques auxquelles il faudrait répondre.

Lorsque le citoyen accepte de confier à l’État des renseignements qui le concernent, un contrat implicite de confiance l’amène à croire que ces données ne feront pas le tour de l’État ou qu’elles ne seront pas éventuellement communiquées au secteur privé sans son consentement.

Désireux d’obtenir un avantage financier ou autre, ou tout simplement parce qu’une obligation légale les y contraint, les citoyens ont rarement la possibilité de refuser la

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec communication des renseignements personnels qui les concernent. En contrepartie, ils attendent une gestion sécuritaire et confidentielle de cette information par l’État. Cette attente caractérise le lien de confiance tissé entre les citoyens et l’État, lien sans lequel la cueillette de renseignements serait sans doute moins aisée.

Préserver le lien de confiance entre le citoyen et l’État demeure un objectif incontournable. Et les nouvelles façons de faire dans la gestion de l’État, que ce soit dans le cadre de partenariat public-privé ou autrement, ne devraient pas entraîner l’affaiblissement de ce lien de confiance.

La Commission croit que l’État devrait donc s’assurer, lorsque le contexte s’y prêtera, qu’un contrat de partenariat ne suscitera pas la méfiance des citoyens au sujet de la protection de leurs renseignements personnels. À cet égard, certaines questions devraient recevoir des réponses claires.

Par exemple, lors du choix d’un partenaire privé, s’assurera-t-on que ce dernier sera à l’abri non seulement de tout conflit d’intérêts mais également de toute apparence de conflit d’intérêts ? Pourra-t-on confier la prise en charge des technologies de l’information d’un ministère à un partenaire qui fait, directement ou indirectement, le commerce ou le traitement de renseignements personnels ? Évitera-t-on de confier des renseignements personnels à un partenaire qui compte parmi ses clients des personnes ou entreprises qui ont, ou pourraient avoir un intérêt à obtenir les renseignements personnels confiés par l’État à un fournisseur ? L’entreprise privée qui aura accès à des renseignements personnels dans le cadre de la prestation d’un service public pourra-t-elle commercialiser ces renseignements ?

De plus, sera-t-il possible de rassurer les citoyens quant à l’équivalence des normes de sécurité et de confidentialité respectées par le secteur privé ? L’État pourra-t-il convaincre les citoyens, qu’en tout temps, une faillite, une fusion d’entreprises, un siège social ou une place d’affaires en dehors du Québec, un changement de fournisseur au terme d’un contrat n’entraîneront aucun risque pour la protection des renseignements personnels ?

Ainsi, avant de conclure des contrats de partenariat qui amèneront les organismes publics à communiquer à l’entreprise privée des renseignements personnels concernant les citoyens ou avant de confier à l’entreprise privée des fonctions ou pouvoirs qui l’autoriseront à recueillir auprès des citoyens des renseignements personnels aux fins de la prestation d’un service public, le gouvernement devrait, à tout le moins, s’assurer que ce transfert de renseignements ou de responsabilités n’amenuisera pas la confiance des citoyens à l’égard du sort réservé aux renseignements qui les concernent. Pour atteindre cet objectif, des évaluations de l’impact des contrats sur la protection des renseignements personnels pourraient être systématiquement réalisées et, au besoin, la population pourrait être consultée pour débattre de l’opportunité d’un projet.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec CONCLUSION L’approche des partenariats public-privé engendrera une révision majeure des modes de fonctionnement de l’État. Cette modernisation de l’État doit pouvoir se réaliser tout en respectant certaines valeurs bien ancrées dans la société québécoise. Comme l’écrivent Aubry et Patry :

l’État ne peut se départir, face aux citoyens, de sa responsabilité ultime de gestionnaire du domaine public. L’État doit donc concevoir et mettre en place les mécanismes de reddition de comptes et de réglementation nécessaires au bon fonctionnement, dans l’intérêt public, des partenariats 31 . Ainsi, afin d’assurer la transparence des partenariats et le respect du droit à l’information, la Commission d’accès à l’information invite le législateur à s’interroger sur les questions suivantes :

À quelles obligations de transparence devraient être assujettis les organismes publics et les entreprises privées liés par un contrat de partenariat ?

Les filiales créées ou acquises par l’Agence des partenariats public-privé ne devraient-elles pas être assujetties à l’application de la Loi sur l’accès ?

De quelle façon les citoyens pourront-ils exercer leur droit d’accès si un document est lié à un partenariat ?

Ne devrait-on pas débattre des conditions d’application des restrictions à l’accès énoncées aux articles 22 à 24 de la Loi sur l’accès afin de s’assurer qu’elles ne constitueront pas un frein à la transparence des activités de partenariat public-privé ?

Pourquoi la loi ne prévoirait-elle pas que le contrat de partenariat et le plan d’affaires, documents décrits aux articles 6 et 54 du Projet de loi 61, ont un caractère public ?

Finalement, afin que la confiance des citoyens envers les prestataires de services publics qui détiennent des renseignements personnels les concernant puisse être maintenue et afin qu’une réelle protection des renseignements personnels puisse être assurée, la Commission croit que tout projet de partenariat qui impliquera une vaste communication de renseignements personnels entre organismes publics et entreprises privées ou une cueillette de renseignements personnels par ces dernières devrait être précédé d’une évaluation de son impact sur la protection des renseignements personnels. En outre, lorsque requis, des mesures de protection des renseignements personnels additionnelles devraient être prises afin de tenir compte du contexte particulier des partenariats public-privé.

31 Op.cit., note 16, p. 8. 23/

Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec Le partenariat public-privé implique une redistribution des pouvoirs et des responsabilités qui ne va pas sans soulever bon nombre de questions relatives à l’application de la Loi sur l’accès. Selon la Commission d’accès à l’information, des règles claires, connues à l’avance de tous pourraient permettre d’assurer une harmonieuse coexistence entre partenariats public-privé, droit à l’information et protection des renseignements personnels.

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Mémoire sur le Projet de loi no 61, Loi sur l’Agence des partenariats public-privé du Québec A N N E X E 22. Un organisme public peut refuser de communiquer un secret industriel qui lui appartient.

Il peut également refuser de communiquer un autre renseignement industriel ou un renseignement financier, commercial, scientifique ou technique lui appartenant et dont la divulgation risquerait vraisemblablement d'entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à l'organisme ou de procurer un avantage appréciable à une autre personne.

Un organisme public constitué à des fins industrielles, commerciales ou de gestion financière peut aussi refuser de communiquer un tel renseignement lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement de nuire de façon substantielle à sa compétitivité.

23. Un organisme public ne peut communiquer le secret industriel d'un tiers ou un renseignement industriel, financier, commercial, scientifique, technique ou syndical de nature confidentielle fourni par un tiers et habituellement traité par un tiers de façon confidentielle, sans son consentement.

24. Un organisme public ne peut communiquer un renseignement fourni par un tiers lorsque sa divulgation risquerait vraisemblablement d'entraver une négociation en vue de la conclusion d'un contrat, de causer une perte à ce tiers, de procurer un avantage appréciable à une autre personne ou de nuire de façon substantielle à la compétitivité de ce tiers, sans son consentement.

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