CSSS – 019M C.P. – P.L. 59 Renseignements de santé
Présentation du président P ROJET DE LOI N 59 LOI CONCERNANT LE PARTAGE DE CERTAINS RENSEIGNEMENTS DE SANTÉ Commission parlementaire de la santé et des services sociaux Le 8 mai 2012 Commission d’accès à l’information CSSS – 019MA C.P. – P.L. 59 Renseignements de santé O
C o m m i s s i o n d ’ a c c è s à l ’ i n f o r m a t i o n d u Q u é b e c Présentation du président Monsieur le Président, permettez-moi, dans un premier temps, de vous présenter les personnes qui m’accompagnent ce matin soit M e Jean-Sébastien Desmeules, secrétaire général et directeur des affaires juridiques, M e Sophie Giroux-Blanchet de la Direction des affaires juridiques ainsi que M. André Marois, directeur de l’analyse et de l’évaluation. J’aimerais remercier les membres de la Commission de la santé et des services sociaux de nous offrir l’opportunité de participer à la consultation et de présenter nos commentaires et nos réflexions sur le projet de loi n o 59. Ce projet de loi revêt une très grande importance pour l’ensemble des citoyens québécois parce qu’il déterminera le cadre juridique applicable à la gestion des renseignements de santé. Nous sommes très heureux de pouvoir contribuer de nouveau à l’évolution de ce projet technologique. Avant d’aborder avec plus de détails certains éléments du projet de loi, je me dois de réitérer les préoccupations de la Commission que sont la protection des renseignements personnels de l’usager ainsi que l’accès et la rectification de ses renseignements. Il importe que les bases du Dossier Santé Québec (DSQ) se fondent sur une bonne compréhension du projet, sur la simplicité et l’adéquation du cadre juridique et sur l’importance de maintenir le lien de confiance de l’usager lors de la dispensation de soins de santé. Le régime légal applicable au DSQ est complexe. À ce sujet, la Commission désire porter à l’attention des parlementaires quelques éléments qui permettent une meilleure compréhension du cadre juridique. On comprend que le DSQ sera alimenté par des renseignements provenant du dossier de l’usager sans qu’il y ait un transfert du dossier vers le DSQ. Le projet de loi n o 59 prévoit certaines modalités qui s’appliquent au DSQ. La Loi sur les services de santé et les services sociaux (LSSSS) qui prévoit la confidentialité du dossier de l’usager est applicable aux dossiers locaux des établissements du réseau de la santé et des services sociaux. Quant aux cliniques médicales et aux pharmacies privées, le Code des professions ainsi que la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (Loi dans le secteur privé) seront applicables pour gérer l’accès aux dossiers locaux. Par conséquent, c’est la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (Loi sur l’accès) qui serait applicable aux renseignements détenus par le ministre et contenus au DSQ. La Commission suggère aux parlementaires de s’assurer que le régime législatif applicable, dans sa rédaction, soit clarifié. En outre, il importe de rappeler que la façon de s’assurer du consentement de l’usager a été modifiée à plusieurs reprises par le passé. À cet effet, il nous semble que plus le DSQ O P R O J E T D E L O I N 5 9 - L O I C O N C E R N A N T L E P A R T A G E D E C E R T A I N S R E N S E I G N E M E N T S D E S A N T É
C o m m i s s i o n d ’ a c c è s à l ’ i n f o r m a t i o n d u Q u é b e c 2 évolue, plus la portée du consentement s’effrite. À titre d’exemple, le projet de loi n o 59 ne prévoit pas de consentement à la constitution d’un DSQ pour un usager. Toutes les personnes assurées au sens de la Loi sur l’assurance maladie sont présumées avoir consenti à la communication, au moyen du DSQ, des renseignements de santé les concernant. L’effet d’un refus d’un citoyen sera dorénavant limité à permettre ou non la consultation du DSQ de la personne concernée à un intervenant ou à un organisme. Depuis les débuts du DSQ, la Commission insiste sur l’importance de promouvoir et de diffuser des informations concernant le DSQ aux citoyens. Une bonne compréhension du DSQ par les usagers est essentielle. Puisque de nombreux changements ont eu lieu depuis l’implantation des deux phases expérimentales, il est nécessaire que le ministre de la Santé et des Services sociaux s’assure de bien vulgariser à la population le DSQ et son cadre juridique, tout en prenant les moyens qui permettent d’informer les usagers. Selon la compréhension de la Commission, les objectifs premiers du DSQ sont le partage de renseignements de santé jugés essentiels aux services de première ligne et au continuum de soins afin d’améliorer la qualité et la sécurité des services de santé et des services sociaux ainsi que l’accès à ces services. De même, ce partage devrait permettre une gestion et une utilisation maîtrisée de l’information sociosanitaire dans le but d’améliorer la qualité, l’efficience et la performance du système québécois de santé. En ce sens, la Commission estime qu’une utilisation secondaire, telle qu’autorisée aux articles 101 et suivants, s’écarte de la finalité première de ce projet. Ainsi, j’attire particulièrement votre attention sur la possibilité de permettre l’utilisation secondaire de renseignements de santé sensibles alors que l’usager n’a aucune possibilité de refuser de consentir à la constitution et à la conservation d’un DSQ. Depuis plusieurs années, mes prédécesseurs, tout comme plusieurs organismes oeuvrant dans le milieu de la santé et des services sociaux, interpellent les parlementaires afin de débattre publiquement de l’utilisation secondaire de renseignements de santé ou de renseignements personnels, notamment lors de recherche tant par des organismes publics que privés. La Commission réitère plus que jamais la nécessité d’une telle réflexion en raison de la création de grandes banques de données personnelles centralisées, comme le DSQ, afin de déterminer un cadre juridique pour les utilisations secondaires. Rappelons en ce sens que la seule possibilité pour la Commission de refuser une demande de communication de renseignements personnels dans le cadre d’une recherche est le caractère frivole. Dans un autre ordre d’idées, la Commission se réjouit de l’inclusion de l’article 13 au projet de loi qui prévoit l’obligation, pour la personne ou l’organisme qui exercent un mandat ou un contrat, d’aviser sans délai le ministre de toute violation ou tentative de violation à la confidentialité des renseignements. La Commission est heureuse de lire cette proposition qui n’est pas sans rappeler une recommandation faite dans son rapport quinquennal de 2011. En effet, cette recommandation veut que la Loi sur l’accès O P R O J E T D E L O I N 5 9 - L O I C O N C E R N A N T L E P A R T A G E D E C E R T A I N S R E N S E I G N E M E N T S D E S A N T É
C o m m i s s i o n d ’ a c c è s à l ’ i n f o r m a t i o n d u Q u é b e c 3 et la Loi dans le secteur privé soient modifiées par l’ajout d’une obligation de déclarer les failles de sécurité qui surviennent et qui impliquent des renseignements personnels. Par contre, la Commission croit qu’elle devrait, au même titre que le ministre, être avisée de toute tentative ou de toute violation. La Commission possède l’expertise pour accompagner et aider les personnes ou les organismes concernés à prendre des mesures particulières afin de minimiser les risques d’atteinte à la sécurité des renseignements personnels des usagers. La Commission pourrait également déterminer dans quelles situations les personnes concernées par les violations de confidentialité devraient être elles-mêmes avisées. De plus, la Commission souhaite porter à l’attention des membres de la Commission que l’obligation inscrite au projet de loi ne vise que les personnes ou organismes externes et non les intervenants internes aux organismes. La Commission ne s’explique pas cette différence de traitement. Évidemment, en raison de la centralisation des données et de leur sensibilité, il est nécessaire que le ministre s’assure de mettre en œuvre des mesures de sécurité adéquates tant lors de l’accès, de la circulation, de l’utilisation que de la conservation des renseignements de santé contenus dans les domaines cliniques. En plus des sanctions pénales prévues au projet de loi contre les auteurs des contraventions, la Commission suggère que des mesures disciplinaires soient prescrites afin de garantir davantage le respect de la confidentialité des renseignements personnels, notamment lors de la collecte et de l’utilisation, et de confirmer toute l’importance qui est accordée à ceux-ci. La Commission désire également émettre quelques réserves en ce qui concerne la volonté exprimée par le projet de loi de disposer par voie réglementaire de nombreux éléments additionnels. À titre d’exemple, le délai de conservation n’est pas établi précisément dans le projet de loi. Ce délai sera déterminé par règlement du ministre. Il est à noter que les renseignements ne doivent pas être conservés au-delà du temps nécessaire pour accomplir les fins pour lesquelles ils ont été recueillis. Ainsi, la Commission se questionne quant au droit à l’oubli de l’usager pour certains renseignements contenus au DSQ. Il est nécessaire de s’assurer d’un équilibre entre les droits individuels et l’intérêt public. La Commission comprend la plus grande souplesse accordée par le processus réglementaire par rapport au processus législatif, mais plusieurs de ces éléments ont un impact important et ne feront pas nécessairement l’objet d’un débat parlementaire. À cet effet, il serait opportun que la Commission soit consultée préalablement. Le processus de rectification actuellement prévu au projet de loi soulève des difficultés particulières. En plus de permettre la rectification de renseignements inexacts, incorrects, comme dans la Loi sur l’accès, le projet de loi n o 59 introduit la possibilité d’obtenir la rectification d’opinions de médecins ou la possibilité que toute autre O P R O J E T D E L O I N 5 9 - L O I C O N C E R N A N T L E P A R T A G E D E C E R T A I N S R E N S E I G N E M E N T S D E S A N T É
C o m m i s s i o n d ’ a c c è s à l ’ i n f o r m a t i o n d u Q u é b e c 4 personne puisse rectifier un renseignement sans être l’auteur de celui-ci. La Commission s’interroge sur cette possibilité qui est contraire aux principes actuels de rectification. Le projet de loi prévoit un registre où tous les intervenants du réseau de la santé et des services sociaux, qui se communiqueront ou accéderont à des renseignements, devront être enregistrés. Le projet de loi ajoute le NAS aux renseignements qui seront recueillis auprès de chaque intervenant. La Commission rappelle que le NAS est un identifiant unique et sensible. Aucune démonstration de la nécessité de le collecter ne semble avoir été effectuée par le ministère. L’utilisation du NAS pour le registre des intervenants ne semble pas nécessaire en raison des seize renseignements d’identité qui permettent déjà d’identifier et de valider l’identité d’un intervenant ou de faciliter le transfert de renseignements. La Commission rappelle au surplus l’importance de l’exactitude des données puisque la circulation de renseignements personnels et leur diffusion peuvent être très grandes à travers le réseau de la santé et des services sociaux ainsi qu’auprès du ministre et de quelques autres organismes. Une autre préoccupation de la Commission consiste à s’assurer que les intervenants et les organismes autorisés n’auront accès qu’aux renseignements strictement nécessaires à l’exercice de leurs fonctions, à l’exercice des attributions d’un organisme ou à la mise en œuvre d’un programme dont l’organisme a la gestion. Ainsi donc, une attention particulière doit être portée aux profils d’accès qui seront autorisés. Cette précaution passe par une formation et une sensibilisation adéquates des personnes qui auront des accès au DSQ afin de prévenir des comportements inacceptables qui pourraient avoir un impact grave sur la vie privée des usagers. La sensibilité des renseignements accessibles n’est plus à démontrer. Quant au registre de vaccination, la Commission note que toutes les vaccinations seront inscrites au registre sans le consentement des personnes concernées. Jusqu’à maintenant, l’inscription des données était soumise au consentement. Puisqu’il n’existera plus de consentement ou de droit de refus pour une personne, la Commission est d'avis qu'il serait préférable d’informer préalablement les personnes que les renseignements relatifs à cette vaccination seront versés au registre de vaccination. De même, la Commission rappelle que le ministre doit s’assurer que toutes les mesures de sécurité seront prises afin de respecter la confidentialité de ces renseignements personnels et de la vie privée. La Commission est d’avis également que la communication de renseignements personnels devrait se limiter à ce qui est déjà inscrit au projet de loi. La Commission constate que les responsabilités confiées au ministre tant en matière de santé et de services sociaux qu’en matière de technologie se cumulent. Ces fonctions impliquent nécessairement la détention par le ministre de renseignements personnels O P R O J E T D E L O I N 5 9 - L O I C O N C E R N A N T L E P A R T A G E D E C E R T A I N S R E N S E I G N E M E N T S D E S A N T É
C o m m i s s i o n d ’ a c c è s à l ’ i n f o r m a t i o n d u Q u é b e c 5 liés à celles-ci. À cet égard, la Commission rappelle au ministre l’importance d’assurer un cloisonnement entre les renseignements détenus en application de ses divers mandats. Ce rappel s’applique également à la Régie de l’assurance maladie qui exerce également plusieurs responsabilités. Ce projet de loi est important puisqu’il prévoit les règles applicables à l’instauration, à l’alimentation, à la communication, à la conservation, à la destruction, à l’accès et à la rectification de renseignements personnels collectés par le biais du DSQ. Pour la Commission, il est essentiel de s’assurer de la cohérence du projet de loi n o 59 avec le cadre législatif québécois dont le régime de la Loi sur l’accès et celui de la LSSSS. En terminant, la Commission désire rappeler au législateur qu’au-delà de l’aspect pratique lié à la constitution du Dossier Santé Québec, les citoyens sont soucieux de préserver leur vie privée et le caractère confidentiel de leurs renseignements de santé. La confidentialité ne vit qu’une fois. C’est à ce prix que leur confiance sera acquise. O P R O J E T D E L O I N 5 9 - L O I C O N C E R N A N T L E P A R T A G E D E C E R T A I N S R E N S E I G N E M E N T S D E S A N T É
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