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Québec, le 25 février 2003 Monsieur Alain Poirier Directeur national de santé publique Ministère de la Santé et des Services sociaux 1075, chemin Sainte-Foy, 12 e étage Québec (Québec) G1S 2M1 OBJET : Projets de règlement dapplication de la Loi sur la santé publique N/D. : 03 01 33 _____________________________________________________________ Monsieur le Directeur, À la demande de votre prédécesseur, monsieur Richard Massé, les membres de la Commission d'accès à l'information ont pris connaissance des deux règlements suivants : - Règlement gouvernemental dapplication de la Loi sur la santé publique - Règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique Le projet de règlement gouvernemental a pour objet détablir la liste de critères que doit respecter le ministre de la Santé et des Services sociaux lorsquil dresse une liste dintoxications, dinfections ou de maladies à déclaration obligatoire. Il en est de même pour la liste des maladies ou infections à traitement obligatoire. Un chapitre du projet de règlement est également consacré aux règles relatives à l'indemnisation des victimes dune vaccination. Le projet de règlement ministériel a pour objet de dresser la liste des infections, intoxications et maladies à déclaration obligatoire et la liste des maladies à traitement obligatoire. Il énonce également diverses règles concernant la collecte de renseignements faite à des fins de surveillance continue de létat de santé et plus particulièrement en matière de surveillance du VIH et du sida. Règlement gouvernemental dapplication de la Loi sur la santé publique
2 Les seuls commentaires de la Commission concernant le projet de règlement gouvernemental se rapportent à son article 2. Cette disposition énonce les critères qui doivent guider le ministre lorsque ce dernier dresse, par règlement ministériel, la liste des infections, intoxications ou maladies à déclaration obligatoire. Cet article se lit comme suit : 2. À légard de la liste prévue à larticle 79 de la loi, les intoxications, les infections ou les maladies qui devront être déclarées aux autorités de santé publique devront répondre aux deux critères suivants : 1° représenter un risque de survenue dautres cas au sein de la population, soit parce quil sagit dune maladie ou dune infection contagieuse, soit parce quil sagit dune intoxication, dune infection ou dune maladie pouvant provenir dune source de contamination ou dexposition dans lenvironnement de la personne atteinte; 2° pouvoir faire lobjet dune intervention des autorités de santé publique ou dautres autorités afin de prévenir lapparition dautres cas, contrôler une éclosion ou limiter lampleur dune épidémie, soit par des moyens médicaux, soit par dautres moyens. Pour les motifs qui suivent, la Commission considère que ces critères sont insuffisants. Tout dabord, la Commission tient à rappeler que contraindre un médecin ou un dirigeant dun laboratoire ou dun département de biologie médicale à révéler des renseignements personnels concernant une personne visée par lune des infections, intoxications ou maladies à déclaration obligatoire est un acte qui va à lencontre du droit à la vie privée, du droit au respect du secret professionnel ou du droit à la confidentialité des renseignements de santé. Ces droits sont énoncés à la fois dans la Charte des droits et libertés de la personne, le Code des professions, la Loi médicale, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels ou la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
3 Certes, ces droits peuvent faire lobjet de restrictions et nont pas de caractère absolu. Règle générale, les restrictions qui y sont apportées par le législateur se limitent à ce qui est nécessaire pour atteindre un objectif déterminé. Ainsi, le législateur reconnaît, dans la Loi sur la santé publique, quune restriction à ces droits peut sappliquer, dans la mesure prévue par cette loi, aux fins de protéger la santé publique. Par exemple, les articles 79 et 81 reconnaissent la possibilité de recueillir et de communiquer des renseignements personnels : 79. Le ministre dresse, par règlement, une liste des intoxications, des infections et des maladies qui doivent faire lobjet dune déclaration au directeur de santé publique du territoire et, dans certains cas prévus au règlement, au directeur national de santé publique ou à l'un ou lautre. 81. La déclaration doit indiquer le nom et ladresse de la personne atteinte et tous les autres renseignements, personnels ou non, prescrits par règlement du ministre. Elle doit être transmise de la manière, dans la forme et dans les délais quindique le règlement. Mais ne peuvent être inscrites dans cette liste ministérielle nimporte quelle intoxication, infection ou maladie. À cet égard, le deuxième paragraphe de larticle 137 oblige le gouvernement à prendre un règlement qui établit les critères que le ministre doit respecter lors de lélaboration de cette liste. Larticle 80 de cette loi encadre également lexercice de détermination des infections, intoxications ou maladies à déclaration obligatoire : 80. Ne peuvent être inscrites à cette liste que des intoxications, des infections ou des maladies médicalement reconnues comme pouvant constituer une menace à la santé dune population et nécessitant une vigilance des autorités de santé publique ou la tenue dune enquête épidémiologique. La Commission comprend de cet article 80 quune intoxication, infection ou maladie à déclaration obligatoire ne pourra être inscrite à la liste que si elle peut constituer une menace à la santé de la population. À larticle 2 de la Loi sur la santé publique, cette menace est définie comme suit : […] Dans la présente loi, on entend par une menace à la santé de la population la présence au sein de celle-ci dun agent biologique, chimique ou physique susceptible de causer une épidémie si la présence de cet agent nest pas contrôlée. […]
4 Outre cette menace à la santé, ces intoxications, infections ou maladies doivent nécessiter une vigilance des autorités de santé publique ou la tenue dune enquête épidémiologique. Lune ou lautre de ces deux actions doit être entreprise. Par ailleurs, le mémoire transmis au Conseil des ministres au sujet de ce projet de règlement précise, à la première page, qu’« une infection, intoxication ou maladie à déclaration obligatoire doit être un problème de santé important relié à une exposition dorigine biologique, chimique ou physique pour lequel une intervention en santé publique doit être effectuée en temps opportun. » Selon la Commission, lobjectif poursuivi par lobligation de dresser une liste de critères est dabord de permettre aux citoyens de connaître les motifs qui guident le ministre lors de lélaboration de cette liste. Cette liste de critère doit donc être exhaustive et explicite. En outre, il faut rappeler que la nouvelle Loi sur la santé publique prévoit que la liste des intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire est dressée par règlement ministériel et non plus par règlement gouvernemental comme auparavant. Cette nouvelle procédure est donc plus expéditive que lancienne. Considérant que la déclaration obligatoire constitue entre autres une immixtion dans la sphère de vie privée des individus et considérant que la liste dintoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire peut être modifiée par simple règlement ministériel, la Commission estime que le gouvernement doit accorder une grande importance aux critères qui guideront par la suite le ministre lors des modifications apportées à cette liste. Or, la Commission considère que les deux critères retenus à larticle 2 du projet de règlement ne permettent pas de connaître de façon claire et exhaustive la façon dont une liste est dressée par le ministre. Ces deux critères, qui se limitent à la « survenue dautres cas » et à la possibilité de faire lobjet dune intervention, ne laissent aucunement apparaître le critère de menace à la santé de la population, tel que l'exige larticle 80 de la Loi sur la santé publique. Contrairement à ce qui est expliqué dans le mémoire au Conseil des ministres, ils ne traduisent pas non plus le fait que la liste doit comprendre des éléments qui impliquent un problème de santé important. Par ailleurs, le deuxième critère peut laisser croire que les intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire ne feront pas nécessairement lobjet dune intervention des autorités publiques. Lutilisation des mots « pouvoir faire lobjet dune intervention » laisse en effet sous-entendre que lintervention des autorités publiques est facultative. Or, larticle 80 stipule que seules les intoxications,
5 infections ou maladies qui nécessitent une vigilance des autorités de santé publique ou une enquête épidémiologique peuvent être inscrites sur la liste. Règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique La Commission a également pris connaissance du Règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique, du mémoire qui laccompagne et des explications fournies par le Directeur national de santé publique dans sa lettre du 23 janvier dernier. La Commission na aucun commentaire à formuler au sujet du chapitre III du projet qui porte sur la collecte de renseignements faite à des fins de surveillance continue de létat de santé en vertu des articles 47 et 48 de la Loi sur la santé publique. Elle note toutefois, tel que nous l'a confirmé une représentante du ministère, que la section concernant la surveillance continue du VIH reprend, en des termes différents mais équivalents, les articles 31.1 et 31.2 du Règlement dapplication de la Loi sur la protection de la santé publique (c. L-o.2, r.1), articles pour lesquels la Commission daccès à linformation a déjà donné un avis le 6 mars 2001. La Commission nentend pas non plus sopposer aux dispositions dont lobjectif est dassurer la sécurité des produits dorigine humaine. Elle prend donc acte du fait que le VIH et le sida seront à déclaration obligatoire lorsque la personne infectée aura déjà donné ou reçu des produits sanguins, des tissus ou des organes. Les commentaires de la Commission se limiteront donc à la liste des infections, intoxications ou maladies à déclaration obligatoire. Mais avant daborder cette question, la Commission souhaiterait rappeler que conformément à larticle 64 de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, un organisme public ne peut recueillir que les seuls renseignements nécessaires à lexercice de ses attributions ou à la mise en œuvre dun programme dont il a la gestion. Ainsi, un directeur de santé publique dun territoire ne peut recueillir des renseignements personnels qui ne sont pas nécessaires à lexercice de ses propres attributions. Ainsi, cet article 64 devra être respecté lorsque la situation décrite à la page 5 de la lettre de monsieur Massé sera présente : « Dans les cas de laboratoire desservant plus dune région, la déclaration dune MADO se fera auprès du DSP du territoire du laboratoire qui se chargera, le cas échéant, de transmettre linformation au DSP du territoire de résidence du patient. »
6 La liste des infections, intoxications et maladies à déclaration obligatoire Après avoir pris connaissance de linformation transmise au soutien du projet de règlement ministériel et plus particulièrement de la liste des infections, intoxications et maladies à déclaration obligatoire, la Commission doit dresser le constat de son impuissance à formuler un avis au sujet de lensemble des éléments contenus dans cette liste. Bien sûr, pour certaines maladies, telles celles qui requièrent une surveillance extrême, la Commission comprend quil faille en faire lobjet dune déclaration obligatoire. Mais de façon générale et même à la lumière des critères énoncés au projet de règlement gouvernemental et des critères prévus à larticle 80 de la Loi sur la santé publique et des informations transmises, la Commission nest pas en mesure de donner son aval à la reconduction de 51 infections ou maladies déjà inscrites dans la liste dressée en vertu du règlement gouvernemental et à lajout de 24 nouvelles intoxications, infections ou maladies. La Commission est également incapable de déterminer si la déclaration obligatoire de « toutes les intoxications par des substances chimiques toxiques, lorsque les résultats danalyse obtenus indiquent une valeur anormalement élevée qui dépasse les seuils reconnus en santé publique » répond aux critères qui autorisent linscription dune intoxication sur la liste à déclaration obligatoire. Encore une fois, la Commission rappelle que lobligation de déclaration dune intoxication, infection ou maladie est une immixtion dans la sphère de vie privée dun individu. La liste doit donc être dressée avec soin et en respectant scrupuleusement les critères dinclusion. Décider si 75 infections, intoxications ou maladies doivent être à déclaration obligatoire est un exercice périlleux, considérant limportance des droits qui sont en cause. La Commission na pas la prétention davoir lexpertise requise pour mener à bien cet exercice. La Commission constate que le ministère a mis en place un processus rigoureux pour réaliser la liste des infections, intoxications et maladies à déclaration obligatoire. Ces experts, la Commission nen doute pas, ont réalisé leur mandat avec sérieux. Mais il faut tout de même faire le constat que la plupart des experts qui ont participé aux différents comités avaient un intérêt à la collecte des renseignements personnels.
7 Pour pouvoir porter un jugement exhaustif sur le contenu de la liste, la Commission croit quun avis dun comité éthique aurait été indispensable. Par exemple, un avis du Comité d'éthique qui devra être institué conformément aux articles 19 et suivants de la Loi sur la santé publique aurait été des plus utile. La Commission ne peut donc vous donner un avis sur lensemble des intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire. Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de nos sentiments les meilleurs. Le secrétaire et directeur du Service juridique, André Ouimet
Québec, le 11 juin 2003 Monsieur Philippe Couillard Ministre Ministère de la Santé et des Services sociaux 1075, chemin Sainte-Foy Québec (Québec) G1S 2M1 OBJET : Restrictions au droit à la vie privée et au secret professionnel dans le Projet de règlement ministériel concernant la liste des intoxications, infections et maladies à déclaration obligatoire Dossier : 03 01 33 Monsieur le Ministre, La Commission daccès à linformation voudrait porter à votre attention limpact que pourrait avoir sur le droit au respect de la vie privée et du secret professionnel un projet de règlement ministériel concernant la refonte de la liste des intoxications, infections et maladies à déclaration obligatoire. Ce projet a fait lobjet dune publication dans la Gazette officielle du Québec du 30 avril dernier. Conformément à son mandat de surveillance de lapplication de la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., chapitre A-2.1) et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé (L.R.Q., chapitre P-39.1), la Commission daccès à linformation est appelée à fournir aux ministères et organismes des avis concernant des projets de loi ou de règlements. Cest donc dans lexercice de ce mandat, et à la demande du Conseil exécutif et de votre Ministère, que la Commission a, les 25 février et 3 avril dernier, donné deux avis concernant les projets de règlement suivants 1 : 1 Vous trouverez en annexe copie de ces avis de la Commission et des projets de règlement publiés dans la Gazette officielle du Québec.
2 Le projet de règlement gouvernemental intitulé Règlement dapplication de la Loi sur la santé publique. Le projet de règlement ministériel intitulé Règlement ministériel dapplication de la santé publique. Le projet de règlement gouvernemental dapplication de la Loi sur la santé publique Adopté conformément à l'article 137 de la Loi sur la santé publique, ce projet de règlement gouvernemental a, entre autres, pour objet détablir des critères que doit respecter le ministre de la Santé et des Services sociaux lorsquil dresse une liste dintoxications, dinfections et de maladies à déclaration obligatoire ou à traitement obligatoire. Dans son avis du 25 février 2003, la Commission suggérait certaines modifications aux critères proposés. Tenant compte de ces suggestions, le Ministère a soumis une nouvelle version du projet de règlement qui a fait lobjet dun avis favorable de la Commission le 3 avril dernier. Cest cette nouvelle version qui a été publiée dans la Gazette officielle du Québec du 30 avril dernier. Contrairement à la situation qui prévalait avant ladoption de la nouvelle Loi sur la santé publique, alors que lajout dune maladie à la liste des maladies à déclaration obligatoire devait faire lobjet dune modification approuvée par le gouvernement, le ministre pourra, par simple règlement ministériel, modifier la liste des intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire. Dans ces circonstances, les critères qui devront guider le Ministre revêtent une importance particulière puisquil ny aura aucun contrôle gouvernemental préalable à la modification de la liste. Les critères qui devront guider le Ministre sont énoncés à larticle 2 du projet de règlement gouvernemental : 2. À légard de la liste prévue à larticle 79 de la loi, les intoxications, les infections ou les maladies qui pourront être inscrites pour être déclarées aux autorités de santé publique devront répondre aux critères suivants : 1° représenter un risque de survenue dautres cas au sein de la population, soit parce quil sagit dune maladie ou dune infection contagieuse, soit parce quil sagit dune intoxication, dune infection ou dune maladie pouvant provenir dune source de contamination ou dexposition dans lenvironnement de la personne atteinte; 2° être médicalement reconnues comme une menace à la santé de la population, telle que définie à larticle 2 de la loi, qui
3 peut entraîner des problèmes de santé importants pour les personnes atteintes; 3° nécessiter une vigilance des autorités de santé publique ou la tenue dune enquête épidémiologique; 4° disposer à leur égard dun pouvoir dintervention des autorités de santé publique ou dautres autorités afin de prévenir lapparition dautres cas, de contrôler une éclosion ou de limiter lampleur dune épidémie, soit par des moyens médicaux, soit par dautres moyens. Le projet de règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique Présentement, la liste des maladies à déclaration obligatoire est établie conformément aux articles 28 à 33.1 du Règlement dapplication de la Loi sur la protection de la santé publique (L.R.Q., chapitre L-0.2, r.1). Ces articles seront remplacés par les articles 1 à 8 du projet de règlement intitulé Règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique. Ce même projet de règlement prévoit également que la tuberculose est une maladie à déclaration obligatoire. Finalement, il établit deux systèmes de collecte de renseignements à des fins de surveillance du VIH 2 et du sida. La nouvelle liste dintoxications, dinfections et de maladies à déclaration obligatoire est dressée conformément aux articles 79 à 81 de la nouvelle Loi sur la santé publique (L.Q., 2001, c. 60) : 79. Le ministre dresse, par règlement, une liste des intoxications, des infections et des maladies qui doivent faire lobjet dune déclaration au directeur de santé publique du territoire et, dans certains cas prévus au règlement, au directeur national de santé publique ou à l'un ou lautre. 80. Ne peuvent être inscrites à cette liste que des intoxications, des infections ou des maladies médicalement reconnues comme pouvant constituer une menace à la santé dune population et nécessitant une vigilance des autorités de santé publique ou la tenue dune enquête épidémiologique. 2 Le 6 mars 2001, la Commission daccès à linformation a formulé un avis favorable concernant le système de surveillance du VIH et des mesures de sécurité mises en place à cet effet afin de protéger les renseignements personnels.
4 81. La déclaration doit indiquer le nom et ladresse de la personne atteinte et tous les autres renseignements, personnels ou non, prescrits par règlement du ministre. Elle doit être transmise de la manière, dans la forme et dans les délais quindique le règlement. De plus, tel que nous lavons déjà mentionné, les intoxications, infections ou maladies devant obligatoirement faire lobjet dune déclaration doivent respecter les critères établis à cet effet par larticle 2 du projet de règlement gouvernemental précité. Le projet de règlement ministériel et son impact sur les droits fondamentaux La Commission d'accès à l'information voudrait attirer plus particulièrement votre attention sur les articles 1 à 5 du projet de règlement ministériel. Ces cinq dispositions regroupent lensemble des intoxications, infections ou maladies qui devront obligatoirement être déclarées aux autorités de santé publique. La liste élaborée par le projet de règlement ministériel recèle 75 intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire. Cette liste reconduit 51 intoxications, infections ou maladies déjà inscrites dans le règlement gouvernemental actuellement en vigueur et en ajoute 24 nouvelles. Dans son avis du 25 février, la Commission daccès à l'information précise quelle na pas la prétention davoir lexpertise requise pour décider, à partir de linformation qui lui a été transmise, si ces 75 infections, intoxications ou maladies devraient être à déclaration obligatoire. Elle ajoute que pour pouvoir porter un jugement exhaustif sur le contenu de la liste, lobtention dun avis dun Comité éthique, par exemple le Comité éthique créé en vertu de larticle 19 de la Loi sur la santé publique, aurait été des plus utile. Bien sûr, pour certaines maladies, telles celles qui requièrent une surveillance extrême (botulisme, choléra, fièvre jaune, fièvre hémorragiques virales, maladie du charbon…), la Commission comprend quil faille en faire l'objet dune déclaration obligatoire. Elle prend acte également du fait que le VIH et le sida seront à déclaration obligatoire aux fins dassurer la sécurité des produits dorigine humaine. Mais que penser de lobligation de déclarer les « intoxications dorigine chimique des systèmes cardiaque, digestif, hématopoïétique, rénal, pulmonaire ou neurologique » ou « toutes les intoxications par des substances chimiques toxiques, lorsque les résultats danalyse obtenus indiquent une valeur anormalement élevée qui dépasse les seuils reconnus en santé publique »? Contraindre un médecin ou un dirigeant dun laboratoire ou dun département de biologie médicale à révéler des renseignements personnels concernant une personne
5 visée par lune des infections, intoxications ou maladies à déclaration obligatoire est un acte, à première vue, qui va à lencontre du droit à la vie privée, du droit au respect du secret professionnel ou du droit à la confidentialité des renseignements de santé. Ces droits sont énoncés à la fois dans la Charte des droits et libertés de la personne, le Code des professions, la Loi médicale, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, la Loi sur laccès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels ou la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Certes, ces droits peuvent faire lobjet de restrictions et nont pas de caractère absolu. Ainsi, lorsque le législateur autorise le ministre de la Santé et des Services sociaux à dresser une liste dintoxications, dinfections ou de maladies à déclaration obligatoire aux fins de la protection de la santé publique, il impose une restriction au droit au respect à la vie privée ou au secret professionnel. Règle générale, les tribunaux reconnaissent que les restrictions apportées à ces droits par le législateur doivent se limiter à ce qui est nécessaire pour atteindre un objectif déterminé. Les tribunaux ont également élaboré un « test de proportionnalité » qui permet de déterminer si une restriction à un droit garanti par les chartes québécoise ou canadienne des droits et libertés de la personne est valide. Ainsi, en vertu de ce test, une restriction à un droit doit être rationnellement liée à lobjectif poursuivi et latteinte au droit doit être minimale. Est-ce que la liste des intoxications, infections ou maladies à déclaration obligatoire répond aux critères du « test de proportionnalité » établit par les tribunaux? À ce stade-ci, la Commission nest pas convaincue que ces critères ont été rencontrés. La Commission constate que le Ministère a mis en place un processus rigoureux pour réaliser la liste des infections, intoxications et maladies à déclaration obligatoire. De nombreux comités, constitués dexperts, ont participé à l'élaboration de la liste. Mais il faut tout de même faire le constat que la plupart des experts qui ont participé aux différents comités avaient un intérêt professionnel à la collecte des renseignements visés par les articles 1 à 5 du projet de règlement et que les conclusions auxquelles en sont arrivés ces comités ne présentent que la perspective du monde de la santé publique. Avant de pouvoir conclure à la nécessité de rendre à déclaration obligatoire chacune des 75 infections, intoxications ou maladies prévues dans le projet de règlement ministériel, la Commission croit que lobtention dun avis dun comité éthique serait opportun et permettrait de compléter la réflexion menée par les experts provenant du milieu de la santé publique.
6 Lavis dun comité éthique pourrait non seulement évaluer le respect des critères prévus à larticle 2 du projet de règlement gouvernemental dapplication de la Loi sur la santé publique mais pourrait également évaluer la liste des intoxications, infections et maladies à la lumière des critères du « test de proportionnalité » élaboré par les tribunaux. En labsence dun tel avis, la Commission ne peut conclure que la collecte de renseignements découlant du projet de règlement ministériel est nécessaire et respecte le principe datteinte minimale à la vie privée. Pour linstant, la Commission nest donc pas en mesure de donner son appui à la cueillette de renseignements personnels qui découlerait de lapplication des articles 1 à 5 du projet de règlement ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de nos sentiments les meilleurs. La présidente JENNIFER STODDART p. j. c.c. M. Juan Roberto Eglesias M. Alain Poirier
Québec, le 2 juillet 2003 Madame Liette Harvey Greffière adjointe Ministère du Conseil exécutif 835, boul. René-Lévesque Est, 2 e étage Québec (Québec) G1A 1B4 OBJET : Règlements gouvernemental et ministériel dapplication de la Loi sur la santé publique N/D. : 03 01 33 _____________________________________________________________ Chère collègue, Nous accusons réception de votre lettre du 27 juin concernant le projet de décret relatif au Règlement dapplication de la Loi sur la santé publique - lequel détermine les critères applicables pour quune intoxication, une infection ou une maladie sinscrive dans les listes de maladies à déclaration ou à traitement obligatoire de même que les conditions applicables aux personnes qui réclament une indemnisation pour les préjudices corporels causés par une vaccination. Comme vous le savez, la Commission d'accès à l'information a déjà émis un avis favorable au sujet du projet de règlement précité. …/2
2 Toutefois, la Commission a émis de sérieuses réserves concernant le projet de règlement ministériel intitulé Règlement ministériel dapplication de la santé publique. Ce projet a entre autres pour objet de dresser la liste des intoxications, infections ou maladies qui sont à déclaration obligatoire auprès des autorités de santé publique. À ce sujet, vous trouverez en annexe copie de la lettre que la présidente de la Commission a transmise au ministre de la Santé et des Services sociaux le 11 juin dernier. Veuillez agréer, chère collègue, l'expression de nos sentiments les meilleurs. La secrétaire par intérim CHRISTYNE CANTIN DP/CC/db p.j.
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