COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION DU QUÉBEC Dossier : 1008641-S Nom de l’organisme : Services d’enquêtes Oligny et Thibodeau Date : 20 février 2018 e Membre : M Cynthia Chassigneux DÉCISION OBJET PLAINTE en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé 1 . [1] La Commission d’accès à l’information (la Commission) est saisie d’une plainte à l’encontre de Services d’enquêtes Oligny et Thibodeau (l’entreprise). [2] La plainte porte sur la collecte et la communication de renseignements personnels sans le consentement de la personne concernée. Plus particulièrement, la plaignante soutient que dans le cadre de l’évaluation de sa candidature pour un logement, le locateur du logement visé a fait appel à l’entreprise afin de vérifier ses antécédents judiciaires sans que cela ne soit mentionné dans le formulaire « Référence de pré-location » (le formulaire) qu’elle a signé. ENQUÊTE [3] À la suite de cette plainte, la Direction de la surveillance de la Commission procède à une enquête, conformément à l’article 81 de la Loi sur le privé. Elle écrit à l’entreprise pour obtenir sa version des faits ainsi que les raisons justifiant la vérification des antécédents judiciaires. 1 RLRQ, c. P-39.1, Loi sur le privé.
1008641-S Page : 2 [4] Par ailleurs, après avoir pris connaissance du formulaire, la Direction de la surveillance de la Commission demande également des précisions quant au fait que l’entreprise collecte des renseignements personnels tels que les numéros d’assurance sociale, de permis de conduire et d’assurance maladie. [5] Le président de l’entreprise répond aux demandes de précision de la Direction de la surveillance de la Commission. Il allègue qu’à la suite de la plainte, le formulaire a été modifié afin d’obtenir le consentement des personnes concernées à l’effet que l’entreprise procède à la vérification des antécédents judiciaires, et ce, même si « cette information est publique » 2 . [6] En ce qui concerne le numéro d’assurance sociale, il soutient que ce renseignement n’est demandé qu’à titre facultatif et qu’« il permet d’identifier précisément le sujet enquêté parce qu’il n’y a pas deux personnes au Canada avec le même numéro d’assurance sociale » 3 . [7] En ce qui concerne les numéros de permis de conduire et d’assurance maladie, il mentionne que l’entreprise, à la suite de la plainte, ne demande plus ces renseignements dans le formulaire. AVIS D’INTENTION ET OBSERVATIONS DE L’ENTREPISE [8] Aux termes de l’enquête, la Commission transmet à l’entreprise un avis d’intention l’informant qu’elle pourrait conclure que l’entreprise contrevient à la Loi sur le privé en recueillant, par le biais du formulaire, des renseignements personnels qui ne sont pas nécessaires pour vérifier le dossier de crédit ni pour évaluer la candidature d’un aspirant locataire. [9] La Commission informe alors l’entreprise qu’elle pourrait : - ordonner à l’entreprise de cesser de recueillir les renseignements personnels non nécessaires à la vérification du dossier de crédit d’un aspirant locataire, notamment le numéro d’assurance sociale, le nom et les coordonnées de l’employeur ainsi que le salaire; - ordonner à l’entreprise de modifier le formulaire en conséquence. [10] En effet, même si elle constate que le formulaire a été modifié en ce qui concerne les antécédents judiciaires, les numéros d’assurance maladie et de permis de conduire, la Commission s’interroge sur la nécessité pour l’entreprise de recueillir le numéro d’assurance sociale de l’aspirant locataire, le nom et les 2 Tel qu’il appert de la réponse du président de l’entreprise en date du 17 avril 2014. 3 Id.
1008641-S Page : 3 coordonnées de son employeur ainsi que son salaire pour vérifier son dossier de crédit et évaluer sa candidature. [11] Partant, la Commission informe l’entreprise qu’il lui revient de démontrer la nécessité de recueillir ces renseignements personnels, pour une finalité donnée, en lien avec l’objet du dossier qu’elle constitue au sujet d’une personne. [12] Pour ce faire, l’entreprise doit démontrer, à l’aide d’éléments concrets et probants, que le ou les objectif(s) poursuivi(s) par cette collecte sont légitimes, importants, urgents et réels. De plus, l’entreprise doit démontrer que l’atteinte au droit à la vie privée que peut constituer cette collecte est proportionnelle aux objectifs poursuivis. Notamment, elle doit démontrer qu’il n’existe pas d’autres moyens moins attentatoires à la vie privée qui permettent d’atteindre ces objectifs. [13] Le président de l’entreprise soumet ses observations en insistant sur les éléments suivants : l’information sur la source de revenus, la capacité de payer des aspirants locataires, le dossier de crédit et le numéro d’assurance sociale. ANALYSE [14] La présente enquête porte sur le fait que, dans le cadre de l’évaluation d’une candidature pour un logement, un locateur a fait appel à l’entreprise afin de vérifier les antécédents judiciaires d’un aspirant locataire sans que cela soit mentionné dans le formulaire. La Commission constate qu’à la suite de l’enquête, l’entreprise a modifié son formulaire à ce sujet, comme mentionné aux paragraphes 5 et 10 de la présente décision. [15] Elle constate également, comme mentionné aux paragraphes 7 et 10 de la présente décision, qu’à la suite de l’enquête, l’entreprise a aussi modifié son formulaire afin que ne soient plus demandés les numéros de permis de conduire et d’assurance maladie. [16] Par conséquent, la Commission prend acte des modifications apportées par l’entreprise à son formulaire quant aux antécédents judiciaires ainsi qu’aux numéros de permis de conduire et d’assurance maladie. La présente décision ne porte donc pas sur ces éléments. [17] Néanmoins, la Commission doit se prononcer sur la nécessité pour l’entreprise de recueillir le numéro d’assurance sociale de l’aspirant locataire, ainsi que son salaire, le nom et les coordonnées de son employeur pour évaluer sa candidature. Elle doit se demander si, à la lumière des observations fournies à la suite de son avis d’intention, l’entreprise contrevient ou non à l’article 5 de la Loi sur le privé.
1008641-S Page : 4 [18] En effet, les renseignements recueillis par le biais du formulaire constituent des renseignements personnels visés par les dispositions de la Loi sur le privé, soit des renseignements qui concernent une personne physique et qui permettent de l’identifier 4 . [19] La Loi sur le privé prévoit qu’une personne qui exploite une entreprise ne doit recueillir que les renseignements personnels nécessaires à l’objet du dossier qu’elle constitue sur autrui, soit en l’espèce l’évaluation d’une demande de location de logement. 5. La personne qui recueille des renseignements personnels afin de constituer un dossier sur autrui ou d’y consigner de tels renseignements ne doit recueillir que les renseignements nécessaires à l’objet du dossier. Ces renseignements doivent être recueillis par des moyens licites. [20] En matière de location de logement, la Commission a déjà conclu que les informations suivantes au sujet d’un aspirant locataire sont généralement suffisantes pour l’évaluation d’une demande de location 5 : • afin d’établir l’identité de l’aspirant locataire, seuls les nom, adresse et numéro de téléphone sont nécessaires. Si le locateur désire vérifier l’identité de cette personne, il peut demander à voir une pièce d’identité, avec ou sans photo, de type permis de conduire, carte d’assurance maladie ou carte d’assurance sociale. Toutefois, le locateur ne peut recueillir les informations inscrites sur cette pièce. Il ne peut donc pas, par exemple, faire une photocopie de cette pièce et la conserver dans le dossier de location; • afin de vérifier le comportement de l’aspirant locataire à l’égard des biens qui lui seront confiés et des autres locataires, seuls les noms ou coordonnées du locateur ou du concierge des logements occupés 4 Loi sur le privé, art. 2. 5 Voir notamment, COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION, « Le bail et la protection des renseignements personnels : des principes et des balises à respecter », FicheInfo, mars 2014; Regroupement des comités logement et Association de locataires du Québec et Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, [1995] C.A.I. 370; Julien c. Domaine Laudance, [2003] C.A.I. 77 ; Perreault c. Blondin, [2006] C.A.I. 162, X. et Y. et Gestion P. Laflèche, CAI 09 18 86, 23 juillet 2013 ; X. et Y. et Habitations populaires du Québec, CAI 10 04 75 et 10 06 09, 23 juillet 2013 ; X. et. Y et Z. (Propriétaire), CAI 11 07 72, 5 décembre 2013 ; X. et. Y, CAI 100 54 75, 16 janvier 2014 ; X, propriétaire, CAI 100 55 00, 22 mai 2015 ; Gestion Immobilière GESCORP, CAI 1010767-S, 9 février 2017.
1008641-S Page : 5 précédemment par le futur locataire peuvent être recueillis par le locateur. L’aspirant locataire peut aussi démontrer son bon comportement en fournissant une lettre de recommandation du précédent locateur; • afin d’établir la capacité de l’aspirant locataire de s’acquitter du loyer ou encore pour s’assurer de ses habitudes de paiement, le locateur peut demander les noms et coordonnées des locateurs actuels ou antérieurs pour obtenir auprès d’eux des informations sur l’aspirant locataire avec son consentement. Le locateur peut aussi réaliser une enquête de crédit si et seulement si l’aspirant locataire y consent et, dans ce cas, seuls les nom, adresse et date de naissance sont nécessaires. Cette enquête de crédit peut également être faite à l’initiative de l’aspirant locataire qui remet alors au locateur le rapport d’enquête 6 . [21] Sur ce dernier point, la Commission a pris connaissance des observations formulées par le président de l’entreprise à la suite de son avis d’intention. [22] Relativement au fait de demander le salaire, le nom et les coordonnées de l’employeur de l’aspirant locataire, le président de l’entreprise soutient que : « […] c’est évident qu’on ne peut pas vérifier la capacité de payer de quelqu’un sans pouvoir lui demander directement combien il gagne par mois et de pouvoir le vérifier. 6 Au soutien de ses observations, le président de l’entreprise réfère aux décisions suivantes : Commission des droits de la personne du Québec c. Lucien Gauthier et Gestion L.E. Gauthier Ltée, 1993 CanLII 2000 (QC TDP); Whittom et Lavallée c. Commission des droits de la personne du Québec, 1997 CanLII 10666 (QC CA). La Commission a pris connaissance de ces décisions. Toutefois, celles-ci ne seront pas prises en considération dans la présente décision car, selon la Commission, ces décisions ne trouvent pas application. En effet, la première décision porte sur le fait que « [les locateurs] ont porté atteinte au droit [d’un aspirant locataire] d’être traité en toute égalité, sans distinction ou exclusion fondée sur sa condition sociale, en refusant de conclure, et même d’envisager de conclure avec lui un acte juridique ayant pour objet un bien ordinairement offert au public soit un logement […] ». La seconde reconnaît que même si « on ne peut imposer à un propriétaire l’onéreuse obligation de faire systématiquement une enquête de crédit pour vérifier la solvabilité des locataires éventuels, il n’en demeure pas moins que le propriétaire peut avoir une obligation ou devoir d’accommodement, dans tous les cas où un accommodement est possible sans lui être trop onéreux. […] Une vérification aussi sommaire que leur évaluation, auprès du propriétaire de l’immeuble où demeurait la mise en cause, sans même nécessiter d’enquête de crédit, aurait suffi à confirmer la capacité de cette dernière à payer le loyer demandé et aurait pu suffire à dissiper leur appréhension ou à leur faire réaliser que cette appréhension, en l’espèce, n’était pas fondée ».
1008641-S Page : 6 Je considère incompréhensible que vous tentiez d’enlever la possibilité à une agence de renseignements personnels de pouvoir vérifier ou confirmer les informations fournies par le locataire potentiel dans un cadre manifestement libre et éclairé et à des fins spécifiques connues, comprises et admises de tous. J’ajouterai à cet effet, sans vouloir être désagréable envers vous, que vous tentez de créer un faux problème à cet effet. J’affirme cela parce que, après avoir déjà exécuté plus de 188 000 enquêtes, il n’y a jamais eu une seule plainte (aucune – zéro sur 188 000 occasions) d’un locataire potentiel contre le fait qu’on lui demandait de nous indiquer sa source de revenu, ainsi que combien il gagne par mois dans le seul et unique but d’être en mesure d’établir sa capacité de payer. Tous comprennent très clairement, la raison du questionnement de montant de revenus et de la source de revenus lorsqu’ils remplissent notre formulaire. Ainsi que des motifs et de la raison de la démarche de vérification qui s’ensuit par la suite » 7 . (sic) [23] Il soutient également que : « obtenir un dossier de crédit ne permet pas du tout de vérifier la capacité de payer d’un locataire potentiel. […] On a déjà vu antérieurement ici, que pour établir la capacité de payer d’un candidat, on doit connaître son revenu actuel et si possible pour la durée du bail aussi. Hors, le montant de revenu que gagne un locataire potentiel n’apparaît jamais sur un dossier de crédit. […] Donc, sans le montant de revenu actuel du candidat sur le dossier de crédit, il est erroné d’écrire que le dossier de crédit est suffisant pour établir la capacité de payer d’un candidat. Et même s’il apparaîtrait, le revenu devrait être vérifié quand même pour savoir si cette information est encore valide à la date de la signature du bail. […] Le plus simple, rapide et efficace est de demander directement au locataire potentiel où il travaille et de confirmer son revenu pour son propre avantage à lui autant que de celui du propriétaire. 7 Tel qu’il appert des observations soumises par le président de l’entreprise en date du 23 septembre 2017.
1008641-S Page : 7 Par ailleurs, il est important de noter que le dossier de crédit d’un locataire potentiel permet de vérifier les habitudes de paiements d’un locataire mais pas du tout sa capacité de payer actuelle. Ce n’est pas du tout la même chose. Contrairement à ce que sous-entend votre texte. […] Dans tous les cas, bonnes ou mauvaises habitudes de paiements, cela nous ramène toujours à la case départ et on doit toujours demander au candidat qu’elle est sa source de revenu et de pouvoir le vérifier. Et cela est encore plus vrai dans le cas où le locataire potentiel n’a aucun dossier de crédit et cela arrive très souvent. […] Dans tous ces cas et nombres d’autres possibles, le propriétaire et son Agence de renseignements doivent quand même être en mesure de vérifier la capacité de payer. Qu’il existe un dossier de crédit ou non. Pour cela, il n’a pas le choix de pouvoir lui demander où il travaille et de pouvoir le vérifier. C’est nécessaire, obligatoire, légitime, important, urgent et réel. […] Vérifier des habitudes de paiement ne confirme pas une capacité de payer présent et futur du bail. […] Et pour cela, le locataire potentiel doit obligatoirement continuer de pouvoir fournir le nom de son employeur et la somme de son revenu actuel et ce, pour la durée du contrat du bail. » 8 [24] Relativement au fait de demander le numéro d’assurance sociale, le président de l’entreprise soutient que : « l’obtention de l’information du numéro d’assurance sociale d’un locataire potentiel a un seul et unique objectif : de s’assurer encore davantage d’obtenir le bon dossier de crédit pour la bonne personne. Il y a plus : car malheureusement, dans beaucoup de cas il permet l’accès même au dossier de crédit. C’est-à-dire que très souvent, sans le numéro d’assurance social le dossier de crédit du candidat n’aurait tout simplement pas apparu. […] Dans la vie réelle et concrète et cela, malgré tous les efforts fournis par les propriétaires et les locataires potentiels, c’est souvent grâce au numéro d’assurance sociale que le dossier de crédit apparaît. Il suffit qu’un moindre détail soit omis ou mal écrit pour que le dossier ne sorte pas. […] 8 Id.
1008641-S Page : 8 Si vous nous accordez l’accès au dossier de crédit, pourquoi tenter de nous diminuer l’accès par la suite ? Et inversement, au contraire, pourquoi ne pas chercher des moyens pour nous favoriser l’accès au dossier de crédit. Pour terminer ce point, j’aimerais vous demandez pourquoi on accorde aux banques le droit de demander le numéro d’assurance sociale pour leur enquête de crédit bancaire, alors qu’on le refuserait à d’autres agences de renseignements pour des enquêtes de crédit de location. […] » 9 [25] Il précise également que : « dans le but d’être le plus manifeste et éclairé que possible, nous avons ajouté sur notre formulaire et au-dessus de l’endroit où on demande le numéro d’assurance sociale : ʺ Information optionnelle afin d’assurer l’exactitude du dossier de crédit et de votre identité. ʺ Dans le but que le candidat se sente le plus libre possible pour nous transmettre l’information de son numéro d’assurance sociale, nous avons aussi ajouté : ʺ Un numéro d’assurance social manquant n’entraînera pas automatiquement un refus. ʺ […] Nous allons laisser notre nouveau texte, qui par l’esprit, s’apparente beaucoup avec celui de la CORPIQ [c.-à-d. Corporation des propriétaires immobiliers du Québec] au-dessus de notre demande de numéro d’assurance social sur notre formulaire. Et cela, jusqu’à ce que vous nous disiez si ce que l’on écrit est tolérable à votre point de vu légal ou non. Si cela n’est pas satisfaisant, s.v.p. nous mentionner ce que l’on pourrait écrire sur notre formulaire pour que l’on puisse continuer de demander le numéro d’assurance sociale, le nom de l’employeur ainsi que le montant de revenu du locataire potentiel » 10 . (sic) [26] Partant, bien qu’il soit légitime pour un locateur de logement de vouloir s’assurer qu’un aspirant locataire pourra s'acquitter de ses obligations financières découlant du bail, seuls les renseignements nécessaires peuvent être recueillis selon la Loi sur le privé qui s’applique à l’entreprise. Ce principe vise à établir un 9 Id. 10 Id.
1008641-S Page : 9 équilibre entre le droit des individus au respect de leur vie privée et les besoins d’une entreprise en matière de collecte de renseignements personnels dans le cadre de l’exercice de ses activités, comme en l’espèce pour évaluer la candidature d’un aspirant locataire. [27] En l’espèce, l’entreprise n’a pas démontré la nécessité de recueillir le salaire, le nom et les coordonnées de l’employeur de l’aspirant locataire, ni son numéro d’assurance sociale pour évaluer sa candidature et vérifier son dossier de crédit. [28] En effet, l’entreprise justifie la collecte de ces renseignements en ce qu’ils seraient essentiels à l’évaluation sérieuse d’un aspirant locataire. Elle allègue que tous ces renseignements sont nécessaires pour vérifier la capacité de payer d’un aspirant locataire et pour obtenir son dossier de crédit. [29] Or, comme mentionné précédemment 11 , la Commission a déjà indiqué dans plusieurs décisions qu’en ce qui a trait à la capacité de l’aspirant locataire de s’acquitter du paiement du loyer, le locateur peut lui demander de fournir une attestation d’anciens locateurs, par exemple, ou l’extrait pertinent de son dossier de crédit. Il peut aussi, avec le consentement de l’aspirant locataire, vérifier cette information auprès de tiers, par exemple auprès d’anciens locateurs ou, comme en l’espèce, d’un agent de renseignements personnels (vérification du dossier de crédit). [30] Elle a également déjà mentionné que le numéro d’assurance sociale n’est pas nécessaire pour effectuer, avec le consentement de l’aspirant locataire, une enquête de crédit. Ses nom, adresse et date de naissance suffisent. Dans l’hypothèse où ces renseignements ne permettraient pas à l’entreprise d’identifier le bon dossier de crédit, le locateur pourrait demander à l’aspirant locataire d’obtenir lui-même ce rapport et de le lui fournir. [31] Il en est de même des renseignements relatifs à l’emploi et au salaire. La Commission a déjà conclu que ces renseignements ne sont pas nécessaires à l’évaluation de la candidature d’un aspirant locataire qui peut avoir d’autres sources de revenus en plus de son emploi. [32] Par ailleurs, une entreprise ne peut, même avec le consentement d’une personne, recueillir des renseignements qui ne sont pas nécessaires à l’objet du dossier. Ainsi, l’entreprise ne peut demander le numéro d’assurance sociale sur une base volontaire, et ce, même si comme mentionné au paragraphe 25 de la présente décision, l’entreprise a inséré, dans son formulaire, une mise en garde 11 Paragraphe 20 de la présente décision.
1008641-S Page : 10 indiquant que cette information est optionnelle 12 . Il ne s’agit donc pas d’un renseignement « nécessaire » au sens de la Loi sur le privé. [33] Enfin, en réponse aux questions de l’entreprise reproduites aux paragraphes 24 et 25 de la présente décision, la Commission tient à souligner que si, dans certaines circonstances, les institutions financières peuvent collecter le numéro d’assurance sociale dans le cadre de leurs activités, c’est qu’elles sont autorisées à le faire, entre autres, au regard de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes 13 et de son règlement d’application 14 . [34] Elle tient également à souligner 15 que l’utilisation d’un formulaire proche de celui élaboré par la CORPIQ ne dispense pas l’entreprise de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la Loi sur le privé, notamment en matière de collecte de renseignements personnels. Elle doit utiliser un formulaire ne permettant de recueillir que les renseignements nécessaires à l’évaluation de la demande d’un aspirant locataire et à la vérification de son dossier de crédit. [35] L’entreprise doit donc cesser toute collecte de renseignements personnels qui ne sont pas nécessaires à l’évaluation de la candidature d’un aspirant locataire et à la vérification de son dossier de crédit, à savoir le numéro d’assurance sociale, le salaire, le nom et les coordonnées de l’employeur. CONCLUSION [36] Ainsi, à la lumière de l’enquête et des observations de l’entreprise, la Commission conclut que, même si l’objet de la plainte a été résolu dans le cadre de l’enquête, comme mentionné aux paragraphes 5 et 10 de la présente décision, l’entreprise contrevient néanmoins à l’article 5 de la Loi sur le privé en recueillant des renseignements personnels concernant des aspirants locataires non nécessaires à l’objet du dossier, soit l’évaluation d’une demande de location de logement et la vérification du dossier de crédit. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [37] DÉCLARE la plainte fondée; 12 A et B c. Gestion P. Laflèche, précité, note 5; X. c. Y et Z. (Propriétaire), précité, note 5; Gestion Immobilière GESCORP, précité, note 5. 13 LC 2000, c. 17. 14 DORS/2002-184. 15 X. c. Y et Z. (Propriétaire), précité, note 5.
1008641-S Page : 11 [38] ORDONNE à l’entreprise de cesser de recueillir le numéro d’assurance sociale ce dernier n’étant pas nécessaire pour vérifier le dossier de crédit d’un aspirant locataire; [39] ORDONNE à l’entreprise de cesser de recueillir des renseignements personnels non nécessaires pour évaluer la candidature d’un aspirant locataire, à savoir le nom et les coordonnées de l’employeur ainsi que le salaire de l’aspirant locataire; [40] ORDONNE à l’entreprise de modifier le formulaire « Référence de pré-location » en conséquence; [41] ORDONNE à l’entreprise d’informer la Direction de la surveillance de la Commission des mesures prises afin de respecter la présente décision, dans un délai de 90 jours de sa réception. « Originale signé » Cynthia Chassigneux Juge administratif
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